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22/08/2011

Le terrorisme de l'Etat culturel

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Pour qui a contemplé, peu de jours après le 11 septembre, du haut d'un observatoire de fortune, avec un petit groupe d'étrangers conduits par Rudolph Giuliani, casque en tête, le paysage de désastre qu'il a nommé lui-même "Ground zero", le programme énoncé récemment par notre propre secrétaire d'Etat communiste au Patrimoine et à la Décentralisation culturelle a de quoi donner le frisson :

"Nous subventionnons de préférence les espaces alternatifs, les friches, les squats artistiques, les projets pluridisciplinaires, un laboratoire de l'émergence d'un nouveau rapport entre l'art et la société. Ces mutations répondent aux attentes et au désir d'art des populations exclues de la culture."

A ce compte, Ben Laden et Etat culturel, même combat. Pour faire accéder à "la culture" les populations qui en sont exclues, il faut créer à leur usage des no man's land répondant à leur "attente" et appeler "art" ce qui peut un peu plus les ensauvager et déboussoler ! Ce genre d'éructation officielle est du même tonneau que le raisonnement pseudo-sociologique par lequel on a, dans les années qui précédèrent 68, stigmatisé l'efficace ascenseur social et intégrateur de l'Education nationale, en le qualifiant de "reproduction", quitte à le remplacer au plus vite par une "créativité" pédagogique tous azimuts propre à enfoncer un peu plus dans la "misère du monde" les enfants défavorisés qui désespèrent de s'en sortir. Ce féroce paralogisme, qui cache un hautain mépris sous la plus démagogique compassion, inspire depuis des décennies en France les réformes incessantes et destructrices de l'enseignement public et l' "action culturelle" envahissante de l'Etat.

Soyons honnêtes envers nous-mêmes. L'agit-prop substituée à l'éducation, l'agit-cult substituée à l'art ne sont pas des inventions originales du génie français, mais sévissent aujourd'hui par génération spontanée dans tous les pays "avancés". Partout, à Los Angeles et à Tokyo comme à Paris, on rencontre de riches snobs, économiquement de droite et sentimentalement de gauche, qui éprouvent un besoin irrésistible de financer des "espaces alternatifs" et des "friches" coûteuses, déployant au moins autant de zèle que notre secrétaire d'Etat communiste au Patrimoine. Avec un instinct très sûr dans les deux cas, les snobs de tous pays, amateurs d' "avant-garde" nihiliste et coûteuse, se précipitent vers ce qui leur assure, croient-ils, "distinction" dans leur propre milieu nouveau riche, tandis que nos hauts fonctionnaires culturels, à la remorque de ces mêmes snobs et emballés pour la même "avant-garde" de champ d'épandage, s'assurent par là une supériorité imaginaire sur leurs petits camarades débranchés.

L'histoire n'est pas nouvelle. Toute son équivoque tient à la confusion entre "art moderne" et "art contemporain". L'art moderne, en concurrence avec un art réaliste et un impressionnisme bien vivants, est apparu à Paris entre 1905 et 1910. Paris est resté sa Mecque et la capitale mondiale de ses artistes jusqu'en 1960 environ. En revanche, sa publicité globale et sa montée en Bourse ont été organisées par le Museum of Modern Art de New York, créé en 1920 sous l'impulsion et avec l'argent personnel de Mrs Abby Aldrich Rockefeller, épouse du richissime John D. Rockefeller et fille d'un autre tycoon , Nelson W. Aldrich. Elle fut secondée par Stephen C. Clark, de la famille propriétaire des machines à coudre Singer, et par Frank Crowninshield, rédacteur en chef du newsmagazine Vanity Fair . Trinité efficace pour l'avenir de l'art moderne parisien, mais dont l'horizon n'avait rien de commun avec celui de la Revue blanche ni avec celui du Minotaure .

A partir de 1960, Manhattan, devenu le centre commercial de l'art moderne, franchit un nouveau pas. Ses "very rich" de la dernière couvée se convertissent à l'anti-art et aux practical jokes dont l'humoriste et dandy français Marcel Duchamp avait été l'évangéliste aux Etats-Unis depuis 1916. New York se pique alors d'être devenue la Mecque de l' "anti-art" contemporain, un tout et un n'importe quoi tellement plus excitants pour la spéculation de nouveaux riches que Picasso, Matisse, Balthus, Henri Laurens, Germaine Richier, Jean Bazaine, Roger Vieillard et autres maîtres incontestés de la tradition parisienne de l'art moderne !

Le Paris des gogos officiels ne tarda pas à donner dans le panneau. Rallié furieusement à l' "art contemporain", dont Niki de Saint-Phalle était alors la muse française, il n'eut de cesse d'humilier la dernière génération d'artistes modernes, qualifiés désormais avec mépris d' "Ecole de Paris". Le New York d'Andy Warhol et des "installations" avait gagné sa bataille. Plus de rot, mais de la fumée vantée à coups de pub et vendue très cher sous le nom ambigu d' "art moderne et contemporain". Cet habile label confond fructueusement dans le même sac "culturel" les effets du merchandising et les oeuvres reconnues des maîtres de l'art moderne. High et Low , or et assignats, montent et descendent désormais à égalité, selon l'humeur de la Bourse, sous le marteau du commissaire-priseur.

Le drame en France, c'est que le nihilisme culturel et l'ardeur pour les "squats artistiques" modernes et contemporains ne sont pas, comme en Amérique ou au Japon, cantonnés dans des coteries riches regroupées autour de musées privés, dont l'empire ne s'étend guère au-delà du milieu fortuné de leurs trustees et des belles adresses de chaque grande cité. Tandis que, chez nous, la frénésie des salles de ventes et des openings branchés est devenue une idéologie à prétentions sociales, qui inspire un ministère tentaculaire ayant la volonté et les moyens, depuis sa création à la fin des années 60, non seulement d'imposer au nom de la République et au moyen des subventions un "goût" unique et officiel, mais encore de corrompre ou d'intimider dans ses propres murs les anciennes et saines administrations patrimoniales qui lui ont été léguées par un Etat traditionnellement modeste, mais ayant une tout autre idée de ses responsabilités envers la nation et l'éducation de ses mandants. L'Etat culturel a adopté le nihilisme esthétique mondain comme un impératif démocratique, tout en se targuant d'une exception culturelle expurgée de son sens - car ce nihilisme culturel, par définition mondial, est à la globalisation ce que le vert-de-gris est au cuivre. Telle est l'une des singularités françaises actuelles les plus caractéristiques et les plus acharnées. Elle consiste à affirmer à cor et à cri une identité nationale que l'on a pris soin au préalable de vider de son contenu.

Exagération ? Polémiques ? Allez donc visiter au Palais de Tokyo, comme je l'ai fait l'autre jour, l'Espace de création contemporaine que notre ministre de la Culture a récemment inauguré ! Vous aurez, comme moi, le frisson de « Ground zero » en apercevant, étalé au sol, un mannequin féminin hyperréaliste en polystyrène nageant dans une feinte flaque de sang, évocation hideuse des malheureux pressés par l'enfer de feu, dans les plus hauts étages du World Trade Center, et qui se sont jetés en grand nombre dans le vide. Vous saurez ce qu'entend le secrétaire d'Etat au Patrimoine par la "nouvelle fonction sociale de l'art" et les "espaces alternatifs" répondant au désir des "populations exclues de la culture". Les magnifiques volumes, éclairés par de vastes verrières, de l'aile droite du Palais de Tokyo ont été à grands frais transformés en zone ravagée, ses murs dénudés ont été d'avance parsemés de tags et de dazibaos débiles, et dans cette ruine artificielle ont été exposés des détritus baptisés "installations" et des écrans dévidant d'insipides vidéos. Pour obtenir ce paysage de banlieue de "non-droit", il a fallu démolir coûteusement les amorces dans ces mêmes lieux d'un Centre du cinéma, qui trouvera abri dans d'autres ruines qui restent à restaurer, celles du mini-musée de Bilbao construit naguère par Frank Gehry en face de la BNF et destiné à un American Cultural Center privé qui a sombré dans la faillite.

Un vandalisme d'Etat est donc parvenu à creuser en plein Paris un "Ground zero" de pacotille, conçu et voulu par la délégation aux Arts plastiques de la Rue de Valois : "Détruire", dit-elle. Mis à part le luxueux saccage d'une architecture de grand style, le contenu de cette zone artificielle ne diffère en rien de ce que l'on peut voir un peu partout dans le monde, à Beaubourg, au Moma, dans les biennales et les galeries qui se spécialisent dans cet "art contemporain" qu'il faudrait plutôt nommer ennemi juré de tous les arts. Dans la librairie de l'Espace est exposée une sélection de coffee-table books , parmi les plus funk et junk de la planète. On a le réconfort ambigu d'y trouver un épais catalogue de l'Académie de France à Rome, préfacé par son directeur, Bruno Racine. C'est l'épave imprimée serré d'une exposition de « troisième type » qui fut généreusement offerte aux populations romaines "exclues de la culture" par le génie "culturel" français, dans le cadre d'une Villa Médicis où achevèrent de se former, pendant près de trois siècles, quelques-uns des plus grands peintres, sculpteurs, graveurs et architectes du monde. Mais j'ai cherché en vain le fameux catalogue illisible, préfacé par MM. Aillagon et Spies, qui nivelait les reproductions de chefs-d'oeuvre du musée d'Art moderne dans les couleurs électriques du kitsch warholien : ce monument de mépris pour le public a été, je le crains, mis au pilon.

Je vous l'accorde, rien n'oblige à visiter l'Espace du Palais de Tokyo. Avec un peu de flair et de doigté, on peut à Paris, pour nourrir fructueusement ses loisirs, découvrir et goûter des merveilles de talent et de goût. Dans ces derniers mois, le "Neveu de Rameau" avec Nicolas Vaude au Ranelagh, la "Rodelinda" de Haendel au Théâtre du Châtelet, "Le triomphe de l'amour" de Marivaux au Studio-Théâtre d'Asnières, le désopilant "Frou-Frou les Bains" du Théâtre Daunou ont été des chefs-d'oeuvre, chacun dans son ordre, au moins comparables au superbe "Ruy Blas" de la très officielle Comédie-Française. Gratis, on peut admirer dans une petite galerie privée, 56, rue de Verneuil, de sublimes photographies de Carlos Freire. Les expositions du musée Guimet, du musée Picasso, du Grand Palais et du Louvre ne déçoivent que rarement. Et j'en passe. Paris reste une fête. L'amour du travail bien fait et la passion de la beauté, ancienne et moderne, y sont trop profondément enracinés pour se soumettre volontiers aux bûcherons de la forêt de Gastine. Mais ces joies, pourtant à la portée de tous, ne sont pas patronnées volontiers par le ministère de la Culture, ni "trompettées" par les médias à son écoute. L'esprit de suite du nihilisme officiel, irrité par cette résistance incontrôlée, s'emploie avec d'autant plus d'obstination à multiplier le désert des "Espaces" et des "Centres" partout où il en a le pouvoir. Ce n'est pas peu dire.

M. Jacques Renard, directeur de la Caisse nationale des monuments historiques (rebaptisée par lui "Centre des monuments nationaux"), a pu vandaliser à grands frais l'Hôtel de Sully, siège du "Centre" restauré naguère avec soin et décoré en style Louis XIII par Jacques Dupont. Il avait d'emblée traité de "vieilleries" les tapisseries d'après Simon Vouet, les portraits de rois et de ministres que le grand décorateur avait réussi à réunir. Sous les plafonds armoriés, les "vieilleries" ont donc été évacuées, et un bastringue des années 50, conçu par un ancien "beaubourgeois" de Support-Surface, a surgi dans les murs du noble hôtel du Marais. Quand ce vandalisme actif n'est pas de mise, les nihilistes officiels recourent au vandalisme passif. On laisse ainsi se dégrader le musée des Monuments français, fermé depuis de longues années au public. Ce trésor scientifique cette merveille authentiquement éducative, que la IIIe République, fidèle à la leçon du jacobin Alexandre Lenoir, avait installé au large dans le Palais de Chaillot, est devenu une ruine, et par cette méthode il est à craindre qu'il ne devienne tôt ou tard un "squat" pour "exclus de la culture". L'Ecole des beaux-arts, dont les cours intérieures ressemblent à des décharges publiques, a renoncé depuis longtemps à enseigner autre chose que "l'art vivant", c'est-à-dire à désapprendre toute discipline artistique et toute mémoire des chefs-d'oeuvre anciens ou modernes. On n'y enseigne plus la gravure, cet art austère dont Paris avait conquis et conservé le privilège depuis quatre siècles. Schizophrène, l'Ecole, qui a formé jusqu'en 1969 de grands artistes et architectes pour le monde entier, continue d'abriter une riche bibliothèque, un fonds de manuscrits et de dessins de maîtres à rendre jaloux le futur Institut national d'histoire de l'art, enclavé, selon un provisoire et un contentieux qui perdurent, dans une partie des locaux de l'ancienne Bibliothèque nationale. Il y a fort à parier que, si ses programmateurs l'avaient intitulé "Espace" ou "Centre de créativité postmoderne", il occuperait déjà tout le bâtiment, et même tout le quartier.

De leur côté, tout aussi mal nommées et mal-aimées, les Archives nationales sont en état de crise aiguë. "Otez ce sein d'érudition que je ne saurais voir !" Il est donc question de les déporter, comme les Archives du Quai d'Orsay, dans une autre monumentale BNF éloignée des quartiers anciens, et décourageante pour les derniers étrangers qui songeaient encore, pauvres ringards, à étudier l'histoire de France.

Certes, le Centre Pompidou, avec ses rides et sa rouille prématurées effacées à grande dépense, bénéficie de divines protections qui le garantissent, au moins en apparence, contre tout chagrin. Il peut continuer à faire coexister dans ses tubulures sa "pluridisciplinarité contemporaine" favorite et le musée d'Art moderne qui lui sert de caution bourgeoise : "e suis oiseau, voyez mes ailes ; je suis souris, vivent les rats !" Les chefs-d'oeuvre accumulés par ce musée-otage ne peuvent être exposés que très partiellement. A ce prix, le Centre peut poser orgueilleusement pour le vaisseau amiral des "Espaces d'Etat".

Mais le Louvre et Versailles, regardés de haut par les dieux de droite et les idéologues de gauche, restent incurablement, en dépit des pétards mouillés sous pyramide de M. Régis Michel ("La peinture comme crime !"), à contre-courant du torrent "contemporain" de la déséducation et de l'anti-art. Les experts cherchent les causes « structurelles » des maux dont souffrent ces musées et ils en trouvent, car il y en a. Mais la cause des causes est l'irritation diffuse dans les hauteurs et les profondeurs du ministère de la Culture, et de l'énarchie qui le colonise, contre ce qu'on y qualifie de "vaches sacrées" de la conservation patrimoniale. Tel de ces puissants personnages (de ceux qui roulent "à droite") ne cache pas son intention, au cas où il deviendrait ou redeviendrait ministre français de la Culture, de mettre fin à la notion de "patrimoine national inaliénable" et d'alimenter abondamment son budget d'action culturelle par la vente sur le marché international, comme en Union soviétique au temps de la NEP, des trésors des Musées nationaux. Christie's et Sotheby's verraient alors leurs bénéfices monter au ciel. Ce serait la foire de Cocagne, un second Nasdaq, tout "français" celui-là. Gageons que la gauche "culturelle", qui fraternise si volontiers avec les "héritiers" branchés dans les cocktails, applaudirait des deux mains à cet assèchement radical et rapide de la souche-mère des "inégalités culturelles".

En attendant cette décisive "avancée" de droite dans l' "émergence d'un nouveau rapport entre l'art et la société", un début de cette maladie à la mort qui a frappé le musée des Monuments français et son voisin, le musée de l'Homme, tourmente déjà le Louvre et Versailles. Une notable partie des salles du Louvre reste fermée pendant de longs intervalles ; la galerie des Batailles de Versailles et son riche musée des Portraits - conçus avec soin sous Louis-Philippe pour enseigner l'histoire de leur pays aux jeunes Français, et qui seraient aujourd'hui, si l'on se souciait d'eux, une révélation pour les enfants d'immigrés - restent à demeure inaccessibles au public. Ils ne sont pas seuls dans ce cas. Il est peu de musées en France dont toutes les salles soient ouvertes. Le musée d'Art moderne enclavé dans le Centre Pompidou ne montre qu'une anthologie. La fuite en avant dans la diffusion de la "culture" aboutit à une rétraction sans précédent des voies d'accès du public aux chefs-d'oeuvre des arts.

La "culture" ne supposant aucune formation, cette "jivarisation" se communique à l'enseignement des arts. Le ministère de la Culture a eu beau récupérer celui de l'architecture, qui naguère était parti au ministère de l'Equipement, on n'étudie plus en France l'histoire de l'architecture dans les écoles où se forment les futurs architectes. Où est le temps, qui a duré près d'un siècle, où il ne se construisait pas d'édifice important en Amérique qui ne fût conçu dans le style Beaux-Arts par des architectes locaux, mais longuement formés à dure école à Paris ? Aujourd'hui, les futurs architectes formés en France potassent les sciences sociales, ils ont désappris à dessiner et leur mémoire ne remonte pas au-delà de Le Corbusier. Ce déni d'éducation va dans le même sens que l'abandon du musée des Monuments français et l'extrême rareté à Paris d'expositions relatives à l'architecture. Elles risqueraient sans doute d'éduquer l'oeil critique du public.

On m'objectera le soin et la dépense consacrés par l'Etat à la restauration du vaste parc des grands monuments classés lui appartenant, et notamment des cathédrales auxquelles le romantisme a définitivement attaché le coeur du public français et international. C'est là en effet que la tradition inaugurée par la monarchie de Juillet est la plus tenace. Elle trace nettement la différence entre le bien commun (et même l'intérêt général, qui bénéficie du tourisme) dont l'Etat se tient pour responsable dans les pays d'antique civilisation comme la France et les autres nations européennes et la conception étroite que peut s'en faire le gouvernement fédéral américain. L'ex-président Bill Clinton a pu déclarer, peu avant de quitter la Maison-Blanche : "Tant que nous préférerons l'ambition de l'avenir à l'attachement au passé, nous serons la plus puissante nation du monde." En Europe, et notamment en France, l'attachement au passé, inséparable de l'ambition de l'avenir, devrait retenir celle-ci sur la pente de la mégalomanie et de la paranoïa. »

Marc Fumaroli

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Source : Le Point


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