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12/03/2009

Lecture Nocturne

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Le Pen et ses séides auront fait plus de mal à la Civilisation européenne que les socialistes et les communistes tous ensemble réunis !

Ils ont condamné toute défense des valeurs occidentales à être immédiatement comparée aux bravades de ce Mussolini de Saint-Cloud, ils ont rabaissé la Geste des Croisés francs au niveau des gesticulations hystériques de quelques skinheads supporters du PSG, ils ont condamné la France à ne plus avoir aucune alternative.

Ils savaient probablement ce qu’ils faisaient. Ce qui les rend deux fois plus coupables.

Une des portées les plus décisives de l’élection présidentielle de 2002 et de ses résultats de république bananière, c’est de démontrer une fois pour toutes que le libéralisme et le socialisme, avec tous leurs avatars, ne représentent qu’une seule voie, que Le Pen et ses éructations antisionistes et antiaméricaines représentent la seconde, soit une variante "extrémiste" de la première, et que la Troisième Voie, par conséquent, et comme toujours en ce pays, reste parfaitement introuvable. »

American Black Box, Maurice G. Dantec

 

Rien à rajouter à ces lignes. Je tire sur ma cigarette. Avale mon thé vert à 2h41 du matin en écoutant le live de Robin Trower du 18 octobre 1977 enregistré à New Haven, dans le Connecticut, USA, pour une émission de radio, King Biscuit Flower Hour. Juste à côté du livre de Dantec le livre d’une jeune poétesse, Arielle Monney qui a signé quelques poèmes lumineux sous le nom d’Aldebaran, avant de mourir à 16 ans tout juste passés : « La mort est ce jardin où je m’éveille » 1957-1975. Une courte vie qui lui a permis tout de même d’écrire des choses comme celle-ci :

 

"Soleil

 

Je repose sans la voir

sur une métamorphose

perpétuelle.

au fond de mon âme se renouvellent

des phrases impossibles malgré moi

et le soir me semble

un soleil."

 

Ou celle-là :

 

"Recherche

 

les châteaux sont en démolition

je cherche un ligne réelle

verticale

                        puissante et agressive

une ligne qui m’aide à vivre

et à combattre

les châteaux les mers et les étoiles

sont en démolition

je veux une ligne

seule immense et noire.

 

            27 mai 1974."

 

Ou bien ça encore :

 

           tu sais le feu

                        qui est le vent

            tu sais le jour

                        qui est la nuit

            tu sais la nuit

                        qui est le vent

            tu sais le feu

                        qui est la mer

            tu sais la mer

                        qui est la nuit

            tu sais la nuit

                        qui est le jour

            tu sais le jour

                        qui est le vent

tu sais le silence qui est l’écume

tu sais l’écume qui est la mer

            tu sais la mer

                        qui est le jour

            tu sais le jour

                        qui est le vent

et le jour qui fut d’écume

            fut la nuit

                        qui est silence.

 

            1er novembre 1974.

 

(si je ne parle de mort

je l’écoute. elle tremble

en moi et elle viendra.)"

 

Paru aux éditions Collection Sud avec une préface de Jean Joubert. Je ne sais rien d’elle. Mais cette adolescente qui écrit comme une nécessité première m’émeut au plus profond et me soigne. Le vide du monde, elle le remplit avec son énergie qui traverse sa propre mort. Elle est plus vivante que tous les lepénistes ou anti-lepenistes qui marchent, sans le savoir, main dans la main. Face à toute la farce consensuelle ambiante, mondialiste, altermondialiste, européiste, nationaliste, politico-jeanfoutiste, reste le verbe, les mots qui ne sont nullement pour moi (comme ils le furent pour Sartre) l’enfer de l’absurde, mais une possibilité de sortie hors la nasse de la médiocrité socio-politique. Née le 6 décembre 1957 et morte le 25 février 1975 elle écrivait le 23 février 1975 son dernier poème :

 

la terre grise.

le jour pâle.

l’enfant aux yeux tristes

lentement regarde

le grand renoncement du jour

qui s’achève

parmi le si grand calme du paysage.

monotone.

la terre n’est qu’un espace

le jour si pâle n’a plus d’ombre.

            l’enfant aux yeux si graves

            lentement regarde

la mort de l’arbre

la mort d’un rêve

            ou d’un songe

parmi le si grand calme du paysage.

monotone.

            l’enfant triste et grave

            lentement regarde

            la fin des herbes folles

            et du grand voyage

            lentement regarde

            l’ombre de l’arbre qui s’achève

parmi le grand renoncement

            du jour

            et la fin

            d’un espace.

 

            23 février 1975.

 

            dernier poème.

 

Cette sublime pureté. Cette ligne simple. Ce souffle limpide. Cette eau calme et cristalline. Cette acceptation. Cette haute conscience de sa carne, de son espace et de ses phrases qui disent ce temps précis déjà hors le temps lui-même. Ce sentiment que j’ai qu’elle est sauvée par-delà sa mort. Elle me purifie de mes déchets, de mes doutes, de mes turpitudes. Cette enfant condamnée avec son écriture. Elle me rappelle que moi, comme nous tous, suis condamné aussi.

 

 

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Commentaires

Ce grand silence, qui va bientôt éteindre et recouvrir cette frêle voix qui semble sur le point de décrocher à chaque mot, lui prête à travers l'ombre qui s'approche une ampleur qui fait désormais partie de l'oeuvre. De toutes façons, un écho s'éveille, doux comme le cristal.

Il fait noir, enfant, voleur d'étincelles !
Il n'est plus de nuits, il n'est plus de jours ;
Dors... en attendant venir toutes celles
Qui disaient : Jamais ! Qui disaient : Toujours !

Entends-tu leurs pas ?... Ils ne sont pas lourds :
Oh ! les pieds légers ! – l'Amour a des ailes...
Il fait noir, enfant, voleur d'étincelles !

Entends-tu leurs voix ?... Les caveaux sont sourds.
Dors : Il pèse peu, ton faix d'immortelles :
Ils ne viendront pas, tes amis les ours,
Jeter leur pavé sur tes demoiselles...
Il fait noir, enfant, voleur d'étincelles !
(Tristant Corbière, + 30ans+ dernierspoèmes)

Écrit par : Restif | 12/03/2009

je ne veux pas qu'il n'y ait que deux voies
je ne veux pas que meurent les adolescentes
je ne veux pas les yeux vides des enfants
je veux Vivre Nebo, VIVRE.

Écrit par : pema | 14/03/2009

Vivez charmante... vivez... rien ne vous en empêche... Je veux vivre aussi et rien ne m'en empêchera.

Si vous déployez vos ailes et parvenez à prendre de l'altitude, vous verrez qu'en bas, dans les méandres des turpitudes politiciennes les deux voies qu'indique Dantec sont bel et bien là, à nous faire prendre les vessies pour des lanternes et nous faire croire aux lendemains qui chantent, ceux de l'aplanissement général de Gôche, ou ceux du consumérisme névrosé de la Drouâte, unis en réalité, main dans la main, pour nous imposer leur réalité comme seule alternative. Les extrême n'en sont qu'une tendance exagérée, d'un côté comme de l'autre.

Ma seule alternative à moi est toute personnelle... un hédonisme frais et léger, une manière particulière de regarder la lumière, de boire un vin ou de savourer un épiderme. Et puis le détachement, la danse du coeur et de l'esprit... pour ne pas devenir totalement fou, moi qui suis déjà assez dingue... face aux désastreuses représentations quotidiennes de la farce que nous nous devons d'affronter à la petite semaine.

Toujours heureux de vous voir dans les parages... :-)

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Écrit par : Nebo | 14/03/2009

Bonjour

J'ai découvert par hasard cette auteur lorsque j'étais au lycée ... et depuis je pense souvent a certains de ces poèmes.
Je cherche ce fameux livre mais je ne le trouve nulle part. Vous sauriez où je peux le trouver ?

Cordialement

Alexandra

Écrit par : Alexandra | 07/02/2013

Je crains qu'il ne faille fouiller chez les bouquinistes, Alexandra, ou sur les sites de la toile dédiés aux livres rares.

Écrit par : Nebo | 07/02/2013

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