28/03/2011
Ce qui autrefois m’avait donné la première notion de l’existence
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« Il arriva donc que livré à la monotonie matérialiste de ce monde banal, seul en face du rythme inconnu et entraînant d’une vie en apparence complètement insensée et pourtant réglée par un mécanisme inexorable, je recourus d’abord à ce qui autrefois m’avait donné la première notion de l’existence, c'est-à-dire au livre. Avant de m’être mis en route comme le Persifal de la légende, je m’étais construis avec les livres une barrière contre les vicissitudes quotidiennes de mon éducation quelque peu difficile.
Et maintenant à cette heure où tout ce que je voyais et sentais me semblais si pâle et si incolore, l’étalage d’une librairie était pour moi comme un appel secret et pouvait éveiller en moi le désir ardent de ces visions immédiates et éblouissantes que les livres m’avaient toujours apportées avant que j’eusse essayé de suivre mon frère Simplizius Simplicissimus autrement qu’en imagination seulement.
Dans cet étalage se trouvait un peu renfoncé dans un coin et un peu poussiéreux, un livre : Des choses futures. Etrangement ému et attiré par ce titre, j’entrai dans la boutique et j’achetai le livre. Je remontai dans ma mansarde, j’allumai ma dernière grande bougie, je m’assis dans le vieux fauteuil de velours dont j’avais déjà brûlé un pied pour me chauffer, non sans avoir calé le meuble grinçant contre une caisse de grenades et, grelottant, je me mis à lire. Ma lecture se prolongea pendant la nuit entière. »
Ernst Von SALOMON, Les réprouvés (1931)
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Commentaires
Figure très intéressante et originale, que celle de Salomon !
Écrit par : Tietie007 | 26/12/2011
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