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31/03/2022

Ce beau front d'où s'est retiré la pensée

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Agenouillé auprès de Jacques Maritain dans la chambre où Raïssa Maritain repose, je regarde avidement ce beau front d'où s'est retiré la pensée, et qui en garde pourtant le rayonnement. Le corps devenu chose devrait être pareil aux choses (ce que devient d'ailleurs une bête morte). Vous avez beau dire que vous ne croyez pas à l'âme : elle ne me semble jamais aussi visible que lorsqu'elle n'est plus là : le visage de cette femme deux fois inspirée, puisqu'elle vivait de Dieu et qu'elle était poète, ce visage au moment de se défaire, de retourner en poussière, de n'être plus rien, garde l'empreinte d'une pensée à jamais absente, mais d'infiniment plus qu'une pensée.

Les Maritain... Ils demeuraient les derniers de cette génération catholique qui nous semble grande, à mesure qu'elle s'efface et que derrière elle rien n'apparaît plus, ni personne.
Qui s'est levé derrière Péguy ? Qui donc a allumé son flambeau à ceux de Bernanos et de Claudel, avant qu'ils ne s'éteignent ? J'ai parfois l'impression ou plutôt, je veux le croire, l'illusion, que la relève en France ne se fait plus. Au vrai, elle se fait, il le faut bien, elle ne peut pas ne pas se faire dans l'ordre de la grâce -- mais sur un plan très différent de celui où mon propre destin s'est noué. Quelle voix chrétienne retentit encore dans les lettres ? Existe-t-il quelque part l'équivalent de la maison des Maritain à Meudon, où tant d'écrivains, de poètes, d'artistes, de jeunes prêtres, sont venus s'asseoir pour écouter une parole ou pour s'unir à une prière dans l'étroite chapelle du premier étage ? »

François Mauriac, Bloc-notes -- Dimanche 6 Novembre 1960

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