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07/09/2005

Il faut bien bouffer... même quand on est un héros !

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=





Magasinier…

La lourdeur du Corps, quand il faut exécuter les bonnes manœuvres, pressé par les obligations professionnelles sans importance...

Les obligations professionnelles sans importance puisqu'il faut bouffer et payer son loyer...

Les chefs, les sous-chefs, les quarts et les tiers de chefs… les superviseurs supervisant… les cadres encadrant… les ouvriers manuelisant… tout ce beau cirque livide… les rires graveleux sans légèreté, sans humour… la satisfaction trouvée dans si peu de choses… les salaires au ras des pâquerettes malgré des bénéfices impressionnants… le blanc des yeux : rouge… les pupilles dilatées… la bouffe à la cantine : banale… les sourires forcés… les teints pâles… ceux qui s’évitent… ceux qui se montrent… ceux qui n’ont pas la moindre envergure mais font semblant d’en avoir une (les jeunes cadres tout particulièrement)… pas de Culture… pas d’angoisse à étreindre, ou plutôt : ravalée l’angoisse, contenue l’angoisse, par l’art sinistre qui consiste à se persuader que la maîtrise sur leur vie est totale, que la saison va être bonne, que la saison va leur donner les opportunités de nouveaux challenges, leur offrir la perspective de nouvelles conquêtes… magnifiques ces beaux et valeureux cadres, rasés de près, costard-cravate et chair très triste… aucun dandysme… que de l’air… même pas du vent… mais dangereux… décisionnaires… crocs aiguisés… névroses et hystéries réglées par de pitoyables convictions de requins humanoïdes… Dans leurs tâches : ils ne peuvent, en effet, qu’être effectifs… mais beaucoup d’entre eux ne sont, finalement, que de pauvres tâches !



Pointeuse… salutations… enthousiasmes et déceptions… brouhaha existentiel… on vole deux minutes pour échanger quelques mots, ou un sourire authentique, avec deux ou trois personnes qui résistent, mais en demeurant sur le qui-vive, des fois qu’on se fasse prendre en flagrant délit d’humanité… et l’entreprise nous assassine, doucement, à petit feu, sans qu’on s’en rende compte… on rentre… on sombre… devant la télé-réalité, devant le foot, en mal-bouffant une mauvaise pizza… enchantement de notre univers !



Celui qui parvient, le soir venu, à éteindre la télévision, à ouvrir un livre… pire (ou mieux, c’est au choix) à écrire quelques lignes est un héros… comme moi… qui passera très vite pour un connard prétentieux auprès de tout ce joli monde…

Étant presque tous dotés, en toutes choses, d’un très mauvais goût, Cadres, prolos et employés divers, c’est bien moi, face à leur morgue qu’ils ont commune, face à la normalité de leur étroitesse répugnante, qui devient nauséeux et provoque haut-le-cœur et aversions diverses. Je leur renvoie l’image de ce qu’ils n’osent pas être, ou ne savent pas être et, probablement, ne seront jamais : un souverain, libre et détaché, un franc-tireur incendiaire, jouant des masques Vénitiens et riant de presque tout avec délectation…



Puisque je fais preuve, selon eux, de mauvais goût, comme disait mon ami Baudelaire : « Ce qu’il y a d’enivrant dans le mauvais goût, c’est le plaisir aristocratique de déplaire. »

Bref… tenir le coup… dépasser la ténèbre…



Nebo

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Bande son du moment : Carmen de Bizet

Lectures du moment :

*La Divine Comédie de Dante
*Illuminations de Rimbaud

Citation du jour : « Mieux vaut celui qui, assis à sa place, avance dans le Tao. » Tao-tö-king,LXII

Humeur du moment : tranchante...