04/01/2018
L'endoctrinement...
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03/01/2018
Qu'on ne me prenne surtout pas pour un amnésique
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« La liberté d’expression n’aura jamais été aussi à la fête que depuis le projet de dissolution des ligues d'extrême-droite. Il y a là, ne trouvez-vous pas, comme un hiatus, quelque chose d'apparemment contradictoire et qui gène. Si j'ai bien compris - et je crois que j'ai bien compris - nous jouirons dorénavant d'une complète liberté d'expression à condition que cette expression soit de gauche, voire d’extrême-gauche, mais pas pas d'extrême-droite. Pourquoi ?
Qu'on ne me prenne surtout pas pour un amnésique. J'ai parfois en tête les images abominables de “Nuit et Brouillard”, les chiffres effarants de l'Holocauste. Sans posséder un quotient intellectuel fabuleux, je ne suis tout de même pas assez bête pour être raciste, ni par ailleurs musicien pour croire qu'un Blanc vaut deux Noirs, mais quand je vois l'étau de la discrimination menacer quelques milliers (mais ne seraient-ils que quelques centaines que ça ne changerait rien) de compatriotes n'ayant pas les mêmes idées que moi, je pose la question: en quel honneur, s'il vous plaît ?
Pour avoir assez braillé “nous sommes tous des juifs allemands” à l'époque de l'expulsion de Cohn-Bendit, j'ai bien l'honneur et l'avantage de gueuler “nous sommes tous des fascistes chiliens” à la plus infime rumeur d'autoritarisme intellectuel, politique ou religieux. Les foulards rouges et les chemises brunes doivent avoir le même droit de défiler sur les avenues démocratiques. Ou alors ne me faites pas chier avec cette démocratie-là ! C'est la démocratie de Khomeiny, la démocratie d'Amin Dada, la démocratie de Castro ! La démocratie qui “casse du facho” ne vaut guère mieux que celle qui “casse du fellouze” parce que c'est cette démocratie qui construit les fours crématoires.
On l'a vue à l’œuvre, on la connait. »
Michel Audiard, inédit pour Le Matin de Paris, 1980
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Le prolétariat héroïque, égalitaire, n’existe pas...
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« Le malheur en tout ceci, c’est qu’il n’y a pas de "peuple", au sens touchant où vous l’entendez, il n’y a que des exploiteurs et des exploités, et chaque exploité ne demande qu’à devenir exploiteur. Le prolétariat héroïque, égalitaire, n’existe pas. C’est un songe-creux, une faribole, d’où l’inutilité, la niaiserie écœurante de toutes ces imageries imbéciles, le prolétaire en cotte bleue, le héros de demain et le méchant capitaliste repu à chaîne d’or. Ils sont aussi fumiers l’un que l’autre. Le prolétaire est un bourgeois qui n’a pas réussi. Rien de plus, rien de moins. Rien de touchant à cela, une larmoyerie gâteuse et fourbe. C’est tout. Un prétexte à congrès, à prébendes, à paranoïsmes… L’essence ne change pas. On ne s’en occupe jamais, on bave dans l’abstrait. L’abstrait c’est facile, c’est le refuge de tous les fainéants. Qui ne travaille pas est pourri d’idées générales et généreuses. Ce qui est beaucoup plus difficile c’est de faire rentrer l’abstrait dans le concret.
Demandez-vous à Brueghel, à Villon, s’ils avaient des opinions politiques ?...
J’ai honte d’insister sur ces faits évidents... Je gagne ma croûte depuis l’âge de 12 ans (douze). Je n’ai pas vu les choses du dehors mais du dedans. On voudrait me faire oublier ce que j’ai vu, ce que je sais, me faire dire ce que je ne dis pas, penser à ma place. Je serais fort riche à présent si j’avais bien voulu renier un peu mes origines. Au lieu de me juger on devrait mieux me copier au lieu de baver ces platitudes – tant d’écrivains écriraient des choses enfin lisibles…
La fuite vers l’abstrait est la lâcheté même de l’artiste. Sa désertion. Le congrès est sa mort. La louange son collier, d’où qu’elle vienne. Je ne veux pas être le premier parmi les hommes. Je veux être le premier au boulot. Les hommes je les emmerde tous, ce qu’ils disent n’a aucun sens. Il faut se donner entièrement à la chose en soi, ni au peuple, ni au Crédit Lyonnais, à personne. »
Louis-Ferdinand Céline, Lettre à Elie Faure, Juillet 1935
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La vérité...
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02/01/2018
Anarchiste, jusqu’aux poils
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« Je me refuse absolument, tout à fait, à me ranger ici ou là. Je suis anarchiste, jusqu’aux poils. Je l’ai toujours été et je ne serai jamais rien d’autre. Tous m'ont vomi, depuis les Inveszias [1] jusqu'aux nazis officiels [2].
Mr de Régnier, Comœdia, Stavinsky, le président Dullin, tous m'ont déclaré imbuvable, immonde, et dans des termes à peu près identiques. Je ne l'ai pas fait exprès mais c'est un fait. Je me trouve bien ainsi parce que j'ai raison. [3]
Tout système politique est une entreprise de narcissisme hypocrite qui consiste à rejeter l’ignominie personnelle de ses adhérents sur un système ou sur les "autres". Je vis très bien, j’avoue, je proclame haut, émotivement et fort, toute notre dégueulasserie commune, de droite ou de gauche, d’Homme. Cela on ne me le pardonnera jamais. Depuis que les curés sont morts, le monde n'est plus que démagogie, on flagorne la merde sans arrêt. On repousse la responsabilité par un artifice d'idéologie et de phrases. Il n'y a plus de contrition, il n'y a plus que des chants de révolte et d'espérances ? Espérer quoi ? Que la merde va se mettre à sentir bon ? Mon bon ami, je ne trahis personne, je ne demande rien à personne. On me fusillera peut-être (on prendra des numéros, alors !).
Lénine aussi bien que Napoléon ont raté leur affaire. Ils ont fait des pointes de feu et hurlent à la guérison. Nenni. Tout ce système révolutionnaire (pas le vôtre) n'est que vulgaire, éternel égoïsme, armé de nouveaux subterfuges. Qu'il s'organise dans le communisme vous en avez de belles ! Plus sordide que l'ancien, vous dis-je ! Je les connais bien les apôtres et les héros, de droite, de gauche. Depuis 30 ans je vis jour et nuit avec eux. Révolution. Tout de suite. Mais d'eux-mêmes d'abord. Pas ces fainéants d'âmes et d'esprits, cocktail ou Picon ? Pourquoi choisir.
Bien affectueusement... »
Louis-Ferdinand Céline, Lettre à Elie Faure, Le 18 Mars 1934
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[1] : En fait Céline écrit "Inveszias" pour "Izvestia", organe de presse officiel du gouvernement soviétique...
[2] : Le parti nazi, au pouvoir, avait interdit en mai 1933 la traduction et la publication en Allemagne du "Voyage au bout de la nuit", et l'avait placé dans l'autodafé organisé par Goebbels...
[3] : Henri de Régnier, dans le Figaro, et un critique du périodique Comœdia avaient exprimé des opinions méprisantes voire insultantes sur "Le voyage au bout de la nuit", de même, aux dires de Céline, que l'escroc Alexandre Stavisky, mort en janvier 1934. Le juge Albert Dullin, présidant alors la 12e Chambre correctionnelle de Paris, avait également critiqué vertement "Le voyage au bout de la nuit" dans un jugement rendu en janvier 1934 en faveur des écrivains Rosny aîné et Roland Dorgelès – ceux-ci avaient assigné deux journalistes en diffamation pour des articles critiques sur l'attribution du prix Goncourt à Guy Mazeline plutôt qu'à Céline...
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Comment nous consolerons-nous, nous, les meurtriers des meurtriers ?
=--=Publié dans la Catégorie "Friedrich Nietzsche"=--=
« L’insensé. — N’avez-vous pas entendu parler de cet homme fou qui, en plein jour, allumait une lanterne et se mettait à courir sur la place publique en criant sans cesse : "Je cherche Dieu ! Je cherche Dieu !" — Comme il se trouvait là beaucoup de ceux qui ne croient pas en Dieu son cri provoqua une grande hilarité. A-t-il donc été perdu ? disait l’un. S’est-il égaré comme un enfant ? demandait l’autre. Ou bien s’est-il caché ? A-t-il peur de nous ? S’est-il embarqué ? A-t-il émigré ? — ainsi criaient et riaient-ils pêle-mêle. Le fou sauta au milieu d’eux et les transperça de son regard. "Où est allé Dieu ?" s’écria-t-il, "je veux vous le dire ! Nous l’avons tué, — vous et moi ! Nous tous, nous sommes ses assassins ! Mais comment avons-nous fait cela ? Comment avons-nous pu vider la mer ? Qui nous a donné l’éponge pour effacer l’horizon ? Qu’avons-nous fait lorsque nous avons détaché cette terre de la chaîne de son soleil ? Où la conduisent maintenant ses mouvements ? Où la conduisent nos mouvements ? Loin de tous les soleils ? Ne tombons-nous pas sans cesse ? En avant, en arrière, de côté, de tous les côtés ? Y a-t-il encore un en-haut et un en-bas ? N’errons-nous pas comme à travers un néant infini ? Le vide ne nous poursuit-il pas de son haleine ? Ne fait-il pas plus froid ? Ne voyez-vous pas sans cesse venir la nuit, plus de nuit ? Ne faut-il pas allumer les lanternes avant midi ? N’entendons-nous rien encore du bruit des fossoyeurs qui enterrent Dieu ? Ne sentons-nous rien encore de la décomposition divine ? — les dieux, eux aussi, se décomposent ! Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c’est nous qui l’avons tué ! Comment nous consolerons-nous, nous, les meurtriers des meurtriers ? Ce que le monde a possédé jusqu’à présent de plus sacré et de plus puissant a perdu son sang sous notre couteau — qui effacera de nous ce sang ? Avec quelle eau pourrons-nous nous purifier ? Quelles expiations, quels jeux sacrés serons-nous forcés d’inventer ? La grandeur de cet acte n’est-elle pas trop grande pour nous ? Ne sommes-nous pas forcés de devenir nous-mêmes des dieux pour du moins paraître dignes des dieux ? Il n’y eut jamais action plus grandiose, et ceux qui pourront naître après nous appartiendront, à cause de cette action, à une histoire plus haute que ne fut jamais toute histoire." — Ici l’insensé se tut et regarda de nouveau ses auditeurs : eux aussi se turent et le dévisagèrent avec étonnement. Enfin il jeta à terre sa lanterne, en sorte qu’elle se brisa en morceaux et s’éteignit. "Je viens trop tôt, dit-il alors, mon temps n’est pas encore accompli. Cet événement énorme est encore en route, il marche — et n’est pas encore parvenu jusqu’à l’oreille des hommes. Il faut du temps à l’éclair et au tonnerre, il faut du temps à la lumière des astres, il faut du temps aux actions, même lorsqu’elles sont accomplies, pour être vues et entendues. Cet acte-là est encore plus loin d’eux que l’astre le plus éloigné, — et pourtant c’est eux qui l’ont accompli !" — On raconte encore que ce fou aurait pénétré le même jour dans différentes églises et y aurait entonné son "Requiem æternam deo". Expulsé et interrogé il n’aurait cessé de répondre la même chose : "A quoi servent donc ces églises, si elles ne sont pas les tombes et les monuments de Dieu ?" »
Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir
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01/01/2018
Les hommes ne peuvent rien faire au monde que mourir
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« Tu es mort pour rien mais enfin ta mort prouve que les hommes ne peuvent rien faire au monde que mourir, que s'il y a quelque chose qui justifie leur orgueil, le sentiment qu'ils ont de leur dignité — comme tu l'avais ce sentiment-là toi qui as été sans cesse humilié, offensé — c'est qu'ils sont toujours prêts à jeter leur vie, à la jouer d'un coup sur une pensée, sur une émotion. Il n'y a qu'une chose dans la vie, c'est la passion et elle ne peut s'exprimer que par le meurtre — des autres et de soi-même. »
Pierre Drieu La Rochelle, Adieu à Gonzague
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Écorché
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« Tu avais tous les préjugés, tout ce tissu de la vie sociale des hommes qui est notre chair même, qui est une chair aussi adhérente que notre chair sexuelle et animale — et que nous ne pouvons que retourner sur nous-mêmes dans un arrachement magnifique et absurde. Tu vivais — le temps que tu as vécu — avec toute la chair des préjugés retournée sur toi. — Écorché ! »
Pierre Drieu La Rochelle, Adieu à Gonzague
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Bonne Année 2018...
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31/12/2017
Bon Réveillon...
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La crue des chairs ensanglantées...
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« Ceux d’entre eux qui avaient pu se traîner jusqu’à l’abri marqué de l’emblème connu de tous (le drapeau blanc à croix rouge), ou que des camarades exténués par la traversée d’un lac de boue gluante, troué de fondrières sans fond, avaient pu transporter à dos d’homme et déposer là, s’y entassaient. La crue des chairs ensanglantées débordait vite jusqu’à l’entrée du poste. Aux abords, les corps meurtris, pesant sur la toile du brancard rouge de leur sang et du sang de ceux qui les avaient précédés, sous la pluie, dans la boue liquéfiée par l’incessant piétinement, attendaient leur tour. Aux moribonds, malgré l’urgence, l’endurcissement, la détresse générale, on prenait garde de ne rien dire. Pourtant, quand ils étaient encore conscients, ils comprenaient et s’abîmaient déjà hors du monde, dans une impressionnante résignation. »
Michel Bernard, Visages de Verdun
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Le fils ou le mari...
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« Il y a eu tellement de tués, mutilés et prisonniers, à Verdun et ailleurs, qu'en France comme en Allemagne, pour compléter les effectifs, il fallut avancer l'appel de la classe à mobiliser. La République et l'Empire incorporaient les fils de ceux tombés en 14. Beaucoup n'avaient pas dix-neuf ans, leurs joues étaient rondes et lisses sous le casque. Sans rien dire, ils montèrent aux créneaux du pays. Les femmes, lorsque le maire traversait la cour de la ferme, ne savaient pas pour qui, le fils ou le mari, leur cœur saisi allait se briser l'instant d'après. »
Michel Bernard, Visages de Verdun
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Bonnes fêtes de fin d'année...
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30/12/2017
Les reliques ont été déposées sur son cerceuil
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« Il y a une rue de Verdun à Chalabre, chef-lieu de canton aux confins de l'Aude, à portée de regard des Pyrénées ariégeoises. Mon arrière-grand-père, Antoine Bernard, ne l'a jamais traversée. Territorial grièvement blessé au bassin par un éclat d'obus reçu là-haut, il ne quittait plus le hameau de Montjardin où était sa maison. Il s'y déplaçait à pas menus, traînant la semelle de ses chaussons de feutre moins vite qu'un petit enfant. Sa chambre avait été installée au rez-de-chaussée, et son lit face à la fenêtre d'où il voyait les collines, rigoureuses pyramides tondues par les troupeaux, le sillon buissonneux de la rivière où il allait pêcher autrefois, les champs qu'il ne pouvait plus travailler et le jardin vers lequel, par beau temps, de l'autre côté de la rue, il faisait de longs et laborieux voyage d'une traversée. Quand il tombait, il appelait d'une voix exaspérée pour qu'on vienne le relever. Baptistine, sa femme, ou le premier villageois par-là remettait sur ses pauvres jambes le grand invalide de guerre. Il vécut ainsi les trente années suivant sa blessure, près de la ferme que continuaient d'exploiter sa femme et ses deux fils qui lui restaient.
De la guerre, il ne disait rien. Au-dessus de son lit étaient ses médailles et la photo du fils aîné, tué à vingt ans dans la Somme, au mois d'août 1918. Lorsque la porte de l'aïeul était ouverte, au mur, près du grand portrait d'un jeune soldat, mon père apercevait, sur des sortes de diplômes, le nom de la famille, son propre nom calligraphié à la plume, en grosses et rondes lettres noires, entre les lauriers, les palmes et la République casquée. Au bout des rubans de couleur, sous les reflets du verre, les ronds dorés des médailles avaient bruni. Les reliques ont été déposées sur son cerceuil, parce que sa descendance n'avait pas su ou voulu les partager, quand on l'a mis en terre dans le petit cimetière situé derrière l'église. Il y est toujours, en contrebas de la route qui, par col du Bac, entre les chênes verts du versant occidental et les vignes étagées à l'orient, conduit à Limoux. »
Michel Bernard, Visages de Verdun
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Ces réformes qui ne sont que des palliatifs
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« Aux hommes de la fin du XIXe siècle, la décadence romaine apparaissait sous l'aspect de patriciens couronnés de roses s'appuyant du coude sur des coussins ou des belles filles, ou encore, comme les a rêvés Verlaine, composant des acrostiches indolents en regardant passer les grands barbares blancs. Nous sommes mieux renseignés sur la manière dont une civilisation finit par finir : ce n'est pas par des abus, des vices ou des crimes qui sont de tous temps, mais par ce gigantisme qui n'est que la contre-façon malsaine d'une croissance, ce gaspillage qui fait croire à l'existence de richesses qu'on n'a déjà plus, cette pléthore si vite remplacée par la disette à la moindre crise, ces divertissements ménagés d'en haut, cette atmosphère d'inertie et de panique, d'autoritarisme et d'anarchie, ces réaffirmations pompeuses d'un grand passé au milieu de l'actuelle médiocrité et du présent désordre, ces réformes qui ne sont que des palliatifs et ces accès de vertu qui ne se manifestent que par des purges, ce goût du sensationnel qui finit par faire triompher la politique du pire, ces quelques hommes de génie mal secondés perdus dans la foule des grossiers habiles, des fous violent, des honnêtes gens maladroits et des faibles sages. »
Marguerite Yourcenar, Sous bénéfice d'inventaire
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29/12/2017
Le courage
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« Le courage est le vent qui nous porte vers les rivages les plus lointains ; c’est la clef de tous les trésors, le marteau qui forge les vastes empires, le bouclier sans lequel aucune civilisation ne saurait durer. Le courage, c’est l’enjeu illimité de sa propre personne, c’est l’assaut que l’idée livre à la matière sans se soucier des conséquences. Etre courageux, c’est être prêt à se faire crucifier pour une conviction, c’est affirmer, même dans le dernier frémissement des nerfs, même dans le dernier soupir, l’idée dont on vivait et pour laquelle on meurt. Maudit soit le temps qui méprise le courage et les hommes courageux ! »
Ernst Jünger, La guerre notre mère
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De Sainte-Sophie, ils firent d’abord une écurie
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« Durant toute cette journée, les Turcs firent, par toute la cité, un grand carnage de chrétiens. Le sang coulait sur la terre comme s’il en pleuvait et formait de vrais ruisseaux… Georges Phrantzès dit aussi que, “en certains endroits, le sol disparaissait sous les cadavres et que l’on ne pouvait passer par les rues”. […] Ils volent, dérobent, tuent, […] font captifs femmes, enfants, vieillards, jeunes gens, moines, hommes de tous âges, de toutes conditions. […] Ils prenaient les trésors et les vases sacrés, dépeçaient les reliques et les jetaient au vent ; ils exhibaient dans les rues puis dans leurs camps, le soir, des crucifix montrant le Christ coiffé de l’un de leurs bonnets rouges. De Sainte-Sophie, ils firent d’abord une écurie. Un nombre incalculable de manuscrits précieux, ouvrages des auteurs grecs ou latins de l’Antiquité, furent brûlés ou déchirés. Les religieuses, violées par les équipages des galères, étaient vendues aux enchères. […] Cette cohue de toutes les nations, ces brutes effrénées, se ruaient dans les maisons, arrachaient les femmes, les traînaient, les déchiraient ou les forçaient, les déshonoraient, les violentaient de cent façons aux yeux de tous dans les carrefours. Pendant trois jours, ce fut aussi une terrible chasse et un immense marché aux esclaves. […] Aucune bataille, aucune conquête n’avait jamais donné en si peu de temps autant de captifs. Ils furent vendus et revendus par la soldatesque puis par les mercantis de toutes sortes, séparés les uns des autres, promis aux travaux misérables jusqu’aux plus lointaines provinces du monde musulman. […] Mehmet avait ordonné que les familles des dignitaires grecs soient réduites à la plus dure et à la plus humiliante des servitudes. Il s’était fait réserver les filles les plus belles et les plus jeunes adolescents et il fit don de quarante très jeunes gens et de quarante vierges au pacha de Babylone. D’autres enfants grecs furent envoyés jusqu’à Tunis et à Grenade. […] Les habitants de Constantinople échappés aux massacres et à l’esclavage avaient fui. Ce n’était plus qu’une ville en grande partie dévastée et vide d’hommes. […] La chute de l’Empire byzantin marquait la fin d’un monde et jetait à bas l’héritage de l’antique Rome. »
Jacques Heers, Chute et mort de Constantinople
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28/12/2017
Une très profonde identité anthropologique
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« Les secrets d’une passion ancestrale. Toutes les traces, y compris mythiques et légendaires, qui nous relient à une très profonde identité anthropologique. Parce que l’avenir est sans doute à ceux qui auront su renouer avec la nature. Et se servir d’une arme. »
Dominique Venner, Dictionnaire amoureux de la chasse
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Passage à tabac et sieste...
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« On apprend plus dans une nuit blanche que dans une année de sommeil. Autant dire que le passage à tabac est autrement plus instructif que la sieste. »
Emil Michel Cioran, Aveux et anathèmes
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Communisme...
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« Il existe deux évaluations scientifiques de l’hécatombe imputable à la dictature du parti communiste depuis 1917, en excluant les pertes de la Seconde Guerre mondiale. Ces évaluations reposent sur des études démographiques serrées.
Selon la plus modeste de ces évaluations, due au démographe soviétique Maksudov, la transformation révolutionnaire de la Russie aurait coûté le chiffre énorme de 27,5 millions de victimes. Pour la seule période de la guerre civile et de la famine qui l’a suivie, de 1918 à 1926, les pertes sont évaluées à plus de 10 millions de morts. Pour la période de 1926 à 1938, qui inclut la dékoulakisation, le génocide-famine de l’Ukraine et les grande purges : 7,5 millions de victimes. Enfin de 1939 à 1953, les exécutions et les déportations ordonnées par le régime (sans compter les pertes dues à la guerre) auraient coûté la vie à environ 10 millions d’individus. » (page 448).
Se fondant sur des taux de natalité et de mortalité différents, le démographe Kourganov obtient un chiffre global beaucoup plus important : plus de 66 millions de morts entre 1918 et 1953 (sans compter les pertes dues à la Seconde Guerre mondiale). Pour la période de guerre civile, de 1918 à 1922, il conclut à 15 millions de vies humaines […]
Ces chiffres sont assez proches de ceux que retiennent les historiens russes à la lumière des archives de l’ex-URSS. Ainsi, pour Volkogonov, à elle seule, la guerre civile a coûté à la Russie 13 millions de vies. Dans la période située entre la guerre civile et la collectivisation, c’est-à-dire dans les “années heureuses de la NEP”, un million de personnes environ ont péri dans les camps ou dans l’extermination de la résistance antisoviétique dans le pays. Entre 1929 et 1953, année de la mort du “premier léniniste”, ce bilan s’est alourdi de vingt-et-un million de victimes. »
Dominique Venner , Les Blancs et les Rouges, Histoire de la Guerre civile russe
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27/12/2017
Affluence
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« Partout où les étrangers sont rares, ils sont les bienvenus : rien ne rend plus hospitalier que de n’avoir pas souvent besoin de l’être : c’est l’affluence des hôtes qui détruit l’hospitalité. »
Jean-Jacques Rousseau, Emile ou de l’éducation
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Un homme qui se venge comme une femme...
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« Dans la vie des peuples, au moment des grands malheurs, après les guerres, les invasions, les famines, il y a toujours un homme qui sort de la foule, qui impose sa volonté, son ambition, ses rancunes, et qui "se venge comme une femme", sur le peuple entier, de la liberté, de la puissance et du bonheur perdus. »
Curzio Malaparte, La technique du coup d'état
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26/12/2017
Je vais à la rencontre de mes origines et de mon éternité
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« Comme le chien loup de Jack London, je ne peux résister longtemps à l’appel de la forêt. Le besoin que j’ai d’elle s’enracine dans ma part animale autant que dans ma spiritualité. L’une n’allant pas sans l’autre. Je ne me "promène" pas en forêt. Marchant par les taillis et les futaies, je vais à la rencontre de mes origines et de mon éternité. Bien que domestiqué par l’homme, la forêt conserve son mystère. Il suffit pour cela d’attendre la chute du jour et les angoisses du cycle nocturne, domaine d’Artémis, la toujours jeune, dont les cheveux d’or s’ornent du croissant de lune. »
Dominique Venner, Dictionnaire amoureux de la chasse
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La promesse d’un nouveau départ
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« De Nietzsche, les penseurs de la révolution conservatrice ont retenu le défi du nihilisme ("la mort de Dieu"), auquel ils répondent par une nouvelle recherche de sens. Pour eux, la religiosité nationale et celle de l’action éternisent ce que le destin individuel a d’éphémère. Le mythe de l’éternel retour conforte une vision cyclique de l’histoire en opposition radicale avec la vision linéaire et finaliste issue du christianisme et qu’ont laïcisée les Lumières. Saisie dans cette structure mentale et dans sa signification astronomique de retour au point initial, le mot "révolution" prend une profondeur inhabituelle. Il ne signifie pas seulement rupture et bouleversement, mais retournement, achèvement d’un cycle historique. Il porte en lui la promesse d’un nouveau départ. Quant au conservatisme, contrairement à son acception française, il ne suggère ni l’immobilisme ni l’attachement à des formes caduques. Tout au contraire, dans l’esprit du romantisme allemand, il est la conscience du permanent et de l’essentiel, ce qui résiste au temps et qu’un choc révolutionnaire pourra libérer des formes périmées. Cette idée d’une révolution assurant le resurgissement d’un ordre fondamental porte en elle un grand dynamisme. Elle prend appui sur la conviction métaphysique que l’époque est celle d’un interrègne entre un ordre déjà mort et un autre à venir, une sorte de "point zéro", comme dira Jünger, à partir duquel tout devient possible. »
Dominique Venner, Ernst Jünger, un autre destin européen
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25/12/2017
Au-delà des idéologies
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« Assurément, cette défense de la civilisation française et des valeurs universelles qu’elle contient ne peut pas se faire si la France conserve les vieilles méthodes libérales et démocratiques ; contre le fascisme, la France doit accepter de subir "un minimum de fascisme", elle doit avoir recours aux méthodes qui ont permis à l’Allemagne et à l’Italie d’acquérir la force dont elles menacent maintenant les démocraties. Mais ce "minimum de fascisme" n’a rien de commun avec l’adhésion à la mystique totalitaire : il n’a de sens, au contraire, que pour résister efficacement aux conséquences de cette mystique. Le vrai, le seul problème de la France est de sortir d’un dilemme absurde dans lequel on prétend l’enfermer, et d’aller au-delà des idéologies qui tendent à se partager le monde. Au-delà et non pas en deçà : ce serait une erreur mortelle, sous prétexte de refuser à la fois le communisme et le fascisme, de revenir à cette démocratie bourgeoise dont, en dépit des apparences, les Français ne veulent plus. »
Paul Sérant, Les dissidents de l’Action française
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