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15/02/2019

[Tribune] : « La Belgique finira arabe »

=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=

 

 

« La Belgique finira arabe »...

Cette phrase, prononcée par un chauffeur de taxi à Bruxelles, est le signe que l’islamisation des esprits a gagné le Nord comme le Sud. De jeunes immigrés trimbalent une mentalité de « daéshistes » sans le savoir, selon Fawzia Zouari.

J’étais de passage à Bruxelles. Je n’aime pas beaucoup Bruxelles. C’est une « capitale pour rire », disait Baudelaire. Elle est faite de tunnels et de voies de sortie sombres, de ponts moches, de trottoirs défoncés, les belles bâtisses y sont noyées sous des buildings à l’architecture foireuse et la gare du Midi est une horreur. Cependant, j’adore les Belges ! Je trouve que c’est le peuple le plus doux et le plus innocent de la terre.

Et c’est sans doute pour cette raison que je me suis fâchée avec le chauffeur de taxi qui m’emmenait au lieu de conférence où je devais me rendre. Le chauffeur en question est tunisien, comme moi. La trentaine, il est installé depuis dix ans à Bruxelles. Dès qu’il a su d’où je venais, il a fait l’Arabe, a abandonné la langue de Molière pour ne parler que la langue du Coran, avec les expressions, les jurons, les wallah et les inchallah à tout bout de phrase. J’avais l’impression de me retrouver au cœur de la médina de Tunis. Je l’ai branché sur Bruxelles. Il a dit  :

« J’y suis très bien, al hamdoullah  ! J’ai un travail, une femme et des enfants. En plus, il y a plein de Maghrébins, m’a-t-il répondu.

– Tant que ça  ?

– Ah  ! oui, ma sœur, nous allons devenir majoritaires ! J’ai quatre enfants, mon voisin marocain en a six. Si Dieu le veut, la Belgique finira arabe et musulmane.

– Et ça te plairait  ?

– Ben oui. Nous sommes appelés à peupler la terre entière. »

Islamisation des esprits

J’ai regardé le jeune homme. Il n’avait ni barbe ni trace sur le front attestant de sa pratique de la prière. Et j’ai compris le mal. Insidieusement, l’islamisation des esprits a gagné le Nord comme le Sud. De jeunes immigrés trimbalent une mentalité de « daéshistes » sans le savoir.

« Pourquoi as-tu quitté la Tunisie  ? l’ai-je interrogé.

– Pour être tranquille. Travailler avec des gens sérieux, pas corrompus, et des administrations qui marchent. »

Jugeant inutile de le raisonner, je me suis contentée de le taquiner à la façon de l’humoriste algérien Fellag : « Tu imagines le jour où la Belgique sera gérée par des Arabes  ? Tu crois que tu vas continuer à jouir de ces privilèges  ? » Il a calé. J’ai ajouté : « Et puis, ils iront où, les Belges  ? »

Soudain, il m’a semblé triste et désorienté. J’ai détendu l’atmosphère en lui racontant l’histoire de l’un de mes oncles qui avait décidé de ne plus aller à la mosquée après un prêche du vendredi lors duquel l’imam avait affirmé que le bon croyant était destiné d’office à retrouver au paradis ses cousins, ses voisins et toute la smala : « Si c’est pour tomber sur ces mêmes idiots qui me pourrissent la vie ici-bas, merci ! » Nous avons ri.

Théorie du remplacement

Après la conférence, il y a eu un cocktail et une rencontre avec le public. Là, un gars du même âge que mon chauffeur de taxi s’est avancé vers moi, un verre de champagne à la main. C’était un Tunisien… Ils sont tous en Belgique ou quoi  ? Et il va falloir que je demande pour quelles raisons mes compatriotes ont quitté aussi nombreux la Tunisie alors qu’il y a eu la révolution et que Ben Ali est parti.

Je pose la question à mon interlocuteur en train de savourer ses bulles  : « Il n’y a pas que la politique, madame. “Là-bas”, c’est la corruption à plein régime et “ces gens-là” ne fichent rien de la journée. De toute façon, moi, si je suis venu ici, ce n’est pas pour fréquenter mes coreligionnaires, c’est pour vivre parmi les Belges. Les Arabes, je ne veux plus les voir, même pas en photo  ! » Voilà qui est clair.

Je suis rentrée à l’hôtel en repensant à la fameuse théorie du remplacement tenue par l’un et au rejet des siens exprimé par l’autre. Et j’ai dû m’avouer que je ne comprenais pas ce qui passe dans la tête de ces jeunes immigrés, moi qui fais partie de la vieille immigration.

Par Fawzia Zouari

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SOURCE : Jeune Afrique

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