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13/07/2014

Il met soudain de l’ordre autour de lui

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« Un homme désordonné qui va mourir et ne s’en doute pas met soudain de l’ordre autour de lui. Sa vie change. Il classe des papiers. Il se lève tôt, il se couche de bonne heure. Il renonce à ses vices. Son entourage se félicite. Aussi sa mort brutale semble-t-elle d’autant plus injuste. Il allait vivre heureux. »

Raymond Radiguet, Le Diable au corps

 

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12/07/2014

Il y a des hommes qui se vantent d’aimer la liberté parce qu’ils en jouissent

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« Je ne me lasserai pas de répéter qu’il y a des hommes qui se vantent d’aimer la liberté parce qu’ils en jouissent. Loin de vouloir lui sacrifier quoi que ce soit, ils entendent bien qu’elle leur épargne tout sacrifice, qu’elle leur permette de s’engraisser en paix, et même qu’elle facilite leur engraissement. »

Georges Bernanos, Le lendemain c’est vous

 

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Là où il n'y a pas de patrie, les mercenaires ou l'étranger deviennent les maitres

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« On a beau ironiser sur le concept de patrie et concevoir l'humanité sur le mode anarchique et abstrait comme composée uniquement d'individus isolés aspirant à une seule liberté personnelle, il n'empêche que la patrie est une réalité sociale concrète, introduisant l'homogénéité et le sens de la collaboration entre les hommes. Elle est même une des sources essentielles du dynamisme collectif, de la stabilité et de la continuité d'une unité politique dans le temps. Sans elle, il n'y a ni puissance ni grandeur ni gloire, mais non plus de solidarité entre ceux qui vivent sur un même territoire. On ne saurait donc dire avec Voltaire, à l'article Patrie de son Dictionnaire philosophique que "souhaiter la grandeur de son pays, c'est souhaiter du mal à ses voisins". En effet, si le patriotisme est un sentiment normal de l'être humain au même titre que la piété familiale, tout homme raisonnable comprend aisément que l'étranger puisse éprouver le même sentiment. Pas plus que l'on ne saurait conclure de la persistance de crimes passionnels à l'inanité de l'amour, on ne saurait prendre prétexte de certains abus du chauvinisme pour dénigrer le patriotisme. Il est même une forme de la justice morale. C'est avec raison qu'Auguste Comte a vu dans la patrie la médiation entre la forme la plus immédiate du groupement, la famille et la forme le plus universelle de la collectivité, l'humanité. Elle a pour raison le particularisme qui est inhérent au politique. Dans la mesure où la patrie cesse d'être une réalité vivante, la société se délabre non pas comme le croient les uns au profit de la liberté de l'individu ni non plus comme le croient d'autres à celui de l'humanité; une collectivité politique qui n'est plus une patrie pour ses membres cesse d'être défendue pour tomber plus ou moins rapidement sous la dépendance d'une autre unité politique. Là où il n'y a pas de patrie, les mercenaires ou l'étranger deviennent les maitres. Sans doute devons-nous notre patrie au hasard de la naissance, mais il s'agit d'un hasard qui nous délivre d'autres. »

Julien Freund, L'essence du Politique

 

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Un fréquent caractère d'artifice politique très pur

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Maurras se battant en duel contre Jacques Landau (1909)

 

« Ici ou là, peuple maigre, peuple gras peuvent se chamailler un temps. Partout le peuple gras s'est fait la guerre à lui-même. Partout et dans tous les temps, il suffit que s'élèvent de grandes maisons, les voilà au prises : l'univers des oligarchies est une Vérone éternelle que ses Montaigus et ses Capulets se disputent avec une constante fureur. On n'y voit de paix que par la force, et qui vient du dehors, sauf dans les circonstances extrêmement rares qui ont permis la naissance des Patriciats impériaux de l'histoire. Qu'elles soient de l'Or, du Sang ou de l'Intelligence, les élites ont cette propriété de se déchirer jusqu'à ce que mort s'ensuive. La lutte des classes ne saurait expliquer la continuelle bataille intestine que se livre cette classe. C'est au contraire sa propre bataille, la bataille interne des patriciats, qui suscite l'action des plèbes contre elle-même. Ces soulèvements sont presque toujours conduits par des patriciens déserteurs de leur classe et animés contre leurs pairs des rancunes féroces que leur guerre de frères a déjà semées ou stimulées. Les Gracques  étaient la fleur du patriciat de Rome. Le dernier dictateur populaire, Jules César, descendait d'Iule, d'Énée, de Vénus. Cela s'était montré dans Clisthène et dans Péricles. Cela se retrouve dans tous nos Rois des Halles, dans tous nos Mirabeau. Cela se continue sous nos yeux dans tous ce mauvais petit peuple de ploutocrates démagogues, d'avocaillons radicaux, socialistes et communistes, nés de bourgeois et de bourgeoises que leurs convoitises et leurs jalousies de bourgeois ont mobilisés contre leur bourgeoisie. Ainsi considérées, les luttes des classes paraissent beaucoup moins spontanées qu'elles n'en ont l'air : l'initiative leur vient d'ailleurs et elle accuse un fréquent caractère d'artifice politique très pur... »

Charles Maurras, La Politique Naturelle, Préface de Mes idées politiques

 

 

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11/07/2014

Rêves de conquérant, de saint ou de découvreur de monde

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« Des rêves trop grands pour notre carrure pèsent parfois sur nos épaules, rêves de conquérant, de saint ou de découvreur de monde, rêves qui furent ceux réalisés d’un Mermoz, d’un Gengis Khan ou d’un François d’Assise. Il ne faut pas nous désoler d’être seulement ce que nous sommes. L’aventure la plus prodigieuse est notre propre vie et celle-là est à notre taille. Aventure brève: trente, cinquante, quatre-vingts ans peut-être qu’il faut franchir durement, gréé comme un voilier cinglant vers cette étoile au grand large qui est notre repaire unique et notre unique espérance. Qu’importent coups de chien, tempêtes ou calme plat, puisqu’il y a cette étoile. Sans elle, il n’y aurait plus qu’à cracher son âme et à se détruire de désespérance. Mais sa lumière est là et sa recherche et sa poursuite font d’une vie humaine une aventure plus merveilleuse que la conquête d’un monde ou la course d’une nébuleuse. Cette aventure-là ne dépasse pas notre carrure. Il nous suffit de marcher vers notre Dieu pour être à la taille de l’Infini, et cela légitime tous nos rêves. »

Guy de Larigaudie, Étoile au grand large

 

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Des prières et des vœux perpendiculaires

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« C’est embêtant, dit Dieu, quand il n’y aura plus ces Français,

Il y a des choses que je fais, il n’y aura plus personne pour les comprendre.

Peuple, les peuples de la terre te disent léger parce que tu es un peuple prompt.

Les peuples pharisiens te disent léger parce que tu es un peuple vite.

Tu es arrivé avant que les autres soient partis.

Mais moi je t’ai pesé, dit Dieu, et je ne t’ai point trouvé léger.

O peuple inventeur de la cathédrale, je ne t’ai point trouvé léger en foi.

O peuple inventeur de la croisade je ne t’ai point trouvé léger en charité.

Quant à l’espérance, il vaut mieux ne pas en parler, il n’y en a que pour eux.


 Tels sont nos Français, dit Dieu. Ils ne sont pas sans défauts. Il s’en faut. Ils ont même beaucoup de défauts.

Ils ont plus de défauts que les autres.

Mais avec tous leurs défauts je les aime encore mieux que tous les autres avec censément moins de défauts.

Je les aime comme ils sont. Il n’y a que moi, dit Dieu, qui suis sans défaut.Mon fils et moi. Un Dieu avait
un fils.

(…)


Nos Français sont comme tout le monde, dit Dieu. Peu de saints, beaucoup de pécheurs.

Un saint, trois pécheurs. Et trente pécheurs. Et trois cents pécheurs. Et plus.

Mais j’aime mieux un saint qui a des défauts qu’un pécheur qui n’en a pas. Non, je veux dire :


J’aime mieux un saint qui a des défauts qu’un neutre qui n’en a pas.

Or ces Français, comme ils sont, ce sont mes meilleurs serviteurs.

Ils ont été, ils seront toujours mes meilleurs soldats dans la croisade.

Or il y aura toujours la croisade.

Enfin ils me plaisent. C’est tout dire. Ils ont du bon et du mauvais.

Ils ont du pour et du contre. Je connais l’homme.

Je sais trop ce qu’il faut demander à l’homme.

Et surtout ce qu’il ne faut pas lui demander. Si quelqu'un le sait, c'est moi.
Depuis que l'ayant créé à mon image et à ma ressemblance.
Par le mystère de cette liberté ma créature
Je lui abandonnai dans mon royaume
Une part de mon gouvernement même.
Une part de mon invention.
Il faut le dire une part de ma création.
Il faut les prendre comme ils sont. Si quelqu'un le sait, c'est moi. Et aussi savez-vous
Combien une seule goutte de sang de Jésus
Pèse dans mes balances éternelles.

(…)


O mon peuple français, dit Dieu, tu es le seul qui ne fasses point des contorsions.

Ni des contorsions de raideur, ni des contorsions de mollesse.
Et dans ton péché même tu fais moins de contorsions Que les autres n'en font dans leurs exercices.
Quand tu pries, agenouillé tu as le buste droit.
Et les jambes bien jointes bien droites au ras du sol.
Et les deux pieds bien joints.
Et les deux mains bien jointes bien appliquées bien droites.
Et les deux regards des deux yeux bien parallèlement
montants droit au ciel.
seul peuple qui regardes en face.
Et qui regardes en face la fortune et lépreuve
Et le péché même.
Et qui moi-même me regardes en face.
Et quand tu es couché sur la pierre des tombeaux
L'homme et la femme se tiennent bien droits lun à côté de l'autre.
Sans raideur et sans aucune contorsion .
Bien couchés droits l'un à côté de l'autre sans faute.
Sans manque et sans erreur.
Bien pareils. Bien parallèlement.
Les mains jointes, les corps joints et séparés parallèles.
Les regards joints.
Les destinées jointes. Joints dans le jugement et dans l'éternité.
Et le noble lévrier bien aux pieds.
Peuple, le seul qui pries et le seul qui pleures sans
contorsion.

Le seul qui ne verses que des larmes décentes.
Et des larmes perpendiculaires.
Le seul qui ne fasses monter que des prières décentes. Et des prières et des vœux perpendiculaires. »

Charles Péguy, Le Mystère des Saints Innocents

 

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Un homme théorique

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« L'utopie de la démocratie a été de dépouiller l'individu de ses qualités sensibles, de le réduire à l'état abstrait de citoyen.  De l'homme concret de chair et d'os, qui a un métier, un milieu, une personnalité, elle a fait un être irréel, un personnage allégorique en dehors du temps et de l'espace, et le même à tous les étages de la société.

Ni ouvrier ni paysan, ni industriel ni commerçant, ni du Nord ni du Midi, ni savant ni ignorant : un homme théorique. »

Hubert Lagardelle, Magazine "Plans" n° : 1, janvier 1931

 

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10/07/2014

Si, au contraire des idées reçues, les hommes n’avaient jamais que la vie qu’ils méritent ?

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« "Il n’a pas eu la vie qu’il méritait." De cette maxime consolante, la vie de Baudelaire semble une illustration magnifique. Il ne méritait pas, certes, cette mère, cette gêne perpétuelle, ce conseil de famille, cette maîtresse avaricieuse, ni cette syphilis - et quoi de plus injuste que sa fin prématurée ? Pourtant, à la réflexion, un doute surgit : si l’on considère l’homme lui-même, il n’est pas sans faille ni, semble-t-il, sans contradictions : ce pervers a adopté une fois pour toutes la morale la plus banale et la plus rigoureuse, ce raffiné fréquente les prostituées les plus misérables, c’est le goût de la misère qui le retient auprès du maigre corps de Louchette et son amour pour "l’affreuse Juive" est comme une préfiguration de celui qu’il portera plus tard à Jeanne Duval ; ce solitaire a une peur affreuse de la solitude, il ne sort jamais sans compagnon, il aspire à un foyer, à une vie familiale, cet apologiste de l’effort est un "aboulique" incapable de s’astreindre à un travail régulier ; il a lancé des invitations au voyage, il a réclamé des dépaysements, rêvé de pays inconnus, mais il hésitait six mois avant de partir pour Honfleur et l’unique voyage qu’il a fait lui a semblé un long supplice ; il affiche du mépris et même de la haine pour les graves personnages qu’on a chargés de sa tutelle, pourtant il n’a jamais cherché à se délivrer d’eux ni manqué une occasion de subir leurs admonestations paternelles. Est-il donc si différent de l’existence qu’il a menée ? Et s’il avait mérité sa vie ? Si, au contraire des idées reçues, les hommes n’avaient jamais que la vie qu’ils méritent ? »

Jean-Paul Sartre, Baudelaire

 

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Le lieutenant était de ces êtres dont l’approbation nous accable

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« "C’est étonnant, disait Mme Courrèges, Paul a un gendre qui pense comme lui sur tous les points, et il ne l’aime pas." Voilà bien ce que le docteur ne pouvait pardonner à ce garçon dont l’esprit déformant lui renvoyait la caricature de ses plus chères idées. Le lieutenant était de ces êtres dont l’approbation nous accable et nous porte à mettre en doute des vérités pour lesquelles nous eussions versé notre sang. »

François Mauriac, Le désert de l’amour

 

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09/07/2014

Au pouvoir du monde je n’ai rien à opposer que moi-même

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« Le monde est donc plus fort que moi. À son pouvoir je n’ai rien à opposer que moi-même, mais, d’un autre côté, c’est considérable. Car, tant que je ne me laisse pas écraser par le nombre, je suis moi aussi une puissance. Et mon pouvoir est redoutable tant que je puis opposer la force de mes mots à celle du monde, car celui qui construit des prisons s’exprime moins bien que celui qui bâtit la liberté. Mais ma puissance ne connaîtra plus de bornes le jour où je n’aurai plus que mon silence pour défendre mon inviolabilité, car aucune hache ne peut avoir de prise sur le silence vivant.



Telle est ma seule consolation. »

Rainer Maria Rilke, Poèmes épars et fragments

 

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L'incohérence étant trait de mâle

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« A cette répugnance à être aimés, qu'ont certains hommes, je vois plusieurs raisons, contradictoires comme de juste, l'incohérence étant trait de mâle.
 Orgueil. - Désir de garder l'initiative. Dans l'amour qu'on nous porte, il y a quelque chose qui nous échappe, qui risque de nous surprendre, peut-être de nous déborder, qui attente à nous, qui veut nous manoeuvrer. Même dans l'amour, même en étant deux, on ne veut pas être deux, on veut rester seul.
 Humilité, ou, si le mot paraît trop fort, absence de fatuité. - L'humilité d'un homme lucide, qui ne se connaît pas tant de beauté ni tant de valeur, et trouve qu'il y a quelque chose de ridicule à ce que ses moindres gestes, paroles, silences, etc., créent bonheur ou même malheur. Quel injuste pouvoir on lui donne ! Je ne fais pas grand cas de quelqu'un qui ose penser tout haut : "Elle m'aime", qui n'essaye pas au moins de diminuer la chose en disant : "Elle se monte la tête sur moi." Par quoi sans doute il rabaisse la femme, mais ne le fait que parce que d'abord il s'est rabaissé soi-même.
 Sentiment que je rapproche, par exemple, de celui de l'écrivain qui trouverait ridicule d'avoir des "disciples", parce qu'il sait de quoi est faite sa personnalité, et ce qu'il en retourne des "messages". Un homme digne de ce nom méprise l'influence qu'il exerce, en quelque sens qu'elle s'exerce, et subit de devoir en exercer une, comme la rançon de sa tarentule de s'exprimer. Nous, nous voulons ne pas dépendre. Et nous estimerions les âmes qui se mettent sous notre dépendance ? C'est par une haute idée de la nature humaine, qu'on se refuse à être chef.
 Dignité. - Gêne et honte du rôle passif que joue un homme qui est aimé. Etre aimé, pense-t-il, est un étant qui ne convient qu'aux femmes, aux bêtes et aux enfants. Se laisser embrasser, câliner, pressurer la main, regarder avec l'oeil noyé : pour un homme, pouah ! (La plupart des enfants eux-mêmes, si féminins qu'ils soient en France, n'aiment pas du tout qu'on les embrasse. Ils se laissent faire par politesse, et parce qu'il le faut bien, les grandes personnes étant plus musclées qu'eux. Leur impatience de ces suçotements n'échappe qu'au suçoteur, qui croit qu'ils en sont ravis.)
 Désir de rester libre, de se préserver. - Un homme qui est aimé est prisonnier. Cela est trop connu, n'y insistons pas. »

Henry de Montherlant, Les jeunes filles

 

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08/07/2014

Deutschland, Deutschland über alles, über alles in der Welt...

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La Mémoire de l'Eau

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Cette émission est à regarder de bout en bout. Une fois de plus, à l'instant ou la science s'apprête à changer de paradigme, les scientifiques officiels d'une part et les intérêts financiers pharmaceutiques d'autre part cherchent à mettre un frein aux promesses de ces découvertes.

Mais lorsque le Professeur Luc Montagnier lui-même se colle à cette recherche pleine de controverses, on se dit qu'il reste peut-être de l'espoir.

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Le vagin retrousse ses babines ! Marguerite se mouille !

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« Christine Villemin a été libérée ! Pour l'instant… La France n'est pas vraiment certaine de tenir là une infanticide "sublime forcément sublime" comme l'appelle cette vieille peau pourrie de Marguerite Duras qui écrit — c'est l'événement du jour — un grand article dans la "Pravda" de Serge July. Le gros gauchiste se régale de toute l'affaire. Ça lui rappelle l'histoire du notaire de Bruay-en-Artois accusé à tort d'avoir trucidé la petite Brigitte Dewaere et sur laquelle l'acharné prolétarien July a bâti toute sa sinistre carrière de "journaliste". Aujourd'hui, ça doit bien le faire bandocher, le feuilleton antique de Lépanges. Assoiffé comme il est, July boirait verre après verre toute l'eau de la Vologne qu'il ne se désaltérerait pas. Chaque fois que July prend la plume, on dirait qu'il vient de l'arracher du cul d'un corbeau. Il touille la merde d'Épinal avec et l'écrase sur ses grandes pages déjà souillées de références douteuses (Roland Barthes et Cie…). Mais tout cela n'est rien encore à côté du "texte" que la Prix Goncourt 1984 a daigné donner à "Libération"… L'Écrivaine numéro un de la minuitée sans suc se lance dans l'actualité ! Le vagin retrousse ses babines ! Marguerite se mouille ! Débile, forcément débile !

Je lis effaré ces quatre pages de conneries culottées. Cette vieillarde pontifiante est allée faire sous elle sur le terrain. C'est du joli. Il va sans dire que ce n'est pas écrit. Ça fait "bien écrit". L'intellote prend conscience de ce temps. La conne enquête. Elle rôde autour de la bicoque au crime, bien enfoncée dans son col roulé de mémère éthylique. On la voit bien avec son intelligence à la main comme une loupe, arpentant les entours du chalet vosgien ! Il ne lui manque que le chapeau à carreaux, à Sherlock Duras ! Moi, j'aurais été le petit Grégory, voir s'approcher de moi un monstre comme Marguerite Duras m'aurait fait me foutre à l'eau tout seul ! Y a-t-il femme de lettres plus grotesquement vaniteuse que la Duras ? "Je téléphone à Serge July, je lui dis que je ne ferai pas l'article. Et puis à deux heures du matin je commence à l'écrire." Coquette cacochyme ! C'est à partir de ce moment qu' "au-delà de la raison", elle rédige son delirium inconséquent. Elle fait sa Simenon, elle se repasse le film, c'est tout juste si elle n'étrangle pas elle-même l'enfant mieux que l'assassin ! Ah, qu'elle se met bien dans la peau de "Christine V." (l'initiale, quel chic !) ! Elle la comprend à mort de l'intérieur ! C'est impressionnant comme Marguerite D. compatit au malheur psychologique qui a poussé Christine V. à devenir forcément sublime ! C'est là qu'elle a cette phrase à dégueuler partout : "Christine V. innocente qui peut-être a tué sans savoir comme moi j'écris sans savoir." Alors ferme ta gueule, salope ! C'est très grave ce culot inouï. Personne d'autre que madame Duras ne pourrait se permettre, en pleine affaire complexe, de "charger", sous couvert d'intuitive littérature, une accusée à ce point. Et July trouve ça parfait. "Marguerite Duras dit tout haut ce que nous pensons tout bas" (comme Le Pen, alors ?). Si haut que toute la justice snobée risque fort d'être influencée sur le sort à réserver à la mère V. Et si elle n'était pas le personnage rêvé de la Duras ? Tout ça pour faire monter le fantasme de l'infanticide, si présent dans l' "œuvre" et la trogne de cette haineuse pocharde femelle ! Pour Marguerite Duras, c'est normal d'être une mère monstrueuse puisque la maternité est monstrueuse en soi. La vraie maman tue. Quelle dégueulasserie ! "J'aime le crime", dit-elle, et ça suffit à July pour l'envoyer à Lépanges, s'approprier l'affaire en cours, trancher dans le vif pour tous les juges et tous les flics, ramener sa fraise et l'écraser sur tous les cadavres chauds… Christine Villemin est devenue "une héroïne de l'écriture de l'auteur de l'Amant", dit le patron de presse. "Il s'agit d'un écrivain en plein travail, fantasmant la réalité en quête d'une vérité qui n'est sans doute pas la vérité, mais une vérité quand même, à savoir celle du texte écrit. Ce n'est de toute évidence pas la vérité de Christine Villemin, ni vraiment celle de Marguerite Duras, mais celle d'une femme ‘sublime, forcément sublime’ flottant entre deux langages »…

Comment peut-on supporter tant de légèreté cynique ? Grégory doit se retourner dans sa vase… Tant de mauvaise littérature (car tout est là aussi), servie en alibi à la manip minable de deux notables du pouvoir intellectuel ! En effet, l'article de la Duras est scandaleux (plus encore que celui de Barthes sur Dominici, son modèle) mais pas comme l'entend July. Il est scandaleux parce qu'il se fait passer pour scandaleusement immoral alors qu'il est scandaleusement moral. Toute la morale gauchiste — la même que celle que July utilisait contre Me Leroy — est là pour caresser les esprits dans le sens du poil sale. Faire semblant de comprendre et de pardonner (on n'a pas rangé la guillotine pour rien) le crime ("Il arrive que les femmes n'aiment pas leurs enfants") pour mieux en renverser les effets sur le plan social. Et si, au passage, Marguerite se paie une petite autopsychanalyse sur le dos de la présumée innocente-infanticide, c'est encore mieux ! Et voilà le travail ! Duras insiste bien, et sans talent, sur la "victime" des circonstances, la femme au foyer martyre, poussée la médiocrité quotidienne à noyer son gosse. C'est pas sa faute : Christine V. n'était pas assez "à gauche". À la fois l'accuser publiquement, de toute son autorité d' "écrivain", et l'innocenter "politiquement" par la force des choses tristes.

Cette masturbation sans plaisir est une des prestations les plus répugnantes de l'époque. Le féminisme hystérique de Duras (et de toutes ses copines soixante-huitardes qu'on devine derrière) va si loin qu'elle excuse la prétendue mauvaise mère pour mieux accuser — c'est le but — le mari, véritable assassin. Ça ne lui suffit pas que Jean-Marie Villemin (elle ne le cite jamais, elle l'appelle "cet homme") ait tué son cousin (encore un présumé innocent) : son vrai crime c'est d'être un homme. D'être le mari d'une femme sublime et de la laisser faire la vaisselle ! "Regardez bien autour de vous : quand les femmes sont comme celles-ci, inattentives, oublieuses de leurs enfants, c'est qu'elles vivent dans la loi de l'homme. »

Duras y arrive tout doucement : si Christine avait eu le courage — ou l'occasion plutôt — de s'évader de cette "prison de liberté", elle n'aurait pas eu besoin de dégrégoryser son petit garçon ! C'est ça que ça veut dire. Pauvre vagin vosgien… Elle a reporté sa violence contre son mari sur son fils. Et voilà l'ignoble Marguerite fanée — qui n'a jamais pu faire bander qu'un faux Chinois il y a cinquante ans — qui lâche un de ses plus moisis pétales : "Aucun homme au monde ne peut savoir ce qu'il en est pour une femme d'être prise par un homme qu'elle ne désire pas. La femme pénétrée sans désir est dans le meurtre." Tout s'explique donc ! Elle le dit et le redit, elle ne se lasse pas de décaler tous ces crimes. La victime c'est la mère ; le meurtrier c'est le père, mais pas de son enfant, ni de son cousin : de sa femme ; et l'enfant mort — ça lui brûle les grandes lèvres de le dire, mais elle n'ose pas — ce n'est pas Grégory c'est celui que Christine V. attend en ce moment ! Dans son ventre, le prochain, voilà le plus cruel assassinat : celui qui consiste à à faire un enfant à sa femme quand on en est l'odieux mari !

Résumé : Chistine V. est sublime parce qu'elle est innocente d'être coupable. Tous les maris sont des ordures, et les enfants n'ont pas à exister. Toute justice est donc inutile. Dans cette affaire, on a touché la monstruosité de l'innocence. On est allé jusqu'à "la couche derrière le mal". Fin. Les intertitres sont de la rédaction.

On dit que je suis haineux ? Mais c'est ça la haine, la vraie haine de tout : des femmes, des hommes, des enfants, du sexe, de l'amour, de la maternité, de la paternité, de la littérature, de la réalité, des Vosges et de la vérité. C'est la haine de la vie et même la haine de la mort ce qui, pour un écrivain, est la lâcheté suprême, celle de l'être détestable qui n'a pas le courage de se détester lui-même. »

Marc-Édouard Nabe, Journal intime, tome 2, Tohu-Bohu

 

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Un certain étourdissement de la sensibilité

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« Lorsque d'aussi grandes expositions d'artistes incompatibles sont reçues avec autant d'intérêt et d'appréciation, il est clair que ceux qui les visitent ont acquis une forte immunité. C'est pour avoir perdu son mordant que l'art est si bien reçu [par] un public dont l'appétit sans cesse croissant n'a d'égal que l'atrophie progressive des organes réceptifs.
Des propos tenus par Wagner à la veille de sa mort, transcrits par Cosima, allaient déjà dans le même sens, rapporté à la musique : "Hier, entendant parler de la popularité de Manfred de Schumann à Munich, il dit : ils éprouvent tout à fait le même sentiment qu'en écoutant Tristan, un certain étourdissement de la sensibilité, car il n'y a pas trace de jugement artistique."

Au contraire, l'auditeur du XVIIIe siècle, enthousiasmé par l'audace d'une modulation en trois notes pour passer d'un ton au ton relatif, se sentait de connivence avec le compositeur. La compétence musicale était alors à la mode comme l'attestent le nombre, l'étendue et la richesse des articles qui s'y rapportent dans l'Encyclopédie. Le public cultivé connaissait les écrits de Rameau, de d'Alembert, de Jean-Jacques Rousseau. Une théorie musicale en plein révolution jouissait dans l'opinion, de pair avec le système de Newton (des passerelles existaient entre les deux), d'une faveur comparable à celle par quoi s'explique à présent le succès commercial des livres de vulgarisation sur l'astrophysique et la cosmologie. Il y a toutefois une différence : nous lisons les ouvrages de vulgarisation scientifique en consommateurs, tandis que les habitués des salons où on jouait de la musique (et qui, pour beaucoup d'entre eux, en jouaient eux-mêmes) jugeaient plus ou moins en praticiens. Entre l'auditeur et le compositeur, la cloison n'était pas aussi étanche qu'elle l'est devenue aujourd'hui. »

Claude Lévi-Strauss, Regarder, écouter, lire

 

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07/07/2014

Mon sujet est le discours que les dominants tiennent sur la réalité

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« Élisabeth Lévy : Nous entendons [cette chanson-là] sur tous les tons : il n’y a pas d’autre avenir possible, pas plus qu’il n’y a d’autre politique, d’autre point de vue ou d’autre choix possibles que ceux que nous assigne le parti du Bien. Mais ce n’est pas parce que celui-ci a décrété la fin de l’Histoire que nous devons l’accepter comme une vérité et encore moins nous y conformer. Mais nous y reviendrons.

Philippe Muray : La maîtresse expression du nihiliste élitocrate est : il faut aller plus loin. Et on sait ce que ça signifie : il s’agit d’anéantir tout ce qui paraît se dresser encore sur la route de la modernité, et cela dans tous les domaines. Ainsi l’organisation Mix-Cité, commentant dans Le Monde les décisions de la susnommée Ségolène Royal et sa brillante réforme du droit de la famille, surenchérissait : « Comment ne pas contester l’idéologie maternaliste selon laquelle les enfants seraient la propriété exclusive des mères ? Allons plus loin ! Demandons-nous aussi au nom de quoi les enfants seraient la propriété privée des parents ? » Ce qui nous ramène à l’idéal des charmants régimes totalitaires où, en effet, les enfants n’étaient pas la propriété de leurs parents mais de l’État et de l’idéologie. Qui dit que le retour à cet idéal est impossible ? [Cette] guerre s’effectue en brandissant l’arme de l’inéluctable. Et c’est aussi cette arme que l’on agite, en ce moment même, pour courber les populations au plus vite et les soumettre à la torture odieuse et même inutile de l’euro. Toutes les anciennes conditions de vie, tous les anciens rapports entre les êtres sont présentés comme des liens archaïques à trancher afin de parachever une libération qui n’est en fait qu’une destruction de ce qui subsistait encore de minimalement vivable dans l’existence. La common decency, à si juste titre chère à Orwell et aujourd'hui à Jean-Claude Michéa, subsiste encore peut-être un peu dans les « couches populaires », mais elle dépend d’un ordre symbolique (le vieil ordre œdipien structureur de l’humanité) que tout concourt à faire disparaître.

(...)

Le plouc émissaire sent, mais sans avoir tout à fait les moyens de l’exprimer, hélas, que toutes les modernisations sont désormais des complots meurtriers, et qu’il est encore davantage le sinistré des élites et de ses affreuses inventions que le sinistré des eaux en folie. Il sait donc aussi que l’instinct de conservation, sans ambiguïté, se trouve dans le camps de la vie et de la liberté. C’est une sorte d’espoir, si vous voulez. Une sorte seulement.

Élisabeth Lévy : Il y a une logique à observer le monde à travers le prisme déformant de la propagande médiatique dès lors que cette propagande est conforme à la réalité. Mais n’est-ce pas aussi adopter le langage des gagnants ?

Philippe Muray : Mais ce que disent les gagnants (qui ne gagnent d’ailleurs plus jamais que sur les ruines qu’ils ont produites, et on peut préférer d’autres sortes de victoires) ce n’est pas autre chose que le monde tel qu’ils le recréent ; ou, mieux encore, ce que disent les gagnants du monde, c’est le monde tel qu’ils le veulent. Mon sujet est le discours que les dominants tiennent sur la réalité (et qui, peu à peu, devient la réalité), non ce qui reste encore de réalité non transformée. Médias, presse, etc., forment l’espèce de magma discursif à travers lequel s’exprime une volonté de transformation que l’on peut essayer de lire, de traduire, de comprendre comme une sorte de texte collectif officiel et perpétuel, avec ses intentions affichées, ses sous-entendus, ses projets masqués, ses intentions non conscientes, ses actes manqués, etc. Toute entreprise critique véritable commence par la critique de la vie quotidienne. La vie quotidienne d’aujourd'hui est cette imposture montée sur roulettes dont l’éloge, infatigablement, se développe dans les médias. Étudier cet éloge, qui se substitue peu à peu à la vie réelle, en entreprendre la critique systématique, montrer que l’éloge remplace progressivement la plus élémentaire compréhension, démontrer que c’est parce qu’eux-mêmes ne comprennent plus rien que les laudateurs du présent crient si fort, c’est déjà empêcher que la fiction des gagnants soit tout à fait gagnante. L’Histoire, prétend-on, a toujours été racontée par les vainqueurs ? Il n’est pas absolument sûr que cela soit vrai de la post-Histoire. En tout cas, de ce côté-là, rien n’est encore joué. Ce que disent la presse et les médias, mais sans savoir qu’ils le disent, et même en en faisant toujours la plus vibrante apologie, c’est le délabrement de la raison. Ce délabrement, comme le reste, est une entreprise qui ne doit jamais s’arrêter (« Allons plus loin ! »). Le nouveau monde onirique doit apparaître comme seul réel et digne de foi. »

Philippe Muray, Festivus Festivus, Conversations avec Elisabeth Levy

 

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Je n’oublie pas non plus que Satan, en hébreu, c’est l’accusateur

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« Elisabeth Levy : Cet égalitisme n’était-il pas la conséquence inéluctable de l’égalité des conditions ? a partir du moment où l’on avait supprimé les hiérarchies de la naissance, pouvait-on éviter que l’on s’attaque à toutes les hiérarchies, que de l’égalité entre le riche et le pauvre, l’on aboutit à l’identité entre le sage et le sot, entre Proust et Paolo Coelho ? Comment être égalitaire sans sombrer dans l’égalitisme : c’est l’un des aspects du problème posé aux gens des Lumières que nous sommes – quoi qu’on en dise...

Philippe Muray : En effet. L’égalité devenant égalitisme, c’est Lucifer, le "fils de l’Aurore", devenant prince des Ténébres. Quand je disais qu’il fallait inventer une nouvelle démonologie, et que cela me paraissait être la mission de la littérature d’aujourd’hui, sous quelque forme que ce soit, c’est à l‘égalitisme démoniaque contemporain que je songeais, qui fait pousser partout les associations de persécution (les "Observatoires" et autres "SOS-Machintruc" communautaristes où abolir sous toutes ses formes l’envie du pénal) ; et je n’oublie pas non plus que Satan, en hébreu, c’est l’accusateur. Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de lutte parkinsonienne contre les discriminations s’annonce comme une immense accumulation d’associations. Le nom de Satan, aujourd’hui comme hier, est "légion", mais aujourd’hui, ces légions s’appellent associations. Il est du devoir de tout être humain de les traiter pour ce qu’elles sont : des ennemis absolus de ce qu’il reste d’humain dans l’homme actuel, qu’elles entendent achever, c’est à dire transformer par divers moyens (chantage vis-à-vis des gouvernements, manipulations, mensonges grossiers, répétition du mensonge, glapissements hallucinantes de cette immense piétaille de dupes de toutes les impostures que l’on appelle militants, etc.) en lyncheur professionnel, en accusateur public permanent, en obsédé de la réparation, en suppôt de Satan. Ce qu’il est déjà pour une bonne part d’ailleurs. Je ne vois pas pourquoi tout le monde respecte ces associations, qui ne sont que des sociétés malfaisantes, des congrégations de succubes, des couvents maudits, des cyber-syndicats du crime. Il en va du salut de l’humanité de détruire ces groupes d’oppression, qui n’existent que pour se porter partie civile au nom d’on ne sait quelle légitimité qui n’est renforcée que par la faiblesse, la lâcheté, l’infantilisme des législateurs contemporains, et dont l’idéologie relève de la camisole civique. Ce sont les hyènes de la comédie de la justice. Dans toutes les affaires modernes, par exemple, celle de « pédophilie » aujourd’hui, et demain celles d’ "homophobie", vous verrez ramper vers la barre, sur leur ventre galeux, poil hérissé, museau aplati et bavant, croupe plus bas que le garrot, oreilles couchées, pelage jaunâtre, les avocats des associations, portées partie civile quand il serait tellement plus agréable de les savoir portées disparues. »

Philippe Muray, Festivus Festivus, Entretien avec Elisabeth Levy

 

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Un phénomène de mémoire

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« Quelquefois je n’avais rien entendu, étant dans un de ces sommeils où l’on tombe comme dans un trou duquel on est tout heureux d’être tiré un peu plus tard, lourd, surnourri, digérant tout ce que nous ont apporté, pareilles aux nymphes qui nourrissaient Hercule, ces agiles puissances végétatives, à l’activité redoublée pendant que nous dormons.

On appelle cela un sommeil de plomb, il semble qu’on  soit devenu, soi-même, pendant quelques instants après qu’un tel sommeil a cessé, un simple bonhomme de plomb. On n’est plus personne. Comment alors, cherchant sa pensée, sa personnalité comme on cherche un objet perdu, finit-on par retrouver son propre moi plutôt que tout autre ? Pourquoi, quand on se remet à penser, n’est-ce pas alors une autre personnalité que l’antérieure qui s’incarne en nous ? On ne voit pas ce qui dicte le choix et pourquoi, entre les millions d’êtres humains qu’on pourrait être, c’est sur celui qu’on était la veille qu’on met juste la main. Qu’est-ce qui nous guide, quand il y a eu vraiment interruption (soit que le sommeil ait été complet, ou les rêves entièrement différents de nous) ? Il y a eu vraiment mort, comme quand le cœur a cessé de battre et que des tractions rythmées de la langue nous raniment. Sans doute la chambre, ne l’eussions-nous vue qu’une fois, éveille-t-elle des souvenirs auxquels de plus anciens sont suspendus ; ou quelques-uns dormaient-ils en nous-mêmes, dont nous prenons conscience. La résurrection au réveil – après ce bienfaisant accès d’aliénation mentale qu’est le sommeil – doit ressembler au fond à ce qui se passe quand on retrouve un nom, un vers, un refrain oubliés. Et peut-être la résurrection de l’âme après la mort est-elle concevable comme un phénomène de mémoire. »

Marcel Proust, La recherche du temps perdu vol. 3 - Le côté de Guermantes

 

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En nous-mêmes

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« Les poètes prétendent que nous retrouvons à un moment ce que nous avons jadis été en rentrant dans telle maison, dans tel jardin où nous avons vécu jeunes. Ce sont là des pèlerinages fort hasardeux desquels on compte autant de déceptions que de succès. Les lieux fixes, contemporains d’années différentes, c’est en nous-mêmes qu’il faut les trouver. »

Marcel Proust, La recherche du temps perdu vol. 3 - Le côté de Guermantes

 

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Le monde moderne est plein d’anciennes vertus chrétiennes devenues folles

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« Le monde moderne n’est pas méchant ; sous certains aspects, le monde moderne est beaucoup trop bon. Il est plein de vertus désordonnées et décrépites. Quand un certain ordre religieux est ébranlé (comme le fut le christianisme à la Réforme), ce ne sont pas seulement les vices que l’ont met en liberté. Les vices, une fois lâchés, errent à l’aventure et ravagent le monde. Mais les vertus, elles aussi, brisent leur chaînes, et le vagabondage des vertus n’est pas moins forcené et les ruines qu’elles causent sont plus terribles. Le monde moderne est plein d’anciennes vertus chrétiennes devenues folles. Elles sont devenues folles, parce qu’isolées l’une de l’autre et parce qu’elles vagabondent toutes seules. C’est ainsi que nous voyons des savants épris de vérité, mais dont la vérité est impitoyable ; des humanitaires éperdus de pitié mais dont la pitié (je regrette de le dire) est souvent un mensonge. Mr Blatchford attaque le christianisme parce que Mr Blatchford a la monomanie d’une seule vertu chrétienne, d’une charité purement mystique et presque irrationnelle. Il a une idée étrange : c’est qu’il rendra plus facile le pardon des péchés en disant qu’il n’y a pas de péchés. (...)

Or il est un cas beaucoup plus remarquable que cet antagonisme de la vérité et de la pitié, c’est celui de la déformation de l’humilité. (...)

Ce dont nous souffrons aujourd’hui, c’est d’un déplacement vicieux de l’humilité. La modestie a cessé tout rapport avec l’ambition pour entrer en contact intime avec la conviction, ce qui n’aurait jamais du se produire. Un homme peut douter de lui-même, mais non de la vérité, et c’est exactement le contraire qui s’est produit. Aujourd’hui, ce qu’un homme affirme, c’est exactement ce qu’il ne doit pas affirmer, c’est-à-dire lui-même ! Ce dont il doute est précisément ce dont il ne doit pas douter : la Raison Divine. (...)

Le nouveau sceptique est si humble qu’il doute de pouvoir apprendre. Ainsi nous aurions tort de nous presser de dire qu’il n’y a pas d’humilité propre à notre époque. Le vérité est qu’il en existe une, très réelle, mais pratiquement plus morbide que les farouches humiliations de l’ascète. L’ancienne humilité était un aiguillon qui empêchait l’homme de s’arrêter et non pas un clou dans la chaussure qui l’empêche d’avancer, car l’ancienne humilité faisait qu’un homme doutait de son effort et cela le poussait à travailler avec encore plus d’ardeur. Mais la nouvelle humilité fait que l’homme doute de son but, ce qui l’arrête tout à fait.

A tous les coins de rue nous sommes exposés à rencontrer un homme qui profère cette assertion frénétique et blasphématoire : "Je puis me tromper". Chaque jour vous croisez quelqu’un qui vous dit : « Bien entendu, mon opinion n’est peut-être pas la bonne ». Or son opinion doit être la bonne, sinon, elle n’est pas son opinion. Nous sommes en train de créer une race d’homme d’une tournure d’esprit trop modeste pour croire à la table de multiplication ! Le danger est de voir des philosophes qui doutent de la pesanteur comme d’une simple fantaisie de leur cerveau. Les railleurs d’autrefois étaient trop orgueilleux pour être convaincus, mais ceux-ci sont trop humbles pour l’être. Les doux posséderont la terre mais les sceptiques modernes ont tant de douceur qu’ils ne veulent même plus réclamer leur héritage. (...)

Le péril, c’est que l’intelligence humaine est libre de se détruire elle-même. De même qu’une génération pourrait empêcher l’existence même de la génération suivante, si tous ceux qui la composent entraient au couvent ou se jetaient dans la mer, ainsi, un petit nombre de penseur peut, jusqu’à un certain point, faire obstacle à la pensée dans l’avenir en enseignant à la génération suivante qu’il n’y a rien de valide dans aucune pensée humaine.

Il est vain de parler de l’antagonisme de la raison et de la foi. La raison est elle même un sujet de foi. C’est un acte de foi de prétendre que nos pensées ont une relation quelconque avec une réalité quelle qu’elle soit. Si vous êtes vraiment un sceptique, vous devrez tôt ou tard vous poser la question : "Pourquoi y aurait-il quelque chose d’exact, même l’observation et la déduction ? Pourquoi la bonne logique ne serait-elle pas aussi trompeuse que la mauvaise ? L’une et l’autre ne sont que des mouvements dans le cerveau d’un singe halluciné ?". Le jeune sceptique dit : "J’ai le droit de penser par moi-même". Mais le vieux sceptique, le sceptique complet dit : "Je n’ai pas le droit de penser par moi-même. Je n’ai pas le droit de penser du tout."

Il y a une pensée qui arrête la pensée, et c’est à celle là qu’il faut faire obstacle. C’est le mal suprême contre lequel toute autorité religieuse a lutté. Ce mal n’apparaît qu’à la fin d’époques décadentes comme la notre...

Car nous pouvons entendre le scepticisme brisant le vieil anneau des autorités et voir au même moment la raison chanceler sur son trône. Si la religion s’en va, la raison s’en va en même temps. Car elles sont toutes les deux de la même espèce primitive et pleine d’autorité. Elles sont toutes les deux des méthodes de preuves qui ne peuvent elles-mêmes être prouvées. Et en détruisant l’idée de l’autorité divine, nous avons presque entièrement détruit l’idée de cette autorité humaine par laquelle nous pouvons résoudre un problème de mathématiques. Avec une corde longue et résistante, nous avons essayé d’enlever sa mitre (la religion) à l’homme pontife et la tête (la raison) a suivi la mitre. »

Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie

 

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06/07/2014

Une vie secrète

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« J’ai beaucoup rêvé d’arriver seul dans une ville étrangère, seul et dénué de tout.

J’aurais vécu humblement, misérablement même. Avant tout j’aurais gardé le secret. Il m’a toujours semblé que parler de moi-même, c’était précisément trahir quelque chose de moi, et le plus précieux...

(...)

Il me reste toujours ce goût du secret. Je cache les actions les plus insignifiantes pour ce plaisir d’avoir une vie à moi seul. Une vie secrète. Non pas une vie solitaire, mais une vie secrète. »

Jean Grenier, Les Îles

 

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L'ivresse

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« Si quelque chose devait me manquer, ce ne serait pas le vin mais l'ivresse. Comprends-moi : des ivrognes vous ne connaissez que les malades, ceux qui vomissent, et les brutes, ceux qui recherchent l'agression à tout prix ; il y a aussi les princes incognito qu'on devine sans parvenir à les identifier. Ils sont semblables à l'assassin du fameux crime parfait, dont on ne parle que lorsqu'il est raté. Ceux-ci, l'opinion ne les soupçonne même pas; ils sont capables des plus beaux compliments ou des plus vives injures ; ils sont entourés de ténèbres et d'éclairs; ce sont des funambules persuadés qu'ils continuent de s'avancer sur le fil alors qu'ils l'ont déjà quitté, provoquant les cris d'admiration ou d'effroi qui peuvent les relancer ou précipiter leur chute ; pour eux, la boisson introduit une dimension supplémentaire dans l'existence, surtout s'il s'agit d'un pauvre bougre d'aubergiste comme moi, une sorte d'embellie, dont tu ne dois pas te sentir exclue d'ailleurs, et qui n'est sans doute qu'une illusion, mais une illusion dirigée...
Voilà ce que je pourrais regretter. Tu vas imaginer que je fais l'éloge de l'ivresse parce que Fouquet traverse une mauvaise passe actuellement et que ce garçon me plaît bien, en cela tu aurais raison pour une bonne part ; autrement, je ne me permettrais pas d'agiter ce spectre devant toi, que j'ai tant tourmentée autrefois et qui m'as entouré d'une façon si vaillante. »

Antoine Blondin, Un singe en hiver

 

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La docte ignorance dans l'univers du on dit

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« Il est remarquable que dans le désordre, la démesure, ou l'affaiblissement des liens sociaux réels, le goût de la statistique, qui est une mesure au sein de l'indéterminé, la moindre et la dernière certitude de l'homme se développe sans cesse ; il s'adapte à l'indétermination de l'opinion publique ; il est la docte ignorance dans l'univers du on dit ; le chiffre est ce que l'on sait quand on ne sait rien. »

Pierre Boutang, La Politique

 

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Surtout pas pour l'améliorer

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« Je ne veux pas croiser le fer avec la société, et surtout pas pour l'améliorer, par exemple, mais la tenir à distance, quoi qu'il advienne. Je supprime mes services, mais aussi mes exigences. »

Ernst Jünger, Eumeswil

 

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Il faut user la vie

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« Avant de la quitter, il faut user la vie. Le moment d’être sage est voisin du tombeau. »

André Chénier, Elégies

 

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