01/08/2011
Bloy, Moreau, Rouault
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« 1er mai – Visité, pour la première fois, le musée Gustave Moreau. Ma stupéfaction de voir la quantité prodigieuse des œuvres de ce maître qui fut un travailleur colossal. Presque toutes les toiles peintes, car le nombre des dessins est infini, sont à l’état d’ébauches plus ou moins avancées. Quelques-une telles que le Retour d’Ulysse ou le Triomphe d’Alexandre me hanteront. Je ne pense pas qu’il y ait jamais eu un artiste d’une imagination aussi somptueuse. C’est un fou furieux de magnificence.
Pourquoi faut-il que la mythologie, les temps héroïques l’aient confisqué à peu près complètement. Si j’avais à écrire sur Gustave Moreau, je m’étonnerais de ne pas trouver un seul tableau de lui inspiré par l’histoire de Byzance. Le grandiose chrétien semble lui avoir été étranger. A peine deux ou trois projets de calvaires, hélas !
Mais j’aurais gagné ma journée, n’eussé-vu que le tableau de Rouault, provisoirement déposé là : Le Christ enfant au milieu des Docteurs. Un Dieu de douze ans et trois hypocrites qui en ont ensemble cent quatre-vingts. Jésus leur dit la Vérité qui est lui-même et, à mesure qu’il parle, on croit voir sortir, de chacun de ces hommes crucifiants, la bête horrible qui le possède et qui doit, un jour, le dévorer. Je ne savais pas que Rouault avait un talent immense. Je le sais maintenant et je le lui ai dit avec enthousiasme. »
Léon Bloy, Journal, mai 1905
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