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22/07/2011

Brûlure nocturne

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires..."=--=

 

A 4h passées du matin je réalise comme par une massive massue sur la tête pourquoi je bloque sur mon roman en cours depuis des mois et des mois de vide et de léthargie. Je suis par l’écriture précisément au moment où le personnage principal de mon histoire qui en est, en même temps, le narrateur désabusé et cynique, est sur le point de retrouver son père après une longue coupure et une enfance blessée. L’expérience fut réelle pour moi, authentique, pleine d’appréhension en même temps que de douleur et de joie. C’est l’année de la canicule, en 2003, que je fis un saut de 5 jours en Serbie afin de retrouver mon père durant 2 jours et demi après plus de 20 années de coupure. Entre mes 4 ans et mes 12 ans, mon père n’a pas donné signe de vie. A l’été 1977, je me souviens, c’était l’année de la mort du King, j’avais 12 ans, j’étais chez mes grands-parents maternels, comme chaque année, à savourer un royaume de liberté en plein pays communiste lorsque mon père, à la surprise générale, vint me rendre visite de manière imprévue. Nous passâmes quelques heures dans l’après-midi à parler avec lui puis il partit me disant que j’avais un frère et une sœur et qu’ils désiraient me connaître. Il avait cessé d’être communiste, portait une croix autour du cou et probablement, pauvre homme, avait-il ressenti le besoin de se confronter à l’épreuve de ces retrouvailles pour se délester de ses erreurs, de ses péchés. Je suppute qu’il devait estimer que la balle était désormais dans mon camp et qu’il m’appartenait si j’en faisais la requête à ma mère et qui y consentait d’avance, que je demande à mon tour, à lui rendre visite. J’avais 12 ans. J’était perdu. Et bien entendu je n’en fis rien. Ce n’est que vers ma trentaine, vers 1994, 1995, que ma grand-mère maternelle, ma petite baka d’amour, m’apprit que le bruit courait que mon père était mort et que « c’était probablement vrai » en raison des conditions de guerre qui avaient prévalues en Croatie où vivait mon père, serbe, dans la ville de ma naissance, Vinkovci. Je pris la nouvelle avec une certaine désinvolture et ma nonchalance en étonnât quelques uns. Mais à l’été 2002 un homme se présenta en Serbie chez ma grand-mère et demanda que je prenne contact avec mon père, numéro de téléphone à l’appui, car celui-ci était bel et bien vivant, et l’avait envoyé pour me chercher. Le choc. Durant une année entière je fus en contact avec lui via appels téléphoniques avant des retrouvailles émouvantes à l’été 2003. Je repousse donc ces retrouvailles cette fois-ci littéraires et largement romancées car la douleur est insoutenable face au sentiment d’inachevé que les retrouvailles réelles m’ont laissé. Mon père est mort un an après. Nous n’avons pas été en mesure de dénouer tous les nœuds, ou tout au moins une partie, qui entravaient nos vies nous interdisant une authentique communion père-fils. Probablement que par ce roman j'aurais cent choses à lui dire que j'appréhende comme si nous étions dans la réalité. La fiction romanesque a cette force et cette charge.

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