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11/07/2014

Rêves de conquérant, de saint ou de découvreur de monde

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« Des rêves trop grands pour notre carrure pèsent parfois sur nos épaules, rêves de conquérant, de saint ou de découvreur de monde, rêves qui furent ceux réalisés d’un Mermoz, d’un Gengis Khan ou d’un François d’Assise. Il ne faut pas nous désoler d’être seulement ce que nous sommes. L’aventure la plus prodigieuse est notre propre vie et celle-là est à notre taille. Aventure brève: trente, cinquante, quatre-vingts ans peut-être qu’il faut franchir durement, gréé comme un voilier cinglant vers cette étoile au grand large qui est notre repaire unique et notre unique espérance. Qu’importent coups de chien, tempêtes ou calme plat, puisqu’il y a cette étoile. Sans elle, il n’y aurait plus qu’à cracher son âme et à se détruire de désespérance. Mais sa lumière est là et sa recherche et sa poursuite font d’une vie humaine une aventure plus merveilleuse que la conquête d’un monde ou la course d’une nébuleuse. Cette aventure-là ne dépasse pas notre carrure. Il nous suffit de marcher vers notre Dieu pour être à la taille de l’Infini, et cela légitime tous nos rêves. »

Guy de Larigaudie, Étoile au grand large

 

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Des prières et des vœux perpendiculaires

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« C’est embêtant, dit Dieu, quand il n’y aura plus ces Français,

Il y a des choses que je fais, il n’y aura plus personne pour les comprendre.

Peuple, les peuples de la terre te disent léger parce que tu es un peuple prompt.

Les peuples pharisiens te disent léger parce que tu es un peuple vite.

Tu es arrivé avant que les autres soient partis.

Mais moi je t’ai pesé, dit Dieu, et je ne t’ai point trouvé léger.

O peuple inventeur de la cathédrale, je ne t’ai point trouvé léger en foi.

O peuple inventeur de la croisade je ne t’ai point trouvé léger en charité.

Quant à l’espérance, il vaut mieux ne pas en parler, il n’y en a que pour eux.


 Tels sont nos Français, dit Dieu. Ils ne sont pas sans défauts. Il s’en faut. Ils ont même beaucoup de défauts.

Ils ont plus de défauts que les autres.

Mais avec tous leurs défauts je les aime encore mieux que tous les autres avec censément moins de défauts.

Je les aime comme ils sont. Il n’y a que moi, dit Dieu, qui suis sans défaut.Mon fils et moi. Un Dieu avait
un fils.

(…)


Nos Français sont comme tout le monde, dit Dieu. Peu de saints, beaucoup de pécheurs.

Un saint, trois pécheurs. Et trente pécheurs. Et trois cents pécheurs. Et plus.

Mais j’aime mieux un saint qui a des défauts qu’un pécheur qui n’en a pas. Non, je veux dire :


J’aime mieux un saint qui a des défauts qu’un neutre qui n’en a pas.

Or ces Français, comme ils sont, ce sont mes meilleurs serviteurs.

Ils ont été, ils seront toujours mes meilleurs soldats dans la croisade.

Or il y aura toujours la croisade.

Enfin ils me plaisent. C’est tout dire. Ils ont du bon et du mauvais.

Ils ont du pour et du contre. Je connais l’homme.

Je sais trop ce qu’il faut demander à l’homme.

Et surtout ce qu’il ne faut pas lui demander. Si quelqu'un le sait, c'est moi.
Depuis que l'ayant créé à mon image et à ma ressemblance.
Par le mystère de cette liberté ma créature
Je lui abandonnai dans mon royaume
Une part de mon gouvernement même.
Une part de mon invention.
Il faut le dire une part de ma création.
Il faut les prendre comme ils sont. Si quelqu'un le sait, c'est moi. Et aussi savez-vous
Combien une seule goutte de sang de Jésus
Pèse dans mes balances éternelles.

(…)


O mon peuple français, dit Dieu, tu es le seul qui ne fasses point des contorsions.

Ni des contorsions de raideur, ni des contorsions de mollesse.
Et dans ton péché même tu fais moins de contorsions Que les autres n'en font dans leurs exercices.
Quand tu pries, agenouillé tu as le buste droit.
Et les jambes bien jointes bien droites au ras du sol.
Et les deux pieds bien joints.
Et les deux mains bien jointes bien appliquées bien droites.
Et les deux regards des deux yeux bien parallèlement
montants droit au ciel.
seul peuple qui regardes en face.
Et qui regardes en face la fortune et lépreuve
Et le péché même.
Et qui moi-même me regardes en face.
Et quand tu es couché sur la pierre des tombeaux
L'homme et la femme se tiennent bien droits lun à côté de l'autre.
Sans raideur et sans aucune contorsion .
Bien couchés droits l'un à côté de l'autre sans faute.
Sans manque et sans erreur.
Bien pareils. Bien parallèlement.
Les mains jointes, les corps joints et séparés parallèles.
Les regards joints.
Les destinées jointes. Joints dans le jugement et dans l'éternité.
Et le noble lévrier bien aux pieds.
Peuple, le seul qui pries et le seul qui pleures sans
contorsion.

Le seul qui ne verses que des larmes décentes.
Et des larmes perpendiculaires.
Le seul qui ne fasses monter que des prières décentes. Et des prières et des vœux perpendiculaires. »

Charles Péguy, Le Mystère des Saints Innocents

 

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Un homme théorique

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« L'utopie de la démocratie a été de dépouiller l'individu de ses qualités sensibles, de le réduire à l'état abstrait de citoyen.  De l'homme concret de chair et d'os, qui a un métier, un milieu, une personnalité, elle a fait un être irréel, un personnage allégorique en dehors du temps et de l'espace, et le même à tous les étages de la société.

Ni ouvrier ni paysan, ni industriel ni commerçant, ni du Nord ni du Midi, ni savant ni ignorant : un homme théorique. »

Hubert Lagardelle, Magazine "Plans" n° : 1, janvier 1931

 

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