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25/03/2007

Sauternes

=--=Publié dans la Catégorie "Festoyons... Buvons la coupe..."=--=



Le Sauternes"Pavois d'Or" a le grand intérêt, me concernant, de me mettre rapidement de bonne humeur.




C'est un Vin qu'il faut boire frappé, pour ne pas dire glacé !!!!

Généralement, je n'aime pas ces vins blancs de "gonzesses", comme dirait certaine de mes connaissances, cependant je fais une exception pour le Sauternes qui se laisse véritablement savourer comme on ne savoure que... euh... les bonnes choses.

Le rouge est ma couleur préférée. De vin en vin, le rouge n'est jamais le même, 1000 et 1 aspects différents nous enchantent lorsque nous ne faisons que contempler les nuances lumineuses au travers d'un verre, à proximité d'une bougie, par exemple... Les rouges explosent littéralement le sens de la vue : cinabre, roux, carmin, cerise, groseille, grenat, rubis, pourpre, bordeaux... Ces termes sont à eux seuls des jouissances en attente... des jus qui ne demandent qu'à être appréciés...
Le rouge a la couleur du sang, du feu. Il brûle.

Mais le Sauternes, chers amis, lorsqu'il a passé une petite heure au frigo... laissez-moi vous dire que son attrait est des plus évidents avec viandes blanches en sauce et fromages qui fouettent ! L'arôme de bouche est des plus surprenant. Ici un fond de noix et de miel nous exalte le dôme du palais. Il n'est guère astringent comme le Bourgogne dont l'épaisseur peut vous permettre de vous passer d'un repas. Le miel, dont je parlais tout à l'heure, subsiste après la première attaque en bouche qui est gargantuesque. Exubérance et richesse du sucre. Guère d'acidité, d'amertume ou de dépôt tannique, par contre la sensation est tout de même alcoolisée.

Il faut prendre la peine d'en humer le bouquet en bouteille avant même que de verser en les verres l'agape salvatrice. Juste après le "plop" du bouchon... Le Sud et le sel de ses vents y a laissé des empreintes.

Très charnu, le Sauternes assiège la bouche non comme des hordes barbares mais comme des femmes lascives. De quoi tirer des plans sur la comète si, compagnon, tu le bois en compagnie féminine. Car s'il est charnu, il est aussi généreux et les inhibitions seront levées et jetées aux oubliettes comme du linge sale. Que Dieu me pardonne !

Sucré mais pas gras... le Sauternes est avant tout gouleyant... ça passe comme une lettre à la poste... ça se boit comme du p'tit lait... et sa persistance aromatique intense qui subsiste quelques minutes après le dernier verre prouve que c'est un bon vin...






Bordeaux, Cité des Lumières


par Philippe Sollers

"Où que je me trouve, je peux revenir soudain à Bordeaux par la couleur ou par le vin, par un signal lumineux sombre ou par un certain parfum dans la bouche.

Avant d'être la ville où je suis né, Bordeaux est ainsi une information diffuse, distribuée dans les tissus ou le contenu des bouteilles. Le mot de « bordeaux » lui-même, en dehors de l'étymologie, évoque pour moi la rive, le lieu stable d'où l'on pourrait voir, indéfiniment, couler l'espace et le temps. L'eau, le vin, le sang transformé en vin, le bord de la durée physique, et voilà une idée de ce que peut être un port dans l'aventure du corps, « le port de la lune », en plus, avec un croissant bienveillant et oriental, comme un poinçon des mille et une nuits en cours de sommeil.

La ville est entourée par des centaines de contes de fées protégés. Bordeaux est le château principal des châteaux environnants, une sorte de « coffre », un peu en retrait de l'océan dont la pression douce se fait sentir. Au sud : le brasier permanent des Landes. Au nord-ouest : l'ouverture atlantique. Entre le feu résineux et l'espace maritime incurvé : une ville tempérée qui résume tous les climats. Supposons maintenant que je sois à New York, à Pékin, à Amsterdam ou à Londres : j'ouvre cette bouteille de margaux, je la bois lentement, je vais dormir, et le lendemain matin, je sais que j'ai été filtré par Bordeaux. Il faut « dormir » le vin pour le comprendre. C'est d'ailleurs plutôt lui qui vous comprend, qui vous accepte ou qui vous refuse. N'est pas dans le bordeaux qui veut. Un Bordelais est souvent bavard, mais c'est pour mieux cacher son silence. Personne n'est aussi trompeur sans avoir à le faire exprès. Cette gaieté ? Peut-être une mélancolie profonde. Cet art de vivre ? Sans doute une conscience aiguë du néant. Bordeaux ou la contradiction : comme une relativité généralisée, d'ailleurs concentrée dans le livre par excellence, les Essais de Montaigne, « que philosopher c'est apprendre à mourir », pages lues au lycée, commentées, relues et apprises par coeur. Avec les Lettres persanes, l'Esprit des lois, avec le Discours de la servitude volontaire, on a l'inspiration libérale et juridique de la cité frondeuse fondamentale, ville de dissidence par rapport au pouvoir central, ville où l'on préfère les Anglais à Jeanne d'Arc et à Napoléon, Louis XV à Louis XIV, ville du Prince noir et de la belle Aliénor.

« Esprit frondeur » : je retrouve cette annotation à l'encre rouge sur mes bulletins d'écolier, et, avec le temps, je me rends compte qu'il s'agissait plutôt d'un éloge, d'un encouragement discret sous la réprobation d'apparence. Montaigne, La Boétie, Montesquieu, et, plus tard, pendant la Révolution, le parti girondin, si mal connu et réhabilité par l'Histoire. Mauriac, enfin, ce Landais, romancier fiévreux et conscience morale intraitable. Les Bordelais ont l'habitude de célébrer leurs « trois M », Montaigne, Montesquieu, Mauriac : il est temps de leur ajouter un quatrième mousquetaire, de les inscrire mieux au pluriel. Un S, donc : le mien.

Impression de Bordeaux, capitale du XVIIIe siècle, sur les écrivains : c'est Stendhal qui note que « sans contredit, Bordeaux est la plus belle ville de France ». Il la compare à Venise, d'autres à Versailles. C'est Hölderlin, en 1802, qui parle « des montagnes de raisins d'où la Dordogne descend, où débouchent le fleuve et la royale Garonne, leurs eaux unies ». Voici l'Aquitaine, le pays des eaux, mais aussi la Gironde, mot merveilleux ; girond, gironde : « beau, gentil, mignon ». Mais aussi : « joyau en forme de médaillon, comme une broche ». À Bordeaux, le jeune Baudelaire s'est embarqué sur le bateau des Mers-du-Sud. À Bordeaux, Lautréamont a débarqué un jour, portant avec lui toute une sauvagerie d'Amérique. La place de la Bourse (ex-place Louis XV) est la mémoire de ce temps passé. Comme les deux grandes colonnes rostrales, consacrées l'une au commerce, l'autre à la navigation. Échanger, circuler : c'était, et ce sera de nouveau, après le tunnel du XIXe siècle et d'une grande partie du XXe siècle, le destin de Bordeaux, ville européenne comme Londres, Hambourg, Barcelone, Naples, Venise, Amsterdam. Les Français aiment-ils l'Europe ? Pas sûr. Je me suis fait traiter de tous les noms pour avoir dit que je me sentais un écrivain européen d'origine française. C'était pourtant du Montesquieu adapté. Montesquieu, à propos des Lettres persanes (à relire ces temps-ci) : « L'auteur s'est donné l'avantage de pouvoir joindre de la philosophie, de la politique et de la morale à un roman, et de lier le tout par une chaîne secrète et, en quelque façon, inconnue. »

Une chaîne secrète ? Celle, simplement, des Lumières. L'aventure continue"


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Bande son du moment : "La Passion selon Saint Jean" de Jean Sébastien Bach sous la direction de Stephen Cleobury

Lecture du moment : ...pas de lecture particulière... butinages divers...

Citation du jour : « Quand dans un royaume il y a plus d’avantage a faire sa cour qu’à faire son devoir, tout est perdu. » Montesquieu

Humeur du moment : Regroupement des forces...

Commentaires

...et les Vendanges tardives ? Oui, parce que je trouve le concept plus séduisant. Ces petits grains de juste avant les gelées.. ça s'imagine, ça se savoure, se fait automnal.
(il faudra que je lise l'"esprit frondeur"aussi... mais une autre fois).

Ce que j'aime effectivement, ce sont les parfums qui surprennent, et qui sans se mélanger, nous perdent sur leur origine...
On n'aime pas non plus en perdre la trace - ce parfum si rapproché, goûte du vin.

Écrit par : Marie Gabrielle | 26/03/2007

Le vin jeune des vendanges tardives d'un raisin longtemps rejeté au cep est délicieux aussi.

Écrit par : Anonyme | 26/03/2007

je vis en Sauternais
très précisément à cinq minutes de Sauternes
c'est dans les forêts avoisinant Eyquem que je vais cueillir bolets bais, cèpes et cèpes de pins et coulemelles.
la meilleure manière de boire le Sauternes
et je l'ai expérimentée avec des anciens de la région
celle qui exalte le mieux son parfum si prodigieux
son épaisseur
sa sensualité
c'est
contrairement à ce qui se dit et conseille dans les grandes métropoles
le saumon fumé, ou meiux encore cru ( ou le thon cru) en carpaccio.

accessoirement (sourire) je suis la goûteuse unique et très bichonnée du chateau haut Bailly premier grand cru classé des graves de Léognan.

Écrit par : Viviane | 27/03/2007

Ma grand-mère raffolait du Sauternes, mais pourquoi sur les desserts ? sur des poissons crus... mm !!! (et des champignons... ahnnnmmhh ! ce serait le dada ?).

Vous avez eu raison, Nebo, de nous rappeler par un miracle que le poids des mots vaut celui de la chair...

Écrit par : Marie Gabrielle | 28/03/2007

le Sauternes accompagne aussi délicieusement une fine tranche de foie gras garni d'une confiture d'oignons. A essayer absolument et tant pis pour les "politiquement correct" qui boycotent le gavage de ces pauv's bestiaux.

Écrit par : irina | 29/03/2007

L'Anonyme mis à part... fille ? garçon ? ... Marie-Gabrielle, Viviane, Irina... il est plaisant de boire en votre compagnie...

Baisers fleuris...

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Écrit par : Nebo | 29/03/2007

Nebo, je salue la création de cette rubrique festive.

Personnellement, et même si je trouve la réputation de ce vin parfois surfaite (au regard d'autres vins du sud-ouest de la france, des fameux "Vendanges tardives" ou mieux encore "selection de Grain Nobles", ou de ceux qui ont ma préférence, les chenins blancs du Val de Loire : Bonnezeaux, Savennières moelleux, quarts de chaume, coteaux de l'aubance, coteaux du layon, ...), j'adore le boire comme digestif, confortablement installé dans un fauteuil après un bon repas, ou alors avec du roquefort.

En tout cas, j'ai définitivement arrêté de le boire comme apéritif, son opulence ayant quand même tendance à rendre notre palais hors d'usage.

P.S. : le réchauffement climatique bouleverse le cycle végétatif de la vigne. Ce sujet a d'ailleurs été évoqué le week-end dernier au cours d'un colloque à Dijon.

Alors, si on veut continuer à boire du sauternes (et les autres), il est important de préserver notre Planète. Une (bonne) raison de plus pour devenir écolo (dans le bon sens du terme).

Écrit par : morgan | 04/04/2007

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