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11/03/2021

« Gauchisto-islamisme », par Pierre Jourde

=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=

 



CHRONIQUE LIBRE. Ecrivain, professeur d’université et critique littéraire, Pierre Jourde se pose ici quelques questions.

Par Pierre Jourde (Ecrivain)

C’était du gâteau, l’intervention de l’inénarrable ministre de l’Enseignement supérieur à propos de l’« islamo-gauchisme » à l’université. On a eu droit à toutes les figures obligées, exécutées par les sociologues de gôche et de service, ou par les journalistes de gôche, apportant des éléments « objectifs » et « dépassionnés », c’est-à-dire la même chose : ce concept est une pure invention sans validité scientifique, il sert à faire avancer les idées d’extrême droite, il est utilisé par des réactionnaires, bref, le discours automatique habituel, objectif et dépassionné comme il se doit. La maladresse de la ministre a permis d’ajouter cet argument vertueux : on s’attaque aux libertés académiques ! Argument employé par des gens qui se contrefichent ordinairement des libertés académiques.

Parlons-en, tiens, des libertés académiques. Quand l’habitude s’installe de conférences ou d’interventions annulées par des présidents d’université parce qu’elles déplaisent à des lobbys féministo-LGBT + x %-racialisto-machinchose, pour des motifs généralement loufoques, on ne les entend pas, là, ceux qui ne s’intéressent aux libertés académiques que quand c’est une ministre qui les menace, mais pas quand elles sont sapées en profondeur au quotidien !

Donc, l’islamo-gauchiste, ça n’existe pas, c’est une invention d’extrême-droite. Dont acte.

Il y a pourtant, en France, des potées de journalistes, de sociologues, d’intellectuels de gauche qui fonctionnent, dans leur rapport à l’islam, depuis des lustres, selon un inoxydable modèle :

- l’islam est la religion majoritaire chez les immigrés.

- C’est donc une religion de gens pauvres, minoritaires, exclus, brimés, opprimés, bref, de victimes.

- Par conséquent, s’en prendre à l’islam, pour quelque raison que ce soit (féminisme, laïcité, démocratie, liberté de conscience, problèmes d’antisémitisme, de violence, etc.) c’est être islamophobe, voire raciste, et faire le jeu de l’extrême droite.

Ce discours est indéfiniment psalmodié par des personnalités « de gauche » telles que : Edwy Plenel, Clémentine Autain, Pascal Boniface, Rokhaya Diallo, Olivier Roy, Alain Gresh, Emmanuel Todd, Geoffroy de Lagasnerie et bien d’autres (j’exclus de cette « gauche » les Indigènes de la République, dont le racisme, l’homophobie, l’antiféminisme, l’antisémitisme et les méthodes d’intimidation font plutôt un groupuscule néo-fasciste, même si certains « intellectuels de gauche » ne dédaignent pas de flirter avec eux).

Cette islamophilie n’est pas seulement de l’ordre des idées : elle s’est maintes fois manifestée par des alliances ou des rapprochements avec des personnalités islamistes aussi sympathiques que Tarik Ramadan ou Marwan Mohammad, la participation à des manifestations de soutien à l’islamisme, au voile, au Hamas (dans lesquelles on crie parfois « mort aux juifs »), etc.

Mais tout ça, ça n’existe pas. Que tout un pan de la gauche soit sans cesse prêt à voler au secours de l’islamisme, à défendre le voile islamique, à pousser des hauts cris pour « stigmatisation » dès qu’on s’inquiète de certaines dérives islamistes, à déclarer que l’homophobie, l’antisémitisme, les attentats et les meurtres, le patriarcat, l’obscurantisme, l’intolérance, la misogynie, la pudibonderie qui sévissent dans une potée de pays musulmans ou dans certains groupes musulmans en France, ça n’a « rien à voir avec l’islam » (avec n’importe quoi d’autre, la zoologie, la pétanque, la philatélie, oui, mais l’islam, en aucun cas), c’est de la pure imagination et c’est même pas vrai. Il est quoi, Plenel ? Gentil ? sympathique ? OK, mais pas islamo-gauchiste, non madame. Islamo-gauchiste, c’est pour stigmatiser (j’adore ce verbe, on peut l’accommoder à toutes les sauces). Je dirais même plus : c’est une stigmatisation nauséabonde qui rappelle les heures les plus sombres de notre histoire.

Qu’est-ce qu’on pourrait dire alors ?

Islamophilie progressiste ?

Gauchisto-islamisme ?

En fait, rien. On ne sait pas ce que c’est.

Entre parenthèses, il y a, dans le refus effarouché de tous ces gens de gauche d’être associés à un islam pour lequel ils ont pourtant des yeux enamourés, quelque chose du reniement. Le bourgeois veut bien coucher avec la bonne marocaine, mais il ne faut pas que ça se sache. Ce ne serait pas de l’islamophobie, ça ?

Ce phénomène qu’on ne peut pas nommer n’est pas seulement une tendance de plus en plus prégnante dans le débat public. Ces gens qui courtisent l’islam, voire l’islamisme, ont des séminaires, des postes au CNRS, donnent des cours à la fac. Mais il est de mauvais goût de dire qu’ils y défendent leurs idées, et que celles-ci trouvent de plus en plus d’écho auprès des étudiants. Un syndicat étudiant proche du parti socialiste, l’UNEF, est dirigé à la Sorbonne par une étudiante voilée.

Mais ce n’est pas de l’islamo-gauchisme.

On ne sait pas ce que c’est.

D’ailleurs il serait faux de dire, en effet, que seul l’islam est concerné. C’est vrai, quoi, il faudrait en plus évoquer la pression de plus en plus importante, à l’université, des groupes racialistes, décolonialistes et tutti quanti. On en vient tout de même à empêcher une représentation d’Eschyle à la Sorbonne, au nom de l’antiracisme ! Une responsable nationale de l’Unef en vient à déclarer qu’il faudrait « gazer les blancs, cette sous-race ».

Mais tout ça, ça ne peut pas se nommer. On ne sait pas ce que c’est.

En sciences humaines, des étudiants finissent par ne plus supporter que l’on étudie des textes qui ne sont pas conformes à leurs convictions. La littérature est pleine de machos, de pervers, de sadiques, d’islamophobes, d’obsédés sexuels. Pas question de heurter les dogmes et les certitudes.

Mais ça ne peut pas se nommer, on ne sait pas ce que c’est.

A l’université, les chercheurs en « gender studies » et études décoloniales se démultiplient à grande vitesse, et s’emploient à appliquer aux textes et aux documents une grille simplificatrice et partisane. Comme disait Gracq, ils ont une clé, il ne leur reste qu’à mettre les textes en forme de serrure.

Mais ça ne peut pas se nommer, on ne sait pas ce que c’est.

Et rien de tout cela ne remet en cause la liberté de pensée et l’ouverture d’esprit à l’université, bien entendu.

Je me souviens de cette émission de Taddei où j’avais évoqué l’époque où j’enseignais en lycée pro à Creil. Mes gars de BTS productique me disaient qu’ils n’aimaient pas les « Arabes » parce que ceux-ci les agressaient et les volaient. J’ai fait venir dans la classe un élève d’une autre classe, d’origine arabe, pour qu’il discute avec eux de ce qu’il vivait de son côté. Sacré moment. Ils ont discuté, réfléchi. J’avais l’impression, là, d’avoir concrètement lutté contre racisme. Non ?

Eh bien non. Sur le plateau, un socialiste, conseiller de Lionel Jospin, m’a dit, pour tout commentaire, qu’il trouvait honteux qu’un professeur emploie à la légère le mot « arabe ». Ce n’était pas la réalité du travail antiraciste qui importait. Il fallait ne surtout pas nommer. J’aurais dû dire : « puisque vous n’aimez pas les Français immigrés, je vais inviter un Français immigré pour qu’il vous parle de sa condition ». Ils m’auraient pris au sérieux, mes mecs de productique !

Le règne désastreux d’Allègre sur l’Education nationale avait déjà sérieusement sapé mes convictions. Mais depuis cette émission, je méprise la plus grande partie de la gauche, je l’avoue. Je n’y vois plus, peut-être à tort, que de petits bourgeois bien-pensants qui se foutent totalement des réalités, qui ne s’y sont même pas, pour la plupart, confrontés de près.

La seule chose qui leur importe, c’est de ne pas dire ce qui fait problème.

Je tiens à préciser que cette chronique est libre, non rémunérée, qu’elle reflète mes opinions et non celles du site qui m’héberge.

Pierre Jourde (Ecrivain)

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SOURCE : Le Nouvel Obs

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06:10 Publié dans Parenthèse | Lien permanent | Commentaires (2) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Commentaires

Très amical salut Nebo, heureux de te voir toujours présent, toujours armé de cet amour de Dame liberté qui nous animait jadis pour défendre sur un site une tradition que de piètres bigots voulait nous interdire d'aimer et plus simplement de connaître. C'est ce même fastidieux labeur d'un fanatisme désormais incarné par les forces d'une certaine gauche habitée par la haine de tout ce qui n'est pas elle que l'on retrouve aujourd'hui. Il est vrai qu'au fond de chaque stupidité barbare git immanquablement le même sempiternel dépôt d'ignorance militante, de bêtise insolente, tout ce qui fonde l'éternel corpus de l'intolérance militante. Ces racisés et islamo-gauchistes (ce sont les mêmes) dont l'hypocrisie et la lâcheté n'ai d'égale que l'impudence avec laquelle ils ignore avec grand soin les sourates qui nient ostensiblement les valeurs qu'ils prétendent défendre seront dans une ou deux générations les prochains accusés en procès de sorcellerie pour crime de condescendance bourgeoise blanche. Tel aujourd'hui une Catherine Fourest expédiée manu-militari d'un bar lesbien parisien pour crime d'universalisme français. Cette logique n'est pas nouvelle : "le pur trouve toujours un plus pur que lui qui l'épure", c'est depuis la chute des girondins devant les jacobins l'inexorable logique du militantisme d'extrême gauche (faut-il vraiment dite "extrême ? la question se pause...). Pour qui connaît un peu l'histoire, ces néo Fouquier-Tinville n'ont rien de novateur et leur ancêtres sont bien connus. On les appelait jacobins et on leur doit, par exemple, des déclarations telles que "nous ferons un cimetière de la France plutôt que de pas la régénérer à notre manière". Loin d'être une pensée isolée, c'est là le substrat même de la pensée jacobine, il n'est pour s'en convaincre que de lire Taine et ses "origines de la France contemporaine", et les travaux de François Furet. Œuvre peut-être plus étonnante encore, parce que l'aspect prophétique y est indéniable, parce que tout ce qu'il y annonce s'est accompli, il y a l'ouvrage d'Edmond Burk "Réflexions sur la révolution française" paru en 1790. l'écrivain anglo-irlandais whigs y annonce la Terreur, l'inexorable destruction de l'individu remplacé par le citoyen appelé a devenir soldat dès que le pouvoir le voudra.
On me dira peut-être que nous voila loin de nos prétendus modernes et que nos minorités agissante n'ont que peu à voir avec les jacobins de 1793. En est-on si sûr ? Le roi à décapiter s'appelle aujourd'hui patriarcat blanc. Et dans l'actualité mortifère de ces derniers mois, il a plus modestement nom Samuel Paty...
Un dernier mot. on s’intéresse aujourd'hui aux vaticination de l'Unef. Je m'étonne de ne voir personne rappeler que ce syndicat étudiant ne représente aujourd'hui quasiment rien. Déjà, en 2011 lorsque les couloirs de la fac de lettres de Nanterre m'étaient fort connus, personne ne se revendiquait de l'Unef. S'ils étaient présent on peut dire qu'ils se cachaient bien. On me dit qu'aujourd'hui c'est encore bien plus groupusculaire. Alors pourquoi donne-t-on la parole à des gens qui ne représentent quasiment personne ? Et si on veut impérativement des interlocuteurs, ma foi, pourquoi alors ne pas interroger l'Uni, majoritaire dans les facs de droit? Mais je suppose que mes questions trahissent mon fond profondément fasciste, raciste et islamo-(homo)phobe, ennemi de l'avenir transgenre, bref, mon statut de laquais du patriarcat blanc.
Le côté positif de toute cette crétinerie pseudo progressiste, c'est évidemment que ces gens nous font rire . Ces nouvelles dame patronnesse qui ne vivent que de sermons et ne cherchent qu'à augmenter leur part sur le marché de l’indignation sont éminemment comique. Nous leur devons notamment de redécouvrir un Molière toujours jeune dont le "Tartuffe" et "Les précieuses ridicules" n'ont pas pris une ride, bien au contraire. Où l'on voit que le comique de caractère a peut-être plus d'actualité que le génie shakespearien.
Dernier point en passant : comment un pays qui à donné Sade et Laclos peut-il tomber dans la bigoterie pseudo progressiste? Voir aujourd'hui une certaine gauche venir à Canossa en expliquant que leur universalisme n'est plus compris et qu'il est indécent et incompréhensible qu'ils se retrouvent en posture d'accusé fait ma joie. Ce sont les mêmes qui taxaient de facho-lepénisme toute personne qui se permettait de critiquer non seulement l'immigration de masse mais même des sujets comme l'ignominie visuelle de l'art contemporain ou l'abaissement des programmes scolaires. Je me souviens encore des insultes prodiguées à Jean Clair qui avait osé dénoncer le règne des nouveaux pompiers et la chute de la cote des artistes français à l’étranger. Quant à ceux qui se permettaient de critiquer l'abandon de l'histoire chronologique à l'école, la disparition d'une éducation jadis symbolisée par le Malet-Isaac et le Lagarde et Michard, la même gauche les traitait de fourriers du lepénisme. Qu'ils gouttent aujourd'hui les fruits de leur militantisme me paraît un phénomène aussi normal que moral (le moralisme n'est pas la moral). J'ai d'ailleurs bon espoir, ainsi que je l'ai dit, que nos modernes accusateurs seront, à leur tour vilipendés et taxés de collaboration avec les forces du mal lorsque le temps du "ôte toi de là que je m'y mette" s'imposera aux nouvelles générations impatientes de s'asseoir à leur tour devant l'assiette au beurre.

Voilà,pardonne moi d'avoir été long, mais le plaisir de retrouver Incarnation trop longtemps délaissé m'a donné cette envie d'exprimer quelques idées, pour le plaisir, car le plaisir n'est-il pas la meilleur raison qu'on ai jamais trouvé d'agir?
Bien à toi Nebo, du fond du cœur.

Ps Je n'arrive pas à trouver mes mots pour parler d'Irina que j'ai connue, avec laquelle j'ai correspondu. Je ne peut que dire ma tristesse, et plus intimement dire ma conviction que je ne crois pas à l’extinction de l'âme, même si j'ignore tout des modalités de son autre existence.
De ce que j'ai pu connaître d'elle, le souvenir m'est cher. voilà tout...

Écrit par : Restif | 19/03/2021

Cher Restif,

Tous ces chiens (et n'oublions pas les chiennes) du système ne récoltent que ce qu'ils ont semé durant tant d'années avec une détermination de laquais serviles... et notre pauvre France se voit réduite à tous ces français post-modernes, masqués, marchant au pas de l'oie, la main sur le coeur (croient-ils), à verser des larmes de crocodiles à la première occasion, pour un Mamadou descendu du bateau, ou un jeune garçon de 6 ans transformé en fille par sa mère hystérique et mal-baisée. Le tout dans une décadente confusion.

Pendant ce temps les conquérants savourent leur position nouvellement acquise et déploient toujours un peu plus leur sinistre agenda.

Je suis fatigué... et d'autant plus fatigué à présent qu'Irina n'est plus à mes côtés. Mais je poursuis mon chemin, car c'est ce qu'Irina souhaite... et c'est ce que Dieu exige. Elle m'a donné de ces signes... simples... vivifiants... mais qui ont suffit à mon âme en peine inconsolable sitôt que je pense à elle. Tout est bien vide sans elle. Mais ma solitude me contente. Tandis que bien des questions s'épaississent... surtout en cette période de Carême Orthodoxe.

Amicalement...

Écrit par : Nebo | 22/03/2021

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