05/02/2017
Théorie du Genre, la Papesse déboulonnée
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et
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Publié dans Le Point n°: 2315, du 12 Janvier 2017
Pilori. Un Livre démonte l'oeuvre de la philosophe américaine Judith Butler, pourtant célébrée pour ses travaux sur les minorités.
Avec son ouvrage phare, Trouble dans le genre, publié en 1990 aux Etats-Unis et traduit pour la première fois en France en 2005, la philosophe américaine Judith Butler est devenue la représentante la plus connue et la plus subversive des gender studies, ce courant des sciences humaines qui vise à distinguer le sexe physiologique de l’identité sociale et psychique. Elle-même lesbienne militante, la chercheuse récuse la norme biologique et invite à s’interroger sur les comportements sexuels marginaux — transgenre, transsexualisme, bisexualité, travestisme — pour mieux bousculer l’ordre hétérosexuel supposé culturellement établi. Epouvantail de La Manif pour tous, mais largement célébrée par une certaine gauche non seulement pour son travail sur le genre mais aussi pour sa défense résolument antiuniversaliste de toutes les minorités, Butler est, en France, une figure incontournable dont on débat des options de fond mais rarement de la légitimité intellectuelle. Or la psychanalyste et philosophe Sabine Prokhoris, qui a lu attentivement la prolifique œuvre butlérienne, ose aujourd’hui dénoncer une imposture. Dans un ouvrage extrêmement critique, Au bon plaisir des « docteurs graves » (PUF), elle relève les approximations, raisonnements tautologiques, contresens et fausses citations qui jalonnent, selon elle, les ouvrages de Judith Butler et s’interroge sur leur réception fascinée en France. Les défenseurs enamourés de la philosophe américaine l’ont-ils vraiment lue ? Interview.
Le Point : Comment vous-êtes-vous intéressée à Judith Butler ?
Sabine Prokhoris : Ayant travaillé sur les mêmes questions et connaissant ses positions sur les droits LGBT, j’avais un a priori plutôt favorable. J’avais déjà lu, plus ou moins attentivement, la plupart de ses ouvrages, mais je dois dire qu’ils ne m’avaient guère convaincue. Et puis j’ai découvert sa tribune publiée dans Libération au lendemain des attentats du 13 novembre (« Une liberté attaquée par l’ennemi et restreinte par l’État » - Libération, 19 novembre 2015), et j’ai senti monter alors une forte colère, mêlée de consternation intellectuelle. Traiter du deuil collectif que nous étions en train de vivre comme elle le faisait — en le soupçonnant d’exprimer un partage entre les vies « dignes d’être pleurées » (les nôtres, ici, en Occident) et celles qui ne les seraient pas, en assénant des absurdités sur les bénéfices que les Parisiens auraient tirés ce soir-là de leur soumission supposée à l’état d’urgence —, j’ai trouvé cela obscène et stupide. Or j’ai eu le sentiment que ce qu’elle disait là n’était pas un accident, mais résonnait au contraire avec l’ensemble de ses travaux. Il m’a donc semblé nécessaire d’aller y voir de plus près. D’où ce travail, qui fut très ingrat à mener.
Le Point : Pourquoi ?
Sabine Prokhoris : Parce qu’elle est le plus souvent illisible, qu’elle jargonne en permanence, et je pense que beaucoup de gens, lisant Judit Butler, en concluent qu’ils sont trop bêtes pour comprendre, alors que sa prose est réellement absconse. Cela fait partie du tour de passe-passe : vous ne saisissez pas, c’est donc que tout cela est très intelligent. Et surtout parce que ses raisonnements théoriques sont précieux, donc compliqués à suivre. Mais elle est le chevalier blanc des « minorités » la cible de la droite conservatrice. La Manif pour tous en tête, et cela semble lui conférer une légitimité intellectuelle et politique automatique.
Le Point : Vous parlez d’imposture, c’est fort…
Sabine Prokhoris :Oui, mais les falsifications qu’elle inflige aux textes qu’elle utilise pour ses démonstrations — la plus flagrante étant celle qu’elle fait subir au philosophe Emmanuel Levinas, à qui elle attribue d’ignobles propos — sont un signe. Il y a des règles au débat intellectuel, et elle ne les respecte pas.
Le Point : Freud, avec sa théorie du complexe d’Œdipe, serait d’après Judith Butler l’un des grands artisans de la domination hétérosexuelle.
Sabine Prokhoris : Que la vulgate psychanalytique, qui véhicule une version figée et simpliste de ce fameux complexe d’Œdipe, soit au service d’un discours normalisateur, c’est un fait indéniable, et je n’ai cessé de le critiquer moi-même. Mais, malgré le conservatisme bien réel de la corporation, je crois, au contraire de ce qu’affirme Butler, que la psychanalyse freudienne a beaucoup contribué à dissoudre les supposées « évidences » sur la question sexuelle.
Le Point : Pourquoi le féminisme de Judit Butler vous semble-t-il problématique ?
Sabine Prokhoris : Pour répondre de façon très sommaire, parce qu’une Afghane qui prétendrait, dans le contexte de l’après-11 Septembre, jeter aux orties sa burqa (une tenue traditionnelle issue d’une culture patriarcale rigoriste et qui fut imposée par le régime taliban), sera considérée, dans le « féminisme » butlérien qui est antiuniversaliste, comme une complice de l’impérialisme « occidental »…
Le Point : Si sa pensée est aussi faible que vous le dénoncez, comment expliquer l’estime dont elle jouit, aux Etats-Unis et aujourd’hui en France ?
Sabine Prokhoris : L’adhésion à un discours, fût-elle parée du plus chatoyant plumage académique, ne constitue pas à mes yeux une preuve de validité. Et ce succès planétaire demeure pour moi une énigme. Mais il est vrai qu’en philosophie une ère « post-vérité » prospère depuis plusieurs décennies, notamment outre-Atlantique. On y postule, à la suite de Roland Barthes et des quelques autres, que le réel est tout entier réductible à des discours et à des constructions rhétoriques. La critique « radicale » que met en œuvre la pensée de Butler, qui consiste juste à « déconstruire » ce qui n’est qu’un « récit », au moyen d’une rhétorique concurrente plus puissante, plus autoritaire, plus habile, plus intimidante en somme, se suffirait en quelque sorte à elle-même. Dès lors, peu importe la vérité, la force du discours butlérien tient à sa réception fascinée. Moins vulgaire que Trump, certes. Mais pas moins inquiétant dans la production de maîtres à ne pas penser.
EXTRAIT
« Vous n’y comprenez goutte ? Cela vous paraît quelque peu embrouillé ? Vous saisisssez mal comment la sexualité (celle qui est minoritaire) et la religion (celle supposée des "dominés") se trouvent mises sur le même plan ? Vous ne saisissez pas vraiment non plus en quoi la laïcité en France et la condamnation par le pape de l’homosexualité vont de pair (d’autant que, soit dit en passant, le pape considère, tout comme J. Butler, que "la France exagère la laïcité") ? Vous avez même peut-être l’impression que l’auteure a sélectionné quelques notions en débat aujourd’hui, les a fourrées pêle-mêle dans un chapeau, a vigoureusement secoué le tout, pour ensuite piocher là-dedans et les assembler ensuite au petit bonheur ? Vous n’y êtes pas. Le rouleau compresseur idéologique de l’amalgame est ici un outil nécessaire, et tant pis si la mixture est indigeste. L’idée générale de ces lignes, qui viennent conclure un texte extraordinairement confus — une confusion qui n’est pas imputable à une mauvaise traduction —, est somme toute assez simple, sinon simpliste : que les "minorités", qu’une seule et unilatérale entreprise d’assujettissement discriminent, s’allient au lieu de se laisser dresser les unes contre les autres par le pouvoir qui les constitue comme telles (c’est bien toujours la même histoire). »
Judith Butler (Cliquez sur la photo)
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SOURCE : par Violaine de Montclos pour LE POINT
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29/01/2017
La chimère du service militaire
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Chose improbable il y a encore quelques années, certains dirigeants politiques appellent aujourd’hui au retour du service militaire. Une attitude qui tient davantage de l’effet d’annonce que d’une vision réaliste de la Défense française alors que le général Vincent Desportes vient d’affirmer que « l’armée manque de tout ».
C’était au printemps 2007. En pleine campagne présidentielle, Ségolène Royal, avec ce mélange d’ingénuité et de calcul politique qui la caractérise, déclarait alors à propos des finances de l’État : « J’en fais ici le serment, cette marge de manœuvre supplémentaire, cette valeur-là, n’ira pas à la Défense nationale mais ira à l’Éducation nationale. » Une déclaration qui préfigure déjà la saignée des budgets militaires entamée par Nicolas Sarkozy, poursuivie ensuite en début de présidence Hollande. Depuis, dix années ont passé et la France est « en guerre » selon les mots de François Hollande, affirmation prononcée lors du solennel discours devant le Congrès du 16 novembre 2015. Face à ce retour violent de l’Histoire dans leur vie quotidienne, les Français semblent aujourd’hui vouloir le retour d’un pouvoir régalien fort même si celui-ci s’évapore un peu plus chaque jour.
Discours devant le Congrès du 16 novembre 2015
Ainsi, les treillis et les Famas retrouvent grâce aux yeux des Français. « Les jeunes doivent retrouver le chemin des casernes », tel est le nouveau son de cloche. Pour certains politiques et intellectuels, le retour du service militaire serait la solution miracle pour palier aux maux qui touchent notre pays. Dans Le Jour où la France tremblera (2006) Guillaume Bigot proclame naïvement : « Jeunes banlieusards et enfants des beaux quartiers porteraient le même uniforme et seraient placés dans un même cadre. Dans identité, il y a identique. Dans notre devise, il y a aussi égalité et fraternité. Nombre d’études en attestent, là où le service militaire a été maintenu, les djihadistes sont proportionnellement moins nombreux. Ce rétablissement du service militaire peut s’opérer en un an (les officiers et les sous-officiers sont à recruter). Cette décision audacieuse mais réaliste réduirait le risque djihadiste, casserait la dynamique communautariste et ressouderait la jeunesse. »
Soldats de l’opération Sentinelle
Même le Parti socialiste, pourtant peu sensible au charme de la Grande Muette, retrouve le goût des valeurs martiales. Jean-Christophe Cambadélis, son secrétaire général, a déclaré en novembre 2016 : « Alors que la France se trouve confrontée à un défi lourd et durable, les conditions requises par la loi pour rétablir la conscription semblent pour la première fois depuis 20 ans réunies. » Pour combler les effectifs de l’armée mobilisés dans le cadre de l’opération Sentinelle, le service militaire se présente comme un remède miracle. Disparu des radars il y a dix ans car jugé poussiéreux et anachronique, il redevient un thème important du débat politique et probablement de la future campagne présidentielle, bien qu’il ait depuis la Révolution française clivé la société.
L’appel du soldat
Sous l’Ancien Régime, les armées sont composées de professionnels. La Révolution française, dans le domaine militaire comme dans les autres, va opérer une profonde rupture. Face à l’invasion étrangère, alors que le sang du roi vient tout juste de couler sur l’échafaud, la Convention nationale déclare, le 24 février 1793, la levée en masse. Le recrutement de 300 000 hommes est décidé afin de se porter aux frontières menacées. Le citoyen devient dès lors le premier rempart du pays. Toutefois, c’est sous le Directoire que voit le jour la première loi de conscription : la loi Jourdain-Delbrel, votée le 5 septembre 1798. Son article 1 proclame que « Tout Français est soldat et se doit à la défense de la patrie ». C’est l’acte de naissance du service militaire sur lequel s’appuiera jusqu’en 1815 Napoléon Bonaparte pour asseoir la puissance militaire française et sa domination sur l’Europe. Le système fonctionne cependant encore sur le tirage au sort et les plus aisés peuvent se faire remplacer moyennant paiement. Tout le monde n’est donc pas appelé à servir.
Fragment de la bataille de Champigny – Le fond de la giberne
Sous la Restauration, l’armée, toujours bonapartiste, est considérée avec méfiance et Louis XVIII supprime la loi Jourdain-Delbrel. C’est la IIIe République qui mettra en place le service militaire moderne, tel que beaucoup de Français l’ont connu au XXe siècle. Après la débâcle de 1870 s’ensuit la Commune de Paris, douloureuse guerre civile qui marque profondément le pays et son élite bourgeoise assoiffée d’ordre. La nouvelle République, alors divisée et dominée par les monarchistes au Parlement, s’unit autour des grandes lois militaires. Même les plus antimilitaristes sont maintenant convaincus de l’utilité du service militaire pour préparer la revanche mais surtout pour ressouder le pays autour de ses soldats. Ainsi, le duc d’Audiffret-Pasquier déclare à l’Assemblée sous les applaudissements unanimes : « Et, quand, à côté de cela, nous voyons le spectacle que nous donne notre armée. Quand nous nous souvenons que c’est elle qui nous a sauvés en 1848, que c’est elle qui nous a sauvés en 1871. Nous nous demandons si ce n’est pas là l’école où il faut envoyer ceux qui paraissent l’avoir oublié, apprendre comment on sert […] son pays. Que tous nos enfants y aillent […] et que le service obligatoire soit la grande école des générations futures ! »
Un outil de contrôle social
Au-delà de la préparation d’une future guerre contre l’Allemagne, l’armée est un outil au service du nouveau régime qui sert à étouffer au cœur de la nation toute étincelle révolutionnaire. Le sabre contre l’anarchie. Selon le nouveau pouvoir, c’est donc à partir de l’armée que naîtra une nation ressoudée après les divisions de la Commune, nation prête à affronter les menaces extérieures. Comme aujourd’hui, d’anciens pacifistes semblent alors convaincus des bienfaits de l’armée. On y voit Jules Ferry, pilier de la nouvelle République, écrire : « Vous rappelez-vous ces vagues aspirations vers le désarmement général, le détachement manifeste de tout esprit militaire, cette tendance à la création d’une sorte de garde nationale universelle qui caractérisaient la démocratie d’alors ? Ces idées-là eurent des partisans ; plusieurs d’entre nous les ont professées, y ont incliné, s’y sont laissé prendre. Mais, je vous le demande, en est-il un seul aujourd’hui qui n’ait été converti par les événements ? Ce pays a vu la guerre de 1870 ; il a tourné le dos pour jamais à ces utopies périlleuses et décevantes. » Mais c’est quelques années plus tard, en 1905, qu’est votée la loi qui met en place le service militaire comme la France le connaîtra jusqu’en 1997, date de sa suspension par Jacques Chirac.
Charles Péguy en uniforme, à droite
Cette nouvelle loi de 1905 instaure un service de deux ans et supprime le système de tirage au sort, tout en interdisant, dans un souci égalitaire, toute exemption autre que médicale. En plus d’être un outil au service de la revanche face à la ligne bleue horizon qui occupe l’imaginaire de tous les jeunes Français, le service militaire devient donc un moyen de pacification et d’adhésion envers une République encore fragile. L’école et les casernes, dans lesquelles on enseigne les valeurs militaires, servent ainsi à former des générations de républicains prêts à mourir pour la France. Verdun sera la preuve de l’incroyable efficacité de cette éducation patriotique au service de la patrie. En 1913, alors que l’ombre de la guerre plane déjà, on décide de prolonger le service à trois ans, ce qui amène des débats fratricides dans lesquels s’affronteront Péguy et Jaurès. Quelques années plus tard, Bernanos, dans La France contre les robots, rejette lui radicalement cette institution qu’il considère comme une « idée totalitaire ».
Aujourd’hui, ce n’est pas la Défense nationale qui motive le rétablissement du service militaire. Il est plutôt perçu comme un substitut à l’éducation, comme un moyen de combler les défaillances de notre société. Mais cette volonté risque de se fracasser sur l’implacable réalité budgétaire. Rétablir le service militaire impliquerait en effet, selon les experts, un coût de 5 ou 6 milliards d’euros pour incorporer les 800 000 jeunes hommes et femmes d’une classe d’âge. Or, le budget de l’armée ne sera pas capable de prendre en charge de telles dépenses quand les soldats de métier combattent parfois avec des équipements de l’âge de leurs pères. L’autre problème insoluble est que l’armée a, depuis vingt ans, vendu un bon nombre des casernes aptes à accueillir les appelés. Il est donc bien improbable que le nouveau président, élu en mai prochain, malgré les intentions et les effets d’annonce martiaux actuels, puisse concrètement rétablir le service national. Et même l’idée défendue par Manuel Valls lors du dernier débat à la primaire de gauche d’un service civique obligatoire semble difficilement applicable en raison de la frilosité de beaucoup d’associations caritatives.
Il est donc plus réaliste d’envisager une augmentation des moyens destinés aux services militaires adaptés prévus pour les DOM-TOM et maintenant mis en place en métropole, ainsi que ses Epide (Établissements publics d’insertion de la défense) créés pour les jeunes décrocheurs scolaires souhaitant intégrer un cadre militaire dans une perspective de réinsertion professionnelle et sociale. Leurs résultats positifs, unanimement reconnus, prêchent en ce sens. L’autre mesure, élaborée par l’actuel gouvernement, est la création d’une Garde nationale. Il ne s’agit pas en réalité d’une nouvelle institution mais juste d’un renforcement de la réserve opérationnelle destinée à soutenir les armées dans leurs nombreuses missions tant en France que dans le cadre d’opérations extérieures. Le plus probable est que le futur gouvernement accentuera ses efforts pour développer cette réserve. Au risque d’en décevoir certains, les jeunes n’iront donc pas rejoindre en masse le chemin des champs de tir après un réveil au clairon. L’expression « c’est la quille ! » est donc bien appelée à disparaître.
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Le Grand Mensonge des Démocrates Américains
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On ne peut pas blâmer les Démocrates américains de tenter, par tous les moyens, de masquer la portée de leur échec en l’attribuant à toutes sortes de motifs, même les plus fantaisistes. La pilule est certes amère. Toutefois, la part la plus intéressante de cette hystérie collective est le phénomène d’auto-persuasion qui en est le moteur et que la plupart des grands médias du pays alimentent.
L’argument numéro un des perdants est la faillite du système électoral et, en particulier, le fait que la candidate démocrate, Hillary Clinton, a remporté le scrutin populaire. C’est oublier que la situation, même si elle n’est pas commune, s’est produite à quatre reprises au cours de l’Histoire des Etats-Unis, et qu’elle ne constitue pas de difficulté particulière aux termes de la Constitution. De plus, le 115ème congrès, sorti des urnes le 8 novembre 2016 et en fonction depuis le 3 janvier 2017, a vu 52% des électeurs voter pour les Républicains au Sénat et 55% à la Chambre des représentants. Il n’y a donc aucune anomalie dans les élections de 2016 de ce point de vue.
Le second argument est celui du piratage informatique à grande échelle des élections, sur ordre du président russe Vladimir Poutine, afin de faciliter l’élection de Donald J. Trump. Là encore, l’idée ne tient pas debout. Aucune trace de défaillance dans le nombre limité de votes électroniques aux élections n’a été décelée. Les services du renseignement américain, en dépit de leur conviction affichée selon lesquelles il existe un indice « haut » de confiance dans le fait qu’il y a eu piratage, ne sont pas tenus de produire le moindre élément de preuve au public, puisque de telles informations sont par essence classées « secret défense ». Il faut donc les croire sur parole.
Poussés par ceux qui demeurent sceptiques sur la manière dont on s’y prend pour influencer le résultat d’une élection par des moyens électroniques, des experts affirment, par dizaines, que le régime russe a répandu de « fausses informations » à grande échelle afin de porter atteinte à l’image de la candidate Hillary Clinton. Les mêmes sont incapables d’expliquer concrètement comment l’on s’y prend et pourquoi il faut des « hackers » pour influencer les esprits dans leur choix lors d’un vote.
Une mauvaise candidate
Hillary Clinton n’a eu besoin ni de Vladimir Poutine, ni de Julien Assange et encore moins de « pirates » pour perdre les élections de 2016. Ce ne sont pas de prétendues « fausses » informations qui ont heurté sa réputation déjà bien entamée auprès de nombreux électeurs américains, par exemple, dans l’affaire des emails, mais au contraire, son refus obstiné de prendre cette affaire au sérieux et de répondre aux interrogations. On ne voit pas, non plus, quelles « fausses » informations ont poussé l’électorat noir américain à se sous-mobiliser lors du vote du 8 novembre, ou les femmes et les plus jeunes à bouder sa candidature, après la défaite de Bernie Sanders lors des primaires démocrates.
Hillary Clinton, dont l’ambition n’est pas éteinte par la défaite, a affiché un visage froid, autoritaire et cassant, durant sa campagne. Elle n’a pas su développer un programme à la fois lisible et crédible, qui aurait pu emporter un vote, à la fois populaire et du collège électoral, si tranché qu’il n’y aurait eu aucune contestation. Comment, en effet, se revendiquer de l’héritage de Barack Obama, lorsque cet héritage peine à brandir autre chose que l’Obamacare, dont même les démocrates savent qu’il n’est pas financé au-delà de 2017 et coûte, en réalité, une fortune au regard des bénéfices qu’il apporte ?
Photo: Sur les 3145 kilomètres de frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, un tiers est déjà protégé par un mur, la poursuite de sa construction étant gelée depuis 2010, en particulier pour des raisons environnementales.
Mensonges et déni
Car au-delà de cette loi sur la santé qui n’est en rien un système généreux et égalitaire tel qu’on le pense du côté des Européens, c’est le vide. Même si le Secrétaire d’Etat John Kerry blâme ces derniers jours le gouvernement anglais, prétendant qu’il est à l’origine de l’incapacité d’Obama à agir plus concrètement et durablement au Moyen-Orient contre l’état islamique, la mémoire de tous est par chance encore assez fraîche pour se souvenir que les huit années de ce président ont été celles d’une grande hypocrisie diplomatique et militaire. Mais le déni, dans ce domaine comme dans bien d’autres, est plus puissant que la mémoire.
Les âmes sensibles sont outrées par l’idée de construire un mur à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. On a beau leur montrer les mille kilomètres de ce mur déjà construit, y compris sous le premier mandat d’Obama, cela n’a guère d’effet et n’entraîne aucune interrogation sur les raisons pour lesquelles le bon président n’en n’a pas retiré une seule pierre.
Un autre exemple est celui de la crise financière de 2008 et du retour au « plein emploi » huit ans plus tard : quel président n’aurait point réussi ce « prodige » en creusant le déficit de son pays, comme Barack Obama l’a fait, de près de 5000 milliards de dollars ?
La période 2008-2016 n’a pas non plus été celle de législations majeures en matière d’armes à feu, d’incarcérations, de recul de la peine de mort, de maîtrise des frais de scolarité ou de gestion des prêts étudiants parvenus à des hauteurs astronomiques.
Quel est donc ce succès dont les Démocrates se revendiquent au juste? Est-ce celui des villes défigurées sous les coups de boutoir du géant Amazon, à la fois propriétaire du puissant Washington Post et importateur massif de toutes les chinoiseries possibles qui inondent un marché américain ou l'on ne sait plus fabriquer une chaussette? Est-celui de Saint Zuckerberg, le jeune patron de Facebook, "le" média des "millénaires" qui ne savent plus à quoi ressemble un livre et qui entre désormais en politique avec de hautes ambitions? Est-ce celui du mariage gay et de la dépénalisation du cannabis, hautes priorités s'il en est dans un monde où tout le monde se fout des 250 000 morts du Sud Soudan, bien moins "sexy" que ceux de Syrie?
Quel héritage Obama ?
Alors, que reste t-il de cet héritage Obama, au juste ? Une posture, bien évidemment. Après George W. Bush et le mensonge irakien, n’importe quel président aurait été auréolé de gloire. On attendait d’Obama, toutefois, un peu plus qu’un physique avenant, un talent rhétorique et l’humour dont il a tant usé. Car c’est à ce que laisse un président que l’on mesure son impact, pas à sa performance sur la scène du pouvoir. L’Amérique n’est pas plus sympathique dans le monde qu’elle ne l’était avant son arrivée, ni plus sûre, ni plus égalitaire. Mais elle a la chance d’être un pays pragmatique : en ramenant au pouvoir, contre toute attente, les Républicains, elle a flanqué une gifle magistrale aux « progressistes » qui se croyaient tout permis. Elle ne l’a pas fait par folie ou par irresponsabilité mais parce qu’elle a confiance dans la capacité de ses institutions à « encaisser » ce type de choix démocratique, si perturbant soit-il pour des milieux qui s’estiment mieux éduqués et éclairés que les autres. On appelle cela l’alternance, une banalité que les Démocrates veulent aujourd’hui faire passer pour un scandale et une catastrophe.
Cherchez l’erreur.
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SOURCE : Stéphane Trano pour Marianne
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