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12/01/2021

Une vie d'homme libre

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« L’homme, qui aime la femme et souhaite passionnément, par-dessus tout, son bonheur, la suit encore sur ce terrain : il produit pour elle du rouge à lèvre qui ne tache pas, du noir aux yeux qui ne la fait pas pleurer, des bigoudis chauffants qui remplacent ses ondulations absentes, des blouses plissées qu’elle n’a plus à repasser, des sous-vêtements qu’elle jette au fur et à mesure qu’ils sont sales. Car il a toujours le même but, la délivrer de ces mesquineries une fois pour toutes, lui permettre de réaliser en elle ce qui est spécifiquement féminin et donc étranger à son esprit d’homme, satisfaire les aspirations "élevées" — à ce qu’il croit — de la nature plus délicate, plus sensible, de la femme, pour qu’enfin elle puisse mener la seule et unique existence qu’il considère digne d’être vécue : une vie d’homme libre. »

Esther Vilar, L’homme subjugué

 

 

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La prodigalité

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« La prodigalité est une vertu d'artiste.

[...]

Le don n'épuise pas la richesse qui le permet, car, dans cette logique de l'expansion, en forme de génération spontanée, la dépense est immédiatement suivie d'une nouvelle disponibilité pour un nouveau don. Le déploiement et la dissipation instaurent un rapport au temps éminemment singulier : l'instant suffit à la consumation, il acquiert de la sorte une densité ignorée en d'autres occasions. Là où il coule, sagement chronologique, sans variations d'intensité, [...] il n'est que durée mesurable, quantité appréciable. En revanche, dans la dilapidation, il est l'occasion de moments intenses, gonflés de sens. Des pics et des cimes. La qualité de l'émotion est sans pareille, l'éternité tout entière semble avoir pris place dans le fragment de temps qui s'est détaché en coïncidence avec le geste. [...] le dispendieux est un artiste du temps.

L'éthique de la dépense suppose l'éclatement et la production de fragments, le divers et le multiple. Ce sont des densités matérialisées, cristallisées qui font les points, mais l'ensemble de la démarche est dynamique. Elle suppose une volonté de mouvement, un consentement aux flux et aux fleuves. D'où l'héraclitéisme du dispendieux qui veut et aime la mobilité, qui sollicite la circulation dans le dessein de produire des opportunités pour une plus grande probabilité de dépenses. [...] il sait n'avoir pour seul capital que sa vie, qu'elle ne durera pas éternellement [...] La mort donne le prix, elle fixe le sens.[...]

Le probable devient effectif et réel par la dépense qui est mode de révélation. »

Michel Onfray, De la prodigalité ou l'excédent somptuaire, in La sculpture de soi : la morale esthétique

 

 

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