17/05/2014
Qui ne méprise pas le mal, ou le bas, pactise avec lui
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« Les vertus que vous cultiverez par-dessus tout sont le courage, le civisme, la fierté, la droiture, le mépris, le désintéressement, la politesse, la reconnaissance, et, d’une façon générale, tout ce qu’on entend par le mot générosité.
Le courage moral, qui a une si bonne presse, est une vertu facile, surtout pour celui qui ne tient nul compte de l’opinion. Si on ne l’a pas, l’acquérir est une affaire de volonté, c’est-à-dire une affaire facile. Par contre, si on n’a pas le courage physique, l’acquérir est une affaire d’hygiène, qui sort du cadre que je me suis tracé ici.
Civisme et patriotisme ne font qu’un, si le patriotisme mérité son nom. Vous êtes d’un pays où il y a du patriotisme par saccades, et du civisme jamais ; où le civisme est tenu pour ridicule. Je vous dis : “Si vous êtes patriote, soyez-le sérieusement”, comme je vous dirais : “Si vous êtes catholique, soyez-le sérieusement”. Je ne fais pas grand cas d’un homme qui défend avec vaillance, en temps de guerre, le pays qu’il a affaibli par mille coups d’épingle en temps de paix. N’ayez pas besoin que votre pays soit envahi pour le bien traiter. Conduisez-vous aussi décemment dans la paix que dans la guerre, si vous aimez la paix.
La vanité, qui mène le monde, est un sentiment ridicule. L’orgueil, fondé, n’ajoute rien au mérite ; quand j’entends parler d’un “bel orgueil”, cela me laisse rêveur. Non fondé, il est lui aussi ridicule. La seule supériorité de l’orgueil sur la vanité, c’est que la vanité attend tout, et l’orgueil rien ; l’orgueil n’a pas besoin de se nourrir, il est d’une sobriété folle. A mi-chemin entre la vanité et l’orgueil, vous choisirez la fierté.
La droiture est ceci et cela, et en outre elle est une bonne affaire. Elle obtient tout ce qu’obtient la rouerie, à moindres frais, à moindres risques, et à moindre temps perdu.
Le désintéressement n’a d’autre mérite que de vous tirer du vulgaire, mais il le fait à coup sûr. Toutes les fois que, pouvant prendre, vous ne prendrez pas, vous vous donnerez à vous-même cent et mille fois plus que vous ne vous fussiez donné en prenant. De toutes les occasions dont vous ne voudrez pas profiter, dans le monde invisible vous vous bâtirez une cathédrale de diamant. La France d’aujourd’hui a créé un certain nombre de mots véritablement obscènes, parmi lesquels celui de resquiller. Ne resquillez pas, fût-ce dans le domaine le plus humble, car cela va du petit au grand.
Le mépris fait partie de l’estime. On peut le mépris dans la mesure où on peut l’estime. Les excellentes raisons que nous avons de mépriser. Qui ne méprise pas le mal, ou le bas, pactise avec lui. Et que vaut l’estime de qui ne sait pas mépriser ? J’avais toujours pensé qu’on pouvait fonder quelque chose sur le mépris ; maintenant je sais quoi : la moralité. Ce n’est pas l’orgueil qui méprise ; c’est la vertu. Aussi sera-t-il beaucoup pardonné à celui qui aura beaucoup méprisé. Et encore j’ajoute ceci : qu’il n’y a pas besoin de n’être pas méprisable, pour mépriser. »
Henry de Montherlant, Lettre d’un père à son fils
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Un homme tout court
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« Un jour, vous me direz peut-être que les conseils que je vous ai donnés ne sont pas adaptés à un homme moderne. A coup sûr : les vertus que je demande de vous sont les plus nuisibles à qui veut "réussir" dans le monde moderne. Mais je ne vous ai pas fait pour que vous fussiez un homme de tel ou tel monde, mais un homme tout court. »
Henry de Montherlant, Lettre d'un père à son fils
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Larmes et Sperme
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« Voilà l’ennui des filles qui font trop bien l’amour : elles nous rendent en larmes, tout le sperme que nous leur donnons. »
Roger Nimier, Le hussard bleu
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15/05/2014
Chacun veut la même chose : chacun sera pareil...
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« Un peu de poison par-ci par-là : cela donne des rêves agréables. Et beaucoup de poison, pour finir : cela donne une mort agréable.
On travaille encore car le travail est un divertissement. Mais on prend soin que le divertissement ne soit pas trop fatiguant [...].
Point de berger et un troupeau. Chacun veut la même chose : chacun sera pareil, celui qui sentira les choses autrement, ira volontairement à l'asile d'aliénés. »
Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra - Le Prologue de Zarathoustra
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Ne pas être le berger et le chien d'un troupeau
=--=Publié dans la Catégorie "Friedrich Nietzsche"=--=
« Zarathoustra ne doit pas être le berger et le chien d'un troupeau !
Pour détourner beaucoup de gens du troupeau — voilà pourquoi je suis venu. Que la foule et le troupeau soient en colère contre moi : ce que veut Zarathoustra, c'est que les bergers l'appellent brigand.
Bergers, dis-je, mais eux-mêmes ils se nomment les bons et les justes. Bergers dis-je : mais eux-mêmes ils se nomment les croyants de la vraie loi.
Voyez les bons et les justes ! Qui haïssent-ils le plus ? Celui qui brise les tables de leurs valeurs, le destructeur, le criminel — mais celui-là c'est le créateur. Des compagnons, voilà ce que cherche le créateur et non pas des cadavres et non pas des troupeaux et des croyants.
Ceux qui créent avec lui c'est eux que le créateur cherche, ceux qui inscrivent des valeurs neuves sur des tables neuves.
Des compagnons, voilà ce que cherche le créateur, qui puissent moissonner avec lui, car chez lui, tout est prêt pour la récolte. Mais ce sont les cent faucilles qui lui manquent : aussi doit-il arracher les épis à poignées et il s'en irrite.
Des compagnons, voilà ce que cherche le créateur, et de ceux qui savent affûter leurs faucilles. On les appellera destructeurs et détracteurs du bien et du mal. Mais ce sont eux les moissonneurs, ce sont eux qui célèbrent les fêtes.
Des compagnons, voilà ce que cherche Zarathoustra pour créer, moissonner, célébrer les fêtes : qu'a-t-il à faire de troupeaux, de bergers et de cadavres ? »
Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra - Le Prologue de Zarathoustra
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C'est sur des irrationalités que la raison construit
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« Hegel rendit célèbre son aphorisme d'après lequel tout ce qui est rationnel est réel, et tout ce qui est réel, rationnel. Mais nous sommes nombreux à ne pas être convaincus par Hegel, à continuer à croire que ce qui est réel, ce qui est réellement réel, est irrationnel ; que c'est sur des irrationalités que la raison construit. Hegel, grand auteur de définitions, prétendit avec elles reconstruire l'univers, semblable à ce sergent d'artillerie qui pensait que les canons se fabriquaient en se munissant d'un trou, qu'on recouvrait ensuite de fer. »
Miguel de Unamuno, Du sentiment tragique de la vie
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14/05/2014
Amour, Gloire (autrichienne) et Beauté...
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Ach ! zes zotrichiens, douchour le zens dé la grandiloquence... Tonton Hitler et Tata Wurst !
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Recueillir plus d'âmes en un jour que Jésus-Christ en 2000 ans
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« Comment le plus infime crétin, le canard le plus rebutant, la plus désespérante donzelle peuvent-ils se muer en dieux et déesses ? Recueillir plus d'âmes en un jour que Jésus-Christ en 2000 ans ? C'est que la foule à genoux a le goût du faux, de l'or et de la merde, plus insignifiante est l'idole plus elle a de chances de conquérir le coeur de la foule... »
Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un Massacre
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13/05/2014
Une convulsion de cette société
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« Les Allemands séduits par la facilité se remettaient à tirer. Et comment. Quelle dégelée de balles. Ces balles, c'est du minerai, sorti des entrailles de la terre, qui vous jaillit à la figure. Et c'est conjointement une convulsion de cette société. C'est si facile de déchirer un centimètre de chair avec une tonne d'acier. »
Pierre Drieu la Rochelle, La Comédie de Charleroi
16:15 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Une voiture de course
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« Le seul avantage serait d’acheter une voiture de course qui me permettrait de me tuer : cela me donnerait ce côté humain et touchant qui me manque prodigieusement, si j’en crois les critiques. »
Roger Nimier, Les Enfants tristes
14:26 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
La merde a de l'avenir...
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« La merde a de l'avenir, vous verrez qu'un jour on en fera des discours. »
Louis-Ferdinand Céline
11:02 Publié dans Brèves | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
11/05/2014
Rien n'est aussi répugnant, chez les êtres soi-disant cultivés, chez les sectateurs des "idées modernes", que leur manque de pudeur
=--=Publié dans la Catégorie "Friedrich Nietzsche"=--=
« On a fait un grand pas en avant lorsqu'on a fini par inculquer aux grandes masses (aux esprits plats qui ont la digestion rapide) ce sentiment qu'il est défendu de toucher à tout, qu'il y a des événements sacrés où elles n'ont accès qu'en ôtant leurs souliers et auxquels il ne leur est pas permis de toucher avec des mains impures, — c'est peut-être le point le plus élevé d'humanité qu'ils peuvent atteindre. Au contraire, rien n'est aussi répugnant, chez les êtres soi-disant cultivés, chez les sectateurs des "idées modernes", que leur manque de pudeur, leur insolence familière de l'œil et de la main qui les porte à toucher à tout, à goûter de tout et à tâter de tout ; et il se peut qu'aujourd'hui, dans le peuple, surtout chez les paysans, il y ait plus de noblesse relative du goût, plus de sentiment de respect, que dans ce demi-monde des esprits qui lisent les journaux, chez les gens cultivés. »
Friedrich Nietzsche, Par-delà le bien et le mal ; partie IX, chapitre "Qu'est-ce qui est noble ?"
19:39 Publié dans Friedrich Nietzsche | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Ceci n'est plus une femme...
19:23 Publié dans Gender... | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
09/05/2014
Une pin-up affriolante derrière, ou devant, chaque objet
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« Bref, si Marx avait lu Sade, il aurait sans doute compris que le capitalisme disposait d’une réserve fantastique : la démocratisation de la jouissance de l’objet. (…)
Le personnage de la pin-up n’a, à l’évidence, pas été inventé par hasard au moment de la crise de 1929. Il est au contraire un élément essentiel à la compréhension d’une époque. En d’autres termes, pour comprendre quelque chose au capitalisme sadien dans lequel nous vivons depuis trois générations, il faut regarder, voire même contempler une pin-up dans une de ces nombreuses situations sadiennes soft où ce personnage s’est alors retrouvé jeté.(…) C’est ce personnage culturel sadien devenu mythique, qui a véritablement sauvé le capitalisme de la crise de 1929 et, par là, changé le cours du monde. (…) Le capitalisme, en effet, aurait dû alors mourir, victime d’une crise majeure de surproduction, comme Marx l’avait annoncé. Mais la pin-up arriva et relança progressivement la machine en se montrant capable d’érotiser à outrance n’importe quel objet manufacturé que les consommateurs n’eurent plus qu’à acheter en masse, moyennant le formatage et l’exploitation industrielle de leur énergie libidinale. Le marché est ainsi devenu peu ou prou pornographe : il y avait une pin-up affriolante derrière, ou devant, chaque objet. »
Dany-Robert Dufour, La Cité perverse
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Nos vies sont immergées dans l’expérience directe des nombres entiers
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« L’enfant sait – nous savons tous – comment certains types d’objets se comportent. Nos vies sont immergées dans l’expérience directe des nombres entiers : combien il y a de pièces de monnaie, de timbres, de cailloux, d’oiseaux, de chats de moutons, d’autobus. Si j’essayais de convaincre un enfant de six ans que je peux mettre trois pierres dans une boîte, en enlever une, et me retrouver avec quatre, il se moquerait tout simplement de moi. Pourquoi ? Ce n’est pas seulement parce qu’il est sûr d’avoir, à de nombreuses reprises, retiré un objet parmi trois pour qu’il en reste deux. Même un enfant comprend que certaines choses qui paraissent fiables finiront par ne plus marcher : un jouet qui fonctionne parfaitement, jour après jour, pendant un mois ou un an, peut toujours se casser. Mais pas l’arithmétique, pas le fait d’enlever un à trois. Ça, il ne peut même pas imaginer que ça ne marche plus. Quand on a vécu dans le monde, quand on a vu comment il fonctionne, la faillite de l’arithmétique devient inconcevable.
Le professeur Hamilton suggère que cela relève de l’âme. Mais que dirait-il d’un enfant élevé dans un environnement d’eau et de brume, qui n’a jamais été en présence de plus d’une personne à la fois, qui n’a jamais appris à compter sur ses doigts et ses orteils. Je doute qu’un tel enfant ait la même certitude que nous, que vous et moi, qu’il lui semble aussi impossible que l’arithmétique l’induise un jour en erreur. Supprimer totalement les nombres entiers de son monde nécessiterait qu’on le place dans un cadre très étrange, avec un niveau de manque qui atteindrait la cruauté, mais est-ce que ce serait suffisant pour qu’il perde son âme ?
Un ordinateur programmé pour faire de l’arithmétique comme l’a décrit le professeur Hamilton, est soumis à des privations encore plus grandes que celles que l’on a infligées à cet enfant. Si j’avais été élevé avec les mains et les pieds attachés, la tête dans un sac, avec quelqu’un qui me hurlait des ordres, je ne crois pas que j’aurais une bonne appréhension du réel – mais je serais néanmoins mieux préparé à cette tache qu’un ordinateur. C’est une grâce formidable qu’une machine soumise à un tel traitement ne soit pas capable de penser : si elle le pouvait, les chaînes qu’on lui a fait porter serait d’une oppresivité criminelle. »
Greg Egan, Nouvelle, Oracle, publiée dans le recueil Océanique
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Le voile a glissé sans qu’elle voulût le voir tomber
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« Le voile a glissé sans qu’elle voulût
Le voir tomber.
D’une main le saisit et de l’autre
Nous fit signe
D’avoir à craindre Dieu, en réprimant
Notre curiosité avide.
Une main aux doigts teints,
Souple, aux extrémités déliées
Comme fruits de l’anam
Qui semblent ne pouvoir
se nouer, tant est grande
leur délicatesse. Puis, de ses longs cheveux noirs
à demi bouclés se couvrant,
elle se ploya comme la vigne s’appuie
sur l’étançon qui la soutient.
Enfin elle te regarda comme
Pour te rappeler que, malgré sa prière,
Tu aurais pu obtenir
Ce que tu n’as pas essayé de prendre…
Lourd regard d’attente qu’un malade
Adresse à ceux qui le visitent. »
Al-Nābiġa al-D̠ubyānī, poème compilé dans "La Poésie Arabe", anthologie traduite et présentée par René Khawam
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Territorialisées contre Globalisés...
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« Ce serait une erreur de ne définir les classes que comme des ensembles d’individus regroupés par un intérêt matériel commun. La lutte des classes, soulignait Edouard Berth, n’est pas la révolte des pauvres contre les riches, comme l’imaginait Blanqui, mais bien, comme l’a montré Marx, la révolte des producteurs contre le système capitaliste. Elle n’oppose pas seulement des groupes d’intérêts divergents, mais aussi des types humains opposés (c’est aussi pour cette raison qu’il ne saurait y avoir d’intérêts communs entre eux).
Le grand clivage social actuel est celui qui oppose des classes populaires encore "territorialisées", dont le mode de vie et de sociabilité se limite en général à un périmètre restreint, à une Nouvelle Classe globalisée, engendrée elle-même par un néocapitalisme financiarisé et de plus en plus déterritorialisé. »
Alain de Benoist, in "Réfléchir et Agir", numéro 44
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08/05/2014
L'intolérance musulmane...
17:07 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (2) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Dans la flamme
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« L'ordre humain ressemble au Cosmos en ceci, que de temps en temps, pour renaître à neuf, il lui faut plonger dans la flamme. »
Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre
17:05 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Rien ne compromet davantage, n’affaiblit de l’intérieur, et n’affadit la lutte contre le racisme que cette façon de mettre le terme à toutes les sauces
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« […] rien ne compromet davantage, n’affaiblit de l’intérieur, et n’affadit la lutte contre le racisme que cette façon de mettre le terme, si j’ose dire, à toutes les sauces, en confondant une théorie fausse, mais explicite, avec des inclinations et des attitudes communes dont il serait illusoire d’imaginer que l’humanité puisse un jour s’affranchir ni même qu’il faille le lui souhaiter […] »
« […] parce que ces inclinations et ces attitudes sont, en quelque sorte, consubstantielles à notre espèce, nous n’avons pas le droit de nous dissimuler qu’elles jouent un rôle dans l’histoire : toujours inévitables, souvent fécondes, et en même temps grosses de dangers quand elles s’exacerbent. J’invitais donc les lecteurs à douter avec sagesse, avec mélancolie s’ils voulaient, de l’avènement d’un monde où les cultures, saisies d’une passion réciproque, n’aspiraient plus qu’à se célébrer mutuellement, dans une confusion où chacune perdrait l’attrait qu’elle pouvait avoir pour les autres et ses propres raisons d’exister. […] il ne suffit pas de se gargariser année après année de bonnes paroles pour réussir à changer les hommes, […] en s’imaginant qu’on peut surmonter par des mots bien intentionnés des propositions antinomiques comme celles visant à “concilier la fidélité à soi et l’ouverture aux autres” ou à favoriser simultanément “l’affirmation créatrice de chaque identité et le rapprochement entre toutes les cultures”. »
Claude Lévi-Strauss, Le regard éloigné
16:51 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Confondre le racisme défini au sens strict et des attitudes normales, légitimes même, et en tout cas inévitables
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« […] je m’insurge contre l’abus de langage par lequel, de plus en plus, on en vient à confondre le racisme défini au sens strict et des attitudes normales, légitimes même, et en tout cas inévitables. Le racisme est une doctrine qui prétend voir dans les caractères intellectuels et moraux attribués à un ensemble d’individus, de quelque façon qu’on le définisse, l’effet nécessaire d’un commun patrimoine génétique. On ne saurait ranger sous la même rubrique, ou imputer automatiquement au même préjugé l’attitude d’individus ou de groupes que leur fidélité à certaines valeurs rend partiellement ou totalement insensibles à d’autres valeurs.
Il n’est nullement coupable de placer une manière de vivre et de penser au-dessus de toutes les autres, et d’éprouver peu d’attirance envers tels ou tels dont le genre de vie, respectable en lui-même, s’éloigne par trop de celui auquel on est traditionnellement attaché. Cette incommunicabilité relative n’autorise certes pas à opprimer ou détruire les valeurs qu’on rejette ou leurs représentants, mais, maintenue dans ces limites, elle n’a rien de révoltant. Elle peut même représenter le prix à payer pour que les systèmes de valeurs de chaque famille spirituelle ou de chaque communauté se conservent, et trouvent dans leur propre fonds les ressources nécessaires à leur renouvellement.
Si comme je l’ai écrit ailleurs, il existe entre les sociétés humaines un certain optimum de diversité au-delà duquel elles ne sauraient aller, mais en dessous duquel elles ne peuvent non plus descendre sans danger, on doit reconnaître que cette diversité résulte pour une grande part du désir de chaque culture de s’opposer à celles qui l’environnent, de se distinguer d’elles, en un mot d’être soi ; elle ne s’ignorent pas, s’empruntent à l’occasion, mais, pour ne pas périr, il faut que, sous d’autres rapports, persiste entre elles une certaine imperméabilité. »
Claude Lévi-Strauss, Le regard éloigné
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Toute création véritable implique une certaine surdité à l'appel d'autres valeurs, pouvant aller jusqu'à leur refus, sinon même leur négation
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« La lutte contre toutes les formes de discrimination participe de ce même mouvement qui entraîne l'humanité vers une civilisation mondiale, destructrice de ces vieux particularismes auxquels revient l'honneur d'avoir créé les valeurs esthétiques et spirituelles qui donnent son prix à la vie (...) Sans doute nous berçons-nous du rêve que l'égalité et la fraternité régneront un jour entre les hommes sans que soit compromise leur diversité. Mais si l'humanité ne se résigne pas à devenir la consommatrice stérile des seules valeurs qu'elle a su créer dans le passé (...), elle devra réapprendre que toute création véritable implique une certaine surdité à l'appel d'autres valeurs, pouvant aller jusqu'à leur refus, sinon même leur négation. Car on ne peut, à la fois, se fondre dans la jouissance de l'autre, s'identifier à lui, et se maintenir différent. »
Claude Lévi-Strauss, Race et culture
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Si l’immigration est officiellement interrompue en 1974, le regroupement familial, autorisé en 1975, accroît dans les faits le nombre d’arrivants
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« Selon le discours en vogue, la France aurait toujours été un creuset de population. Du point de vue historique, cette assertion est fausse. Du VIe au XIXe siècle, le fond du peuple français est demeuré le même. Au XIXe siècle apparaît une immigration saisonnière, les travailleurs retournant dans leur pays après leur labeur. La première grande vague migratoire a lieu après la Première Guerre mondiale. Elle est constituée d’ Italiens, d’Espagnols, de Polonais et de ressortissants d’autres nations de l’Est. Ceux-ci s’assimilent peu à peu, par le biais de l’école, du service militaire et de la guerre -certaines institutions exerçant une force intégratrice : l’Église catholique, les syndicats, et même le Parti communiste. A partir de 1946, la seconde vague migratoire vient d’Algérie. Sous la IVe République, contrairement à ce qui se répète, ce n’est pas le patronat qui fait venir cette main-d’œuvre : ce sont les pouvoirs publics, afin de trouver une issue à l’explosion démographique de la population musulmane d’outre-Méditerranée. Après 1962, l’Algérie indépendante, le flux migratoire reprend en vertu de la libre circulation stipulée par les accords d’Evian. Si l’immigration est officiellement interrompue en 1974, le regroupement familial, autorisé en 1975, accroît dans les faits le nombre d’arrivants. D’autres courants migratoires apparaissent, issus d’Afrique noire ou d’Asie. Et en vertu de la loi, tout enfant né en France de parents étrangers peut, à sa majorité, accéder à la nationalité française. »
Jean Sévillia, Le terrorisme intellectuel
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07/05/2014
Le tracas qui nous détourne d’y penser et nous divertit
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« Quand je m’y suis mis quelquefois à considérer les diverses agitations des hommes et les périls et les peines où ils s’exposent dans la Cour, dans la guerre, d’où naissent tant de querelles, de passions, d’entreprises hardies et souvent mauvaises, etc., j’ai découvert que tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre. Un homme qui a assez de bien pour vivre, s’il savait demeurer chez soi avec plaisir, n’en sortirait pas pour aller sur la mer ou au siège d’une place. On n’achète une charge à l’armée si cher, que parce qu’on trouverait insupportable de ne bouger de la ville. Et on ne recherche les conversations et les divertissements des jeux que parce qu’on ne peut demeurer chez soi avec plaisir.
Mais quand j’ai pensé de plus près et qu’après avoir trouvé la cause de tous nos malheurs j’ai voulu en découvrir la raison, j’ai trouvé qu’il y en a une bien effective qui consiste dans le malheur naturel de notre condition faible et mortelle, et si misérable que rien ne peut nous consoler lorsque nous y pensons de près.
Quelque condition qu’on se figure, si l’on assemble tous les biens qui peuvent nous appartenir, la royauté est le plus beau poste du monde. Et cependant qu’on s’en imagine, accompagné de toutes les satisfactions qui peuvent le toucher. S’il est sans divertissement et qu’on le laisse considérer et faire réflexion sur ce qu’il est, cette félicité languissante ne le soutiendra point. Il tombera par nécessité dans les vues qui le menacent des révoltes qui peuvent arriver et enfin de la mort et des maladies, qui sont inévitables. De sorte que s’il est sans ce qu’on appelle divertissement, le voilà malheureux, et plus malheureux que le moindre de ses sujets qui joue et qui se divertit.
De là vient que le jeu et la conversation des femmes, la guerre, les grands emplois sont si recherchés. Ce n’est pas qu’il y ait en effet du bonheur, ni qu’on s’imagine que la vraie béatitude soit d’avoir l’argent qu’on peut gagner au jeu ou dans le lièvre qu’on court, on n’en voudrait pas s’il était offert. Ce n’est pas cet usage mol et paisible et qui nous laisse penser à notre malheureuse condition qu’on recherche ni les dangers de la guerre ni la peine des emplois, mais c’est le tracas qui nous détourne d’y penser et nous divertit. »
Blaise Pascal, Pensées
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Des manigances qui vous ont toujours un fumet de moralisme
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« Michel pensait encore aux honnêtes ahuris qui rêvaient de vaporiser des symphonies de parfums durant des concerts, de jouer du Beethoven devant du Tintoret. "Tous à fourrer dans le même sac. Des manigances qui vous ont toujours un fumet de moralisme". Ces préparatifs entravent l’émotion chez tous les êtres de quelque délicatesse. On ne pénètre jamais mieux les chefs d’œuvre que lorsqu’on les aborde de face, très simplement, aussi seul que possible, en s’oubliant soi-même et en pensant d’abord au métier du peintre ou du musicien. Ça n’a pas une allure aussi exhaustive, mais c’est bien plus difficile et bien plus rare, parce qu’il faut être capable de lire, d’écouter la langue des héros. Tandis que Dieu sait quelles ritournelles, quelles rhapsodies de métaphores et de symboles à deux sous la ligne, entendent les "âmes élevées" devant Tristan ou Rembrandt. »
Lucien Rebatet, Les deux étendards
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