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06/04/2015

Un peuple de "philosophes nés"

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« En fait il faut attendre l’extrême fin du IVe siècle avant notre ère pour trouver, dans un fragment du traité "Sur la piété" de Théophraste, conservé par Porphyre que cite Eusèbe de Césarée, la première mention des Juifs. [...]
Pour Théophraste, les Juifs sont un "peuple de philosophes nés" ; à longueur de journée ils s’entretiennent avec la divinité et passent la nuit à contempler les étoiles. Information sans doute fausse, mais qui a pu être interprétée comme une marque d’"estime" ou de "bienveillance" et qui du point de vue grec est parfaitement logique. Théophraste connait visiblement le trait fondamental du judaïsme : le principe monothéiste. Or, pour les Grecs, le monothéisme ne relève pas de la pratique religieuse, polythéiste par définition, mais de la philosophie. Du moment où l’on découvre un peuple qui tout entier pratique le monothéisme, ce peuple est logiquement un peuple de "philosophes nés" (ou "de naissance", "genos", qu’évidemment on ne doit pas traduire par "race" !). La contemplation des étoiles, les yeux levés vers le ciel, procède sans doute de la même équation : en parlant de Xénophane de Colophon, qui le premier a enseigné l’unité de la divinité, Aristote dit que c’est "en regardant vers le ciel qu’il pensa que Dieu est Un". [...]
Théophraste marque pour nous un premier temps dans la constitution de l’image du "Juif philosophe". Le deuxième temps vient avec la constatation que les Juifs ne sont pas les seuls à "faire de la philosophie hors de l’Hellade" ; elle est faite par le voyageur Mégasthène qui a séjourné trois ans aux Indes entre l’extrême fin du IVe siècle avant notre ère et le début du IIIe ; il compare aux Juifs les brahmanes indiens, ceux-ci remplissaient en Inde le même rôle que ceux-là jouent en Syrie. Le parallèle s’imposait. A partir de là, dans un troisième temps, on établira une généalogie : les Juifs, philosophes syriens, descendent des philosophes de l’Inde, ou, si l’on préfère, ils leur sont apparentés, ayant pour ancêtre commun les mages [...]
Voilà donc une généalogie du peuple juif, fausse mais noble, qui le rattache au tronc commun de la sagesse orientale. »

Joseph Mélèze-Modrzejewski, Un peuple de philosophes

 

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Il faut s’éloigner des cloaques, des vieux bassins pourris

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« Les fictions se vident. Les religions sont pareilles à des bassins couverts de beaux reflets, mais qui se lézardent ; l’eau s’écoule petit à petit, un jour il n’y a plus que le vieux ciment et de la vase au fond. C’est une loi de ce monde. il faut savoir vivre sans les reflets. C’est possible, c’est sans doute une autre forme de bonheur. Mais il faut s’éloigner des cloaques, des vieux bassins pourris, ce que nous avons fait, cornedieu ! »

Lucien Rebatet, Les deux étendards

 

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Michel allait de l’avant, en fourrageur, rentrait avec des proies inégales...

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« Michel ne dédaignait pas de passer pour un snob et s’orientait assez adroitement parmi les snobismes opportuns et ceux qui sont de pures affectations. Guillaume, moins agile à détecter ces nuances, en gardait un oeil d’autant plus propre à faire sérieusement le point, et la nécessité de cette opération s’imposait souvent. Michel allait de l’avant, en fourrageur, rentrait avec des proies inégales, parfois assez grièvement désarçonné ; Guillaume occupait des positions travaillées en profondeur, solidement étayées. Dans les heures où ils revenaient à la chère étude d’eux-mêmes, ils se félicitaient longuement de leur “fraternité complémentaire”, ce roc où l’on reprenait souffle, d’où l’on pouvait faire face au monde entier, sans gloriole mais sans timidité, avec son petit baluchon, ramassé au temps naïf des collèges et des provinces, mais que l’on ne renierait jamais, qui enfermait quelques pièces d’or que l’on ferait toujours sonner fièrement. »

Lucien Rebatet, Les deux étendards

 

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