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15/02/2012

La houle d'un corps heureux

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« Elle glissa hors de la chemise longue, tendit aux mains et aux lèvres d’Antoine les fruits tendres de sa gorge et renversa sur l’oreiller, passive, un pur sourire de sainte qui défie les démons et les tourmenteurs...
Il la ménageait pourtant, l’ébranlait à peine d’un rythme lent, doux, profond… Elle entrouvrit les yeux : ceux d’Antoine, encore maître de lui, semblait chercher Minne au-delà d’elle-même… Elle se rappela les leçons d’Irène Chaulieu, soupira "Ah ! ah !" comme une pensionnaire qui s’évanouit puis se tut, honteuse. Absorbé, les sourcils noueux dans un dur et voluptueux masque de Pan, Antoine prolongeait sa joie silencieuse. "Ah ! ah... !" dit-elle encore malgré elle. Car une angoisse progressive, presque intolérable, serrait sa gorge, pareille à l’étouffement des sanglots prêts à jaillir… Une troisième fois, elle gémit, et Antoine s’arrêta, troublé d’entendre cette Mine qui n’avait jamais crié... L’immobilité, la retraite d’Antoine ne guérirent pas Mine, qui maintenant trépidait, les orteils courbés, et qui tournait la tête de gauche à droite comme une enfant atteinte de méningite. Elle serra les poings, et Antoine put voir les muscles de ses mâchoires délicates saillir, contractés.
Il demeurait craintif, soulevé sur ses poignets, n’osant la reprendre… Elle gronda sourdement, ouvrit des yeux sauvages et cria : "Va donc !"
Un court saisissement le figea au-dessus d’elle ; puis il l’envahit avec une force sournoise, une curiosité aigüe, meilleure que son propre plaisir. Il déploya une activité lucide, tandis qu’elle tordait des reins de sirène, les yeux refermés, les joues pâles et les oreilles pourpres… Tantôt elle joignait les mains, les rapprochait de sa bouche crispée, et semblait en proie à un enfantin désespoir… Tantôt elle haletait, bouche ouverte, enfonçant aux bras d’Antoine ses ongles véhéments… L’un de ses pieds, pendant hors du lit, se leva, brusque, et se posa une seconde sur la cuisse brune d’Antoine qui tressaillit de délice...
Enfin, elle tourna vers lui des yeux inconnus et chantonna : "Ta Minne… ta Minne à toi..." tandis qu’il sentait enfin, contre lui, la houle d’un corps heureux… »

Colette, L’ingénue libertine

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14/02/2012

Ensuite il faudra procéder à une nouvelle expulsion

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« En devenant trop nombreuse et malgré le génie de ses penseurs, une société ne se perpétue qu’en sécrétant la servitude. Lorsque les hommes commencent à se sentir à l’étroit dans leurs espaces géographique, social et mental, une solution simple risque de les séduire : celle qui consiste à refuser la qualité humaine à une partie de l’espèce. Pour quelques dizaines d’années, les autres retrouveront les coudées franches. Ensuite il faudra procéder à une nouvelle expulsion. Dans cette lumière, les événements dont l’Europe a été depuis vingt ans le théâtre, résumant un siècle au cours duquel son chiffre de population a doublé, ne peuvent plus m’apparaître comme le résultat de l’aberration d’un peuple, d’une doctrine ou d’un groupe d’hommes. J’y vois plutôt un signe annonciateur d’une évolution vers le monde fini, dont l’Asie du Sud a fait l’expérience un millénaire ou deux avant nous et dont, à moins de grandes décisions, nous ne parviendrons peut-être pas à nous affranchir. Car cette dévalorisation systématique de l’homme par l’homme se répand, et ce serait trop d’hypocrisie et d’inconscience que d’écarter le problème par l’excuse d’une contamination momentanée. Ce qui m’effraie en Asie, c’est l’image de notre futur, par elle anticipée. Avec l’Amérique indienne, je chéris le reflet fugitif même là-bas, d’une ère où l’espèce était à la mesure de son univers et où persistait un rapport adéquat entre l’exercice de la liberté et ses signes. »

Claude Lévy-Strauss, Tristes tropiques

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13/02/2012

De là, la coexistence dans le monde romain des actes les plus choquants et de la plus sourcilleuse rigueur morale

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« De là, la coexistence dans le monde romain des actes les plus choquants et de la plus sourcilleuse rigueur morale. Vertu (virtus) veut dire puissance sexuelle. La virilité (la virtus) étant le devoir de l’homme libre, la marque de sa puissance, le fiasco était marqué de honte ou de démonie. Le seul modèle de la sexualité romaine est la dominatio du dominus sur tout ce qui est autre. Le viol à l’intérieur des status inférieurs est la norme. Jouir sans mettre sa puissance au service de l’autre est respectable. Une épigramme de Martial définit la norme : "Je veux une fille facile, qui avant moi se donne à mon jeune esclave et qui, à elle seule, en fasse jouir trois à la fois. Quant à celle qui parle haut (grandia verba sonantem) qu’elle aille se faire foutre par la queue d’un imbécile de Bordelais (mentula crassae Burdigalae)." Tout homme actif et non sentimental est honnête. Toute jouissance mise au service (officium, obsequium) de l’autre est servile et de la part d’un homme constitue un signe de manque de virtus, de manque de virilité, donc d’impotentia. De là, la répression féroce des fautes qui nous paraissent par contraste légères en regard d’audaces qui nous semblent au contraire révoltantes. La jeune fille violée est sans tache mais la matrone violée doit encourir la mort. Le baiser de l’affranchi à l’enfant libre est puni de mort. Valère-Maxime rapporte que Publius Maenius tua un pédagogue qui avait donné un baiser à sa fille de douze ans.

L’esclave ne peut sodomiser son maître. C’est l’interdit majeur selon Artémidore. Même, cette vision surgissant au cours d’un rêve crée un certain nombre de problèmes à celui qui l’a vue dans la clandestinité de son âme et dans le silence de la nuit. La sodomie des esclaves par les maîtres était la norme. Les patriciens tendaient le doigt. Ils disaient : Te paedico (Je te sodomise) ou Te irrumo (J’emplis ta bouche de mon fascinus). C’était la sexualité de Cicéron à la fin de la République. C’est celle de Sénèque sous l’Empire. »

Pascal Quignard, Le sexe et l'effroi

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12/02/2012

Tout le drame de la vie est dans la recherche des êtres, plus fougueuse en amour et plus attentive en amitié

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« Qu'un homme qui a appris la vie ait un air de calme et de froideur, qu'il recoure tour à tour, pour écarter le vulgaire, à la politesse ou à l'ironie, il ne fait qu'user de ses droits. Mais prendre pour sa nature ce qui n'en est que les défenses, ce serait la même erreur que de ne pas distinguer une ville de ses remparts. La question n'est pas, pour nous, de ne plus jamais être fous, mais de réserver notre folie pour les occasions qui en sont dignes. Qu'un être paraisse qui, par quelques signes, nous donne à croire qu'il est de la race supérieure, nous déploieront, pour l'accueillir, un enthousiasme qui dépassera infiniment celui de nos premiers temps, car comment comparer la fougue instinctive d'un jeune homme avec la hautaine imprudence d'un homme qui n'ignore rien des dangers auxquels sa folie l'expose et qui trouve sa volupté à les affronter en les connaissant ?



Tout le drame de la vie est dans la recherche des êtres, plus fougueuse en amour et plus attentive en amitié. Ici encore, il convient que notre expérience nous instruise sans nous accabler. Si nombreux que soient les gens médiocres, il ne faut pas qu'ils aient le pouvoir de nous faire douter de ce qui les dépasse et, pleinement convaincus du peu que valent tant d'hommes, nous ne devons jamais oublier ce qu'un homme peut valoir. »

Abel Bonnard, L'Amitié

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Les troupeaux...

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« A quoi bon détruire les dictateurs si l’on continue, sous prétexte de discipline sociale et pour faciliter la tâche des gouvernements, à former des êtres faits pour vivre en troupeaux ? Ce ne sont pas les dictateurs qui font les dictatures, ce sont les troupeaux. »

Georges Bernanos, cité par Paul Sérant dans, Les dissidents de L’action Française, (G. Valois, L. Dimier, J. Maritain, G. Bernanos, R. Brasillach, T. Maulnier, C. Roy)

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11/02/2012

Notre société devrait susciter des résistants, des âmes fortes qui se démarquent d’elles, des visionnaires qui refusent le consensus et créent l’avenir

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« Tu veux aimer et être aimé.
Si il est un idéal qui résiste à tous les doutes, c’est celui-là. Sache qu’il t’a déjà mis dans la bonne direction. Pourtant nous sommes tous spectateurs de l’amour gâché. Toi-même, peut-être as-tu déjà un passé d’amertume. Rien n’est perdu, l’amour ne fait que commencer ; cependant, il n’y parvient qu’en s’appuyant sur la vérité. Le christ nous rend capables de choisir la vérité et de vivre l’amour. Si tu veux aimer et être aimé, cherche le Christ.

Tu n’es pas le premier à chercher ; le Christ a commencé avant toi. Il t’a trouvé : le cherches-tu en retour ? Il t’aime tel que tu es. C’est ainsi, tu n’y pourras jamais rien : il ne te regarde qu’en t’aimant. Etre lucide sans amour, c’est le fait de cette créature splendide qui tourna mal en décidant de se détourner de son créateur. Ce jour-là, Lucifer devint Satan. Ne l’imitons pas : acceptons de nous regarder nous-mêmes qu’en nous aimant, à l’imitation de ce regard que le Christ a sur nous, éternellement et maintenant. […].

Pourquoi fais-tu la moue ? Oui, je suis un prêtre et je te parle comme un prêtre. Tes yeux me disent que tu me vois venir, que mon discours n’est qu’une fiche d’inscription à la "vocation", noyée dans quelques bons sentiments. Sur ce point, tu te trompes. Tu ne tarderas pas à découvrir que les paroles ensorceleuses ne sont pas mon genre. Je préfère te mettre devant la vérité de toi-même. Je ne suis pas un panneau publicitaire, je suis un miroir, le miroir de ton âme : tu n’y vois que toi. As-tu le cran de regarder, ou bien signes-tu l’échec de ta vie en détournant déjà les yeux ? Tu n’auras pas trop de ton existence pour rattraper cette erreur. Hésites-t-u ? Je le comprends, ces choses sont graves. As-tu peur ? Ce n’est pas le Christ qui t’effraie ; il ne procède jamais par la peur. Si tu as peur, c’est de toi-même. Le moment est venu d’affronter, de prendre tes responsabilités.

- Prendre mes responsabilités ? t’exclames-tu. Quel ennui ! je veux vivre. Quel discours d’adulte ! Je suis jeune, j’ai droit à l’insouciance.

- Tu es jeune, en effet, mais tu sais que l’insouciance te fuit déjà. Quelqu’un a dit que l’on est jamais aussi sérieux qu’à dix-sept ans… Dix-sept, vingt, vingt-cinq, et même trente, peu importe ; c’est l’âge des décisions. Toute ta vie va tenir à quelques décisions, à celles que tu prends maintenant et, j’insiste, à celles que tu ne prends pas. Si tu gâches ta jeunesse, tu gâches ce qui lui succédera ; si tu construis ta jeunesse, ta vie entière sera solide.

Permets-moi d’être encore plus féroce que tu ne l’es lorsque tu juges les adultes. Les trouves-tu si admirables ? Pourquoi si peu d’entre eux te donnent-ils envie d’être comme eux ? Cela vaut pour leur mariage, leurs idées, leurs réponses… Bien sur, entre ton idéal et leur vie, il y a les revers, les échecs, les deuils, ou bien le simple atterrissage dans la vie réelle. Il te faut accepter d’en tenir compte, car cela t’arrivera aussi ; mais, tout de même, ils sont bien médiocres, ces adultes. Même quand ils ont réussi, tu me dise qu’ils sont ternes ?. tu as raison, mais tu ignores pourquoi. Laisse-moi te le confier : s’ils sont ternes, c’est souvent parce qu’ils ont gâché leur jeunesse.

Après tout, un adulte n’est rien de plus qu’un jeune comme toi, mais qui est jeune depuis longtemps. Il n’a pas changé, il a vieilli, identique à lui-même, dans la ligne de sa jeunesse. Il était insouciant, avançait sans gravité, brulant son énergie dans la recherche des soirées, de la séduction, des conquêtes ; ne pensant qu’à l’argent à venir, ou qui lui manquerait, se cultivant un peu ou s’abrutissant au travail, remettant à plus tard le Christ, s’oubliant soi-même, oubliant les autres et la grisailles des jours dans les plaisirs déjà marqués par l’ennui. Il était jeune, ce la ne se voyait pas trop, mais tout était là. Ces joies factices ont continué, ou bien se sont faites plus modérées, mais ce vieux jeune n’est plus sage, il n’est que ralenti. Lui ont manqué Dieu, la vérité, l’amour ; une générosité active, un peu de panache.

Certains pensent qu’au moins, ils en ont bien profité. En effet, ils ont dilapidé leur cœur et leur corps. Tu me trouve rabat-joie, tu plaides pour faire la fête ? Fais-là ! Cependant, je ne ferais pas semblant de croire que tu heureux, je sais que tu ne l’es pas. Tu protestes :

- N’ai-je pas droit d’être un jeune normal ?

- Normal ! C’est donc cela que tu n’osais t’avouer : ce que tu cherches, c’est être comme les autres.

Même chez les jeunes chrétiens, qui vivent au nom d’un ailleurs, la tentation est quotidienne. Etre comme les autres, écouter les mêmes musiques (les trouves-tu belles ?), parler avec les même mots (facile, il y en si peu !), vivre et penser comme eux, n’est-ce pas formidable ?

C’est nul.

Puisses-tu au moins, être un caractère. Juge par toi-même, donne le ton. Notre société devrait susciter des résistants, des âmes fortes qui se démarquent d’elles, des visionnaires qui refusent le consensus et créent l’avenir. L’Evangile devrait être l’arbitre de la vie sociale, et non sa honte.

Le moment est venu d’affronter, de prendre tes responsabilités. »

Thierry-Dominique Humbrecht, Lettre aux jeunes sur les vocations

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10/02/2012

Pauvre, joyeux et indépendant ! – tout cela est possible simultanément

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« Pauvre, joyeux et indépendant ! – tout cela est possible simultanément ; pauvre, joyeux et esclave ! - c'est aussi possible – et je ne saurais rien dire de mieux aux ouvriers esclaves de l'usine : à supposer qu'ils ne ressentent pas en général comme une honte d'être utilisés, comme c'est le cas, en tant que rouages d'une machine et, pour ainsi dire, comme un bouche-trou pour les lacunes de l'esprit humain d'invention ! Fi ! croire que l'on pourrait remédier par un salaire plus élevé à l'essentiel de leur détresse, je veux dire de leur asservissement impersonnel ! Fi ! se laisser persuader que grâce à un accroissement de cette impersonnalité, à l'intérieur de la machinerie de la société nouvelle, la honte de l'esclavage pourrait devenir vertu ! Fi ! avoir un prix auquel on cesse d'être une personne pour devenir un rouage ! êtes vous complices de la folie actuelle des nations qui ne pensent qu'à produire le plus possible et à s'enrichir le plus possible ? Votre tâche serait de leur présenter l'addition négative : quelles énormes sommes de valeur intérieure sont gaspillées pour une fin extérieure. Mais qu'est devenue votre valeur intérieure si vous ne savez plus ce que c'est que respirer librement ? Si vous n'avez même pas un minimum de maîtrise de vous-même ? »

Friedrich Nietzsche, Aurore

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09/02/2012

L'univers visible, j'y manque d'air respirable

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« L'univers visible, celui qui est fils de l'instinct de conservation, me paraît étroit, m'est comme une prison exiguë contre les barreaux de laquelle vient en voletant heurter mon âme ; j'y manque d'air respirable. Mais, davantage et toujours davantage, je veux être moi, et sans cesser de l'être, être en outre autrui, intérioriser la totalité des choses visibles et invisibles, m'étendre à l'illimité de l'espace et me prolonger à l'infini du temps. N'être pas du tout et pour toujours, c'est comme si je n'étais pas ; ou au moins être tout moi, et l'être pour jamais. Et être tout moi, c'est être tous les autres. Tout ou rien ! »

Miguel de Unamuno, Le sentiment tragique de la vie

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08/02/2012

Toutes les civilisations se valent-elles ? L'opinion du philosophe Robert Redeker

=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=


"Qui croit sérieusement que la civilisation aztèque était égale à la civilisation espagnole ?"

Comment doit-on comprendre l’assertion du ministre Claude Guéant “Toutes les civilisations ne se valent pas” ? (hors contexte de la campagne électorale française) ?

Philosophiquement, rien n’est plus juste que ce propos. Si on le nie, on se trouve en face de grandes difficultés. Les civilisations dans lesquelles les sacrifices humains étaient obligatoires valaient-elles celles où ils sont proscrits ? Malgré certaines beautés, la civilisation aztèque ne valait pas la civilisation espagnole. Vivre, construire, édifier des civilisations signifie évaluer, s’évaluer soi-même comme capable de faire mieux que les autres. S’il existe un universel - par exemple les droits de l’homme, l’égalité, l’importance de la vie individuelle - alors les civilisations se hiérarchisent par rapport à leur plus ou moins grande proximité à cet universel. Elles ne se valent donc pas. Refuser cette évaluation ne revient pas seulement à refuser l’universalité, c’est aussi refuser l’idée de progrès. Si toutes les civilisations se valent, aucune n’est meilleure que d’autres et la barbarie ne peut être condamnée.

Comme accusent certains détracteurs, est-ce de la xénophobie que d’affirmer cela ?

On peut trouver choquantes par leur psittacisme les réponses-réflexes adressées par la gauche à M. Guéant. Dire que tout se vaut est dire que rien ne vaut, bref c’est la définition du nihilisme. La réaction de la gauche à ses propos montre à quel point celle-ci est encore le porte-parole du nihilisme. Elle n’est pas la voix du peuple, des sans-grade, mais celle, comme Nietzsche l’avait vu (en particulier lorsqu’il fustigeait le socialisme), du nihilisme. De plus, la xénophobie n'est pas condamnable en soi, elle ne peut-être tenue, au contraire du racisme, pour une faute morale. Le racisme est biologique (il regarde l’autre comme appartenant à une autre espèce), la xénophobie est politique (elle regarde l’autre comme appartenant à une autre cité, à un autre Etat). Le racisme brise l’unité biologique de l’humanité, quand la xénophobie renforce les entités politiques. La vertu civique et la xénophobie vont souvent ensemble. Rien de grand dans l’histoire de l’humanité - y compris la Révolution française, en particulier dans son moment expansionniste - ne s’est fait sans un sentiment de supériorité teinté de xénophobie.

Dire cela maintenant, fait-il partie d’une stratégie électorale de l’UMP face au FN en France ?

Probablement. Mais ce n’est pas parce qu’un énoncé aurait pu être prononcé par le FN ou pour attirer les électeurs du FN qu’il est faux. Donnons un exemple inverse, sur la même thématique, d’un énoncé prononcé par un politicien hautement respectable, et faux pour autant. Voici ce qu’a dit Léon Blum dans un discours devant l’Assemblée nationale le 9 juillet 1925 : "Nous admettons qu’il peut y avoir non seulement un droit, mais un devoir de ce qu’on appelle les races supérieures, revendiquant quelquefois pour elles un privilège quelque peu indu, d’attirer à elles les races qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de civilisation." Bien que prononcée par un socialiste légendaire, l’ami du philosophe Alain et le futur chef du Front Populaire, la phrase de Léon Blum n'est pas vraie du fait de l’emploi du concept de race, scientifiquement contestable. La rectitude de l’intelligence doit inciter à juger les propos selon leur contenu plus que selon l’opinion que l’on se fait de leurs locuteurs.

 

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S'il était avéré qu'hérédité et culture fussent étroitement liées, on préférerait encore sacrifier la culture, par horreur de l'hérédité, antidémocratique par excellence dés lors qu'elle revêt la forme d'un privilège

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« (...) Que, de façon générale, et avec toutes les exceptions inviduelles qu'on voudra, au premier rang desquelles celles du génie, il faille deux ou trois générations pour faire un individu tout à fait accompli culturellement, voila bien, quoique c'ait été la conviction tranquille de presque tous les siècles avant les nötres et de la plupart des civilisations, le genre d'opinions qui ne sauraient en aucune façon être reçue parmi nous. S'il était avéré qu'hérédité et culture fussent étroitement liées, on préférerait encore sacrifier la culture, par horreur de l'hérédité, antidémocratique par excellence dés lors qu'elle revêt la forme d'un privilège. Or, c'est à peu prés ce qui est arrivé, car le lien est bel et bien attesté, comme en atteste à l'envie tout le vocabulaire métaphorique gravitant autour du mot "culture" : "héritage", "patrimoine", "transmission", etc. La culture est la culture des morts, des parents, des grands-parents, des aïeux, des ancêtres, du peuple, de la nation ; et même de cela qu'on ne peut même plus nommer, d'autant qu'il est convenu qu'elle n'existe pas,  "la race". Celle-là, il est significatif qu'elle soit interdite de séjour. Mais, à travers elle, entraîné dans sa chute et dans sa proscription, c'est tout ce qui relève de la lignée, de l'héritage, du patrimoine qui est visé ; et la culture, par voie de conséquence, qui est atteinte. »

Renaud Camus, La grande déculturation

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07/02/2012

La prolétarisation ambiante

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« (…) La prolétarisation ambiante, si sensible culturellement en tous les quartiers et toutes les sous-sections de l’énorme petite bourgeoisie centrale, fait de spectaculaires apparitions, à titre d’emblème, jusqu’au sein du pouvoir, par le biais du langage des ministres, dont plusieurs s’affranchissent délibérément de la contrainte, jusqu’alors à peu prés observée, au moins dans l’exercice de leurs fonctions, de l’usage d’un langage "tiers", et affichent leur soi mêmisme enthousiaste en donnant expressément leur unique souci d’être et de rester eux-mêmes (qu’on aurait pu croire, sinon tout à fait contraire à la dignité ministérielle, du moins parfaitement secondaire par rapport à elle) comme le motif ou la justification de leurs phrases relâchées ou de leurs mots orduriers. Sous sa forme culturelle (au sens si volontiers "contre culturel" du terme) elle se manifeste même au plus haut niveau de l’Etat, non seulement dans les amitiés affichées du président de la République avec les acteurs les plus en vue du cinéma populaire et commercial, dans son intimité chaleureuse avec le milieu qu’on eut appelé jadis de la télévision du samedi soir (mais c’est désormais samedi soir tous les soirs, à la télévision, et toute la journée), mais mêmes dans ses allocutions les plus solennelles, comme celle ou sous la coupole du Capitole, à Washington, il invoque Elvis Presley ou Marilyn Monroe afin de souligner les liens de sa génération (entraînée toute entière à sa suite en un mouvement rhétorique typique de l’impérialisme culturel petit-bourgeois) avec les Etats-Unis d’Amérique. Le tropisme culturel prolétarisant est ici d’autant plus manifeste qu’il se donne à voir et à entendre dans la bouche du chef d’Etat d’une vieille nation de haute et grande culture, bien sur, mais aussi d’un personnage dont on nous rappelle volontiers l’origine aristocratique, il est vrai peu frappante. »

Renaud Camus, La grande déculturation

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06/02/2012

Double Pensée

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« Winston laissa tomber ses bras et remplit lentement d’air ses poumons. Son esprit s’échappa vers le labyrinthe de la double-pensée. Connaître et ne pas connaître. En pleine conscience et avec une absolue bonne foi, émettre des mensonges soigneusement agencés. Retenir simultanément deux opinions qui s’annulent alors qu’on les sait contradictoires et croire à toutes deux. Employer la logique contre la logique. Répudier la morale alors qu’on se réclame d’elle. Croire en même temps que la démocratie est impossible et que le Parti est gardien de la démocratie. Oublier tout ce qu’il est nécessaire d’oublier, puis le rappeler à sa mémoire quand on en a besoin, pour l’oublier plus rapidement encore. Surtout, appliquer le même processus au processus lui-même. Là était l’ultime subtilité. Persuader consciemment l’inconscient, puis devenir ensuite inconscient de l’acte d’hypnose que l’on vient de perpétrer. La compréhension même du mot "double pensée" impliquait l’emploi de la double pensée. »

George Orwell, 1984

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05/02/2012

L'écharde Marine Le Pen

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D'abord, l'article de Caroline Fourest, paru dans le Journal Le Monde il y a deux jours...

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A chaque élection, le Front national se plaint d'avoir du mal à trouver 500 parrains et crie au déni de démocratie. Pourtant, la France n'est pas seulement une démocratie mais une République, attachée aux valeurs d'égalité et de fraternité. Il est donc logique, et même rassurant, qu'un parti fragilisant ces valeurs ait du mal à trouver des parrains.

La démocratie n'est pas non plus une auberge espagnole, où l'on peut se présenter au suffrage universel, et prétendre bénéficier de subventions publiques, sans respecter quelques règles. En l'occurrence convaincre 500 élus sur environ 47 000 (maires, parlementaires, conseillers généraux ou régionaux...) que votre candidature présente un intérêt. La barre n'est pas si haute. L'étrange Jacques Cheminade parvient à la sauter, grâce à une armée de bénévoles qui labourent le terrain. On ne peut pas en dire autant du Front national, plus crédible et plus haut dans les sondages, mais qui peine à quadriller. En tout cas cette année. Carl Lang a longtemps fait ce travail pour le FN, mais démarche aujourd'hui les communes pour son propre compte : celui du Parti de la France. A sa grande surprise, de très nombreux maires ayant accordé leur parrainage à Jean-Marie Le Pen en 2007 n'ont pas été approchés par les militants de Marine Le Pen : "Quand nos amis sont allés les voir à Noël, ils n'avaient vu personne du FN." Un constat valable pour plusieurs départements. Comment l'expliquer, sachant que la candidate frontiste dit s'inquiéter pour ses parrainages ?

La première raison est technique : le FN a perdu la plupart des cadres ayant ce savoir-faire, notamment au profit du Parti de la France. L'autre est stratégique. Marine Le Pen croit moins au quadrillage qu'au fait d'arracher, au dernier moment, une consigne de la part des grands partis. Sa non-candidature pouvant susciter un retour de bâton, dans l'opinion puis dans les urnes aux législatives. Il peut être très sévère. Surtout si le gouvernement envisage une dose de proportionnelle dès 2012 pour émietter la prochaine majorité...

Jeu de dupes

Le pari est risqué mais crédible. En 2007, à en croire d'anciens militants frontistes, c'est Nicolas Sarkozy qui aurait donné le coup de pouce nécessaire. Pour ne pas prendre le risque de froisser des électeurs, dont il avait besoin au second tour. Cette année encore, Marine Le Pen se dit qu'il suffit d'apparaître comme martyr pour obtenir ses signatures sur un plateau. Gilbert Collard en fait même un peu trop. Lors d'une manifestation organisée face au Sénat, il est allé jusqu'à dénoncer des "pressions" dignes de la "mafia", censées dissuader les maires de parrainer Marine Le Pen. Quelle mascarade et quel jeu de dupes.

Si pressions il y a, ce sera pour donner les signatures à Marine Le Pen, et non l'inverse. Si le FN est candidat pour tonner contre l'"UMPS" à cette élection, ce sera grâce à l'UMP et au PS. Non pas parce qu'il aura convaincu des élus de l'intérêt de sa candidature, mais par chantage indirect. Le FN souhaite en prime que ces parrainages - et donc tous les arrangements possibles - soient anonymes et ne puissent être observés par les Français. A y regarder de près, ce n'est pas la démocratie, mais du chantage.

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Ensuite je vais y aller de ma p'tite humeur.

"Il est donc logique, et même rassurant, qu'un parti fragilisant ces valeurs (les valeurs de la République) ait du mal à trouver des parrains."

C'est un peu rapide. Jean-Marie Le Pen qui avait des déclarations nauséabondes trouvait, donc, plus facilement ses signatures que sa fille qui a entamé une manoeuvre de dédiabolisation de son mouvement politique ?

"Lors d'une manifestation organisée face au Sénat, il est allé jusqu'à dénoncer des "pressions" dignes de la "mafia", censées dissuader les maires de parrainer Marine Le Pen. Quelle mascarade et quel jeu de dupes."

Ah bon ? Mascarade et jeu de dupes ? Mais comment appeler autrement que "pressions dignes de la Mafia" des procédés qui consistent à suggérer à des maires que leurs subventions régionales leurs passeront sous le nez s'ils donnent leur parrainage à Marine Le Pen ? S'il est un chantage et une absence de démocratie, personnellement je ne les vois que là.

Il faut croire que si Marine Le Pen dérape en dansant la valse avec des gens infréquentables, l'UMP et le PS, pour ne pas dire l'UMPS, utilisent des manières de faire qui rejoignent, de loin, les pires manipulations qu'utilisa Goebbels pour faire advenir un hystérique caporal aux portes de la chancellerie du Reich.

Personnellement je suis assez perdu et n'ai pas la moindre idée pour qui je vais aller voter à ces élections présidentielles. Jean-Marie Le Pen avait des déclarations puantes mais il était libéral. Marine Le Pen tente de supprimer de son parti les éléments gênants, mais affiche un programme économique dont la mousse déborde largement sur sa gauche et me laisse bouche bée.

Qu'une Nation puisse chercher à retrouver une réelle souveraineté m'apparaît comme primordial, seulement aucun des mouvements souverainistes dans la course, que ce soit celui de Chevènement, celui de Dupont-Haignan, celui du FN ou celui de De Villiers qui est parti se faire masser au sein de l'UMP, ne semblent porteurs de promesses dignes d'intérêts. On y sent une odeur de moisissure qui sous prétexte de chercher à mettre en avant ce qui fut, jadis, la grandeur de la France, n'en récupèrent que les miettes et les jettent avec mépris au pied de leurs adversaires comme au pied de leur électorat.

Cependant je vois bien que Marine Le Pen dérange tout le monde. La gauche d'abord, en lui soufflant une bonne partie de son électorat populaire, mais surtout la droite conventionnelle, et Sarkozy en premier lieu qui s'est fait élire en réussissant le coup de maître de siroter au FN suffisamment de voix afin de se faire élire président, mais sur des promesses en matière d'immigration et de sécurité qu'il n'a absolument pas tenues. Quelques 200 000 étrangers supplémentaires sont rentrés en France chaque année de façon légale, avec des papiers, depuis son arrivée au pouvoir, soit 1 000 000 de personnes en un quinquennat, et sans compter les étrangers en situation irrégulière qui sont Légion. Quant à l'insécurité, les chiffres parlent d'eux-mêmes.

Que l'UMP travaille d'arrache-pied à l'absence de Marine Le Pen au second tour semble de plus en plus une évidence. Cela permettrait à Nicolas Sarkozy de durcir quelque peu son discours, comme il l'avait fait en 2007, et de remporter l'adhésion d'une partie de l'électorat du FN à défaut de candidat pour les représenter. Il s'amuserait, ainsi, à combler un vide.

 

Sur Le Blog du Conseiller où l'on trouve quelques perles concernant les agissements de nos politiques dans les coulisses de la République, on peut trouver cette note :

 

Le document qui montre que la droite travaille bien sur l’hypothèse d’une absence de Le Pen à la présidentielle

L’un de mes associés a transmis en début de semaine cette note à l’un de ses interlocuteurs de la majorité. Ce document est intéressant car il révèle et justifie les initiatives en cours pour éviter que Marine Le Pen, identifiée comme « Gamma » dans ce document, ne puisse recueillir les 500 parrainages nécessaires à la présentation de sa candidature. C’est l’articulation entre enquête d’opinion et stratégie de communication qui mérite d’être observée ici.


Cliquez sur la photo

Source

Je suis bien incapable de dire qui se trouve derrière ce mystérieux Blog, mais au train où vont les choses j'ai tendance à croire que les informations qui y sont distillées sont exactes. Daignez me corriger si je me trompe, il n'y a que les cons qui ne changent pas d'avis. 

Je ne partage pas les idées du FN, même pas pour les mots douteux qu'a pu avoir par le passé Jean-Marie Le Pen à propos du "point de détail de l'Histoire de la seconde guerre mondiale" et autres joyeusetés du même acabit que j'ai toujours trouvés minables et blessants, mais plus simplement parce que je n'ai jamais considéré que l'amour de la Patrie dans laquelle je me suis enraciné, de l'Histoire de celle-ci, de son Identité, de sa Langue n'étaient l'apanage que de ce seul parti politique. Et pour le reste, les vieilles postures poussiéreuses et rances avec relents de pétainisme et ce malgré la tentative positive de Marine Le Pen pour faire accéder son Parti vers un nouveau seuil de respectabilité, ça n'est pas mon univers du tout. Il n'existe pas en France de mouvement libéral sur le plan économique, patriote mais sans exagération douteuse, libertaire dans le sens où l'état serait fort mais ne s'occuperait que de son cul et non de la manière dont vivent les gens pour emporter mon adhésion. Je vote donc souvent pour les moins pires et je ne me suis mis à voter qu'à un age tardif, presque à 42 ans. Plus exactement en 2007. Et je me tâte de plus en plus pour ne plus me rendre aux urnes à nouveau. En tout cas il est amusant de recevoir des leçons de démocratie de la part de l'UMP et du PS, lorsqu'avec un air emprunté ils prennent la pause de l'indignation et présentent le FN comme un danger alors qu'ils appliquent des méthodes qui font passer ces derniers, au final, pour des enfants de choeur.

 

D'ailleurs un sondage envisage des élections sans la présence de Marine Le Pen. Un premier tour qui profiterait à qui ? A bibi Sarkozy, bien-sûr... 

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Toutes les civilisations ne se valent pas, paraît-il...

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Claude Guéant a, encore, fait son cinéma. Il est rigolo. Il est rigolo mais pas tant que le camp d'en face qui est ridicule jusqu'au comique et jusqu'à la nausée. Qu'a-t-il proféré, Claude Guéant, cette fois-ci comme postulat hautement philosophique politique ? Que toutes les civilisations ne se valent pas. Bien ! Levées de boucliers en face, chez les socialistes en particulier.

Comme chacun le sait, la civilisation des papous vaut (de loin) la brillante Civilisation Perse, et la Civilisation des pygmées écrase de tout son poids celle de l'Occident. N'oublions pas la Civilisation brillante de L'Empire du Grand Zimbabwe, aussi appelé Monomotapa qui rend insignifiante la Civilisation chinoise que la Dynastie des Han consolida dés l'Antiquité. Je tiens à avoir une pensée toute particulière pour la Civilisation Aborigène d'Australie qui efface d'un revers de la main celle de la Mésopotamie à l'ère d'Uruk qui fit se développer l'écriture.

Je sais, je suis cynique... mais c'est tout ce qu'il me reste.

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Un enregistrement de Sheila ou Dalida

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« Qu’entre les riches et les pauvres la seule différence soit désormais l’argent entraîne, parmi plusieurs autres conséquences inattendues, une précarité sociale considérablement accrue des classes privilégiées elles-mêmes qui, de ce fait, n’ont plus le temps d’être des classes, justement, ni, partant, de remplir leur rôle social et culturel. Jadis, une famille qui avait appartenu un certain  temps à la classe privilégiée pouvait maintenir ce statut sur plusieurs générations même après l’effondrement de son niveau économique. La ruine, au temps de la noblesse, mais encore à l’époque bourgeoise, c’est-à-dire jusqu’au dernier tiers du siècle dernier, n’entraînait pas le déclassement social, ou seulement très lentement, parce que l’appartenance de classe n’était pas uniquement déterminée par le niveau de revenus mais aussi par le niveau culturel et la maîtrise plus ou moins grande de certains codes portant sur l’attitude, le vêtement et, au premier chef, sur le langage. En société déculturée, en revanche, ou post culturelle, ou néo culturelle –si l’on peut désigner par cette expression une société ou le mot "culture" a totalement changé de sens et ne désigne plus que les habitudes des uns et des autres, et tout spécialement les habitudes liées au loisir et au divertissement- , en société néo culturelle, donc, l’effondrement économique d’une famille entraîne ipso facto son effondrement social immédiat, ou du moins d’une génération à l’autre. Le rejeton d’une famille "distinguée" et cultivée peut très bien, s’il ne s’est pas intéressé à ses études, s’il n’était pas doué pour elles et s’il n’y a pas réussi, envisager très sérieusement, et même avec impatience et envie, d’être vendeur dans un magasin de chaussures ou chef de rang dans un restaurant ; et réclamer, s’il vient à mourir, qu’à son enterrement on fasse entendre un enregistrement de Sheila ou Dalida. »

Renaud Camus, La grande déculturation

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04/02/2012

Dans un coin près du comptoir il y avait une silhouette de femme pétrie dans un bleu de Prusse qui vous saturait le sang

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« Ce qui lui plaisait dans ce bistrot, c'étaient les couleurs. Il y avait un bon peintre qui avait vécu par ici et qui avait laissé une trace heureuse. Ce peintre était fou de bleu et Constant aussi. Sans doute ce peintre avait-il touché ces murs au début de la guerre quand Paris était soudain devenu tout bleu, d'un bleu secret et délicat de solitude qui se complait doucement et chaudement en elle-même et qui nie avec un entêtement rusé et délicieusement absurde les traînées de froid et de rigueur qui s'approchent de tous les lointains. Ce peintre aimait sans doute le bleu auparavant, mais la circonstance lui avait enjoint de se repaître de sa préférence. Peut-être maintenant, s'il n'était pas mort, aimait-il une autre couleur ? Mais Constant qui n'était pas peintre aimerait toujours le bleu. Il haïssait le verre et mépriser le violet. Avec quelque complaisance pour le jaune, il appréciait le rouge dans la mesure où il se mariait, divorcée et se remarier avec le bleu. Il y avait aussi des terres de Sienne, des cobalts qui le nourrissait bien. Il était goinfre et aimait à se gaver. Il était amoureux des choses. Quelquefois il se disait qu'il aurait pu se passer des gens ; il savait pourtant que les choses ne vivent que par les gens et que jouer des choses est le dernier moyen de communiquer avec les gens : à travers les choses on échange des messages. Et c'est ainsi que lui, Constant, venait causer dans ce bistrot avec un type qui lui disait des paroles bleues comme on en entend pas de bouche à oreille.

Dans un coin près du comptoir il y avait une silhouette de femme pétrie dans un bleu de Prusse qui vous saturait le sang. La ligne ajoutait aux bienfaits de la couleur un autre bienfait. Cela faisait deux bienfaits en même temps : on n'avait pas se plaindre, on avait de quoi se réjouir profondément dans les entrailles de son ventre et de son imagination. Tout cela ne tombe pas du ciel, mais c'était doucement sué par la terre qui était sous ce quartier de bitume et de plâtras et sous ce bistrot de marchandage et de bavardage. Constant rigolait doucement en songeant au bon tour que la terre, la couleur bleue et un copain inconnu jouaient à tous ces idiots crasseux et gentils qui ne savaient pas qu'ils nageaient dans le bleu, dans le suc que le plus raffiné. Pourtant, de temps en temps l'un d'eux semblait une seconde se méfier, s'inquiéter et, interrompant une phrase, suspendant son verre, demeurait bouche bée devant une tâche, une éclaboussure de magie et de fascination. Constant connaissait bien la terre. Bien qu'il fût de Paris, il connaissait la terre. Il ne l'avait jamais ignorée ; il l'avait toujours soupçonné, devinée, décelée sous les quartiers. Il n'avait aimé rien tant que les travaux de voirie qui, tout d'un coup, fendaient le bitumes et l'asphalte, cassaient le ciment et autour des tuyaux faisaient resurgir la chair vive, non pas seulement cette matière rapportée et sableuse qui est tout de suite sous le pavé, mais plus en dessous, le terreau même. »

Pierre Drieu la Rochelle, Les Chiens de paille

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03/02/2012

Il conclut au conditionnel désespoir des millénaires

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« Le Christianisme lui donnait sa parole d’honneur de l’Éternité bienheureuse, mais à quel prix ! Il la comprenait, maintenant, cette fringale de supplices de toute son enfance ! C’était le pressentiment de la Face épouvantable de son Christ !... Face de crucifié et face de juge sur l’impassible fronton du Tétragramme !...
Les misérables se tordent et meurent depuis deux mille ans devant cette inexorable énigme de la Promesse d’un Règne de Dieu qu’il faut toujours demander et qui jamais n’arrive. "Quand telles choses commenceront, est-il dit, sachez que votre Rédemption approche". Et combien de centaines de millions d’êtres humains ont enduré la vie et la mort sans avoir rien vu commencer !
Marchenoir considérait cette levée d’innombrables bras perpétuellement inexaucés et il comprit que c’était là le plus énorme de tous les miracles. - Voilà dix-neuf siècles, pensa-t-il, que cela dure, cette demande sans réponse d’un Père qui règne in terra et qui délivre. Il faut que le genre humain soit terriblement constant pour ne s’être pas encore lassé et pour ne s’être pas assis dans la caverne de l’absolu désespoir !
Il conclut au conditionnel désespoir des millénaires. »

Léon Bloy, Le désespéré

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02/02/2012

THE GABBA HEYS : "Loosing control" (2012)

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"Vous avez entendu ce bruit, juste avant que la terre tremble ?" demande le professeur Carlson à un de ses collègues, au début de l'inénarrable "Attaque des crabes géants" de Roger Corman (1957).
"De quel bruit parlez vous ?" lui rétorque son confrère.
"Des grondements, ça venait des profondeurs..."
C'est exactement ce que je me suis dit juste après avoir posé le bras de la platine sur le sillon de la face A du premier 45 tours des Gabba Heys. "Loosing control" que ça s'appelle, et en effet, on imagine bien qu'ils ont été jusqu'à égarer les potards de volume, bloqués à 11, comme ils se doit.
Les Gabba Heys sont de sympathiques primates limougeauds, fidèlement croqués sur la pochette par le talentueux dessinateur néanderthalien Jean-Marie Arnon.
Pour le reste, après une entrée en matière quasi tribale lancée par Gabba Thierry (basse) et Gabba Didz (tambours), on pensera d'abord aux Fleshtones sur le thème d'harmo soufflé par Gabba Alain, puis aux Damned sur le couplet poussé au cul par la guitare de Gabba Pierre, et enfin aux Bishops (l'équivalent anglais de Little Bob Story en 1977...) sur le refrain fédérateur .
"Même en reculant, on avance" me souffle l'Agent Secret, mais on le savait déjà depuis l'invention de la chambre d'écho et de la guitare à 5 cordes. C'est amplement satisfaisant pour nos cerveaux reptiliens, et l'on se dit que ces gars là auraient aussi bien pu s'appeler les Morlocks.
J'ajoute que le disque contient 3 autres hymnes (dont un furieux "CBGB"), que son tirage est limité à 518 exemplaires, les pochettes étant toutes sérigraphiées et les vinyles noirs comme la jungle.
Quand à la qualité du pressage, je laisse conclure le professeur Carlson: " Quoique ça puisse être, ça a coupé le courant!"

 

 

podcast

 

 

Philippe "The Reverend" Nicole (Bassiste-chanteur des défunts King Size et ex-bassiste chez Peter Night Soul Deliverance et chez Margerin)...

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Vivre une existence double !

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« Vivre une existence double ! Etre et paraître ! Les grands aventuriers affirment qu’ils y trouvent une intensité de plaisir nerveux qui triple la joie de vivre (…). Combien il doit être vif, le frisson de ces aventureux qui, tout en s’accommodant de leur milieu ordinaire, goûtent et réalisent les voluptés de deux ou trois vies morales différentes et contradictoires. »

Maurice Barrès, Du sang, de la volupté et de la mort

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01/02/2012

Le mépris de soi ne nous sauvera pas du bain de sang. L’habitude de la capitulation fera le reste.

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« (…) Voila pourquoi je pense que l’islamisation, totale ou partielle, est la réponse la plus probable à la question : "Que va-t-il se passer ?". Il va se passer que des pans entiers et sans cesse s’élargissant de la France et de l’Europe vont ressembler de moins en moins à la France et à l’Europe que nous avons connues (mais que de moins en moins d’individus auront connues, et que la déculturation générale leur permettra d’oublier, de méconnaître et de calomnier). En revanche des pans entiers et sans cesse s’élargissant de la France et de l’Europe ressembleront de plus en plus et ressemblent déjà à ce qui s’observe dans les contrées où l’Islam est traditionnellement implanté ; et tout particulièrement bien sûr, s’agissant de la France, dans celles de ces contrées, à prédominance arabe ou berbère, d’où sont originaires la plupart des populations transplantées. On peut le conclure très clairement de l’observation des zones où l’influence ou la présence "arabo-musulmane" (pour le dire très vite et bien sûr imparfaitement) sont déjà majoritaires : ce n’est pas le sol ni le "droit du sol" qui détermineront le type de société qui aura cours : c’est le type de population. »

« (…) Des villes comme Alger ou Gaza, des pays comme l’Algérie, la Tunisie, la Palestine, des scènes de rues comme celles qui s’observent à Ramallah ou La Mecque, des systèmes économiques et d’économie parallèle, des taux de chômage, , des répartitions de l’aide publique tels qu’en connaissent le Maroc ou la Jordanie, des modes de gouvernement comme ceux de la Syrie, de l’Egypte ou encore une fois de l’Algérie, peuvent sans doute nous donner une idée beaucoup plus juste de ce qui va advenir en France que l’étude attentive et docte du "modèle Danois" ou du "paradigme Blairien". »

« (…) Toutefois, au moins dans un premier temps, c’est sans doute au Liban que la situation ressemblera le plus, les politiques menées en France depuis trente ans et davantage paraissant avoir tendu scrupuleusement à la reconstitution assez scrupuleuse du type libanais de société (avec quelques éléments empruntés aussi à l’Irlande du nord et à l’ex Yougoslavie, ou évoquant l’Irak le plus contemporain). »

« (…) Y aura-t-il ou non une guerre civile ? S’il faut absolument répondre à la question, je dirais que je pencherais plutôt, très légèrement, pour la négative. L’effondrement moral, culturel, intellectuel, grammatical, spirituel, "religieux", que dis-je "hormonal", d’une des parties au conflit éventuel l’empêchera sans doute de se lancer dans une résolution aussi extrême que le conflit armé ; et l’engagera très fort à le fuir, même, quel que soit le prix à payer pour ce désistement. La déculturation systématique dont a fait l’objet cette partie là de la population (la plus anciennement sur place) lui enlèvera toute conscience d’avoir quelque chose à défendre. Et de fait il ne lui restera pour ainsi dire rien, sinon une liberté dont elle se dégoûtera volontiers, sachant trop bien lui devoir ce qu’elle est devenue et que non sans raison elle déteste, même si ses raisons de se détester elle-même ne sont pas les bonnes. Le mépris de soi ne nous sauvera pas du bain de sang. L’habitude de la capitulation fera le reste. »

Renaud Camus, Le communisme du XXIième siècle

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