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02/04/2014

Nous cherchons à être des espèces d’hommes globaux fantasmatiques

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« Nous ne savons même pas où il vit, ce vivant-là, et ce qu’il est vraiment, et comment il s’appelle ! Laissez-nous seuls, sans livres, et nous serons perdus, abondonnés, nous ne saurons pas à quoi nous accrocher, à quoi nous retenir ; quoi aimer, quoi haïr, quoi respecter, quoi mépriser ? Même être des hommes, cela nous pèse – des hommes avec un corps réel, à nous, avec du sang ; nous avons honte de cela, nous prenons cela pour une tache et nous cherchons à être des espèces d’hommes globaux fantasmatiques. Nous sommes morts-nés, et depuis longtemps, les pères qui nous engendrent, ils sont des morts eux-mêmes, et tout cela nous plaît de plus en plus. On y prend goût. Bientôt nous inventerons un moyen pour naître d’une idée. Mais – ça suffit ; je n’ai plus envie d’écrire, moi, du fond de mon "sous-sol"… »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Carnets du sous-sol

 

 

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J'ai mon sous-sol

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« Anéantissez-moi mes désirs, effacez-moi mes idéaux, montrez-moi quelque chose de mieux et je vous suivrai. Je suppose que vous me répondrez que je fais beaucoup d'histoires pour rien -auquel cas je vous réponds la même chose. Nous parlons sérieusement ; si vous ne voulez pas me faire l'honneur de m'écouter, je ne vous retiens pas. J'ai mon sous-sol. »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Carnets du sous-sol

 

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Com­ment pourrais-je sup­porter le con­tact des catholiques mod­ernes qui croient pos­si­ble de con­join­dre le cadavre du passé avec la charogne du temps présent ?

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« L’accroissement con­tin­uel des dif­fi­cultés de la sub­sis­tance matérielle a beau aver­tir les plus épais du détraque­ment de la mécanique sociale, et la rage vis­i­ble des entre­pre­neurs d’anarchie a beau gron­der autour d’eux de plus en plus fort; ils ont des doc­teurs pour leur enseigner que tout cela n’est qu’une crise pas­sagère, effet d’une exces­sive ten­sion des ressorts, et qu’aussitôt après la vic­toire dont ils répon­dent, hommes et choses repren­dront leur équili­bre. Si ce n’est pas pré­cisé­ment l’âge d’or qu’ils promet­tent, ce sera peut être l’âge d’argent ou, au pis aller, «l’âge du papier» qui paraît avoir com­mencé déjà.

Les intel­lectuels au front d’airain font sans doute une plus large part au mal­heur des temps et vont même jusqu’à regarder comme improb­a­ble une resti­tu­tion immé­di­ate du bon­heur par­fait, mais les uns et les autres ont foi en l’Humanité qui doit accom­plir tous les miracles.

Com­ment ne serais-je pas seul, n’ayant que du mépris pour cette human­ité sup­plan­ta­trice de son Créa­teur et con­sid­érant comme des impos­tures ineptes du Démon tous les lieux com­muns de pro­grès, de civil­i­sa­tion, de poli­tique et surtout de démoc­ra­tie qui ont rem­placé depuis si longtemps la con­fi­ance en Dieu ?

Com­ment pourrais-je sup­porter le con­tact des catholiques eux-mêmes, des catholiques mod­ernes qui croient pos­si­ble de con­join­dre le cadavre du passé avec la charogne du temps présent et qui rêvent je ne sais quelle restau­ra­tion de la vieille bâtisse royale où une niche à chien de garde serait offerte à Notre Seigneur Jésus-Christ ?… La sot­tise de ces prédes­tinés au mas­sacre me paraît encore plus impie que l’idiote fureur des pires sec­taires. »

Léon Bloy, Médi­ta­tions d’un soli­taire

 

 

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Mes petites passions étaient aiguës, brûlantes à cause de mes nerfs toujours malades

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« Ce que je faisais surtout à la maison, c’est que je lisais. Je voulais que des impressions extérieures viennent étouffer ce qui bouillait sans cesse au fond de moi. Et, pour moi, les seules impressions extérieures venaient de la lecture. La lecture, cela va de soi, m’aidait beaucoup -elle me passionnait, elle me comblait, me torturait. Mais, quelquefois, elle m’ennuyait à mort. Quand même, j’avais besoin de bouger et je me plongeais alors, je ne dirai pas dans la débauche -mais dans une débauchette, obscure, souterraine et sale. Mes petites passions étaient aiguës, brûlantes à cause de mes nerfs toujours malades. Il y avait des à-coups hystériques, avec des larmes et des convulsions. En dehors de la lecture, il n’ y avait pas d’issue -c’est-à-dire que je n’avais rien que j’aurais pu admirer dans mon entourage et qui aurait pu m’entraîner. Et puis, l’angoisse qui s’accumulait ; je voyais monter un désir hystérique de contradictions, de contrastes -et je me lançais dans la débauche…Si je viens de raconter tout ça, ce n’est pas du tout pour me justifier…Encore que -non ! mensonge ! Si, justement, je voulais me justifier. Note à usage interne, messieurs. Je ne veux plus mentir. J’ai promis. »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Carnets du sous-sol

 

 

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Réduire à néant l’identité des individus

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« La dénonciation de tout pouvoir, de l’identité, de l’ethnocentrisme de la nation, est enseignée comme une norme éthique aux masses avec pour effet de les démobiliser et de les décourager, ce à quoi fait écran le miroitement d’une liberté totale, via la technologie ou l’anomie morale, mâtinée de la célébration de l’Autre. (…) De ce point de vue, la théorie du genre vise à réduire à néant l’identité des individus, la théorie de la minorité politique vise à la déréliction de la nation, la théorie du réseau vise à décomposer l’Etat, la théorie de la discrimination positive vise à reléguer dans les marges les citoyens, et l’apologie du non-occidental vise à casser le principe même de l’identité des nations démocratiques. »

Schmuel Trigano, La nouvelle idéologie dominante, le post modernisme

 

 

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Eric Clapton : Double trouble (Live - 1980)

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Eric Clapton

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01/04/2014

Le Changement c'est maintenant...

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Une bonne parole, la parole qu'il faut...

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« Si je ne t’ai pas parlé plus tôt, c’est parce que le temps n’était pas venu. Tout vient en son temps. A quoi bon tenter d’arrêter un cheval, tant qu’il rue et mord, je te demande ? Lorsqu’il est bien las, bien rendu, voilà le moment de lui dire une bonne parole et de lui passer le bridon. Bêtes ou gens, tu n’en trouveras guère qui résistent à une bonne parole, à la parole qu’il faut. Malheureusement, les gens parlent trop. Ils parlent tellement, tellement ils parlent que, le jour venu, leurs paroles n’ont plus de pouvoir, elles sont comme la poussière... »

Georges Bernanos, Nouvelle Histoire de Mouchette

 

 

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Ceux qui se servent de la phraséologie libérale pour défendre des privilèges anti-sociaux

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« La lenteur des progrès de la politique libérale, la juste irritation contre ceux qui se servaient de la phraséologie libérale pour défendre des privilèges anti-sociaux, et l’ambition illimitée que légitimaient en apparence les améliorations matérielles déjà atteintes, tout cela fit que vers la fin du siècle la croyance dans les principes essentiels du libéralisme fut de plus en plus abandonnée. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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Can't Find a Job...

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Le libéralisme n'est pas une idéologie

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« Il n’y a rien dans les principes du libéralisme qui permette d’en faire un dogme immuable ; il n’y a pas de règles stables, fixées une fois pour toutes. Il y a un principe fondamental : à savoir que dans la conduite de nos affaires nous devons faire le plus grand usage possible des forces sociales spontanées, et recourir le moins posible à la coercition. Mais ce principe peut comporter une infinie variété d’applications. Il y a, en particulier, une immense différence entre créer délibérément un système où la concurrence jouera le rôle le plus bien-faisant possible, et accepter passivement les institutions telles qu’elles sont.  »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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La liberté individuelle...

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« Un des résultats les plus importants de la libération des énergies individuelles a peut-être été le merveilleux développement de la science qui a suivi le mouvement de la liberté individuelle d’Italie en Angleterre et au-delà. Certes, les facultés inventives de l’homme n’avaient pas été moindres auparavant. On avait su construire un grand nombre de jouets et d’autres mécaniques, cependant que la technique industrielle demeurait stationnaire. D’autres part, les industries qui n’avaient pas été soumises à des contrôles restrictifs, comme l’industrie minière et l’horlogerie, avaient fait de grands progrès. Mais les rares tentatives faites pour étendre l’usage industriel des inventions mécaniques, dont certaines étaient remarquablement perfectionnées, furent rapidement étouffées. Le désir de s’instruire fut frustré aussi longtemps que les idées dominantes restèrent obligatoires pour tous. Les croyances et l’éthique de la majorité barraient la route à tout novateur. Mais, dès que la liberté industrielle eut ouvert la voie au libre usage des connaissances nouvelles, dès que tout homme capable de courir un risque eut reçu la possibilité de tenter n’importe quelle expérience, souvent à l’insu des autorités chargées de surveiller l’enseignement, alors, et alors seulement la science put faire les immenses progrès qui, au cours des cent cinquante dernières années, ont changé la face de l’univers. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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Eric Clapton : She Rides

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Eric Clapton

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31/03/2014

Qu’est ce qu’une société disneylandisée ?

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« Ce qu’il y a quand même de fascinant dans tout cela, ce qu’il y a d’attirant presque, ce sont les milles facettes de la bêtise éternelle que le sport incarne : la stupidité du muscle intensif, le crétinisme de la force, la niaiserie de l’exercice méthodique, l’optimisme absurde du dépassement de soi et de la répétition de ce dépassement, la sottise de la performance comme argument. Et j’oubliais l’insanité suprême, le rêve sportif absolu de la grande fraternité des peuples ; laquelle d’ailleurs, sur le terrain, se traduit automatiquement par son contraire radical (c’est Dieu merci,  le destin de toutes les bonnes intentions), c’est à dire le chauvinisme le plus sordide. Cela m’a toujours réjoui, moi d’apprendre la défaite de la France à telle ou telle répugnante compétition internationale, à cause de la tête catastrophée de la plupart de mes concitoyens. Comme atteinte au moral de la nation, comme détérioration de son image, comme déstabilisation de sa réputation, une défaite de l’équipe de France aux cauchemardesques Jeux Olympiques peut avoir son intérêt. Mais que cet intérêt est faible comparé à la tyrannie bienveillante dont le sport, dans la société disneylandisée d’aujourd’hui, est devenu l’un des moteurs essentiels.

Qu’est ce qu’une société disneylandisée ? Peut-être appelée ainsi toute société où les maîtres sont maîtres des attractions et les esclaves spectateurs ou acteurs de celles-ci. N’oublions pas que le mot sport est couplé avec loisir, cet autre vocable antipathique. Qui dit sport dit week-end, dimanches, vacances ; donc familles, communautés, donc renforcement à perpétuité de l’infâme contrat social. Peut-être nommée disneylandienne toute société qui contraint aux loisirs - et qui songerait à se révolter contre une oppression qui ne communique, au fond, que l’ordre de s’amuser ? Qui refuserait les planches à voiles, les skis, , les camping-cars et les autoroutes pour aller dessus ? Et qu’on aille pas non plus me parler de "culture" sportive, encore moins d’ "art" bien entendu ! Aucun tableau de Picasso ne ressemble à un tableau de Rembrandt (même pas à un autre tableau de Picasso), alors qu’un match ressemble toujours à un autre match. C’est toujours le même Tour de France, toujours la même Coupe du monde, toujours les même voitures ridicules sur leurs circuits grondants… »

Philippe Muray, Désaccord parfait

 

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Il n’y avait jamais rien eu qui ressemblât à ma grand-mère

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« Bouleversement de toute ma personne. Dès la première nuit, comme je souffrais d’une crise de fatigue cardiaque, tâchant de dompter ma souffrance, je me baissai avec lenteur et prudence pour me déchausser. Mais à peine eus-je touché le premier bouton de ma bottine, ma poitrine s’enfla, remplie d’une présence inconnue, divine, des sanglots me secouèrent, des larmes ruisselèrent de mes yeux. L’être qui venait à mon secours, qui me sauvait de la détresse de l’âme était celui, qui, plusieurs années auparavant, dans un moment de détresse et de solitude identique, dans un moment où je n’avais plus rien de moi, était entré, et m’avait rendu à moi-même, car il était moi et plus que moi (le contenant qui est plus que le contenu et me l’apportait). Je venais d’apercevoir, dans ma mémoire, penché sur ma fatigue, le visage tendre, préoccupé et déçu de ma grand-mère, telle qu’elle avait été ce premier soir d’arrivée ; le visage de ma grand-mère, non pas de celle que je m’étais étonné et reproché de si eu regretter et qui n’avait d’elle que le nom, mais de ma grand-mère véritable, où pour la première fois depuis les Champs-Elysées où elle avait eu son attaque, je retrouvais dans un souvenir involontaire et complet la réalité vivante. Cette réalité n’existe pas pour nous tant qu’elle n’a pas été recrée par notre pensée (sans cela les hommes qui ont été mêlés à un combat gigantesque seraient tous de grands poètes épiques) ; et ainsi, dans un désir fou de me précipiter dans ses bras, ce n’était qu’à l’instant – plus d’une année après son enterrement –que je venais d’apprendre qu’elle était morte. J’avais souvent parlé d’elle depuis ce moment-là, et aussi pensé à elle, mais sous mes paroles et mes pensées de jeune homme ingrat, égoïste, et cruel, il n’y avait jamais rien eu qui ressemblât à ma grand-mère, parce que, dans ma légèreté, mon amour du plaisir, mon accoutumance à la voir malade, je ne contenais en moi qu’à l’était virtuel le souvenir de ce qu’elle avait été. A n’importe quel moment que nous la considérions, notre âme totale n’a qu’une valeur presque fictive, malgré le nombreux bilan de ces richesses, car tantôt les unes, tantôt les autres sont indisponibles qu’ils s’agisse d’ailleurs de richesses effectives aussi bien que de celles de l’imagination, et pour moi par exemple, tout autant que de l’ancien nom de Guermantes, de celles combien plus graves, du souvenir vrai de ma grand-mère. Car aux troubles de la mémoire sont liées les intermittences du cœur. C’est dans doute l’existence de notre corps, semblable pour nous à un vase où notre spiritualité serait enclose, qui nous induit  à supposer que tous nos biens intérieurs, nos joies passées, toutes nos douleurs sont perpétuellement en notre possession. Peut-être est-il aussi inexact de croire qu’elles s’échappent ou reviennent. En tout cas si elles restent en nous, c’est la plupart du temps dans un domaine inconnu où elles ne sont de nul service pour nous, et où même les plus usuelles sont refoulées par des souvenirs d’ordre différent et qui excluent toute simultanéité avec elles dans la conscience. Mais si le cadre de sensations où elles sont conservées est ressaisi, elles ont à leur tour le même pouvoir d’expulser ce qui est incompatible, d’installer seul en nous, le moi qui les vécut. Or comme celui que je venais subitement de redevenir n’avait pas existé depuis ce soir lointain où ma grand-mère m’avait déshabillé à mon arrivée à Balbec, ce fut tout naturellement, non pas après la journée actuelle que ce moi ignorait, mais – comme s’il y avait dans le temps des séries différentes et parallèles – sans solution de continuité, tout de suite après le premier soir d’autrefois, que j’adhérai à la minute où ma grand-mère s’était penchée vers moi. Le moi que j’étais alors et qui avait disparu si longtemps, était de nouveau si près de moi qu’il me semblait encore entendre les paroles qui avaient immédiatement précédé et qui n’étaient pourtant plus qu’un songe, comme un homme mal éveillé croit percevoir tout près de lui les bruits de son rêve qui s’enfuit. Je n’étais plus que cet être qui cherchait à se réfugier dans les bras de sa grand-mère, à effacer les traces de ses peines en lui donnant des baisers, cet être que j’aurais eu à me figurer, quand j’étais tel ou tel de ceux qui s’étaient succédé en moi depuis quelque temps, autant de difficulté que maintenant il m’eût fallu d’efforts, stériles d’ailleurs, pour ressentir les désirs et les joies de l’un de ceux que, pour un temps du moins, je n’étais plus. Je me rappelais comme, une heure avant le moment où ma grand-mère s’était penchée ainsi, dans sa robe de chambre, vers mes bottines, errant dans la rue étouffante de chaleur, devant le pâtissier, j’avais cru que je ne pourrais jamais dans le besoin que j’avais de l’embrasser, attendre l’heure qu’il me fallut encore passer sans elle. Et maintenant que ce même besoin renaissait, je savais que je pouvais attendre des heures après des heures, qu’elle ne serait plus jamais auprès de moi, je ne faisais que le découvrir parce que je venais, en la sentant pour la première fois vivante, véritable, gonflant mon cœur à le briser, en la retrouvant enfin, d’apprendre que je l’avais perdue pour toujours. Perdue pour toujours ; je ne pouvais comprendre et je m’exerçais à subir la souffrance de cette contradiction : d’une part, une existence, une tendresse, survivantes en moi telles que je les avais connues, c’est à dire faites pour moi, un amour où tout trouvait tellement en moi son complément, son but, sa constante direction, que le génie des grands hommes, tous les génies qui avaient pu exister depuis le commencement du monde  n’eussent pas valu pour ma grand-mère un seul de mes défauts ; et d’autre part, aussitôt que j’avais revécu, comme présente, cette félicité, la sentir traversée par la certitude, s’élançant comme une douleur physique à répétition, d’un néant qui avait effacé mon image de cette tendresse, qui avait détruit cette existence, aboli rétrospectivement notre mutuelle prédestination, fait de ma grand-mère, au moment où je la retrouvais comme dans un miroir, une simple étrangère qu’un hasard a fait passer quelques années auprès de moi, comme cela aurait pu être auprès de tout autre, mais pour qui, avant et âpres, je n’étais rien, je ne serais rien. »

Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe

 

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Le mot individualisme est assez malsonnant de nos jours...

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« La tendance moderne vers le socialisme signifie une rupture brutale, non seulement avec le passé récent, mais encore avec toute l’évolution de la civilisation occidentale. On s’en rend compte en considérant cette tendance, non plus seulement dans le cadre du XIXe siècle, mais dans une perspective historique plus vaste. Nous abandonnons rapidement, non seulement les idées de Cobden et de Bright, d’Adam Smith et de Hume, ou même de Locke et de Milton, mais encore une des caractéristiques les plus saillantes de la civilisation occidentale telle qu’elle s’est édifiée sur les fondations posées par le christianisme, par la Grèce et par Rome. Ce qu’on abandonne peu à peu, ce n’est pas simplement le libéralisme du XIXe et du XVIIIe siècle, mais encore l’individualisme fondamental que nous avons hérité d’Erasme, et de Montaigne, de Cicéron et de Tacite, de Périclès et de Thucydide.
Le chef nazi qui a défini la révolution nationale-socialiste comme une Contre-Renaissance ne savait peut-être pas à quel point il disait vrai. Cette révolution a été l’acte essentiel de destruction d’une civilisation que l’homme édifiait depuis l’époque de la Renaissance et qui était avant tout individualiste. Le mot individualisme est assez malsonnant de nos jours, et il a fini par évoquer l’égoïsme. Mais l’individualisme dont nous parlons pour l’opposer au socialisme et à toutes les autres formes de collectivisme n’a pas nécessairement de rapport avec l’égoïsme. Ce n’est que petit à petit qu’il nous sera possible au cours de cet ouvrage d’expliquer le contraste entre les deux principes. En quoi consiste donc cet individualisme dont les éléments, fournis par le christianisme et par l’antiquité classique, ont connu leur premier développement complet lors de la Renaissance et sont ensuite devenus ce que nous appelons la civilisation de l’Europe occidentale ? Respecter l’individu en tant que tel, reconnaître que ses opinions et ses goûts n’appartiennent qu’à lui, dans sa sphère, si étroitement qu’elle soit circonscrite, c’est croire qu’il est désirable que les hommes développent leurs dons et leurs tendances individuels. On a tant usé du mot « liberté » qu’on hésite à l’employer pour définir l’idéal qu’il a représenté depuis la Renaissance. Le mot "tolérance" est peut-être le seul à conserver la pleine signification d’un principe qui, après une longue ascension, a connu depuis peu un rapide déclin et a fini par disparaître complètement avec l’apparition de l’Etat totalitaire.
La transformation progressive d’un système rigidement hiérarchique en un régime où l’homme peut au moins essayer de modeler son destin, où il a l’occasion de connaître plusieurs genres de vie et de choisir entre eux, cette transformation est étroitement liée au développement du commerce. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

 

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Déterminer les circonstances qui, au cours des dernières soixante-dix années, ont permis la croissance progressive et enfin la victoire d’une certaine catégorie d’idées

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« Nous ne réussirons jamais dans notre politique avec les Allemands tant que nous ne comprendrons pas le caractère et le développement des idées qui les gouvernent aujourd’hui. La théorie suivant laquelle les Allemands seraient atteints d’un vice congénital n’est guère soutenable et ne fait pas honneur à ceux qui la professent. Elle déshonore les innombrables Anglais qui, au cours des derniers siècles, ont allégrement adopté ce qu’il y avait de meilleur, et aussi le reste, dans la pensée allemande. Elle néglige le fait qu’il y a quatre-vingts uns John Stuart Mill s’est inspiré, pour son essai Sur la Liberté, avant tout de deux Allemands, Goethe et Guillaume de Humboldt. Elle oublie que deux des précurseurs intellectuels les plus importants du nazisme, Thomas Carlyle et Chamberlain, étaient l’un Ecossais et l’autre Anglais.

Sous sa forme la plus vulgaire, cette théorie déshonore ceux qui, en l’adoptant, adoptent en même temps le racisme allemand. Il ne s’agit pas de savoir pourquoi les Allemands sont méchants. Ils n’ont probablement pas plus de méchanceté congénitale qu’aucun autre peuple. Il s’agit de déterminer les circonstances qui, au cours des dernières soixante-dix années, ont permis la croissance progressive et enfin la victoire d’une certaine catégorie d’idées, et de savoir pourquoi cette victoire a fini par donner le pouvoir aux plus méchants d’entre eux. Haïr tout ce qui est allemand, et non pas les idées qui dominent aujourd’hui l’Allemagne, est de plus très dangereux. Cette attitude masque aux yeux de ceux qui la prennent une menace très véritable. Elle n’est bien souvent qu’une manière d’évasion à laquelle recourent ceux qui ne veulent pas reconnaître des tendances qui n’existent pas seulement en Allemagne, et qui hésitent à réexaminer, et au besoin à rejeter, des croyances que nous avons prises chez les Allemands et qui nous abusent tout autant qu’elles abusent les Allemands eux-mêmes. Double danger : car en prétendant que seule la méchanceté allemande est cause du régime nazi, on a un prétexte pour nous imposer les institutions qui ont précisément déterminé cette méchanceté. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

 

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30/03/2014

Pornographie sur demande pour nos enfants...

=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=

 

Planère Stars ça s'appelle... le genre de presse people à la con pour gamin pré-pubère en mal de potins à propos de ses idoles construites à grands coups de marketing savamment orchestrés. Dans les cours des écoles primaires, au lieu de jouer aux billes ou aux gendarmes et aux voleurs, comme au temps jadis, les marmots s'échangent les dernières nouvelles à propos de leurs chanteurs, acteurs et boys band préférés. Les parfums de glace qu'ils préfèrent, leurs peines de coeurs, leurs espoirs pour un monde meilleur... ce genre de connerie qui touchaient, avant, plutôt les adolescents. Mais les temps ont changés... Bob Dylan nous avait prévenus...

 

 

 

Le dernier numéro en date était consacré aux acteurs du soap-opéra "Violetta"... Haut niveau. Le genre de magazine que certains parents achètent à leurs jeunes enfants en soupirant et en se disant que ça leur passera.

Et que trouve-t-on comme publicité dans ces magazines pour enfants pré-adolescents ? Oh, rien ma bonne Dame, rien qui ne soit normal aujourd'hui...

Mais le mieux est que vous alliez voir, par vous-mêmes, les trois liens PDF juste en-dessous et que vous aggrandissiez le visuel... c'est édifiant.

Planète Stars - 1.PDF

Planète Stars - 2.PDF

Planète Stars - 3.PDF

 

Voyez aussi ce lien...

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29/03/2014

L'Islam et ses schémas de pensée involontaires, par Daniel Pipes

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

 

Comment l'Islam façonne-t-il la vie des musulmans ? Les prescriptions religieuses officielles sont à la base d'une structure beaucoup plus large d'habitudes qui donnent aux règles formelles de l'islam une portée aussi inattendue qu'imprévue. Quelques exemples :

Par l'interdiction formelle de la consommation de porc, le Coran a entraîné une disparition presque totale des cochons domestiqués dans les régions à majorité musulmane au profit des moutons et des chèvres. Ces derniers ont provoqué un surpâturage qui a conduit, comme l'a fait remarquer le géographe Xavier de Planhol à un « déboisement catastrophique » qui a été à son tour « une des raisons fondamentales de la nudité particulièrement sensible des pays islamiques méditerranéens ». On remarquera cette progression des injonctions coraniques sur le plan alimentaire jusqu'à la désertification sur de vastes étendues de terres. Le prescrit du texte sacré n'avait pas pour intention de provoquer des dommages écologiques mais c'est ce qui est pourtant arrivé.

L'exigence inaccessible des normes définies par l'islam quant au comportement des gouvernants s'est traduite dans l'histoire par le fait que les dirigeants en place, par leurs nombreux défauts, se sont aliéné leurs sujets musulmans qui ont, en retour, refusé de servir ces dirigeants dans l'administration et l'armée, forçant les gouvernants à rechercher du personnel ailleurs. Avec pour conséquence un déploiement systématique d'esclaves dans l'armée et l'administration, générant ainsi une façon de gouverner qui, apparue au VIIIe siècle, allait durer un millénaire.

 


Les Janissaires de l'empire Ottoman ont été le corps d'esclaves soldats le plus important et détenant le record de longévité.

 

Le sentiment de supériorité musulmane et le mépris pour la foi et la civilisation des autres instillés par la doctrine islamique ont eu deux implications majeures à l'époque contemporaine : ils ont fait des musulmans les groupes les plus rebelles au pouvoir colonial et les ont empêchés de s'inspirer de l'Occident pour se moderniser.

Les textes sacrés de l'islam inculquent également envers les non-musulmans une hostilité qui en retour engendre le sentiment que les non-musulmans nourrissent une hostilité semblable envers les musulmans. À l'époque contemporaine, cette projection a produit une sensibilité certaine aux théories du complot qui ont eu de nombreuses conséquences pratiques. Par exemple, parce que les musulmans sont les seuls à craindre que le vaccin contre la polio rende leurs enfants stériles, la polio est réellement devenue un fléau propre aux musulmans de 26 pays.

Le pèlerinage annuel à la Mecque, le hajj islamique, a commencé au VIIe siècle comme coutume locale avant de devenir un rassemblement international favorisant les échanges de tout type, depuis les idées islamistes et les mouvements politiques (l'Idrissiya en Libye) jusqu'aux produits de luxe (ivoire), aux plantes (caoutchouc vers l'Asie du Sud-Est, riz vers l'Europe) et aux maladies (méningococcies, infections de la peau, diarrhées infectieuses, maladies transmissibles par le sang, infections de l'appareil respiratoire et peut-être aussi le tout nouveau coronavirus MERS-CoV).

 


Le hajj, à l'origine cérémonie locale, s'est mué en événement international témoin de nombreux échanges.

 

D'autres injonctions de l'islam ont aussi des implications involontaires négatives sur la santé. L'impératif de modestie a amené certaines femmes musulmanes à se couvrir entièrement la tête et le corps (niqabs et burqas), ce qui engendre une carence en vitamine D, décourage l'exercice physique et entraîne toute une série de problèmes médicaux, notamment les éruptions, les maladies respiratoires, le rachitisme, l'ostéomalacie et les scléroses multiples.

Le jeûne diurne du Ramadan conduit souvent les musulmans pratiquants à bouger moins et à « se suralimenter lors de la rupture du jeûne, en consommant des repas généralement composés d'aliments lourds, gras et riches en calories », selon le responsable de l'Emirates Diabetes Society. Une enquête menée à Djeddah, en Arabie Saoudite, a montré que 60 pourcent des personnes interrogées disent se trouver en excès de poids au terme du Ramadan.

 


Paradoxalement, le Ramadan est un mois de jeûne mais aussi de suralimentation.

 

La préférence pour les mariages entre cousins germains, qui rappelle les pratiques tribales préislamiques (dans le but de maintenir les richesses au sein de la famille et de bénéficier de la fertilité des filles) a produit en l'espace d'environ cinquante générations une consanguinité largement répandue aux conséquences négatives comme un taux environ deux fois plus élevé de troubles d'ordre génétique tels que la thalassémie, l'anémie à cellules falciformes, l'amyotrophie spinale, le diabète, la surdité, le mutisme et l'autisme.

Par rapport aux femmes, les injonctions concernant le mahram [homme de la parenté avec qui la femme ne peut se marier, NdT] auxquelles s'ajoute un statut social et légal nettement défavorable, ont créé des schémas comportementaux aussi inattendus que l'isolement physique, l'obsession de la virginité, les crimes d'honneur, les mutilations génitales féminines ainsi que l'apartheid du genre (à la mode saoudienne). La polygamie crée une anxiété permanente chez les femmes.

Les orphelins jouissent d'un statut honorable dans la loi islamique (kafala) mais cet honneur étant lié à une structure tribale incompatible avec la société moderne, les orphelins musulmans subissent à l'heure actuelle des discriminations persistantes, même parmi les musulmans vivant en Occident.

Les textes sacrés de l'islam ont fourni une base à partir de laquelle se sont développées d'autres attitudes-types, notamment : fondation de dynasties par conquête et non par renversements internes ; problèmes récurrents de succession dynastique ; pouvoir menant à la richesse et non l'inverse ; quasi-absence de gouvernements à l'échelon municipal ; gestion inadéquate des villes ; lois résultant de décisions de circonstances au lieu de législations officielles ; transferts d'argent fondés sur le hawala et pratique des attentats suicides.

Les schémas de pensée involontaires, parfois appelés [en anglais] Islamicate, changent selon les époques. Certains (comme les esclaves soldats) finissent par disparaître et d'autres (comme la polio) ne font que commencer. Ces schémas demeurent aussi puissants aujourd'hui que par le passé et constituent la clé de compréhension de l'Islam et de la vie musulmane.

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Source : Daniel Pipes

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Crime de lèse-majesté

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Un dessinateur satyrique a été éjecté du Journal Le Monde, après 32 ans de collaboration... pour un dessin qui a déplu à notre grand président... et que voici. 

 


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Oisiveté

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« J’honore l’homme d’action, mais quand même il ne faudrait pas en faire pulluler l’espèce et encore faudrait-il lui laisser le temps de penser un petit peu à ce qu’il va faire. Je trouve que depuis quelque temps le monde est assez encombré de gens débordés de travail et incapables de trouver seulement une petite heure de temps en temps pour penser tranquillement à leur travail ou, mieux encore, à autre chose. Esclave de son travail, quelle affligeante, quelle misérable formule quand les sots en tirent vanité. Si encore il s’agissait d’un travail digne de ce nom. Pour calculer la surface d’un triangle on pourrait croire que le plus gros du travail est fait quand on a multiplié la base par la hauteur ; travail honnête, loyal, sans arrière-pensée, suffisant et nécessaire. Erreur. Le plus gros du travail consiste à réunir les mille conditions légales administratives, sociales, politiques et fiscales qui vous donnent droit à solliciter les trente-six demandes d’autorisation exigées par les différents offices et organismes de contrôle relatifs au calcul superficiel des triangles. Sans parler du comité d’épuration des triangles. Telle est la déchéance diabolique du travail.

Ce qui paraît un très mauvais signe c’est de voir les oisifs entraînés malgré eux dans cette activité fanatique et cette démence universelle de production ; l’équilibre est rompu, la terre n’a plus son compte de fainéants et, même au printemps, trop de bancs publics sont délaissés le long des avenues pleines de gens pressés. Pire encore : vous avez pu noter que, depuis quelques temps, on fait arracher un grand nombre de bancs jadis plantés en hommage aux précieux oisifs. Et je suis sûr que la vitesse moyenne du citadin à pied a augmenté sinistrement en l’espace d’un siècle, même à Paris. Ils ont tous « un travail fou » et finissent par vénérer la folie de leur travail. Voilà ce que c’est d’avoir proclamé à l’étourdie la sainteté du travail au lieu de s’en tenir tout bonnement à la sainteté du dimanche. Peut-être y eut-il un temps, une société où, dans une certaine mesure, le travail pouvait, à la rigueur, être tenu pour honorable et même, dans certains cas exceptionnels, pour sanctifiant. C’est bien fini. La notion de travail commence à sentir fortement le soufre. Et nous voyons clairement aujourd’hui, à la faveur des monstrueuses mystiques d’action et de production, que la vraie dignité de l’homme, c’est l’oisiveté. »

Jacques Perret , La République et ses Peaux-Rouges : chroniques d'Aspects de la France, T.1, 1948-1952 (15 décembre 1950, "Méditons")

 

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28/03/2014

Derrière le Guichet

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« La barricade n’est plus aujourd’hui le grand instrument social et politique, le grand appareil de gouvernement ou de révolution, le grand appareil de discernement Ce n’est plus la barricade aujourd’hui qui discerne, qui sépare en deux le bon peuple de France, les populations du royaume. C’est un beaucoup plus petit appareil, mais infiniment plus répandu, surtout aujourd’hui, qu’on nomme le guichet. Quelques cadres de bois, plus ou moins mobiles, un grillage métallique, plus ou moins fixé, font tous les frais d’un guichet. C’est pourtant avec cela, c’est avec ce peu que l’on gouverne la France très bien. Format bon ordinaire. Au lieu qu’il fallait des tonneaux, et même des barriques, et si j’ai bonne mémoire des omnibus, presque des immeubles, pour faire une barricade. C’est même sans doute pour cette raison que finalement, c’est du moins une des raisons pour lesquelles vraisemblablement il est finalement venu au monde beaucoup plus de guichets qu’il n’y était jamais poussé de barricades.

C’est que c’était peut-être plus facile à faire. Il suffit d’avoir été soi-même acheter des timbres ou payer ses impôts, que nous nommons contributions, et de comprendre un peu, de savoir un peu lire ce que l’on fait, pour avoir soi-même découvert cette vérité de fait élémentaire. Nous n’avons plus aujourd’hui la barricade discriminante. Nous avons le guichet discriminant. Il y a celui qui est derrière le guichet, et celui qui est devant. Celui qui est assis derrière, et ceux qui sont debout devant, ceux qui défilent, devant, comme à la parade, en on ne sait quelle grotesque parade de servitude librement consentie. Là est la grande, la vraie séparation du peuple de France. Et c’est pour cela que les grands débats politiques de ces dernières années et de cette présente ne parviennent point à me passionner. [...]

Tous ces hommes, tous ces partis qui se battent ou qui font semblant de se battre, je les reconnais aisément pour ce qu’ils sont, je les connais depuis longtemps pour un grand, pour un immense, pour un seul parti. Tous ils appartiennent au même grand et unique parti, qui est le parti de ceux qui sont de l’autre côté du guichet, du bon côté, selon eux. Tous ils appartiennent au même grand et seul parti de la bureaucratie. Ceux qui y sont y tiennent. Ceux qui n’y sont plus ne demandent qu’une chose, qui est d’y revenir. Ceux qui n’y sont pas encore ne demandent qu’une chose, qui est d’y venir. [...]

Bureaucrates sur et contre quiconque est de la menue populace : électeurs, ou simplement inscrits, dans l’ordre politique. et, dans l’ordre économique, imposés, nommés contribuables, ouvriers en révolte ou ouvriers résignés, graine d’électeurs, graine de grévistes, et toujours graine de sacrifiés.

 

Ils se battent, entre eux, mais ils ne se battent que derrière le guichet. On ne se battra jamais à travers le guichet, parce qu’alors, ce serait sérieux. »

Charles Péguy, Cahiers de la quinzaine, De la situation faite au parti intellectuel, 6 octobre 1907 

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Homme-Masse étranger à lui-même...

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« Il n'y a pas de liberté sans enracinement et sans volonté.
L'homme libre : tel est l'idéal unique qu'exalte tradionnellement la culture européenne, les poèmes celtes, les légendes germaniques.
Autonome dans ses choix, responsable de ses actes, l'homme libre est le produit des vertus du génie européen.
Or, c'est lui précisément, qui est menacé par la marche des despotismes extérieurs.
Mais aussi, à l'intérieur, par ce que Konrad Lorenz nomme la contagion de l'endoctrinement et Raymond Ruyer la pollution idéologique.
Egalitarisme, uniformisation des modes de vie, bureaucratisation accélérée, économisme totalitaire, sont en train de changer l'homme libre européen en homme-masse étranger à lui-même. »

Louis Pauwels, Le Figaro-Magazine, 8 octobre 1977

 

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Être Jeune

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« La jeunesse n'est pas une période de la vie,
Elle est un état d'esprit, un effet de la volonté,
Une qualité de l'imagination, une intensité émotive,
Une victoire du courage sur la timidité,
Du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
On ne devient pas vieux pour avoir vécu un certain nombre d'années :
On devient vieux parce qu'on a déserté son idéal.
Les années rident la peau ; renoncer à son idéal ride l'âme.
Les préoccupations, les doutes, les craintes et les désespoirs sont les ennemis qui, lentement,
nous font pencher vers la terre et devenir poussière avant la mort.
Jeune est celui qui s'étonne et s'émerveille.

Il demande comme l'enfant insatiable : Et après ?

Il défie les événements et trouve de la joie au jeu de la vie.
Vous êtes aussi jeune que votre foi. Aussi vieux que votre doute.
Aussi jeune que votre confiance en vous-même.
Aussi jeune que votre espoir.

Aussi vieux que votre abattement.
Vous resterez jeune tant que vous resterez réceptif.
Réceptif à ce qui est beau, bon et grand.

Réceptif aux messages de la nature, de l'homme et de l'infini.
Si un jour, votre cœur allait être mordu par le pessimisme et rongé par le cynisme, puisse Dieu
avoir pitié de votre âme de vieillard. »

Samuel Ullman

 

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27/03/2014

Junky

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"A mesure qu'on s'intoxique, tout le reste perd de son importance. La vie se résume à peu de chose : la piqûre, l'attente de la suivante, la cachette, l'ordonnance, la seringue et le compte-gouttes. Le camé lui-même croit souvent qu'il mène une vie normale et que la drogue n'est qu'un accident de parcours. Il ne voit pas que tout ce qu'il fait à part de se droguer est machinal. Ce n'est que lorsqu'il a épuisé son stock qu'il prend conscience de ce que la drogue représente pour lui."

 "J'allai à la salle de bain pour me piquer. Je mis beaucoup de temps à trouver une veine. L'aiguille se boucha deux fois et le sang coula le long de mon bras. La came se répandit dans mon corps comme une injonction de mort. Le rêve s'était envolé. Je regardai le sang qui coulait de mon coude au poignet. J'eus soudain pitié de ces veines et de cette chair violée. J'essuyai délicatement le sang sur mon bras."

  William S. Burroughs, Junky

 

 

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