02/06/2013
J’aurais pu lui répondre que j’étais vivant, moi, mais je n’en étais pas tout à fait certain
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« Je me demande ce qu’il y a encore à détruire, dans ce secteur, a-t-il ajouté en montrant l’immense terrain vague laissé par le déblaiement des taudis de la Quarantaine.
-- Des hommes, ais-je cru bon de suggérer, souriant à mon tour pour ne pas avoir l’air trop niais.
-- Des hommes ? Non, ils sont morts, même ceux qui combattent, en ce moment, et qui se croient vivants. A un certain degré d’horreur et de bruit, on ne se bat plus pour vivre, ni pour survivre, mais parce qu’on est mort, oui, passé à l’autre bout de la vallée de larmes, et que le combat se limite à tenter de remonter chez les vivants.
J’aurais pu lui répondre que j’étais vivant, moi, mais je n’en étais pas tout à fait certain, et j’ai préféré continuer à sourire, tout en reconnaissant que j’appartenais aux ombres, que je méprisais même un peu les vivants, leur insouciance, leur incurie, leur cruauté, lezs morts, eux étant en paix les uns avec les autres, on n’y a jamais songé de cette façon, mais c’est ce qui les caractérise, outre leur invraisemblable mémoire.
Mais je n’ai rien dit. Je préférais rester un combattant simple et droit aux yeux du responsable phalangiste dont je continuais à trouver la cause noble, et la seule qui méritât d’être défendue. »
Richard Millet, La confession négative
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Commentaires
La Confession négative de Millet est un des meilleurs livres de guerre - sur la guerre, dans la guerre, avec la guerre - que j'ai lus. Je le mets au niveau des romans et récits de Drieu, V. Grossmann, Jünger, Malaparte,...
Écrit par : Paglop77 | 02/06/2013
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