08/07/2012
Si quelque chose devait me manquer, ce ne serait pas le vin mais l’ivresse
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« Si quelque chose devait me manquer, ce ne serait pas le vin mais l’ivresse. Comprends-moi : des ivrognes vous ne connaissez que les malades, ceux qui vomissent, et les brutes, ceux qui recherchent l’agression à tout prix ; il y a aussi les princes incognito qu’on devine sans parvenir à les identifier. Ils sont semblables à l’assassin du fameux crime parfait dont on ne parle que lorsqu’il est raté. Ceux-ci, l’opinion ne les soupçonne même pas ; ils sont capables des plus beaux compliments comme des plus vives injures ; ils sont entourés de ténèbres et d’éclairs ; ce sont des funambules persuadés qu’ils continuent de s’avancer sur le fil alors qu’ils l’ont déjà quitté, provoquant les cris d’admiration ou d’effroi qui peuvent les relancer ou précipiter leur chute ; pour eux, la boisson introduit une dimension supplémentaire dans l’existence surtout s’il s’agit d’un pauvre bougre d’aubergiste comme moi, une sorte d’embellie, dont tu ne dois pas te sentir exclue d’ailleurs, et qui n’est sans doute qu’une illusion mais une illusion dirigée… Voilà ce que je pourrais regretter. »
Antoine Blondin, Un Singe en Hiver
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