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26/11/2014

Comme une barrière entre moi et l’autre côté

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« La gratuité a disparu de nos moeurs, malheureusement. On trouve de moins en moins de gens disposés à agir “pour rien”, à accomplir un acte désintéressé, un acte pur — un de ceux qui ont pourtant un énorme pouvoir. La France traverse une période de terrible vulgarité louisphilipparde, tout y est corrompu par l’argent, il n’y a plus d’élégance morale. Dans les milieux où je vais parfois, il n’y a que trois sujets de conversation : la vie privée d’abord (qui couche avec qui), la grande politique vue à travers les petits intérêts (la dernière parole du Président va faire baisser nos intérêts), et la vantardise (j’ai récemment ridiculisé monsieur Untel). Bref, c’est la grossièreté. Mais ce n’est pas là mon milieu. Ce n’est même pas la bourgeoisie traditionnelle : je n’ai jamais entendu parler de tout cela chez mes parents.
Il semble d’autre part, que les gens soient rassurés par le fait d’arrêter leurs contours. Le résultat, c’est qu’ils bloquent leurs possibilités en fixant certaines limites. Moi, au contraire, quand j’ai l’impression que quelque chose en moi est figé, stable, arrêté, c’est la panique. Comme une barrière entre moi et l’autre côté. Je n’aime pas les habitudes, le cadre qui a déjà vécu  : je déménage tout le temps, c’est une manie. La vie matérielle m’ennuie à un point qui frise la maniaquerie. Lorsqu’on me demande ce qu’il faut faire pour le dîner, cela me plonge dans des abîmes de perplexité, d’ennui, d’angoisse. »

Françoise Sagan, Je ne renie rien, Entretiens 1954-1992

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (1) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Commentaires

Elle avait du bon sens, Françoise, sous ses airs d'évaporée. Ces entretiens rassemblés (et reliés) par Jérôme Garcin offrent au lecteur des moments agréables. La "petite musique" de Sagan y résonne toujours.

Écrit par : Paglop77 | 27/11/2014

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