04/10/2012
Les hommes et les femmes considérés comme tels sont devenus des sortes de lignes parallèles
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« En simplifiant, on peut dire que la famille est une espèce d'organisme politique en miniature, où la volonté du mari représente celle de l'ensemble. La femme peut influer sur la volonté du mari, et celle-ci est censée être déterminée par l'amour de la femme et des enfants. De nos jours, tout ce système a purement et simplement volé en éclats. En fait, il n'existe plus et on ne considère pas qu'il serait bon qu'il revive. Mais rien de solide n'a pris sa place. Ni les hommes ni les femmes n'ont la moindre idée de ce vers quoi ils vont ou, plus exactement, ils ont toutes les raisons de redouter le pire. Il y a désormais deux volontés égales sans aucun principe médiateur pour les unir. De plus, aucune des deux volontés n'est sûre d'elle. C'est ici qu'intervient "l'ordre des priorités", particulièrement chez les femmes, qui n'ont pas encore décidé si elles doivent donner la priorité à leur carrière ou à leurs enfants. On n'enseigne plus aux enfants à penser que le mariage et la responsabilité devraient être leur objectif premier dans l'avenir, et l'incertitude qui découle de ce manque d'enseignement est puissamment renforcée par la considération des statistiques des divorces : en en prenant connaissance, on peut estimer qu'en mettant tous ses oeufs psychologiques dans le même panier, celui du mariage, on court un sacré risque. La situation actuelle est donc caractérisée par un conflit sentimental entre les buts et les volontés. Les individus -les hommes et les femmes considérés comme tels- sont devenus des sortes de lignes parallèles et il faudrait l'imagination d'un Lobatchevski pour espérer qu'ils se rencontrent. »
Allan Bloom, L'âme désarmée
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