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31/01/2007

Aux Modernes

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

"Aux Modernes

Vous vivez lâchement, sans rêve, sans dessein,
Plus vieux, plus décrépits que la terre inféconde,
Châtrés dès le berceau par le siècle assassin
De toute passion vigoureuse et profonde.

Votre cervelle est vide autant que votre sein,
Et vous avez souillé ce misérable monde
D'un sang si corrompu, d'un souffle si malsain,
Que la mort germe seule en cette boue immonde.

Hommes, tueurs de Dieux, les temps ne sont pas loin
Où, sur un grand tas d'or vautrés dans quelque coin,
Ayant rongé le sol nourricier jusqu'aux roches,

Ne sachant faire rien ni des jours ni des nuits,
Noyés dans le néant des suprêmes ennuis,
Vous mourrez bêtement en emplissant vos poches."


Charles-Marie LECONTE DE LISLE (1818-1894)
Poèmes barbares


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30/01/2007

La souriante Garce

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=




Ségolène Royal veut la mort de ce pays... cette pétasse incompétente est dangereuse :

« Ne comptez pas sur moi pour parler de ce qui ne va pas. »

« Je ne veux plus entendre parler d'intégration. »

« Je veux un pays qui entende ce que lui dit Diam's dans Ma France à moi »
... qui n'est pas la France.

Elle se tait sur Redeker qui vit toujours sous la menace d'une Fatwa et sous protection de la Police... mais lui note dans son journal qui vient de paraître :

« Plus les jours passent, plus je prends la mesure de l'étendue de la corruption intellectuelle et morale qui affecte la gauche de ce pays » Robert Redeker (Il faut tenter de vivre, Seuil)

Il rend hommage aux milliers de courriers reçus qui « n'acceptent pas que nos moeurs soient changées pour complaire à un islam politique qui effraie les élites ».

Voici les élections... économisez vos munitions. On va bien rire. Et pleurer, sûrement...

Certains vont se réveiller avec la gueule de bois...

C'était ma parenthèse du jour... je retourne à mes lectures empoisonnées et mon écriture nocive...

09:30 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : 47-Franc-Tireur : La souriante Garce | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

29/01/2007

Esclaves

=--=Publié dans la Catégorie "Friedrich Nietzsche"=--=



"Nous autres modernes avons sur les Grecs l'avantage de posséder deux concepts qui nous servent en quelque sorte de consolation face à un monde où tous se conduisent en esclaves et où pourtant le mot fait reculer d'effroi:nous parlons de la dignité de l'homme et de la dignité du travail. Tous s'échinent à perpétuer misérablement une vie de misère, et sont contraints par cette effroyable nécessité à un travail exténuant, qu'ensuite l'homme, ou plus exactement l'intellect humain, abusé par « la volonté », regarde ébahi, par moments, comme un objet digne de respect. Or pour que le travail puisse revendiquer le droit d'être honoré, encore serait-il nécessaire qu'avant tout l'existence elle même, dont il n'est pourtant qu'un instrument douloureux, ait un peu plus de dignité que ne lui en ont accordé jusqu'ici les philosophies et les religions qui ont pris ce problème au sérieux. Que pouvons-nous trouver d'autre dans la nécessité du travail de ces millions d'hommes, que l'instinct d'exister à tout prix, ce même instinct tout puissant qui pousse des plantes rabougries à étirer leurs racines sur la roche nue! De cette épouvantable lutte pour l'existence, seuls peuvent émerger les individus qui seront tout aussitôt absorbés par les nobles et illusoires productions d'une civilisation artistique afin qu'ils ne parviennent surtout pas à un pessimisme dans l'action, que la nature abhorre en tant qu'il est véritablement contre-nature."

L'Etat chez les Grecs. Nietzsche



"Nous autres modernes avons sur les Grecs l'avantage de posséder deux concepts qui nous servent en quelque sorte de consolation face à un monde où tous se conduisent en esclaves et où pourtant le mot fait reculer d'effroi : nous parlons de la dignité de l'homme et de la dignité du travail."

Il faut bien noter ici le caractère ironique du propos de Nietzsche. Car s'il y a bien une chose que Nietzsche savait de par sa solide formation, c'est que les Grecs aimaient et appréciaient le travail, quel qu'il soit, et le travail bien fait... celui du guerrier comme celui du paysan. Par exemple, pour Hésiode, le poète Des Travaux et des Jours, le meilleur genre de vie, fort pénible peut-être, mais qui assure pleinement la dignité de l'homme Libre, est celui du paysan propriétaire qui trouve sur son domaine de quoi nourrir et vêtir lui-même et les siens, de quoi satisfaire à tous les besoins de sa famille. Impensable pour un grec du temps de Périclès de dépendre d'un autre pour subvenir à ses besoins. C'est là une condition d'esclave. L'esprit aristocratique naît au sein même du peuple producteur, pas seulement chez les guerriers et, sur ce point, cela n'a pu que contribuer à une unicité de l'esprit grec, donc du peuple grec, ainsi que des castes plus perméables qu'on ne le pense. L'Areté Grecque, vertu des vertus, permet de considérer l'œuvre de l'individu, fut-elle productive ou guerrière, comme un moyen pour lui de s'élever, de franchir des étapes, de s'améliorer et de prendre date avec soi-même. Ce que les grecs abominaient, c'est le travail lucratif, l'argent pour l'argent. Ils ont érigé une civilisation sur une terre rocailleuse et peu fertile dont il a fallu tirer par le sacrifice du travail et de l'effort les fruits providentiels.

D'où l'ironie de Nietzsche, car il a du lire (dans le texte... en grec ancien... philologue de formation...) Des Travaux et des Jours d'Hésiode, passage obligatoire pour tout hélleniste qui se respecte. Car, entre les lignes, nous assistons à quelque chose de plus clair lorsqu'il affirme :

"Tous s'échinent à perpétuer misérablement une vie de misère, et sont contraints par cette effroyable nécessité à un travail exténuant, qu'ensuite l'homme, ou plus exactement l'intellect humain, abusé par « la volonté », regarde ébahi, par moments, comme un objet digne de respect. Or pour que le travail puisse revendiquer le droit d'être honoré, encore serait il nécessaire qu'avant tout l'existence elle même, dont il n'est pourtant qu'un instrument douloureux, ait un peu plus de dignité que ne lui en ont accordé jusqu'ici les philosophies et les religions qui ont pris ce problème au sérieux. "

J'aime à rappeler que le point culminant de ce type de conception du travail, que Nietzsche dénonce clairement, se trouve à l'entrée de je ne sais plus quel camp de concentration immonde au frontispice du quel était inscrit : "Le travail rend Libre" ! On ne peut, du coup, que comprendre l'énoncé d'un Guy Debord qui plus de 10 ans avant Mai 68 inscrivait sur les murs : "Ne travaillez jamais !" Lui, qui n'a pas arrêté d'écrire, de tourner, de penser. C'est là l'oisiveté authentique.
Les différentes religions ou philosophies n'ont fait qu'entériner sans cesse une "malédiction" liée à "la chute originelle" en indiquant que cela était de l'ordre du devoir que de souffrir pour gagner notre pain à la sueur de notre front. Or, le travail devrait être une bénédiction. Mais même pour l'entrepreneur bourgeois du 19ème Siècle, il ne s'agit même plus d'être dans une bénédiction de l'action, la seule bénédiction qui vaille pour lui consiste à faire rentrer du fric, de la maille, du flouze, du pognon. C'est Marx, n'est-ce pas, qui a très bien analysé l'irruption du travail comme "valeur marchande" au 19ème Siècle. Fait nouveau qu'il assimile à un progrès, il ne faut pas l'oublier... ou alors il faut relire Le Capital.

Nietzsche regrette, en fait, que ce qui nous est présenté comme de la dignité et du respect n'est, en vérité, que de l'esclavage. On est tenus par les couilles pour subsister et subvenir à nos besoins essentiels. Nous dépendons bien d'un autre pour pouvoir bouffer et c'est, selon lui, et selon tous les grecs tant pré-socratiques que post-platoniciens... une triste condition d'esclave :

"Que pouvons-nous trouver d'autre dans la nécessité du travail de ces millions d'hommes, que l'instinct d'exister à tout prix, ce même instinct tout puissant qui pousse des plantes rabougries à étirer leurs racines sur la roche nue! De cette épouvantable lutte pour l'existence, seuls peuvent émerger les individus qui seront tout aussitôt absorbés par les nobles et illusoires productions d'une civilisation artistique afin qu'ils ne parviennent surtout pas à un pessimisme dans l'action, que la nature abhorre en tant qu'il est véritablement contre-nature."

L'artiste seul peut s'en tirer car par le biais de l'artifice il transforme la nature en oeuvre d'art. C'est peut-être une illusion mais cela lui donne la force de vivre.

Ce texte de Nietzsche, est un texte, je crois me souvenir, de jeunesse... corrigez-moi, si je me trompe... il a nuancé par la suite son propos en imaginant et "une Grande Politique" et "une Grande Santé", inextricablement liées l'une à l'autre qui auraient autorisé l'émergence d'hommes qui, guerriers, économistes, philosophes, prêtres, ingénieurs, hommes d'état, manuels, etc... auraient tous été à leur niveau des artistes. Ce qui aurait permis à la Vie d'être supportable et de grandir...

Histoire d'enfoncer le clou :

"Fi ! avoir un prix auquel on cesse d'être une personne pour devenir un rouage ! Etes-vous complices de la folie actuelle des nations qui ne pensent qu'à produire le plus possible et à s'enrichir le plus possible ? Votre tâche serait de leur présenter l'addition négative : quelles énormes sommes de valeur intérieure sont gaspillées pour une fin aussi extérieure ! (...) Voilà l'état d'esprit qu'il conviendrait d'avoir : les ouvriers, en Europe, devraient déclarer désormais qu'ils sont une impossibilité humaine en tant que classe, au lieu de se déclarer seulement, comme il arrive d'habitude, les victimes d'un système dur et mal organisé ; ils devraient susciter dans la ruche européenne un âge de grand essaimage, tel qu'on n'en a encore jamais vu, et protester par cet acte de nomadisme de grand style contre la machine, le capital et l'alternative qui les place aujourd'hui : devoir choisir entre être esclave de l'Etat ou esclave d'un parti révolutionnaire. "

Aurore, §200 Nietzsche


Nietzsche par Edvard Munch


Les grecs ne concevaient pas la Terre comme une vallée de larmes, mais il ne faut pas les imaginer insouciants et nonchalants face à la dureté de l'existence. À bien lire les textes anciens (j'ai lu l'année dernière "La Paideïa, formation de l'homme grec" par l'estimé philologue Werner Jaeger) on voit des grecs plutôt combatifs, estimant que la vie est dure, que nous ne sommes que des mortels, et qu'il nous faut nous retrousser les manches pour lui faire face, car les dieux sont impitoyables, ils se jouent de nous, s'amusent de notre sort, et le seul bien inaliénable que nous pouvons posséder et cultiver toute notre vie durant c'est la magnanimité de l'esprit aristocratique que l'on retrouve aussi bien chez Achille le guerrier que chez Hésiode le paysan, cette magnanimité par laquelle on domine un sort contraire. L'Homme plus fort que son Destin, c'est cela le dernier mot de la sagesse grecque... et c'est celle qui manque aux esclaves salariés que nous sommes aujourd'hui...

C'était ma parenthèse du jour... je retourne à mes lectures néfastes et mon écriture empoisonnée...

18:15 Publié dans Friedrich Nietzsche | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : 46-Friedrich Nietzsche : Esclaves | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

24/01/2007

Dans le Cochon y'a que du bon !

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

"Mangez du cochon... ... parce que le cochon... ...c'est tellement bon ! En particulier le Jambon... ... sans oublier le saucisson... ... et bien entendu, la soupe aux lardons !"

Voilà... c'était ma déclaration Politique du moment... Parce que dorénavant, manger du cochon sera un acte politique !

J'étais en train d'écrire divers trucs et de lire diverses choses depuis quelques jours lorsque la nouvelle est tombée comme une masse du haut du ciel...

Libération :

Le Conseil d'Etat interdit la distribution de «soupe au cochon»




Le ministère de l'Intérieur avait déposé un recours devant la plus haute juridiction administrative qui a refusé à l’association d’extrême-droite SDF-Solidarité des Français de distribuer de la soupe au lard aux sans domiciles fixes • Le gouvernement a argué du caractère discriminatoire de la distribution envers les juifs et les musulmans •

Le Conseil d'Etat a refusé vendredi la distribution à Paris par une association d'extrême droite d'une «soupe au cochon» aux sans-abri en annulant une décision du tribunal administratif de Paris qui l'avait autorisée.
La plus haute juridiction administrative a rejeté la demande de l'association Solidarité des Français qui voulait la suspension d'un arrêté du préfet de police du 28 décembre interdisant la distribution à Paris de cette soupe.
Saisi par l'association Solidarité des Français (SDF), organisatrice de ces distributions de soupes à base de porc, le juge des référés du tribunal administratif de Paris avait rendu mardi une ordonnance suspendant un arrêté d'interdiction pris le 28 décembre 2006 par le préfet de police de Paris.
Saisi de l'appel formé par le ministre de l'Intérieur, le juge des référés du Conseil d'Etat a annulé vendredi cette ordonnance, estimant qu'en interdisant les distributions, le préfet de police n'avait pas porté une «atteinte grave et manifestement illégale» à la liberté de manifestation.
Devant Christian Vigouroux, juge des référés au Conseil d'Etat, le représentant du ministère de l'Intérieur, Me Jean-François Boutet, a estimé que ces distributions de soupe étaient «discriminatoires» et donc susceptibles de troubler l'ordre public.


Me Boutet a cité une phrase du site internet de SDF ("Pas de soupe, pas de dessert, les nôtres avant les autres"), ajoutant que la Haute Autorité de lutte contre les discriminations (Halde) s'était émue de l'aspect discriminatoire de ces "soupes au cochon" ainsi que deux délibérations du Conseil municipal de Paris.


Bertrand Delanoë, le maire de Paris, souhaitait un appel contre la distribution de la «soupe au cochon». Le ministère de l’Intérieur avait saisi jeudi le Conseil d’Etat afin qu’il revienne sur la décision du tribunal administratif de Paris permettant à l’association d’extrême droite SDF-Solidarité des Français de reprendre sa distribution de soupe au lard aux sans domiciles fixes. Une «recette» qui exclut juifs et musulmans, dont la religion interdit le porc.

Le tribunal administratif avait pourtant reconnu que «l’association poursuit un but manifestement discriminatoire à l’encontre des personnes auxquelles leur confession interdit la consommation de viande de porc» mais n’avait pas pour autant confirmé les arrêtés de décembre 2006 interdisant cette distribution, considérant qu’elle ne constituait pas un trouble à l’ordre public. 


Bertrand Delanoë avait été le premier à s’indigner de cette décision mardi et avait demandé expressément au Préfet de Police de Paris de saisir le Conseil d’Etat en espérant que l’institution aura «une interprétation différente des principes républicains». Face à l’«initiative aux relents xénophobes» de Solidarité des Français, le maire a exprimé «à nouveau la volonté de la municipalité de dénoncer et de combattre toute forme de discrimination, de racisme et d’antisémitisme».

Le maire socialiste a été entendu par le ministère de l’Intérieur qui a saisi le Conseil d’Etat jeudi, considérant cette distribution xénophobe et raciste à l’égard des personnes de confession juive et musulmane. L’appel sera examiné ce vendredi. Décision connue à 16 heures.


Article de Libération : http://www.liberation.fr/actualite/societe/226860.FR.php


Voilà... par contre, je n'ai aucune accointance avec le groupuscule du Bloc Identitaire (ex-Unité Radicale) qui est derrière cette provoc' socio-politique amusante. Cependant, ce que l'article de Libération oubli de stipuler c'est que les barbus de l'UOIF (financés par les frères musulmans) distribuent des repas hallal. Et les Frères musulmans sont loins d'être des exemples de respect de la différence, ou des vertueux en matière démocratique ! Des Nazislamistes masqués. À quand l'interdiction de l'UOIF ? À quand l'interdiction dans ce pays des petits merdeux qui sous couvert de vertu religieuse en appellent dans leurs prêchi-prêcha à la mort de nos valeurs et de la république ? That is the fucking question !

Ce que, probablement, ce groupuscule d'extrème-droite, a voulu démontrer et il vient d'y parvenir magistralement, c'est qu'on est plus chez nous en France, dans le sens où distribuer de la cochonnaille gratuitement, ben ça va plus être possible. Bientôt le moindre mangeur de jambon beurre passera pour être un dangereux fasciste, raciste et islamophobe ! Ma bonne humeur vient de tomber d'un bon cran. C'est quoi ce pays ? Interdire de distribuer gratuitement de la soupe aux sdf parce qu'elle est au cochon ?!!!?!!! Alors là je suis scié.

Les barbus de l'UOIF distribuent des repas hallal... Et les frères musulmans ou l'extrème-droite, c'est blanc bonnet et bonnet blanc ! Le politiquement correct s'empare définitivement de tout le monde, de plus en plus.

Il y a 30 ans en arrière cet interdit n'aurait même pas été imaginable ! Il aurait fait rire tout le monde !

Le pire, c'est qu'on les oblige pas à en manger du porc. Et mieux, le coran dit que si le musulman n'a que ça à manger, rien d'autre, et bien il peut en manger. On est où là ? Dans une République Islamique ? Dans une monarchie de la péninsule Arabe ? Si ça continue on y va tout droit !

Et cette fiente de Delanoë qui vient se répandre là-dessus...


"Sans moi" (extrait)

"Delanoë damné et sa gueule de tramway
Ses trottoirs à poussettes et ses complots pluriels
Son bétail culturel destiné à rester
Sa fabrique de plage et ses Verts criminels

Sans moi ni moi ni moi
Ni moi ni moi ni moi

L'infime Delanoë sans honte et sans remords
Ses projets infamants son sourire de pendu
Son existence même qui sans cesse déshonore
De la simple raison les derniers détritus

Sans moi ni moi ni moi
Ni moi ni moi ni moi

Encore Delanoë qui parle de l'attente
De tous ces morts-vivants qu'on appelle Parisiens
Et qui n'existent plus depuis des temps anciens
Qui virera ce con et sa connerie glaçante"


(Philippe MURAY - in "Minimum Respect")

À Paris on distribue des soupes Casher et Hallal et personnellement je ne trouve aucun mal à en dire... mais qu'on en tombe là... au lieu d'en rire, simplement, je trouve ça pitoyable pour la justice, pitoyable pour la République Laïque... il y a quelque chose de bien plus malsain dans l'interdiction de la distribution de soupe au cochon aux SDF que dans la provoc' à laquelle se sont livrés les identitaires en question. Point final !

Il y a quelque chose de pourri au Royaume de Chiraquie ! Va falloir aérer.

J'ai 41 berges, je n'ai jamais voté de ma vie... mais là je me suis inscrit sur les listes en Décembre dernier, j'attends ma carte censée arriver en Mars... et je vais pas aller voter à "GÔCHE", laissez-moi vous le dire... je comptais vachement sur Chevènement, mais comme il s'est couché comme une merde devant la Royal de Ségo, je vais bifurquer vers la "DROUATE"... il y a bien plus important que ma petite condition de magasinier avec mon modeste salaire... là ce qui se passe, de manière larvée, c'est pire que le FN ou De Villiers parce que eux ils annoncent la couleur, on sait à quoi s'en tenir... là on est en plein délire Kafkaïen Cauchemardesque ! C'est mon opinion, mais je me comprends.

Écoutez-moi bien les gôchos et drouatos à la mord moi le noeud... aujourd'hui, 24 Janvier 2007... on est en Bosnie-Herzégovine vers 1985/90... comprenne qui peut... et laissez de côté les bons sentiments mitterrandiens...

Éviterons-nous un Srebrenica à grandeur Européenne ?... Il va falloir nous y atteler.

Plus que jamais il faut Hurler en faisant une spéciale dédicace à Tariq Ramadan et à toute sa Clique de barbus fascistes :"Mangez du cochon... ... parce que le cochon... ...c'est tellement bon ! En particulier le Jambon... ... sans oublier le saucisson... ... et bien entendu, la soupe aux lardons ! "

C'était ma parenthèse du jour...

22/01/2007

Trois Photos du Général

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=



"La politique ne m’intéresse que lorsqu’elle est située sur le terrain tragique et qu’elle met aux prises un individu, l’histoire et le destin. Autant dire que, né en 1959, je n’ai jamais eu l’occasion de me passionner pour les péripéties qui ont conduit au pouvoir un banquier matois, un inspecteur des finances arrogant, un avocat véreux et un énarque impulsif, tous complices de ceux qui ont installé l’histoire dans le registre hystérique et décérébré de la comédie de boulevard.
Lorsque le Général de Gaulle disparaît, j’ai onze ans et subis la pédagogie de prêtre salésiens dans un orphelinat fonctionnant sur les principes du siècle précédent : perversions, coups, brimades, sadisme à la petite semaine, saleté. Passons . La mort du connétable a signifié, pour moi, une journée de congé, le jour des obsèques. Ceux qui avaient des parents dignes de ce nom sont rentrés chez eux, quittant le pensionnat où nous sommes restés une poignée, une dizaine sur les six-cent élèves que comptaient l’école.
Dans cette prison où tout était vu, su, encadré dans de rigoureux emplois du temps, décidé par des curés perclus de complexes et de ressentiments à l’endroit de la vie, nous avons été abandonnés à nous-mêmes, laissés-pour-compte, considérés comme absents : le Général était mort, quelque chose d’exceptionnel se passait, et les règlements de l’orphelinat n’existaient plus. Alors que les prêtres devaient suivre les évènements à la télévision, nous en avons profité, à deux ou trois, pour visiter la salle des professeurs où nous avons retourné toutes les paperasses possibles et inimaginables. Nous avons mangé deux ou trois gâteaux qui traînaient là, volé des cartes postales et des livres, fait bombance et régné comme des rois.
Après cette fête de l’âne, à notre manière, nous avons décidé de dormir à la belle étoile, non loin du Belvédère, un endroit dans un bois proche, qui dominait le cour de l’Orne et les champs alentours. Nous avions des cigarettes, un peu d’alcool et de quoi transformer une bâche en toile de tente : la nuit, froide, les bruits du lieu, les cris d’animaux, les chiens au loin, et d’autres bestioles hululantes ou sifflantes dont nous ignorions tout, on entamé nos ardeurs. Nous rentrâmes au dortoir sans que personne nous ai vu, ni se soit aperçu de notre escapade car tous les adultes avaient déserté les postes de combat : la guérite de surveillance dans le dortoir aux cent-vingt lits, les couloirs habituellement hantés par des cerbères tout de noir vêtus, le bureau du préfet de discipline ou les chambres de surveillants. Tout était mort, la liberté était à nous, je ne savais quoi en faire.
De Gaulle, pour moi, c’était la cause des inscriptions faites en blanc sur la fromagerie de mon village : non . « Non à quoi ? » Mes parents m’avaient bien répondu : « Non à De Gaulle », mais je n’en comprenais pas plus. J’était soucieux, à l’époque, des faveurs d’une jeune et jolie parisienne qui venait en vacances dans le bourg et à qui j’écrivais des lettres enflammées : elle me répondait des inepties, mais je crois bien que j’étais amoureux. En même temps, je tenais scrupuleusement mon journal et remplissais des carnets d’histoire que j’inventais et transformais en romans. La vie paraissait simple, mes parents sur leur plan ète, moi sur la mienne et De Gaulle au milieu de tout ça. J’ai bien souvenir, vaguement, qu’à la télévision, où je ne comprenais rien des Perses d’Eschyle, apparaissait parfois un vieil homme, une fois en costume sombre, une autre en habit militaire, et qu’il parlait après qu’une musique royale l’avait précédé au générique. Mais je n’ai jamais eu soucis de ce qu’il disait. Et voilà qu’il était mort.
Par la suite, j’ai compris de manière viscérale que les humiliations supportées par les pauvres devraient interdire à tout jamais qu’ils deviennent de droite, comme on dit. Donc, souscrivant à la vulgate, j’ai cru plusieurs années que De Gaulle était un homme de droite, parce que ceux de gauche le disaient, certes, mais aussi parce que ceux de droite, parfois, s’en réclamaient. C’est en lisant Les chênes qu’on abbat que j’ai compris que les choses n’étaient pas aussi simples. Je venais d’avoir vingt ans et j’ai souligné, dans la marge, ces commentaires de Malraux que je retrouve aujourd’hui : « Le Général ne pouvait affronter que des évènements historiques —ou la mort —ou le secret. » Puis : « Il n’est évidemment pas un défenseur du capitalisme, mais pas d’avantage du prolétariat. » Enfin : « Sa pensée ombrageuse ne se confond pas avec un système. » Et, par la suite, je n’ai cessé d’aimer cet homme installé dans l’épique et le mythe, le tragique et la souveraineté, passionné de liberté et d’indépendance. Il me plaisait également qu’il fut lecteur de Bergson et de Nietzsche, homme d’action à la volonté trempée comme un glaive, visionnaire et, parce que j’aime tout particulièrement ce trait, ombrageux. En feuilletant aujourd’hui le livre de Malraux, je redécouvre ces vers de Victor Hugo :

Oh ! quel farouche bruit font dans le crépuscule
Les chênes qu’on abat pour le bûcher d’Hercule !

Comment puis-je concilier un goût pour De Gaulle l’austère et en même temps aimer Antisthène ou Diogène ? Comment apprécier l’action d’un général quand on est antimilitariste ? Comment soutenir un homme que la gauche honnit, que la droite récupère quand on se sent plus chez soi chez Stirner ou Proudhon, Nietzsche ou Baudelaire ? Comment s’enthousiasmer pour un catholique pratiquant quand on est d’un athéisme radical ? Je me suis souvent posé ces questions, craignant pour mon compte les pires contradictions avant de trouver la réponse : j’ai plaisir à cette individualité forte tout simplement parce que j’aime les figures singulières, les destins sans duplication, les monades rebelles et audacieuses qui assument le tragique à l’œuvre dans l’antinomie radicale entre l’individu et la société, les styles à l’œuvre, les visionnaires qui agissent, les solitaires qui s’impliquent dans l’action comme on se jette la tête la première dans un abyme ou un brasier.
Le grand homme n’est pas seulement ce que Hegel en dit, une construction de l’esprit, une ruse de la raison prise par l’histoire, une incarnation transformant un sujet en objet, il est surtout un sculpteur d’énergie, un démiurge, un artiste ou un poète au sens grec, un producteur de forme et de sens. Il faut lire Carlyle et Scheler, sinon Bergson pour se souvenir de la parenté entre le Saint, le Génie et le Héros, pointes d’une civilisation, éminences d’un ordre au milieu du chaos. Le trait distinctif de ces figures d’exception est la solitude dans l’expression de leur destin, dans le déroulement de l’anankè, la nécessité. Et je comprends soudain pour quelles raisons, dans l’iconographie du général de Gaulle, trois photographies font partie de mon musée imaginaire : toutes elles montrent un homme seul face à son destin, une fois en mer de Manche en 1941, une autre sur la pelouse de Baden-Baden en 1968, une dernière sur les plages d’Irlande en 1970.
Sur ces trois clichés, De Gaulle est personnage de tragédie, un acteur échappé des pièces de Corneille : confronté au pouvoir, l’homme est une fois rebelle, une autre fois solitaire, une dernière fois exilé, trois états familiers des héros cornéliens qui évoluent dans le désir de grandeur, et cheminent travaillés par la volonté d’être à la hauteur, debout, majestueux. Le héros cornélien a l’âme fière, le sens de l’honneur et de la gloire, du destin et de la nécessité, il sait la puissance et la force du devoir. En politique, il vise le sublime, catégori e esthétique par excellence, à partir de laquelle il ordonne le réel. Du vieil homme, Malraux écrivait : « Il a toujours dit que son idéologie courrait mal en terrain plat. » Et chez lui comme chez Nietzsche, on trouve souvent des métaphores de cimes, de montagnes, de crêtes et de pics. A la Boisserie, il dira : « quand tout va mal et que vous cherchez votre décision, regardez vers les sommets ; il n’y a pas d’encombrements. » Les géographies gaulliènes sont les déserts et les pleines mers, les rocs et les embruns, les landes et les escarpements. D’autres se satisfont de mornes plaines et de fondrières aux eaux croupissantes.
La pleine mer, donc, avec cette photographie qui le représente en ciré, képi sur le chef, ganté, dépassant d’une tête ceux des marins qui l’accompagnent. Derrière lui, la mer, devant, les câbles du navire sur lesquels il croise, filins d’acier qui strient le cliché en diagonale. Son regard est perdu au loin, fixe sur un point que personne d’autre ne regarde, le visage paraît grave, tendu, sinon inquiet, du moins soucieux : il est au large des côtes anglaises à bord d’un bâtiment des forces françaises libres. La date est 1941. C’est déjà l’homme qui descendra les Champs-Elysées, mieux, c’est déjà le rebelle qui dira non aux américains et refusera l’Amgot, dont personne n’aura parlé l’année du cinquantenaire du Débarquement et la Libération. Et pourtant, faut-il rappeler qu’après avoir dit non au fascisme de Pétain, non à Staline et au totalitarisme soviétique, il lui fallut également dire non au projet américain de transformer la France en pays sous tutelle avec monnaie d’occupation US et administration US ?
Faut-il rappeler que les américains avaient imprimé des billets et formé succinctement du personnel pour occuper les préfectures et sous-préfectures françaises de conserve avec les vichystes qu’outre-Atlantique on entendait ménager ? Faut-il rappeler que le général Giraud était le Pétain de ce projet-là et que De Gaulle fut une fois encore le résistant de ce nouveau camouflet néo-vichiste ?
J’aime cet homme qui regarde la mer comme Hercule les travaux qui l’attendent et dira non au totalitarisme d’où qu’il vienne, antifasciste par essence, républicain de conviction, démocrate dans l’âme. Il ne voulait rien d’autre que l’indépendance, la liberté, l’autonomie : ni une nouvelle Révolution nationale, ni le bolchévisme, ni l’american way of life. Qui ne souscrirait à pareil programme ? Nous avons échappé aux deux premiers fléaux, le troisième nous a rattrapé : dès le départ de De Gaulle, avec l’arrivée du banquier de Montboudif au pouvoir, l’amérique entrait de plain-pied dans les modèles et références explicites de la France. Nous sommes depuis sous ses hospices-là, sacrifiant aux mythologies qu’ils nous font payer en dollars. Au regard des échouages qui caractérisent notre époque grégaire, j’aime la solitude de cet homme-là, convaincu qu’il faut dire non, tenir, résister et s’affranchir des modèles, justement pour être soi-même un modèle. J’ai de la sympathie pour son isolement en mer de Manche quand il lui faut lutter contre tout et tous pour imposer son idée —qui est la bonne.
Dès 1905, il est alors âgé de quinze ans, évidemment encore lycéen, par encore dans la carrière des armes, il écrit sur un cahier d’écolier un scénario de fiction : en 1930, la France est envahie, les armées allemandes pénètrent sur le territoire national par les Vosges. Mais la riposte ne se fait pas attendre et on confie au … général de Gaulle une armée de deux cent milles hommes qui lui permettra de bouter les occupants. Presque quarante ans plus tard, il est dans ce cas de figure et sa fiction a été rattrapée par le réel —ou l’inverse. Oracles ou invocations ? Auspices ou divinations ? Toujours est-il qu’on ne peut guère être mieux antihégélien qu’en manifestant ce nietzschéisme du destin et de la nécessité incarnés dans le réel, l’œuvre, l’action, l’histoire, manifestés par une figure d’exception, habitée, hantée. « La plus grande gloire du monde, celle des hommes qui n’ont pas cédé », confiera-t-il à Malraux.
Je ne suis pas d’âge à appréhender cette période autrement que sur le terrain métaphysique, sinon mystique, mais je veux respecter la mémoire d’un homme qui n’a pas voulu de l’antisémitisme, du collaborationnisme, du défaitisme de Pétain ; je veux honorer la pensée d’un être qui a refusé les camps soviétiques, l’idéologie totalitaire communiste, l’optimiste délirant et religieux des lendemains qui chantent pour l’humanité entière ; je veux célébrer l’action d’une personne qui a décliné l’invitation d’un mode de vie induit pas le dollar, le seul papier imprimé que vénèrent les Américains. Pour autant, je ne me sens pas de droite, car depuis un demi siècle, soit elle a célébré les vertus pétainistes, soit elle a invité à faire de la France une étoile de plus sur le drapeau US, quand elle n’a pas fait les deux en même temps.
La solitude du Général en mer de Manche, au large des côtes de Weymouth, me touche autant que celle du souverain de la cinquième république qui ne sait pas comment lire les évènements de mai 68, donc comment y réagir, y répondre. Certes, il y a ceux qui en profitent pour avancer leurs pions, utilisent l’histoire comme un marchepied, tentent le tout pour le tout ayant pour dessein leur seule carrière politique. De Gaulle, lui, voulait comprendre, mais n’y parvenait pas. Mai 68, à Paris, c’était l’écho, dans le Quartier Latin, des secousses sismiques et ondes de choc venues des Etats-Unis, de Hollande, d’Italie, d’Allemagne, d’Inde, du Japon, de Pologne —Malraux l’a souligné, on l’oublie bien souvent. L’esprit de 68 paraît encore suffisamment indéchiffrable aujourd’hui, quand colloques, dossiers de revue, numéros spéciaux commémoratifs essayent d’en déterminer l’essence, pour qu’on n’en veuille pas à un homme de soixante dix-sept ans d’avoir eu besoin de quelques heures de réflexion pour décider de ce qu’il convenait de faire en pareil moment.
Acteurs et spectateurs se perdent en conjecture : explosion sociale, brèche poétique, débordement nihiliste, crise de société, ébranlement des valeurs bourgeoises, refus de la société de consommation, embrasement politique, grondements syndicaux, mouvement revendicatif —tout est dit pour culminer dans l’idée que l’esprit de 68 est dans la contestation. Refus du Père, pour le dire en termes freudiens, refus de l’autorité, de la hiérarchie, de la discipline, des modèles, refus des repères bourgeois. Et pour l’ensemble, je souscris à la phase négatrice, encore aujourd’hui, alors que l’esprit de 68 a été sinon étranglé, du moins fort mis à mal, par le recyclage massif auquel ont consenti les anciens combattants de cette époque dans l’appareil d’Etat socialiste, mitterrandien à partir de 1981.
N’ayant pas eu à m’impliquer dans cette histoire —mon soucis était alors de passer en cours moyen deuxième année !— , je n’ai pas de complexe à me réclamer maintenant d’un esprit dont j’ai senti les effets au cours des années qui suivirent dans ma vie quotidienne : modification des relations avec l’autorité, qu’elle soit familiale, professionnelle, amoureuse. Cette part de 68 est un héritage que je veux reprendre à mon compte, parce qu’elle fonde un certain type de modernité sur laquelle je veux asseoir mon travail d’écriture aujourd’hui —critique des valeurs bourgeoises, de l’idéologie libérale, de la société spectaculaire, de la société de consommation, de la technicisation au service du capital, éloge de l’hédonisme, de la contestation, de l’esprit libertaire, de l’indépendance, de l’existence esthétique, de la puissance de la critique, de la résistance à l’endroit de tous les pouvoirs.
En revanche, l’autre versant de Mai 68, c’est la tentative de récupération de cette formidable négation par des organisations avançant leurs propositions positives toutes inspirées de la Chine de Mao, de la IVème Internationale de Trotski, de l’expérience soviétique du marxisme-léninisme, de l’optimisme néochrétien des anarchistes ou gauchistes qui visaient le paradis demain, via les conseils ouvriers ou l’abandon de tout le pouvoir aux travailleurs. Je n’ai jamais pensé qu’il y eu vertus dans le Petit Livre rouge ou Leur morale et la nôtre , bréviaires de cynisme politique écrits avec le sang des peuples. Jamais je n’ai cru qu’on puisse trouver là autre chose que matière à exploiter, opprimer, dominer : ceux de Cronstadt avaient payé le prix fort, massacrés par l’Armée rouge inventée par Trotski, maniée par Lénine inspirée par Marx, le tout servant plus ou moins de modèle au Grand Timonier.
Le versant nihiliste de Mai 68, De Gaulle l’a compris et peut-être le voyage à Baden-Baden lui aura-t-il servi de temps pour méditer, tacher de comprendre, tenter de saisir les raisons de l’explosion sociale, même s’il paraît évident qu’il lui faudra plus longtemps que ce que l’on dit mais moins que ce que l’on croit. La photo qui retient mon attention est celle du vieil homme un peu las, venant de sortir de l’une des Alouettes qui lui a permis, avec sa femme, de survoler la France, en rase-mottes, pour échapper aux radars, en direction du quartier général des Forces françaises en Allemagne. Certes, les commentaires vont toujours bon train : abandonnait-il la France pour quelques temps ou pour toujours ? Echappait-il à ses responsabilités en laissant le pouvoir en vacance ? Etait-ce une nouvelle fuite de Varennes ? Voulait-il créer un psychodrame, décidant de l’ensemble, ou obéissait-il à des pulsions dépressives, jouet de son tempérament cyclothymique ? Tous ont leurs hypothèses, des protagonistes aux témoins, des acteurs au spectateur de ce qui allait devenir un coup de force après avoir été un coup de théâtre.
De Gaulle confiera que dans l’hélicoptère qui lui fait traverser la France à quelques mètres d’altitude, dans un appareil dont les pales et la tuyère font un bruit épouvantable, dont les vibrations sont éprouvantes, il aura compris qu’il ne pouvait laisser le pays à l’abandon, en proie aux forces nihilistes et destructrices. Sur la pelouse de Baden-Baden, il est seul. Que se passe-t-il alors dans sa tête ? Tout lâcher ? il en eut la tentation. Tout reprendre ? Certes, mais comment ? Pas de démonstration de force ou de violence, pas d’autorité militaire, pas de brutalité. Dans l’action, il sait trouver la solution : son départ, la mise en scène, l’installation des évènements sur le terrain de la tragédie, tout contribue à la formulation du problème, donc au début de sa résolution. Seul, il demande à l’action de lui épargner une méditation trop vaine. On pourrait lui prêter alors la formule de Picasso : je ne cherche pas, je trouve. Et il trouve la solution : le retour, les mots qui apaisent la tempête en promettant un combat singulier. Dissolution de l’Assemblée nationale, élections. On connaît le résultat : la formulation d’une confiance majoritaire dans les urnes. De Gaulle retrouve la légitimation du contrat social qu’il veut pratiquer directement avec le peuple, le contraire d’une pratique d’affidé du coup d ‘état.
Solitude de l’homme qui est aussi le chef de l’Etat, solitude de celui qui fut de combats plus lourds devant un monôme qu’il ne comprend pas, solitude de ce qui se voit contesté, vacillant, sur des revendications dont il ne saisit pas la nature symptomatique, solitude du vieil homme qui n’entend pas la voix des jeunes et qui surprend l’hostilité plus ou moins travestie de son entourage politique, solitude, enfin, du vieillard qui a traversé le siècle entre Première et Seconde Guerre mondiale, entre guerre d’Algérie et décolonisation et qui trébuche sur des murs annonçant qu’il faut jouir sans entraves et vivre sans temps morts. Que reste-t-il à l’homme du 18 Juin pour rebondir une dernière fois ? Le génie politique. Et il en manifeste.
Refusant les solutions marxistes aux problèmes posés par Mai 68, De Gaulle va dire qu’il a bien entendu un malaise et qu’il entend s’y attaquer, qu’il a compris la fracture et se propose de la combler. Soucieux de dire sa prise en compte des revendications, il avance la participation, une idée politique qui montre à l’envi le bien-fondé de l’idée de Malraux selon laquelle le général de Gaulle est toujours là où on ne l’attend pas, déjouant les prévisions courtes de la droite et de la gauche. C’est d’ailleurs la droite et la gauche qui, sur ce sujet, le feront tomber.
Pompidou et Giscard d’Estaing, également Chirac et Balladur, à l’époque au cabinet du Premier ministre, ne veulent pas d’un soutien franc et massif au projet du chef de l’Etat. On a prétexté que, la date du référendum étant prise, les textes sur la participation ne pouvant être rédigés dans les temps impartis, il fallait maintenir la consultation populaire dans le délai, mais proposer un autre objet de réforme, par exemple le projet Sénat-régions. Pompidou avait dit de la participation qu’elle signalait la sénilité du Général, qu’elle montrait la sénescence du vieil homme : on lui prête d’ailleurs le geste du doigt porté à la tempe qui signifie le déphasage, la folie.
Avec ce projet politique et social, De Gaulle visait l’introduction des salariés et des syndicats dans les conseils de gestion des entreprises, de sorte qu’il se mettait à dos le capital, la bourgeoisie, les patrons et la gauche qui ne voulaient pas entendre parler de ce que pas même en son sein elle n’aurait oser proposer —ni ne proposera en quatorze années de pouvoir. Le référendum se fit sur un autre projet, De Gaulle tablait malgré tout sur cette consultation pour réitérer son lien et son contrat avec le peuple afin de savoir si il pouvait compter une fois encore sur une assise populaire pour ses desseins réformistes. Il avait entendu la demande de 68 et croyait de la sorte y répondre : Giscard appela à voter contre, les pompidoliens soutinrent mollement, la gauche vota contre, le vieil homme fut congédié. Il partit. On porta au pouvoir son antithèse, il fallait bien que la phrase de Marx fut vraie qui disait que l’histoire se manifestait toujours deux fois, la première sous forme de tragédie, la seconde sous forme de bouffonnerie, de comédie. La Vème République commençait avec Corneille, elle se poursuivait avec Labiche : après Andromaque ou Mithridate, l’heure était venue de Champignol et Monsieur Berrichon. Rideau pour la grandeur, la pièce était terminée. Le Général parti pour l’Irlande afin de ne pas assister au changement de décor : on emballait les temples romains, les colonnes cannelées, les cellas furent vidées de leurs statues et l’on replia les toges viriles pour apporter les treilles, les chapeaux de paille, les panamas, les chaises longues et les fauteuils confortables. Pompidou pouvait entrer en scène et avec lui les rôles de boulevard tenus par les porteurs d’eau, les seconds couteaux qui avaient perpétré le régicide et allaient essuyer leurs larmes de crocodiles. Avec la participation, ils avaient craint, selon leurs mots, les soviets et les régimes d’assemblée, ils avaient également mal accepté le pouvoir donné aux étudiants et à leurs enseignants dans les universités réformées, ils avaient écarté le péril et allaient pouvoir gérer la France comme une Petite et Moyenne entreprise.
La dernière photo qui me touche montre l’exilé sur une plage d’Irlande, non loin de Heron’s Cove, dans une petite anse. De Gaulle se repose, lit les Mémoires d’outre-tombe et le Mémorial de Sainte-Hélène. Au sommet des dunes de Derrynane, les journalistes le guettent et photographient ses promenades sur la plage : il est en compagnie de sa femme et de son aide de camp, mais on le sait seul. Les deux proches qui l’accompagnent sont derrière ou devant, à côté, dans son sillage ou dans son ombre, mais ailleurs, sur une autre planète que celle du vieux roi déchu, renié, abandonné. La lande est grillée par l’air venu de l’Océan, le vent souffle, la mer paraît déchaînée, l’écume paraît voler sur la crête des vagues. Le Général a ses lunettes, la tête nue, une canne à la main, un grand imperméable sur le dos. Solitude, là encore, sur le sol de ses ancêtres, retour sur des terres de mémoire et de symbole. Sur le sable, il paraît souffrir mentalement l’un des supplices de l’Enfer de Dante. Pour quelles fautes ? Avoir proposé la grandeur à ceux qui ne savent pas ou plus ce que c’est ? Avoir cru que les choix se feraient sur des idées, pour le bien d’une nation dont le tissu s’était déchiré quand tous se sont évertués à en faire un échéance partisane et carriériste ? Avoir imaginé qu’un projet de société plus solidaire puisse être entendu par tous quand la plupart s’étaient déjà transformés en sourds ? Son seul péché fut d’être présomptueux en imaginant que tous étaient comme lui désireux d’un grand projet de rassemblement au-delà des partis et de la politique de boulevard, pour un destin qui engage la nation et le peuple dans un entreprise valant pour œuvre d’art .
Sur l’exemplaire des Mémoires de guerre que lui présentera l’ambassadeur de France en Irlande, De Gaulle écrira une phrase de Nietzsche : « Rien ne vaut rien. Il ne se passe rien, et cependant tout arrive. Mais cela est différent. » De retour en France, il accomplira son destin. Sur un livret scolaire datant de l’époque où il était saint-cyrien, l’un de ses maîtres avait écrit : attitude de roi en exil. Il se contentera d’illustrer la prédiction. Déjà mort pour la France, il attendait la fin en écrivant ses Mémoires, en faisant des réussites aux cartes, en recevant deux ou trois fidèles, pas plus. Il succomba, comme on sait : tel un chêne qu’on abat.
J’ai compris depuis que l’art politique français avait perdu son dernier poète et qu’aucun des suivants ne dépassa jamais la figuration dans des pièces de boulevard. Ceux qui, aujourd’hui, se succèdent sur le trône ont tous voulu sa mort politique, ils l’ont eue. L’un des plus fielleux se servi du socialisme pour étancher une volonté de puissance extraordinaire qui, le jour où elle pu s’exercer, ne produisit d’excellence que dans la bouffonnerie là où le Général avait sublimé dans la tragédie. Marx avait bien raison. Restent ceux qui, à droite, s’en réclament : les pires, qui ne l’ont jamais lu —savent-ils d’ailleurs qu’on peut le lire ?—, qui oublient qu’ils ont encore dans leur poche le couteau avec lequel ils ont saigné le vieil homme et sont d’autant plus nains qu’ils parlent de grandeur. Et puis, à droite, ceux qui déjà le combattaient : ils sont avec les ennemis de toujours du Général, les néofascistes, les pétainistes et vichyssois de tous ordres, les anciens de l’Algérie française, les libéraux qui s’offrent aux plus offrants des Américains. Tous sont là, fascinés par l’Elysée. Baudelaire déjà écrivait que les « morts ont de grandes douleurs »."


Michel Onfray
Le désir d’être un volcan - 1996


21/01/2007

Le Sexe des mots

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

"Byzance tomba aux mains des Turcs tout en discutant du sexe des anges. Le français achèvera de se décomposer dans l'illettrisme pendant que nous discuterons du sexe des mots. La querelle actuelle découle de ce fait très simple qu'il n'existe pas en français de genre neutre comme en possèdent le grec, le latin et l'allemand. D'où ce résultat que, chez nous, quantité de noms, de fonctions, métiers et titres, sémantiquement neutres, sont grammaticalement féminins ou masculins. Leur genre n'a rien à voir avec le sexe de la personne qu'ils concernent, laquelle peut être un homme. Homme, d'ailleurs, s'emploie tantôt en valeur neutre, quand il signifie l'espèce humaine, tantôt en valeur masculine quand il désigne le mâle. Confondre les deux relève d'une incompétence qui condamne à l'embrouillamini sur la féminisation du vocabulaire. Un humain de sexe masculin peut fort bien être une recrue, une vedette, une canaille, une fripouille ou une andouille. De sexe féminin, il lui arrive d'être un mannequin, un tyran ou un génie. Le respect de la personne humaine est-il réservé aux femmes, et celui des droits de l'homme aux hommes ? Absurde ! Ces féminins et masculins sont purement grammaticaux, nullement sexuels.
Certains mots sont précédés d'articles féminins ou masculins sans que ces genres impliquent que les qualités, charges ou talents correspondants appartiennent à un sexe plutôt qu'à l'autre. On dit: «Madame de Sévigné est un grand écrivain» et «Rémy de Gourmont est une plume brillante». On dit le garde des Sceaux, même quand c'est une femme, et la sentinelle, qui est presque toujours un homme. Tous ces termes sont, je le répète, sémantiquement neutres. Accoler à un substantif un article d'un genre opposé au sien ne le fait pas changer de sexe. Ce n'est qu'une banale faute d'accord.
Certains substantifs se féminisent tout naturellement : une pianiste, avocate, chanteuse, directrice, actrice, papesse, doctoresse. Mais une dame ministresse, proviseuse, médecine, gardienne des Sceaux, officière ou commandeuse de la Légion d'Honneur contrevient soit à la clarté, soit à l'esthétique, sans que remarquer cet inconvénient puisse être imputé à l'antiféminisme. Un ambassadeur est un ambassadeur, même quand c'est une femme. Il est aussi une excellence, même quand c'est un homme.
L'usage est le maître suprême. Une langue bouge de par le mariage de la logique et du tâtonnement, qu'accompagne en sourdine une mélodie originale. Le tout est fruit de la lenteur des siècles, non de l'opportunisme des politiques.
L'Etat n'a aucune légitimité pour décider du vocabulaire et de la grammaire. Il tombe en outre dans l'abus de pouvoir quand il utilise l'école publique pour imposer ses oukases langagiers à tout une jeunesse.
J'ai entendu objecter: «Vaugelas, au XVIIe siècle, n'a-t-il pas édicté des normes dans ses remarques sur la langue française?». Certes. Mais Vaugelas n'était pas ministre. Ce n'était qu'un auteur, dont chacun était libre de suivre ou non les avis. Il n'avait pas les moyens d'imposer ses lubies aux enfants. Il n'était pas Richelieu, lequel n'a jamais tranché personnellement de questions de langues. Si notre gouvernement veut servir le français, il ferait mieux de veiller d'abord à ce qu'on l'enseigne en classe, ensuite à ce que l'audiovisuel public, placé sous sa coupe, n'accumule pas à longueur de soirées les faux sens, solécismes, impropriétés, barbarismes et cuirs qui, pénétrant dans le crâne des gosses, achèvent de rendre impossible la tâche des enseignants.
La société française a progressé vers l'égalité des sexes dans tous les métiers, sauf le métier politique. Les coupables de cette honte croient s'amnistier (ils en ont l'habitude) en torturant la grammaire.
Ils ont trouvé le sésame démagogique de cette opération magique : faire avancer le féminin faute d'avoir fait avancer les femmes."


Jean François Revel

20/01/2007

Le sourire à visage humain

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

"Le sourire à visage humain




Notre époque ne produit pas que des terreurs innommables, prises d’otages à la chaîne, réchauffement de la planète, massacres de masse, enlèvements, épidémies inconnues, attentats géants, femmes battues, opérations suicide. Elle a aussi inventé le sourire de Ségolène Royal. C’est un spectacle de science-fiction que de le voir flotter en triomphe, les soirs électoraux, chaque fois que la gauche, par la grâce des bien-votants, se trouve rétablie dans sa légitimité transcendantale. On en reste longtemps halluciné, comme Alice devant le sourire en lévitation du Chat de Chester quand le Chat lui-même s’est volatilisé et que seul son sourire demeure suspendu entre les branches d’un arbre.
On tourne autour, on cherche derrière, il n’y a plus personne, il n’y a jamais eu personne. Il n’y a que ce sourire qui boit du petit-lait, très au-dessus des affaires du temps, indivisé en lui-même, auto-suffisant, auto satisfait, imprononçable comme Dieu, mais vers qui tous se pressent et se presseront de plus en plus comme vers la fin suprême.
C’est un sourire qui descend du socialisme à la façon dont l’homme descend du cœlacanthe, mais qui monte aussi dans une spirale de mystère vers un état inconnu de l’avenir où il nous attend pour nous consoler de ne plus ressembler à rien. C’est un sourire tutélaire et symbiotique. Un sourire en forme de giron. C’est le sourire de toutes les mères et la Mère de tous les sourires.
Quiconque y a été sensible une seule fois ne sera plus jamais pareil à lui-même. Comment dresser le portrait d’un sourire ? Comment tirer le portrait d’un sourire, surtout quand il vous flanque une peur bleue ? Comment faire le portrait d’un sourire qui vous fait mal partout chaque fois que vous l’entrevoyez, mal aux gencives, mal aux cheveux, aux dents et aux doigts de pieds, en tout cas aux miens ?
Comment parler d’un sourire de bois que je n’aimerais pas rencontrer au coin d’un bois par une nuit sans lune ?
Comment chanter ce sourire seul, sans les maxillaires qui devraient aller avec, ni les yeux qui plissent, ni les joues ni rien, ce sourire à part et souverain, aussi sourd qu’aveugle mais à haut potentiel présidentiel et qui dispose d’un socle électoral particulièrement solide comme cela n’a pas échappé aux commentateurs qui ne laissent jamais rien échapper de ce qu’ils croient être capables de commenter ? C’est un sourire qui a déjà écrasé bien des ennemis du genre humain sous son talon de fer (le talon de fer d’un sourire ? la métaphore est éprouvante, j’en conviens, mais la chose ne l’est pas moins) : le bizutage par exemple, et le racket à l’école. Ainsi que l’utilisation marchande et dégradante du corps féminin dans la publicité. Il a libéré le Poitou-Charentes en l’arrachant aux mains des Barbares. Il a lutté contre la pornographie à la télé ou contre le string au lycée. Et pour la cause des femmes. En reprenant cette question par le petit bout du biberon, ce qui était d’ailleurs la seule manière rationnelle de le reprendre ; et de la conclure par son commencement qui est aussi sa fin.
On lui doit également la défense de l’appellation d’origine du chabichou et du label des vaches partenaires. Ainsi que la loi sur l’autorité parentale, le livret de paternité et le congé du même nom. Sans oublier la réforme de l’accouchement sous X, la défense des services publics de proximité et des écoles rurales, la mise en place d’un numéro SOS Violences et la promotion de strustures-passerelles entre crèche et maternelle. C’est un sourire près de chez vous, un sourire qui n’hésite pas à descendre dans la rue et à se mêler aux gens. Vous pouvez aussi bien le retrouver, un jour ou l’autre, dans la cour de votre immeuble, en train de traquer de son rayon bleu des encoignures suspectes de vie quotidienne et de balayer des résidus de stéréotypes sexistes, de poncifs machistes ou de clichés anti-féministes. C’est un sourire qui parle tout seul. En tendant l’oreille, vous percevez la rumeur sourde qui en émane et répète sans se lasser : « Formation, éducation, culture, aménagement du territoire, émancipation, protection, développement durable, agriculture, forums participatifs, maternité, imaginer Poitou-Charentes autrement, imaginer la France autrement, imaginer autrement autrement. »
Apprenez cela par cœur, je vous en prie, vous gagnerez du temps. Je souris partout est le slogan caché de ce sourire et aussi son programme de gouvernement. C’est un sourire de nettoyage et d’épuration. Il se dévoue pour en terminer avec le Jugement terminal. Il prend tout sur lui, christiquement ou plutôt ségolènement. C’est le Dalaï Mama du IIIe millénaire. L’Axe du Bien lui passe par le travers des commissures. Le bien ordinaire comme le Souverain Bien. C’est un sourire de lessivage et de rinçage. Et de rédemption. Ce n’est pas le sourire du Bien, c’est le sourire de l’abolition de la dualité tuante et humaine entre Bien et Mal, de laquelle sont issus tous nos malheurs, tous nos bonheurs, tous nos évènements, toutes nos vicissitudes et toutes nos inventions, c’est-à-dire toute l’Histoire. C’est le sourire que l’époque attendait, et qui dépasse haut la dent l’opposition de la droite et de la gauche, aussi bien que les hauts et les bas de l’ancienne politique.
Un sourire a-t-il d’ailleurs un haut et un bas ? Ce ne serait pas démocratique. Pas davantage que la hiérarchie du paradis et de l’enfer. C’est un sourire qui en finit avec ces vieilles divisions et qui vous aidera à en finir aussi. De futiles observateurs lui prédisent les ors de l’Élysée ou au moins les dorures de Matignon alors que l’affaire se situe bien au-delà encore, dans un avenir où le problème du chaos du monde sera réglé par la mise en crèche de tout le monde, et les anciens déchirements de la société emballés dans des kilomètres de layette inusable.
Quant à la part maudite, elle aura le droit de s’exprimer, bien sûr, mais seulement aux heures de récréation. Car c’est un sourire qui sait, même s’il ne le sait pas, que l’humanité est parvenue à un stade si grave, si terrible de son évolution qu’on ne peut plus rien faire pour elle sinon la renvoyer globalement et définitivement à la maternelle. C’est un sourire de salut public, comme il y a des gouvernements du même nom. C’est évidemment le contraire d’un rire. Ce sourire-là n’a jamais ri et ne rira jamais, il n’est pas là pour ça. Ce n’est pas le sourire de la joie, c’est celui qui se lève après la fin du deuil de tout.
Les thanatopracteurs l’imitent très bien quand ils font la toilette d’un cher disparu."


Philippe Muray – septembre 2004 (Moderne contre moderne. Exorcismes spirituels IV)



Philippe Muray... Repose en Paix !

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Oeuvres lues de Philippe Muray au moment de cette note :

-L'empire du Bien
-Chers Djihadistes

+ butinages divers...

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There's some rockin' tonite !

=--=Publié dans la Catégorie "Parenthèse"=--=



"Ernst Nolte disait que la seconde guerre mondiale était la première guerre civile européenne. En ce sens nous pouvons dire que la guerre qui vient de commencer est la première guerre civile planétaire." Maurice G. Dantec

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Oeuvres lues de Maurice G. Dantec, au moment de cette note :

-Le théâtre des opérations, 2000 : Journal Métaphysique et polémique (Vol. 1),
-Le théâtre des opérations, 2001 : Le Laboratoire de Catastrophe Générale (Vol. 2)
-Le théâtre des opérations, 2002-2006 : American Black Box (Vol. 3)
-Grande Jonction (Roman)
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Bande son du moment : « Live all Over The Place » par King's X

Lecture du moment : En parallèle : « Grande Jonction » et « American Black Box » de Maurice G. Dantec

Citation du jour : « L'homme est si grand, que sa grandeur paraît surtout en ce qu'il ne veut pas se connaître misérable. Un arbre ne se connaît pas grand. C'est être grand que de se connaître grand. C'est être grand que de ne pas vouloir se connaître misérable. Sa grandeur réfute ces misères. Grandeur d'un roi.


(...)

Le phénomène passe. Je cherche les lois.

Les révolutions des empires, les faces des temps, les nations, les conquérants de la science, cela vient d'un atome qui rampe, ne dure qu'un jour, détruit le spectacle de l'univers dans tous les âges.»
Isidore Ducasse, Comte de Lautréamont - (Poésies) - 1870


Humeur du moment : Jubilation exacerbée !

16/01/2007

Conservateur

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=


«L’histoire, ce témoin des siècles, cette lumière de la vérité, cette vie de la mémoire, cette maîtresse de la vie.» Cicéron


Ce jour, suite à quelques sujets de discussions rapidement lâchés, dans la salle de pause, au travail, vous savez… l’intervention américaine en Irak… l’avortement… l’euthanasie… la peine de mort… le pape… à peine 3 ou quatre phrases sorties de ma bouche pour chaque sujet… bref, j’ai eu droit à la sentence banale à laquelle je suis habitué depuis plus de 20 ans : « Tu as des propos de réac’. T’es franchement conservateur ! » La personne en question, qui m’a chié cette phrase, vote à gôche, tendance Ségolène Royal et elle pense que si la France devait envoyer l’armée en Irak ce serait pour s’interposer entre l’armée américaine et la « résistance » irakienne… que l’avortement honore la femme… que l’euthanasie, ma grand-mère nous l’aurait demandé si elle avait pu, mais elle pouvait pas à cause de son semi-coma et nous sommes des égoïstes, ma mère et moi, nous l’avons gardé jusqu’au bout pour nous et uniquement pour nous… que Saddam Hussein, ben on n’aurait jamais du le pendre, parce que la peine de mort (même pour crime contre l’humanité) ben que c’est pas bien… et que le pape pourrait faire un effort, merde, c’est vrai quoi, il pourrait penser à l’Afrique, merde alors, et aider à la propagation du préservatif… par la même occasion, qu’il officialise des prêtres pédés… « On est en 2007 tout de même ! » Aux temps messianiques probablement.

Bon, je ne vais pas expliquer ce que je pense et de l’affaire Irakienne, et des petro dollars, et de la situation géopolitique de la mondialisation en cours, et de l’avortement, et de l’euthanasie, et de la peine de mort (en particulier pour crime de guerre et crime contre l'humanité), et de Benoît XVI. J’ai pas la tête à ça. Je me suis promis, dans un autre de mes posts, de sourire et porter le masque de circonstance. Non ?

En vérité je ne veux pas faire partie de la poulaille. La basse-cour pue. D’un bout à l’autre ça caquette et ça se tient chaud, plumes contre plumes et culs dans la fiente. Mon « trip » c’est d’être d’une race particulière, de celle qui est inévitablement détestée et abominée de beaucoup, mais gratifiée par quelques-uns. Cela me va comme un gant de velours recouvrant une poigne de fer. Et chemise en soie, s’il vous plaît, avec vouvoiement à la lettre, histoire de faire monter l’acidité gastrique dans l’œsophage du bobo contrit. Le tutoiement survient comme un couronnement… pour ceux qui le méritent.



« Je n'ai pas une minute à perdre
J'écris
Il est cinq heures et je précède
La nuit
Mon feutre noir sur le papier
Va vite
Pendant que ma lucidité
Me quitte

J'écris c'que j'ai vu
Diagramme des détresses
Le collier, la laisse
Je n'supporte plus
Vinyle de la rue
Fantôme de la vitesse
Tous ceux que je blesse
Je n'm'en souviens plus

J'ai atteint la date limite
Pour le suicide idéal
La date que j'avais inscrite
A quinze ans dans mon journal

Je croyais, la vie passe vite
Je croyais, je n'crois plus en rien

Es-tu prêt à mourir demain ?
Es-tu prêt à partir si vite ?
Les yeux baissés tu ne dis rien
J'ai atteint la date limite

Je ne suis plus de votre race
Je suis du clan Mongol
Je n'ai jamais suivi vos traces
Vos habitudes molles
J'ai forgé mon corps pour la casse
J'ai cassé ma voix pour le cri
Un autre est là qui prend ma place
Un autre dicte et moi j'écris

L'autre
Je suis l'autre

Venez entendre la fissure
Le cri
De la sensibilité pure
Celui
Qui se dédouble et qui s'affronte
La nuit
Celui du sang et de la honte
Folie

Folie que j'ai vue
A l'angle des stress
Dans la jungle épaisse
Des mots inconnus
Je vois ou j'ai vu
Hôpital silence
Tout ce que je pense
Je n'm'en souviens plus

J'ai dépassé la limite
Du scénar original
Rien à voir avec le mythe
Etalé dans le journal

Tu croyais, la vie passe vite
Tu croyais, tu n'crois plus en rien

Je suis prêt à mourir demain
Je suis prêt à partir très vite
Regard d'acier je ne dis rien
J'ai dépassé la limite

Je ne suis plus de votre race
Je suis du clan Mongol
Je n'ai jamais suivi vos traces
Vos habitudes molles
J'ai forgé mon corps pour la casse
J'ai cassé ma voix pour le cri
Un autre est là qui prend ma place
Un autre dicte et moi j'écris

L'autre
Je suis l'autre »

Le Clan Mongol
(Bernard Lavilliers)


 

Il me convient de faire partie de ces clowns métaphysiques qui ne craignent pas d’affirmer différence, originalité et individualité, d’indiquer les hiérarchies dans les pensées et les actes en dédaignant le déroulement des péripéties quand celui-ci s’écarte un peu trop du discernement et de l’entendement. L’effronterie et l’impertinence piquent au vif les crétins, les stupides, les débiles, les idiots, les sots, les bornés, les bêtes, les cons, les ineptes et les niais naïfs. Une pensée qui s’assume et assume la réalité est une menace pour ces petites larves qui se chient dessus dés qu’elles doivent faire face à quelque personne pourvue d’une devanture de dandy et d’une profondeur de l’Être.

Certes, ma dégaine brouille les pistes. Mes goûts musicaux entachent cette chiquenaude : « Conservateur » ! Le Rock and roll est pourtant, à bien y réfléchir, une musique qui, de par son parcours sinueux, est à la fois révolutionnaire et… conservatrice.

« Je reste persuadé que le rock a atteint son ultime apogée vers le milieu des années 1990, moment où sa FORME TERMINALE s’est définitivement cristallisée : la chanson Kowalsky de Primal Scream, ou le D’You Know What I Mean, d’Oasis par exemple sont des concentrés quintessenciels de ce que fut la musique électrique du XX ème siècle.
Depuis, malgré les talents indéniables de quelques auteurs et musiciens, le rock ne peut plus que RÉPÉTER, avec quelques variantes accessoires, les formules inventées pendant quarante-cinq années de révolution permanente.
Il n’y a rien de plus CONSERVATEUR qu’un groupe de rock-music. »


Maurice G. Dantec (Le théâtre des opérations : 2002-2006 American Black Box)

Je ne sais pas si ça va en rassurer quelques-uns qui, se grattant la nuque ou le front (peut-être même le cul), se demandent sur quel pied ils se doivent de danser pour aborder d’une façon ou d’une autre le phénomène paradoxal que je suis. Mais j’émets surtout cette citation histoire d’emmerder les quelques gauchistes qui considèrent que le rock est une affaire de révolutionnaires anti-occidentaux. Alors que, précisément, le rock and roll (avec le Jazz bien entendu, dans sa version bop, cool, free ou fusion) est l’exemple même de ce que l’occident a accouché de plus beau, artistiquement, ces 50 dernières années. Se reposant sur l’apport essentiel de la négritude afro-américaine dans ce qu’elle a de plus altier, de plus digne, sur la volonté blanche de s’arracher aux habitudes bourgeoises que la société de consommation était en train d’installer. La noble négritude électrifiée par la fureur blanche. Bon, ok, je ne suis fan ni de Primal Scream, ni d’Oasis, mais j’entrevois très bien ce que le sieur Dantec a voulu nous signifier. J’ y reviendrai. Et je précise qu’il faut aimer la vie pour être un descendant d’esclave et oser hurler dans un micro avec une détermination rageuse convaincue : « I Feel Good ! ». Paix à toi James Brown, godfather du Rhythm ‘n’ Blues, de la Soul et du Funk !

« Conservateur ».

Ce qui emmerde avant tout, c’est le langage qui va à contre courant de la chienlit nombriliste. Il faut, vaille que vaille, être d’un groupe, d’une formation, d’un rassemblement. Éventuellement chrétien, tendance calviniste ou catho cool orienté Vatican II. UMPS. Sainte Chiraquie valeureuse. Alter mondialiste convaincu. Anti-américain, surtout. Faut être à la page. Le conformisme nauséabond de notre temps tient de la nausée la plus suintante. De toutes parts ça dégouline et personne ne voit rien, ou alors, mieux, ou pire, tout le monde le voit et trouve ça normal et joli. C’est définitivement l’exception, quand elle surgit, qui vient confirmer la règle de ce nouveau parc humain : la haine de la particularité, de l’irrégularité, de l’anomalie, de la parole et de l’acte hors pair. Et la vengeance immédiate, d’une manière ou d’une autre, à son encontre.

« Conservateur ».

J’aime la douceur et l’écoute, le dialogue (dans le sens ou David Bohm l’a exprimé), la compagnie des femmes, le rire des enfants… ok… ok… ne sortez pas les violons… car pour tenir debout, j’aime surtout ce qui est dur et taillé pour le corps des athlètes, j’aime ce qui scintille et bruit comme « les bijoux sonores » de Baudelaire, j’aime les décorations de guerre quand elles sont méritées, et je méprise la grisaille, la pauvreté, l’avachissement, la mollesse, les échecs, la médiocrité crasse. J’aime le luxe, le calme et la volupté (voir le même Baudelaire). Bref, j’aime tout ce que notre époque déteste. Mon cœur vibre à l’évocation de Nietzsche. Mon âme se tasse quand on me parle de Sartre. Beaucoup me dépeignent comme un être désenchanté, sombre et triste. C’est exact. Mais c’est ne voir qu’un côté de la médaille. Tentez de la retourner, ça vaut le coup d’œil. Rires. Vins délicats. Viande blanche en sauce. Verbe léger et charmeur. Danse de l’esprit et des corps. Fraternité. J’aime l’idée que je danse au-dessus du cratère, non sans crainte, mais avec une peur mesurée. Avec de la bravoure, non de la « bravitude ». Chants et rires. Rires et chants. Insolence au programme. Tant pis pour les frileux. Une pensée leste et claire devient fatale pour les gueux. Lueur dans la nuit. Obscénité crue des propos. Mais pudeur calculée et consciente. La pudeur mène vers la raillerie et le persiflage. Épée. Plus précis : errance solaire, fleuret, plume et marteau. Art des masques dont les contours torturés inquiètent uniquement les chiens qu’ils sont sensés inquiéter, c’est-à-dire presque tout le monde. Ainsi, on pénètre l’arène en gladiateur libre d’avance et on use des termes qu’il faut avec qui il faut. La confrontation, de toute façon, est déséquilibrée dés le départ, il faut de la stratégie pour se faufiler au milieu de la meute. Le calme, la froideur, le détachement qui me caractérisent sont une manière de cacher la confusion, la pagaille, le bordel, les troubles de mon cœur, le chaos de mon âme, et de les distiller, à ma convenance, comme des poisons ou des contre-poisons afin d’imposer un agencement, une ordonnance, une économie, une organisation dans l’échange sous le couvert de la clarté et de l’élégance.

« Conservateur ».

Je sais, il est beaucoup de conservateurs qui dorment comme des chiens, le nez au chaud entre leurs couilles. Ils muséifient dans la poussière croyant protéger et promouvoir. Nécropoles intestinales. Ils appellent de leurs vœux le retour d’un passé qui est mort et enterré depuis longtemps. Mais, vous l’aurez compris, j’espère, je ne me réclame pas de ces insignifiants.

« Conservateur ». On devine aussi le terme « Fasciste » qui, parfois, tombe comme le marteau du juge. C’est vite évacué. ON est vite évacué. Le débat est vite évacué. Refus de complexifier la vie qui est pourtant bien complexe. Car si je suis, entre autre, « conservateur », c’est parce que je me sens dépositaire d’un legs et que je me dois, à ma modeste échelle, d’en assumer la succession. Je veux garder un œil ouvert sur le phare tandis que je m’aventure entre les récifs. Les falaises me parlent, là-bas, fouettées par les vagues, éternelles dans leur écrin de nacre et de sel, même si l’horizon inconnu m’appelle comme une obsession. Les empreintes de notre passage, là, devant ces falaises, je veux les conserver. Je veux me souvenir. Je refuse l’extinction de la mémoire. C’est bien d’un Acte dont il s’agit ici, non d’une réaction se rongeant le frein, arrêtée sur elle-même. Conserver ce qui se doit d’être préservé c’est faire un bras d’honneur à la mort, au temps, aux opinions terre-à-terre. Fi de la soumission éternelle. Je préfère l’éternité insoumise. Les racines tissant en voluptueux rhizomes le sens du glébeux que nous sommes. Le mouvement constant, le changement n’est possible qu’avec un sens de la Fondation. « Conservateur ». Pour aller sur Mars : la rage antique contre la peste moderne. « Conservateur ». C’est l’Ordre profond qui m’intéresse. La sentinelle de l’Humanité. Le gardien du lieu Saint que plus personne ne désire honorer. S’il y a des « rockers » parmi vous, peut-être comprennent-ils à présent la citation de Dantec.

Et un Jack Daniel's... un.

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Bande son du moment : « The Isle Of View » par The Pretenders

Lecture du moment : En parallèle : « Grande Jonction » et « American Black Box » de Maurice G. Dantec

Citation du jour : « On ne conserve pas des valeurs. On les transcende sans cesse. Sinon, elles meurent d'elles-mêmes. » Christian Boiron


Humeur du moment : Méditatif

 

14/01/2007

Pour Noël prochain ?

=--=Publié dans la Catégorie "Parenthèse"=--=

Pendant que tous mes voisins débiles installeront leur père noël à leurs balcons, mon épouse me suggère que nous installions cette sale bestiole là... c'est mon fils qui trouverait ça chouette.

Cliquez sur la photo

 

En tout cas ça nous changerait des effluves faussement cordicoles habituelles !

21:20 Publié dans Parenthèse | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : 39-parenthèse : pour noël prochain ? | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

13/01/2007

Toi et la Mort

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« En premier, c’est toi que j’aime, et la mort en second,
car elle m’aime plus que toi quand tu n’es pas là.
Elle s’assied en face de moi,
aiguise sa faux.
Nous nous adressons plein de mots sages,
aussi sages que les derniers mots peuvent être.

Tiens, on frappe à la porte :
"C’est elle", dit la mort, "Alors je m’en vais."
"C’est ça", je lui dis, autrement distrait.
Ton sourire, découvrant à peine tes dents,
plus luisant que l’acier de la sinistre faux,
brille de mille éclats. Nous nous embrassons.

Nous nous roulons sur le plancher.
Ce craquement de planches,
comme si l’on brisait et quittait un cercueil,
c’est l’amour qui se relève et ne meurt pas. »

Visar Zhiti, Toi et la mort

02:53 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

08/01/2007

Vivre et Écrire II

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=

« ENIVREZ-VOUS

Il faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.

Mais de quoi ? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous !

Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise. »


(Les petits poèmes en prose) Charles Baudelaire

Je n'aime pas perdre de temps en matière de lecture... et je ne souhaite plus ouvrir de livre pour simplement me distraire, puis faire un amalgame entre une certaine légèreté que je revendique (et ne confond nullement avec la frivolité) et le Nihilisme qui consiste à être vain... Je ne parviens pas du tout à rester devant un film de série B à la télévision, avec ou sans cacahuètes... avec ou sans bière... et lorsque j'ai besoin de légèreté, quelques biographies simplistes mais intéressantes mises à part ("La Fièvre de la Ligne Blanche" par exemble, par LEMMY KILMISTER, bassiste-chanteur du fabuleux groupe Mötörhead et baroudeur Rock 'n' Rollesque depuis une quarantaine d'années...)



(... ou encore, "Mort aux Ramones", par Dee Dee Ramone, bassiste et compositeur principal pendant les plus belles années du combo Punk The Ramones... Lemmy et Dee Dee, deux cramés de la tête, l'âme écorchée vive et le rire nihisliste comme unique voie de sortie... mais couronnée par quelques superbes chansons dont l'énergie nourricière n'a de cesse de me requinquer depuis les hautes heures sombres et lumineuses de mon adolescence.)



...des lectures "coca-cola" (selon l'expression d'une amie) qui aèrent la tronche, favorisent la purge et contribuent à faire fonctionner les zygomatiques avant l'explosion salvatrice du rire.



Hormis ce genre d'exception, quand j'ai besoin de légèreté, c'est encore vers la littérature que je me tourne : de Djian à D’Ormesson... l'éventail est large... Car simplement me distraire, sans rien apprendre, ce n'est pas du tout ce que j'attends de l'énergie déployée dans la lecture d'un livre. Ce vers quoi j'aspire, par le biais de la littérature, c'est d'être secoué, perturbé, renversé, avant que de pouvoir déployer des ailes... plus fort... plus serein... plus sage. Plus souverain aussi. Si il y a maint styles et moult écrivains, il n'y a, à mes yeux, qu'une seule Littérature... un seul Verbe... avec tout ce que cela peut impliquer en terme symbolique.

Si la définition basique et banale de la littérature de notre abominable époque (comme me le soutenait une de mes connaissances) consiste de plus en plus à ne considérer la littérature uniquement que comme un domaine comprenant les oeuvres écrites à finalité esthétique (pour quelques unes qui surnagent péniblement du lot nauséabond) ou ayant pour but unique de raconter une petite histoire (nombriliste et agrémentée de quelques thèses conspirationnistes étouffantes, excluant du coup tous les écrits comprenant des thèmes philosophiques, politiques, historiques ou religieux) j'en arrive à comprendre très vite pourquoi "Le Diable s'habille en Prada" ou le "Da Vinci Code" sont considérés comme de la Littérature. De la Littérature de gare disent quelques esprits sur la défensive. La littérature de gare, fut un temps, était signé Simenon ou Féval, autrement dit, même la classe populaire lisait quelque chose de palpable, de concret, avec de la consistance. La petite histoire esthétique personnelle, définition tellement basique qui semble sortir d'un Larousse, précisément le type de définition qui ferait se hérisser les pics de n'importe quel écrivain. C'est tellement réducteur, qu'en effet, n'importe quel scribouillard doté d'un peu d'imagination et sachant manipuler quelques phrases peut être catapulté écrivain pour son plus grand bonheur... et pour notre malheur à tous.

Bah, me direz-vous... il y a tellement de choses plus graves ici-bas, sur ce pauvre caillou bleu perdu dans l'infini, qu'à quoi bon se prendre la tête pour une histoire de définition littéraire ? Hmm ? Après tout, mes contemporains ont peut-être raison... je me prends la tête tout seul... je devrais, probablement, me laisser glisser dans l'alcôve universelle, dans l'érection de la Métastructure Machinique à laquelle tout le monde consent sans trop se poser de questions. Surfing is good. Et nous sommes loin du Surfing Bird des Trashmen, repris avec verve et fureur par les Ramones que j'évoquais plus haut. Non, le Surf sauvage, aristocrate et psychédélique a laissé place à un surf idéel, faussement idéal, virtuel et désincarné, déguisé par des artifices qui ne tiennent rien du dandy, mais plutôt de l'autruche s'enfonçant la tête dans le sable et présentant son cul masqué pour une enculade au sens propre et au sens figuré que le "théâtreuh" que nous jouons au quotidien nous empêche de considérer de face. La Vérité pose des problèmes.

Pourtant, le rôle de la Littérature, et de l'Art en général, par extension, est des plus simple. Il consiste à dire la Vérité, à regrouper en faisceaux communs les forces éclatées pour honorer l'Intelligence, faire voler en éclats les masques de l'autruche, et si l'artifice culturel nous distingue tous du troglodyte moyen il ne doit pas être utilisé pour nous masquer nos rides : notre passage ici-bas est bel et bien éphémère. Il faut disséquer. Sans crainte. Mais les craintes sont grandes. Et le poids de la Vie considérable.

Les coups que je reçois, à force de dévoiler le fond de mes pensées, dans ce Blog comme dans la Vie réelle, me laissent toujours perplexe car je trouve les coups en question, les justifications, les arguments, inutiles. Pourquoi ? Parce qu'en ce qui me concerne l'affaire est entendue : je sais ce qui est de la Littérature et ce qui n'en est pas. Point. Je sais, indiscutablement, ce qui est de la Pensée et ce qui n'en est pas. Mais envers et contre tout on cherche à me convaincre... de quoi ? D'être futile et vain. « Le péché n’est pas que les locomotives soient mécaniques, il est que les hommes le soient. » G. K. Chesterton

Et ça me fatigue de plus en plus la justification ad nauseam que je vais finir par me dissimuler. J’ai quelques talents de comédien. Je sais, aussi, acquiescer et sourire bêtement. La résistance passe d’abord par l’acte qui consiste à sauver sa peau en passant inaperçu. Dois-je cacher mes élans ? Arrêter de sortir mes grandes phrases, mes théories pleines d'emphase, mon souffle parfumé ou fétide ? Je vais me planquer. Je vais enfin dire des banalités, ça finira par en rassurer plus d’un et, ainsi, peut-être parviendrai-je par rentrer dans le rang de leur estime. Pour vivre heureux, il faut savoir planquer son cul. C'est ça ? Et pour vivre caché il faut parvenir à être heureux pour puiser la force adéquate en soi qui met à l'écart par le biais du masque qui cache sans rien révéler. Un peu d'hypocrisie ne me fera pas de mal, un peu d'hypocrisie orientée selon mon plein vouloir et non par cette moraline puante qui caractérise tellement notre époque de lâches.

Mais la vérité est autre. Laissez-moi soupirer.

Je me lève tous les matins vers 7h30 et je suis incapable de me coucher avant 1h30/2h00 du matin. Le travail de magasinier vaut son pesant d'insomnies. Je rêve de traverser toutes les nuits du monde, passer de l'autre côté de la ténèbres. « Break on through to the other side ! » Pendant que les écrans des Mac et PC scintillent de leur banalités tellement vaines, je termine « Carnet de nuit » de Sollers... « L'évangile de Nietzsche » de Sollers encore (avec, entre autre, un magnifique chapitre consacré à Venise, ce qui enchante le guitariste du groupe VENICE que je suis)... et je poursuis ma descente Cancérigène vers l'antidote salvateur en lisant lentement « Grande Jonction » de Maurice G. Dantec. C'est mon affaire, voyez-vous ? Le pire c'est que j'en souris, même lorsque c'est amer, alors qu'à 20 ans j'en aurais pleuré de dégoût. Et il me faudrait lire le « Da Vinci Code » et ses théories fumeuses pour bonnes femmes puritaines en pleine descente de névrose ou en pleine montée d’hystérie… parce que ça les rassure de se dire que Jésus aurait baisé Marie-Madeleine, aurait vécu « normalement », comme un homme avec une bite ? Oui, ça les rassure de se persuader que Jésus ait laissé une descendance, féminine par dessus le marché. Notre époque est spécialisée dans le tassement, le rabaissement. La Guillotine selon d'autres moyens. Impossible de leur faire comprendre que Jésus avait, sûrement, des érections parfaites (ce n’est rien de le dire) mais que le fond du problème n’était pas là, même circoncis et Juif par sa mère, sa situation dépasse le Freudisme de Prisunic.
« Virgina Madre, filia del tuo filio » écrivait Dante dans sa « Divine Comédie », ce qui n’arrange pas les choses pour les dégarnis du bulbe. « Vierge Mère, fille de ton fils ». De quoi méditer quelque temps au lieu de se complaire dans la vulgarité rassurante, ne fut-elle que, prétentieusement, « romanesque ».

Selon Philippe Sollers :

« Effets du "spectaculaire intégré" :

1. Ils ont tous tendance à dire la même chose en même temps, au point que le phénomène paraîtrait mystérieux s'il n'était purement technique. Comprendre : Pavlovien...

2. La perception rétinienne est hypertrophiée (somnambulisme inversé), d'où l'importance de la perception physique, immédiate et quantitative. La grande affaire : grossi ou maigri ?

3. Dévalorisation sans précédent de l'activité intellectuelle et littéraire. »


(Carnet de Nuit)

Oui. Ils, elles, se posent des questions banales. Ils, elles, dorment debout. Le sommeil qui les possède les rassure. Le gouffre est une abomination qu’ils ne souhaitent nullement affronter et cette attitude est l’abomination de l’abomination, ce qui est pire. Pourtant j’ai croisé parmi eux, parmi elles, des esprits brillants, intelligents mais qui ont fini par s’aplatir, par rendre les armes. Mais « même les élus seront séduits » affirment les Évangiles. Ces résonances sont bien singulières. « Parce que tu n'es ni froid ni brûlant, mais tiède, je te vomirai de ma bouche » affirme le Seigneur. Résonnances bien singulières, en effet.

Car la Littérature c’est une autre histoire, voyez-vous. Toujours de Sollers : « Chaque fois, les phrases se sont mises à fonctionner avant que je sois là, ou plutôt leur espace, leur air. J'ai continué, ce qui veut dire : garder le commencement, sans cesse. » Le Verbe nous rend esclave. Esclave Joyeux et Souverain.

La littérature, comme toute création artistique (oui je sais, c'est une histoire de prétendants présomptueux) est une affaire qui nous mets en contact direct avec le réel (qui n'est pas la réalité), avec le réel de l'Être. Mais le réel en question, par strates progressives se trouve d'abord bousculé sens dessus dessous avant que d'être... transcendé... même si c'est à un niveau d'immanence insoupçonnable par les somnambules. (Voir plus haut). L'Homme (terme, ici, générique) est confronté à la même rengaine éternelle que nous connaissons tous : Je viens d'où ? Je vais où ? Qu'est-ce que je branle ici ? À quoi qu'ça sert tout ce cirque individuel ou collectif ? Usons donc d'un peu de Style. « Ton Style c'est ton cul ! » gueulait Léo Ferré, un peu énervé, je dois dire, le vieil anar. On cherche à mettre en scène, donc, par la manière la plus évidente à nos yeux, on cherche à représenter ce pauvre Réel qui nous fait tourner en rond comme des loups affamés dans une cage. Style et Stylet ont la même racine étymologique, voyez-vous, et un Stylet n'est jamais qu'un poignard à petite lame aiguë. Mais c'est aussi, en zoologie, la partie saillante et effilée de certains organes. Autrement dit, la littérature a toujours consisté à mettre à nu, à montrer le fond des choses, à révéler les aspects rugueux et les angles tranchants du Réel de notre Être confronté à la réalité.

Expression sur un support d'un sentiment qui s'impose par lui-même, la littérature pose des questions, tente des réponses, élabore un équilibre précieux qui autorise l'émergence de valeurs nouvelles. Tout le reste, vain ou pas, c'est du blah-blah, même si ça en soulage plus d'un de se trouver "cool" et "détendu". User du Stylet, amis, c'est trouver le point de rupture qui donne le souffle de l'évocation, fait grandir la force de ce souffle, accouche d'une structure particulière, d'une musique dans la langue, offre la perspective d'un point de vue, dessine une synesthésie (Trouble sensoriel caractérisé par le fait qu’un seul stimulus entraîne plusieurs perceptions... ainsi on se met à entendre la peinture, à sentir les mots, à toucher les idées... la musique devient sculpture... une symphonie devient une peinture épique... etc...). Voyez ou revoyez « Les Illuminations » de Rimbaud... par exemple... ou méditez, longuement, sur les « Correspondances » de Baudelaire.

Le Style, la langue, les mots qui finissent par guérir les maux, c'est là la première réponse immédiate à la situation dont je parlais quelques lignes au-dessus, car l'action qui est en cours dans cette curieuse incarnation Verbale (le Logos n'en finit plus de s'incarner et s'incarner encore et encore) permet une autre perception de la situation en question. Cette action est la Littérature en personne : un rapport profond avec la texture même du Réel qui nous fait pénétrer par des portails d'Or et d'Ivoire dans un Royaume que peu comprennent. Un peu comme avec la musique : on joue une seule note, au piano ou à la guitare, un simple "la"... et si l'oreille est sensible, on entend soudain la quinte (mi)... la tierce (majeure ou mineure, selon notre état d'esprit... do... ou do#). La Réalité banale du "la"donnera une chansonnette... si on perce son réel (ô vives harmoniques) on devient un artiste... car harmonisations et orchestrations qui en découlent ne se peuvent d'être banales, même si elles sont parfois simples. Il s'agit bien de CAPTIVER, CHARMER, CONQUÉRIR, ÉMERVEILLER, ENSORCELER, ENVOÛTER, FASCINER, RAVIR, SÉDUIRE, SUBJUGUER, SAISIR... non pas le lecteur mais la réalité qui, explosant, mène au RÉEL. À la question « que peut-on faire ? » y'a-t-il une réponse universelle ? : AGIR. La Littérature c'est le Verbe qui ne se prostitue pas... mais qui agit... « SOIT ! »... et celà EST !

Et pour agir, il faut se donner les moyens du langage. Il faut se doter d'une réponse car notre condition l'exige. Ce n'est pas, comme le croyait Sartre, une Action sur la réalité, mais c'est une action sur le Réel de notre Être, sur le Réel de l'ÊTRE en tant que tel. Le Réel de l'Être changeant... la perception de la réalité devient vivable. Il paraît que nous sommes faits à l'Image de Dieu. Que de stupeurs en perspective. Il me faudrait m'amuser à vous expliquer la "naissance" de Dieu... le Tsimtsoum... et le sens de Bereshit... mais vous avez GOOGLE
, soyez débrouillards un peu, ça ne vous fera pas un deuxième trou au cul... en tout cas ça risque de contribuer à vous nettoyer le sphincter... Je m'adresse ici à quelques détracteurs qui se reconnaîtront.

Il faut une constitution forte pour affronter la médiocrité ambiante, grandissante, conquérante, aux hordes gigantesques. Légion. C’est que Nous sommes dans un hôpital psychiatrique généralisé, organisé selon le schéma objectif d’un camp concentrationnaire. Actifs dans notre sommeil. Actifs pour le sommeil. La prise de Conscience, en semblable circonstance, est une balle d’argent pénétrant notre cervelle. Une Croix et son chemin qui mène vers le Golgotha.

« Cette douleur plantée en moi comme un coin, au centre de ma réalité la plus pure, à cet emplacement de la sensibilité où les deux mondes du corps et de l'esprit se rejoignent, je me suis appris à m'en distraire par l'effet d'une fausse suggestion.
L'espace de cette minute que dure l'illumination d'un mensonge, je me fabrique une pensée d'évasion, je me jette sur une fausse piste indiquée par mon sang. Je ferme les yeux de mon intelligence, et laissant parler en moi l'informulé, je me donne l'illusion d'un système dont les termes m'échapperaient. Mais de cette minute d'erreur il me reste le sentiment d'avoir ravi à l'inconnu quelque chose de réel. Je crois à des conjurations spontanées. Sur les routes où mon sang m'entraîne il ne se peut pas qu'un jour je ne découvre une vérité. »


Antonin Artaud (à André Gaillard) - Fragments d'un Journal d'Enfer (1926)

C’est une sacrée affaire, je vous le dis, une fois la balle d’argent illuminant les neurones que de parvenir à porter au lecteur le diamant salvateur qui sera sensé l’illuminer à son tour. Cristal. Feu qui consume sans brûler. L’écrivain, également lecteur, procède de par ses mots, malgré lui souvent, au dénombrement, à l’énumération, au recensement de tout ce que la Littérature se doit de tenir comme promesse pour clamer la Présence du Réel. La Langue est expérimentation alternative, réalisme, classicisme, Romantisme, Futurisme, mais elle veut passer le Temps et porter une œuvre par-delà la mort de l’auteur. Son souffle est de tous les temps, de toutes les époques passée et à venir. Le but est de porter cette illumination vers un seul individu peut-être qui se sentira dépositaire et transmetteur à son tour. La Langue veut le frisson, les fièvres, la scission du désespoir qui sème un champ particulier pour des moissons d’espoir. La fiction parvient, c’est là sa singularité, à rendre efficace dans les synapses du lecteur exalté la perception du Réel, à la rendre active. Blanchot : « Le mot agit, non pas comme une force idéale, mais comme une puissance obscure, comme une incantation qui contraint les choses, les rend réellement présentes hors d’elles-mêmes. » Car le Verbe ne qualifie pas cette piteuse action qui consiste à parloter et palabrer entre une coupe de champagne et un boudoir, ou à scribouiller une petite histoire pour nous persuader que le diable s’habille en Prada, ce dont je n’ai jamais douté. J’ajoute même qu’il a un sourire d’enfant innocent, le Diable, pendant qu’il tue. Le conte, la fable, l’illusion, la chimère, l’invention dialectique, le mirage qu’élabore l’écrivain, est RÉEL. Le RÉEL est de la sphère de l’entendement, de la raison, de la pensée, de l’intellect, de la raison, de l’esprit, de l’âme du monde pour ne pas dire de l’Univers. Mais il s'INCARNE. Le RÉEL n’est pas du domaine fini et arrêté, uniquement social, des phénomènes quotidiens, des évènements et situations banals « à la p’tite semaine ». Si les faits sociaux peuvent être un point de départ, il ne convient pas uniquement de les décrire, il faut aller se vautrer un peu dans le fumier, mettre son nez dans les plaies de la chair et de l’âme pour découvrir que l’Univers entier est peut-être une Pensée jouissante. Car décrire la réalité sociale ce n’est rien d’autre que se confronter à l’opacité des symptômes. Surface. Aspect. Dehors. Apparence. Brisures. Obscénité dont personne ne voit la pornographie sous-jacente. Réécoutez l’album « Pornography » de Cure.

« A hand in my mouth
A life spills into the flowers
We all look so perfect
As we all fall down
In an electric glare
The old man cracks with age
She found his last picture
In the ashes of the fire
An image of the queen
Echoes round the sweating bed
Sour yellow sounds inside my head
In books
And films
And in life
And in heaven
The sound of slaughter
As your body turns

But it's too late
But it's too late

One more day like today and I'll kill you
A desire for flesh
And real blood
I'll watch you drown in the shower
Pushing my life through your open eyes

I must fight this sickness
Find a cure
I must fight this sickness »


Revenons à nos moutons. Plus qu’une formulation argumentée, logique, raisonnée de la réalité, la Littérature est la projection visible, et par la même occasion : transmission, d’un contenu, d’une essence, mieux : d’une quintessence. Elle nous fait pénétrer dans le nœud des questions. Elle devient une arme pour combattre.

« I must fight this sickness
Find a cure
I must fight this sickness »


La Littérature ouvre au Royaume caché des évidences indicibles qui font de nous ce que nous sommes. Ce qui est indubitable et manifeste, concret et effectif, tangible, sensible, substantiel se dévoile, se divulgue, apparaît, consume. Car la Vérité peut être mortelle. Lorsque l’auteur parvient à toucher le nerf à vif, le point sensible, il fait se coïncider la pulsion de Mort et la Vie lumineuse dans ce qu’elle a de plus noble, de plus altier. Elle révèle l’union des deux antinomies qui se conjuguent en nous depuis la nuit des temps en une bataille Sainte et nécessaire pour nous accoucher à nous-même de cet excédent de force captée, de cette surcharge d’énergie, ce surcroît de volonté. Et la liesse va de pair avec le désespoir sublime. Euphorie. Allégresse. Jubilation. Ivresse. Or, il faut s’enivrer, tout est là.

Nabokov, cité par Sollers dans son « Carnet de Nuit » : « Dans une oeuvre d'imagination de premier ordre le conflit n'est pas entre les personnages, mais entre l'auteur et le lecteur. »

Je vous souhaite donc de bonnes guerres... ou de tristes paix... vous êtes libres de choisir.

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Bande son du moment : « Last of the Independents » par The Pretenders

Lecture du moment : En parallèle : « Grande Jonction » et « American Black Box » de Maurice G. Dantec

Citation du jour : « O Vierge mère, et fille de ton Fils, humble et plus haute qu'aucune créature, terme fixé d'un Éternel Conseil, c'est par Toi que fut l'humaine nature si ennoblie, que son grand Ouvrier ne dédaigna de se faire son oeuvre. En tes entrailles se ralluma l'amour dont la chaleur en l'éternelle paix a fait germer cette céleste fleur. Tu es ici pour nous, brûlant flambeau de charité ; et, parmi les mortels, là-bas, Tu es d'espoir fontaine vive. Dame, Tu es si grande et si puissante, que qui veut grâce, et à Toi ne recourt, il veut que son désir vole sans ailes. » (Alighieri Dante, La Divine Comédie, traduite par André Perate, Librairie de l'art Catholique, Paris, chapitre XXXIII)


Humeur du moment : Stimulé