Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

10/10/2013

Il en concluait, ce Jésus, que l’humanité n’était qu’un faux départ, une tentative ratée, radicalement mauvaise

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Un homme vint un jour, qui s’appelait Jésus.
Ce n’était pas un grand penseur, sans doute, mais il eut le mérite de mettre en formules ce que chacun sentait confusément, savoir : que l’homme n’est après tout qu’une vilaine bête, infiniment plus malfaisante, même pour sa propre espèce, que les fauves les plus féroces ; que tout ce qu’il fait en vue d’assurer son existence, d’organiser son avenir, le rend plus odieux encore ; qu’il ne résout un problème que pour en faire surgir dix autres, et dix fois plus ardus, plus cruels, plus angoissants que le problème résolu ; bref, que toutes les qualités qui le distinguent des animaux ne servent qu’à le rendre plus misérable qu’eux.
Il en concluait, ce Jésus, que l’humanité n’était qu’un faux départ, une tentative ratée, radicalement mauvaise ; qu’elle offensait, par sa seule présence, le regard de Dieu (car il croyait en Dieu), et que celui-ci n’allait pas tarder à la détruire.
"Le genre humain, prêchait-il, est condamné. Vivez donc les dernières années qui vous restent, en sachant que la terre va périr. Ne vous occupez plus, ni des affaires publiques, ni de vos biens, ni de votre subsistance. Ne travaillez plus, ne jugez plus, ne prenez plus les armes contre quiconque, ne résistez à rien ni à personne. Attendez le jour proche où Dieu fera justice de toute cette misère. En vérité je vous le dis, cette génération ne passera point que ces choses n’arrivent..."
Beaucoup le crurent, le suivirent, abandonnèrent leurs occupations, vécurent avec lui d’expédients, de chapardage et de mendicité, formant ainsi une population instable, parasite, exploitant sans vergogne les citoyens qui travaillaient encore, les démoralisant avec une sorte de passion...
Le pouvoir politique réagit. On crucifia Jésus, on persécuta ses disciples, on poursuivit ses sectateurs. Quelques-uns se repentirent, se remirent à vivre, sinon raisonnablement, du moins à peu près comme tout le monde. Mais la majorité resta ferme, persuadée que les temps étaient proches et que la catastrophe ne tarderait plus. »

Pierre Gripari, Les vies parallèles de Roman Branchu

14:10 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Les commentaires sont fermés.