24/06/2018
Ce qui me plaisait au-delà de tout plaisir dans ce geste, c'est qu'il était lui aussi solitaire
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« Un jour, je sus qu’il y avait un mouvement qui se produisait parfois chez un homme, et qui s’appelait le suicide. Je me rappelle très bien qu’à la suite d’une conversation entendue, j’avais compris qu’un homme peut "se donner la mort". Je ne sais pas, je ne crois pas que j’aie établi un rapport précis entre ce jeu dont je viens de parler et qui m’était familier, et la révélation de cet acte. Le fait est que l’immédiate possibilité, l’extrême facilité, imaginais-je, le prodigieux résultat, la puissance d’irrémédiable de ce geste me fascinèrent. Cette fascination mettait en moi le même genre d’émoi doux et fin, un peu lancinant et merveilleusement rare que j’avais éprouvé plusieurs fois sous le lit. Ce qui me plaisait au-delà de tout plaisir dans ce geste, c’est qu’il était lui aussi solitaire, volé à tous les regards, perpétré dans l’ombre et le silence et qu’il me laissait à jamais, à l’infini, perdu hors de moi-même, adorablement livré à cette puissance que j’avais entendu tomber en moi goutte à goutte. »
Pierre Drieu la Rochelle, Récit Secret
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