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03/04/2014

Ce ne sont pas des prostituées, ce sont des jeunes filles de bonne famille

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

 

 

« Un jour, le service sanitaire de la11ème Armée allemande décida d'ouvrir à Soroca un bordel militaire. Mais, à Soroca, il n'y avait d'autres femmes que les vieilles et les repoussantes. La ville avait en grande partie été détruite par les mines et les bombardements allemands et russes. Presque toute la population s'était enfuie. Le jeunes gens avaient suivis l'armée soviétique vers le Dniepr ; seuls étaient restés debout le quartier du jardin public et celui que les Génois ont construit autour de l'ancien château-fort et qui se dresse sur la rive ouest du Dniestr, au milieu d'un labyrinthe de masures basses de bois et de boue -habitées par une misérable population tartare, roumaine, bulgare et turque. Du haut du talus qui domine le fleuve, on voit la ville enserrée entre le Dniestr et une rive abrupte et boisée ; les maisons, à ce moment-là, étaient ravagées et noircies par les incendies : certaines là-bas, au-delà du jardin public, fumaient encore. Voilà ce qu'était Soroca sur le Dniestr quand fut ouvert le bordel militaire, dans une maison située prés des remparts du château-fort Génois : une ville en ruines avec des routes encombrées de colonnes de soldats, de chevaux et de véhicules automobiles.

Le service sanitaire expédia des patrouilles donner la chasse aux jeunes Juives cachées dans les blés et dans les bois avoisinants la ville. C'est ainsi que, lorsque le bordel fut inauguré par la visite officielle, d'un sévère style militaire, du comandant de la 11ème Armée, ce fut une dizaine de pales jeunes filles aux yeux rouges de larmes, qui accueillirent en tremblant le général Von Schobert et sa suite. Elles paraissaient toutes extrêmement jeunes ; certaines étaient encore des enfants. Elles ne portaient pas de ces longs peignoirs de soie rouge, jaune ou verte à larges manches qui sont l'uniforme traditionnel des bordels d'Orient, mais leur plus belle robe, des robes simples et honnêtes de jeunes filles de la bonne bourgeoisie provinciale, si bien qu'on eut dit des étudiantes (quelques-unes, d'ailleurs, en étaient) réunies chez l'une de leurs amies pour préparer ensemble un examen. Elles avaient un air apeuré, humble et timide. Je les avait vu passer sur la route quelques jours avant l'ouverture du bordel : une dizaine, qui marchaient au milieu de la route en portant, chacune, soit un ballot sous le bras, soit une valise de cuir, soit un petit paquet attaché par une ficelle. Elles étaient suivies de deux SS armés de leur fusil-mitrailleur. Toutes avaient les cheveux gris de poussière, quelques épis de blé accrochés à leur jupe et les bas déchirés. Une d'elles boitait, elle avait un pied nu et tenait son soulier à la main.

Un mois après, certain soir où j'étais de passage à Soroca, le Sonderführer Schenk m'invita à aller avec lui voir les Juives du bordel militaire. Je refusai et Schenk se mit à rire en me regardant d'un air moqueur :

-- Ce ne sont pas des prostituées, me dit-il, ce sont des jeunes filles de bonne famille.
-- Je le sais, que ce sont d'honnêtes filles, lui répondis-je.
-- Ce n'est pas la peine de tant vous apitoyer, dit Schenk. Ces filles sont des Juives.
-- Je le sais que ce sont de jeunes Juives, répondis-je.
-- Et alors, me demanda Schenk, vous avez peur de les froisser en allant les voir ?
-- Il y a des choses que vous ne pouvez pas comprendre, Schenk.
-- Qu'y a-t-il à comprendre ?
-- Ces pauvres filles de Soroca, répondis-je, ne sont pas des prostituées ; elles ne se vendent pas librement ; elles sont contraintes à se prostituer. Elles ont droit au respect de tous. Ce sont des prisonnières de guerre que vous exploitez d'une manière ignoble. Quel est le pourcentage que l'Etat-Major allemand touche sur le gain de ces malheureuses ?
-- L'amour de ces filles ne coûte rien, dit Schenk, c'est un service gratuit. En tout cas, ce n'est pas la peine de les payer.
-- Ce n'est pas la peine de les payer. Pourquoi pas ?
Le Sonderführer Schenk me dit alors que, leur service fini, dans une quinzaine de jours, on les renverrai chez elles.
-- Oui me répondit Schenk d'un air embarrassé : chez elles ou à l'hôpital, je ne sais pas. Dans un camp de concentration peut-être ? »

(...)

[ Malaparte rencontre, plus tard, des jeunes juives. Lors d'une discussion l'une d'entre elle lui demande : ]

« -- Vous n'avez plus rien su de ces pauvres filles, demanda Louise après un long silence ?
-- Je sais que deux jours plus tard, on les a amenées, répondit Suzanne. Tous les vingt jours les allemands venaient changer les filles. Celles qui sortaient du bordel, on les faisait monter dans un car et on les descendait vers le fleuve. Schenk m'a dit, par la suite, que ce n'était pas la peine de tant les plaindre. Elles ne servaient plus à rien. Elles étaient réduites à l'état de loques. Et puis c'étaient des Juives.
-- Elles savaient qu'on allait les fusiller ? demanda Ilse ?
-- Elles le savaient, elles tremblaient de peur d'être fusillées. Oh, elles le savaient, tout le monde le savait à Soroca. »

Curzio Malaparte, Kaputt

 

 

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"Il y a 33 ans, déjà..." , par H16

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H16 voit juste... comme d'hab'... En 33 années nous nous sommes rapprochés de l'idéal communiste comme jamais auparavant en France et... on voit le résultat. Armée de fonctionnaires, chômage, désindustrialisation, bisounours gôchistes et ressentiments à tous les étages. Et on continue à dénoncer le libéralisme qui n'a jamais été appliqué, on le confond très souvent avec les Trusts qui désirent créer des monopoles en s'impliquant dans un Capitalisme de connivence avec les gouvernements planificateurs (voir Mosanto avec Bruxelles, par exemple) et on implante le dégoût de la réussite dans les têtes mal faites de nos enfants abrutis par une idéologie qu'on leur inculque dés la maternelle.

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En 33 années, la France a fini par appliquer à peu près tous les points du programme du parti communiste de 1981.

Un lecteur (qui se reconnaîtra et que je remercie) m’a aimablement pointé cette intéressante vidéo tout droit sortie des archives de l’INA. Elle nous projette 33 ans en arrière, en 1981, alors que la campagne électorale — pour ce qui allait déboucher sur les « années Mitterrand » — touche à sa fin. On y découvre, pendant 18 minutes montées avec cette candeur que plus aucun communicant n’oserait, les bonnes recettes d’un certain Georges Marchais, figure emblématique d’un Parti Communiste qui ne retrouvera jamais sa superbe ensuite, pour créer de l’emploi, redresser le pays, faire repartir la croissance et ouvrir grand le robinet à bisous.

Passionnant retour dans le passé où l’on découvre que les communistes de 1981 préconisaient des nationalisations, le passage au 35 heures par semaine (fait), envisageaient l’impôt sur le revenu à 75% (tenté) et sur la fortune (fait), la retraite à 60 ans (fait), la prise en compte de la pénibilité (fait), la hausse du SMIC (fait, de façon continue, depuis 33 ans), une bonne décentralisation des familles (faite), l’augmentation des allocations familiales et autres redistributions sociales pour les nécessiteux divers et variés (fait, big time, plusieurs fois), le relèvement des retraites (fait), et un combat acharné contre les stages, les vacataires et les agences d’intérim (régulièrement tenté et partiellement bouclé).

En trente-trois années, la France a, de gouvernements en gouvernements, fini par appliquer à peu près tous les points du programme du parti communiste de 1981.

Mais rassurez-vous : la France est un paradis ultra-néo-libéral, et avec Valls, on va passer la démultipliée, bien sûr.

Ce pays est foutu.

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Source : ICI

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Quand les richesses sont drainées outre mesure par l’une de ses parties

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« Le tyran prise et chérit son propre bien-être plus que le salut commun de ses sujets, et c’est pourquoi il s’efforce de maintenir son peuple dans une soumission servile.

(…)

Et c’est là l’intérêt véritable et la gloire du souverain dont le pouvoir, comme dit Aristote, est d’autant plus noble, d’autant meilleur que les hommes sur lesquels il l’exerce sont libres et accomplis, et d’autant plus durable que le roi persévère avec zèle dans une telle résolution, Cassiodore ayant dit : "L’art de gouverner, c’est d’aimer ce qui convient au plus grand nombre."

Chaque fois, en effet, que la royauté se transforme en tyrannie, elle est vite menacée de disparaître, parce qu’elle est ainsi prédisposée à la discorde, à l’usurpation et à des périls de toutes sortes. Surtout dans une contrée policée et éloignée de la barbarie servile où, par coutume, par lois et par nature, les hommes sont libres, et non pas asservis ni insensibles par habitude à la tyrannie, tels que la servitude ne pourrait leur convenir et qu’eux n’y pourraient consentir, tels qu’ils ne sauraient voir que violence dans l’oppression du tyran, dès lors précaire, parce que, comme dit Aristote, "la violence court à sa perte."

(…)

Or, un corps est mal en point quand les humeurs affluent à l’excès à l’un de ses membres : souvent, elles l’enflamment et l’enflent gravement, tandis que les autres membres se dessèchent et s’amoindrissent terriblement. Alors, l’équilibre convenable est rompu et ce corps-là ne peut vivre longtemps.

Il en est de même d’une communauté ou d’un royaume quand les richesses sont drainées outre mesure par l’une de ses parties.

En effet, une communauté ou un royaume dont les souverains obtiennent une énorme supériorité sur leurs sujets en fait de richesse, de pouvoir et de rang, est comme un monstre, comme un homme dont la tête est si grande, si grosse, que le reste du corps est trop faible pour la porter.

De même qu’un tel homme ne peut se soutenir ni longtemps vivre ainsi, de même donc, ne pourrait se maintenir un royaume dont le prince drainerait à l’excès les richesses, comme cela se ferait par les mutations de la monnaie... (...)


Par ailleurs, dans la polyphonie, si l’uniformité n’apporte ni plaisir ni agrément, l’excès ou l’abus de contraste y détruit et anéantit toute l’harmonie : il y faut au contraire une variété réglée et mesurée durant laquelle les choeurs mêlent avec bonheur de douces mélodies. Il en va généralement de même des diverses parties de la communauté : l’égalité de biens ou de pouvoir n’est pas convenable, elle ne "sonne" pas bien, mais, à l’inverse, une disparité excessive ruine et anéantit l’harmonie de la société, comme le fait ressortir Aristote au livre V de la "Politique".

C’est surtout, en vérité, si le prince lui-même, qui est dans le royaume ce que sont dans le chant la teneur et la voix principale, chante trop fort et sans s’accorder avec le reste de la communauté, que la douce musique du gouvernement royal sera troublée.
C’est pourquoi, selon Aristote, il y a encore une autre différence entre le roi et le tyran : le tyran veut être plus puissant que toute la communauté qu’il domine par la violence ; la modération du roi, au contraire, va de pair avec un régime tel qu’il est plus grand et plus puissant que chacun de ses sujets, mais qu’il est cependant inférieur à cette communauté tout entière en forces et en ressources, et qu’il se trouve ainsi dans une situation moyenne.

Puisque le pouvoir royal tend communément et facilement à s’accroître, il faut donc faire preuve de la plus grande défiance et d’une vigilance toujours en éveil. Oui, c’est une sagesse suprême qui est requise pour le préserver de dégénérer en tyrannie, surtout à cause des tromperies des adulateurs qui, comme dit Aristote, ont toujours poussé les princes à la tyrannie.

En effet, comme on lit dans le Livre d’Esther, ceux-ci "abusent avec une habile fourberie la confiance naïve des princes qui juge des autres d’après leur propre nature", et c’est par leurs "suggestions que se dévoient les élans des rois".

(…)

En effet, comme dit Aristote, rares sont les choses qu’il faut laisser au libre arbitre du juge ou du prince.
C’est Aristote encore qui rapporte l’exemple de Théopompe, roi de Sparte.

Celui-ci avait renoncé en faveur du peuple à de nombreux pouvoirs et aux tributs imposés par ses prédécesseurs. C’est pourquoi sa femme se lamentait en lui faisant honte de transmettre à ses fils une royauté procurant moins de revenus que celle qu’il avait reçue de son père. Il lui répondit alors en ces termes : "Je la transmets plus durable." Ô paroles inspirées ! Ô de quel poids sont ces mots qu’il faudrait peindre en lettres d’or dans les palais des rois ! "Je la transmets", dit-il, "plus durable", c’est-à-dire : "J’ai plus accru la royauté en la rendant durable qu’elle n’a été diminuée par la réduction de son pouvoir." "En voici un qui surpasse Salomon !" (Evangile selon Luc, XI, 31)

En effet, si Roboam, dont j’ai parlé plus haut, avait reçu de son père Salomon un royaume régi selon ces principes et qu’il l’avait gouverné dans cet esprit, jamais il n’aurait perdu dix des douze tribus d’Israël, et le chapitre XLVII de l’Ecclésiastique ne lui aurait pas reproché : "Tu as déshonoré ton lignage au point de faire retomber la colère sur tes enfants et les conséquences de ta déraison sur tous les autres : par ta faute, la royauté s’est brisée en deux." Il est donc ainsi démontré que si le pouvoir d’un roi se transforme en tyrannie, il faut qu’on y mette terme rapidement. »

Nicole Oresme, CHAPITRE XXV, Un tyran ne peut durer longtemps, in "Traité sur l’origine, la nature, le droit et les mutations des monnaies" - 1355

 

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Une civilisation qui se retourne contre elle-même

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« Pendant plus de deux siècles, les idées anglaises s’étaient répandues vers l’Est. La règle de liberté élaborée en Angleterre semblait destinée à s’étendre au monde entier. Vers 1870, le domaine de ces idée avait probablement atteint la limite de son expansion vers l’Est. A partir de ce moment, il commença à reculer et un nouveau jeu d’idées, non point neuves mais en vérité très anciennes commencèrent à venir vers l’Est. L’Angleterre perdit sa maîtrise intellectuelle dans le domaine politique et social et devint un pays importateur d’idées. Pendant les soixante années qui suivirent, l’Allemagne devint le centre à partir duquel les idées destinées à gouverner le monde au XXe siècle se répandaient vers l’Est et l’Ouest. Qu’il s’agisse de Hegel ou de Marx, de List ou de Schmoller, de Sombart ou de Mannheim, d’un socialisme extrémiste ou de simple "organisation" ou de "planisme" moins radical, partout on importait avec empressement les idées allemandes et l’on imitait les institutions allemande. La plupart de ces idées nouvelles, et singulièrement le socialisme, n’étaient pas nées en Allemagne. Mais ce fut en Allemagne qu’elles se perfectionnèrent et atteignirent leur plus complet développement au cours du dernier quart du XIXe et du premier quart du XXe siècle. On oublie souvent aujourd’hui l’avance considérable que l’Allemagne a prise au cours de cette période dans le développement théorique et pratique du socialisme. Une génération avant que le socialisme fût sérieusement discuté en Angleterre, l’Allemagne avait déjà un fort parti socialiste dans son parlement. Jusqu’à une époque très récente, le développement doctrinal du socialisme s’est presque entièrement produit en Allemagne et en Autriche, en sorte qu’aujourd’hui même, la discussion russe est en grande partie reprise au point où les Allemands l’ont laissée ; la plupart des socialistes anglais ne savent pas encore que la plus grande partie des problèmes qu’ils commencent à découvrir ont été discutés à fond par les socialistes allemands depuis longtemps.
L’influence intellectuelle que les penseurs allemands ont pu exercer sur le monde entier au cours de cette période a été appuyée non seulement par le grand progrès matériel de l’Allemagne, mais encore par l’extraordinaire renommée que les penseurs et les savants allemands avaient acquise au cours des cent années précédentes, alors que l’Allemagne était redevenue un membre intégral, voire dirigeant, de la civilisation commune à l’Europe. Mais elle servit bientôt à diffuser, à partir de l’Allemagne, des idées dirigées contre les fondements de cette civilisation. Les Allemands eux-mêmes — ou tout au moins ceux d’entre eux qui diffusaient ces idées — étaient parfaitement conscients du conflit. Ce qui avait été l’héritage commun de la civilisation européenne devint pour eux, longtemps avant les nazis, la civilisation "occidentale", ce mot signifiant désormais : situé à l’ouest du Rhin. Ce qui était "occidental" c’était désormais le libéralisme et la démocratie, le capitalisme et l’individualisme, le libre-échange, l’internationalisme et l’amour de la paix sous toutes leurs formes.
Mais en dépit du mépris mal dissimulé qu’un nombre sans cesse croissant d’Allemands portaient à ces idées "creuses" des occidentaux, ou peut-être à cause de ce mépris, les occidentaux continuèrent à importer des idées allemandes. On arriva même à leur faire croire que leurs propres convictions antérieures n’étaient rien d’autre que l’expression d’intérêts égoïstes, que le libre-échange était une doctrine inventée pour servir les intérêts britanniques, que les idéaux politiques que l’Angleterre avait donnés au monde étaient irrémédiablement démodés et qu’il y avait lieu d’en rougir. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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Avec certains êtres, très rares, il faudrait ne pas parler

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« Avec certains êtres, très rares, il faudrait ne pas parler. Il faudrait tout de suite être dans les bras, caresser le visage, les paupières, les joues, les lèvres, les effleurer d'un doigt, lentement d'abord, puis dans un baiser, passionnément. S'embrasser. S'étreindre. Les mots sont inutiles. Les mots viendraient plus tard confirmer ce que les corps ont su dès les premiers instants. »

Laurence Tardieu, Un temps fou

 

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Led Zeppelin: I Can't Quit You Babe (Live)

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Led Zeppelin

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02/04/2014

Nous cherchons à être des espèces d’hommes globaux fantasmatiques

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« Nous ne savons même pas où il vit, ce vivant-là, et ce qu’il est vraiment, et comment il s’appelle ! Laissez-nous seuls, sans livres, et nous serons perdus, abondonnés, nous ne saurons pas à quoi nous accrocher, à quoi nous retenir ; quoi aimer, quoi haïr, quoi respecter, quoi mépriser ? Même être des hommes, cela nous pèse – des hommes avec un corps réel, à nous, avec du sang ; nous avons honte de cela, nous prenons cela pour une tache et nous cherchons à être des espèces d’hommes globaux fantasmatiques. Nous sommes morts-nés, et depuis longtemps, les pères qui nous engendrent, ils sont des morts eux-mêmes, et tout cela nous plaît de plus en plus. On y prend goût. Bientôt nous inventerons un moyen pour naître d’une idée. Mais – ça suffit ; je n’ai plus envie d’écrire, moi, du fond de mon "sous-sol"… »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Carnets du sous-sol

 

 

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J'ai mon sous-sol

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« Anéantissez-moi mes désirs, effacez-moi mes idéaux, montrez-moi quelque chose de mieux et je vous suivrai. Je suppose que vous me répondrez que je fais beaucoup d'histoires pour rien -auquel cas je vous réponds la même chose. Nous parlons sérieusement ; si vous ne voulez pas me faire l'honneur de m'écouter, je ne vous retiens pas. J'ai mon sous-sol. »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Carnets du sous-sol

 

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Com­ment pourrais-je sup­porter le con­tact des catholiques mod­ernes qui croient pos­si­ble de con­join­dre le cadavre du passé avec la charogne du temps présent ?

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« L’accroissement con­tin­uel des dif­fi­cultés de la sub­sis­tance matérielle a beau aver­tir les plus épais du détraque­ment de la mécanique sociale, et la rage vis­i­ble des entre­pre­neurs d’anarchie a beau gron­der autour d’eux de plus en plus fort; ils ont des doc­teurs pour leur enseigner que tout cela n’est qu’une crise pas­sagère, effet d’une exces­sive ten­sion des ressorts, et qu’aussitôt après la vic­toire dont ils répon­dent, hommes et choses repren­dront leur équili­bre. Si ce n’est pas pré­cisé­ment l’âge d’or qu’ils promet­tent, ce sera peut être l’âge d’argent ou, au pis aller, «l’âge du papier» qui paraît avoir com­mencé déjà.

Les intel­lectuels au front d’airain font sans doute une plus large part au mal­heur des temps et vont même jusqu’à regarder comme improb­a­ble une resti­tu­tion immé­di­ate du bon­heur par­fait, mais les uns et les autres ont foi en l’Humanité qui doit accom­plir tous les miracles.

Com­ment ne serais-je pas seul, n’ayant que du mépris pour cette human­ité sup­plan­ta­trice de son Créa­teur et con­sid­érant comme des impos­tures ineptes du Démon tous les lieux com­muns de pro­grès, de civil­i­sa­tion, de poli­tique et surtout de démoc­ra­tie qui ont rem­placé depuis si longtemps la con­fi­ance en Dieu ?

Com­ment pourrais-je sup­porter le con­tact des catholiques eux-mêmes, des catholiques mod­ernes qui croient pos­si­ble de con­join­dre le cadavre du passé avec la charogne du temps présent et qui rêvent je ne sais quelle restau­ra­tion de la vieille bâtisse royale où une niche à chien de garde serait offerte à Notre Seigneur Jésus-Christ ?… La sot­tise de ces prédes­tinés au mas­sacre me paraît encore plus impie que l’idiote fureur des pires sec­taires. »

Léon Bloy, Médi­ta­tions d’un soli­taire

 

 

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Mes petites passions étaient aiguës, brûlantes à cause de mes nerfs toujours malades

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« Ce que je faisais surtout à la maison, c’est que je lisais. Je voulais que des impressions extérieures viennent étouffer ce qui bouillait sans cesse au fond de moi. Et, pour moi, les seules impressions extérieures venaient de la lecture. La lecture, cela va de soi, m’aidait beaucoup -elle me passionnait, elle me comblait, me torturait. Mais, quelquefois, elle m’ennuyait à mort. Quand même, j’avais besoin de bouger et je me plongeais alors, je ne dirai pas dans la débauche -mais dans une débauchette, obscure, souterraine et sale. Mes petites passions étaient aiguës, brûlantes à cause de mes nerfs toujours malades. Il y avait des à-coups hystériques, avec des larmes et des convulsions. En dehors de la lecture, il n’ y avait pas d’issue -c’est-à-dire que je n’avais rien que j’aurais pu admirer dans mon entourage et qui aurait pu m’entraîner. Et puis, l’angoisse qui s’accumulait ; je voyais monter un désir hystérique de contradictions, de contrastes -et je me lançais dans la débauche…Si je viens de raconter tout ça, ce n’est pas du tout pour me justifier…Encore que -non ! mensonge ! Si, justement, je voulais me justifier. Note à usage interne, messieurs. Je ne veux plus mentir. J’ai promis. »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Carnets du sous-sol

 

 

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Réduire à néant l’identité des individus

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« La dénonciation de tout pouvoir, de l’identité, de l’ethnocentrisme de la nation, est enseignée comme une norme éthique aux masses avec pour effet de les démobiliser et de les décourager, ce à quoi fait écran le miroitement d’une liberté totale, via la technologie ou l’anomie morale, mâtinée de la célébration de l’Autre. (…) De ce point de vue, la théorie du genre vise à réduire à néant l’identité des individus, la théorie de la minorité politique vise à la déréliction de la nation, la théorie du réseau vise à décomposer l’Etat, la théorie de la discrimination positive vise à reléguer dans les marges les citoyens, et l’apologie du non-occidental vise à casser le principe même de l’identité des nations démocratiques. »

Schmuel Trigano, La nouvelle idéologie dominante, le post modernisme

 

 

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Eric Clapton : Double trouble (Live - 1980)

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Eric Clapton

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01/04/2014

Le Changement c'est maintenant...

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Une bonne parole, la parole qu'il faut...

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« Si je ne t’ai pas parlé plus tôt, c’est parce que le temps n’était pas venu. Tout vient en son temps. A quoi bon tenter d’arrêter un cheval, tant qu’il rue et mord, je te demande ? Lorsqu’il est bien las, bien rendu, voilà le moment de lui dire une bonne parole et de lui passer le bridon. Bêtes ou gens, tu n’en trouveras guère qui résistent à une bonne parole, à la parole qu’il faut. Malheureusement, les gens parlent trop. Ils parlent tellement, tellement ils parlent que, le jour venu, leurs paroles n’ont plus de pouvoir, elles sont comme la poussière... »

Georges Bernanos, Nouvelle Histoire de Mouchette

 

 

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Ceux qui se servent de la phraséologie libérale pour défendre des privilèges anti-sociaux

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« La lenteur des progrès de la politique libérale, la juste irritation contre ceux qui se servaient de la phraséologie libérale pour défendre des privilèges anti-sociaux, et l’ambition illimitée que légitimaient en apparence les améliorations matérielles déjà atteintes, tout cela fit que vers la fin du siècle la croyance dans les principes essentiels du libéralisme fut de plus en plus abandonnée. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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Can't Find a Job...

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Le libéralisme n'est pas une idéologie

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« Il n’y a rien dans les principes du libéralisme qui permette d’en faire un dogme immuable ; il n’y a pas de règles stables, fixées une fois pour toutes. Il y a un principe fondamental : à savoir que dans la conduite de nos affaires nous devons faire le plus grand usage possible des forces sociales spontanées, et recourir le moins posible à la coercition. Mais ce principe peut comporter une infinie variété d’applications. Il y a, en particulier, une immense différence entre créer délibérément un système où la concurrence jouera le rôle le plus bien-faisant possible, et accepter passivement les institutions telles qu’elles sont.  »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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La liberté individuelle...

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« Un des résultats les plus importants de la libération des énergies individuelles a peut-être été le merveilleux développement de la science qui a suivi le mouvement de la liberté individuelle d’Italie en Angleterre et au-delà. Certes, les facultés inventives de l’homme n’avaient pas été moindres auparavant. On avait su construire un grand nombre de jouets et d’autres mécaniques, cependant que la technique industrielle demeurait stationnaire. D’autres part, les industries qui n’avaient pas été soumises à des contrôles restrictifs, comme l’industrie minière et l’horlogerie, avaient fait de grands progrès. Mais les rares tentatives faites pour étendre l’usage industriel des inventions mécaniques, dont certaines étaient remarquablement perfectionnées, furent rapidement étouffées. Le désir de s’instruire fut frustré aussi longtemps que les idées dominantes restèrent obligatoires pour tous. Les croyances et l’éthique de la majorité barraient la route à tout novateur. Mais, dès que la liberté industrielle eut ouvert la voie au libre usage des connaissances nouvelles, dès que tout homme capable de courir un risque eut reçu la possibilité de tenter n’importe quelle expérience, souvent à l’insu des autorités chargées de surveiller l’enseignement, alors, et alors seulement la science put faire les immenses progrès qui, au cours des cent cinquante dernières années, ont changé la face de l’univers. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

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Eric Clapton : She Rides

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Eric Clapton

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31/03/2014

Qu’est ce qu’une société disneylandisée ?

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« Ce qu’il y a quand même de fascinant dans tout cela, ce qu’il y a d’attirant presque, ce sont les milles facettes de la bêtise éternelle que le sport incarne : la stupidité du muscle intensif, le crétinisme de la force, la niaiserie de l’exercice méthodique, l’optimisme absurde du dépassement de soi et de la répétition de ce dépassement, la sottise de la performance comme argument. Et j’oubliais l’insanité suprême, le rêve sportif absolu de la grande fraternité des peuples ; laquelle d’ailleurs, sur le terrain, se traduit automatiquement par son contraire radical (c’est Dieu merci,  le destin de toutes les bonnes intentions), c’est à dire le chauvinisme le plus sordide. Cela m’a toujours réjoui, moi d’apprendre la défaite de la France à telle ou telle répugnante compétition internationale, à cause de la tête catastrophée de la plupart de mes concitoyens. Comme atteinte au moral de la nation, comme détérioration de son image, comme déstabilisation de sa réputation, une défaite de l’équipe de France aux cauchemardesques Jeux Olympiques peut avoir son intérêt. Mais que cet intérêt est faible comparé à la tyrannie bienveillante dont le sport, dans la société disneylandisée d’aujourd’hui, est devenu l’un des moteurs essentiels.

Qu’est ce qu’une société disneylandisée ? Peut-être appelée ainsi toute société où les maîtres sont maîtres des attractions et les esclaves spectateurs ou acteurs de celles-ci. N’oublions pas que le mot sport est couplé avec loisir, cet autre vocable antipathique. Qui dit sport dit week-end, dimanches, vacances ; donc familles, communautés, donc renforcement à perpétuité de l’infâme contrat social. Peut-être nommée disneylandienne toute société qui contraint aux loisirs - et qui songerait à se révolter contre une oppression qui ne communique, au fond, que l’ordre de s’amuser ? Qui refuserait les planches à voiles, les skis, , les camping-cars et les autoroutes pour aller dessus ? Et qu’on aille pas non plus me parler de "culture" sportive, encore moins d’ "art" bien entendu ! Aucun tableau de Picasso ne ressemble à un tableau de Rembrandt (même pas à un autre tableau de Picasso), alors qu’un match ressemble toujours à un autre match. C’est toujours le même Tour de France, toujours la même Coupe du monde, toujours les même voitures ridicules sur leurs circuits grondants… »

Philippe Muray, Désaccord parfait

 

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Il n’y avait jamais rien eu qui ressemblât à ma grand-mère

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« Bouleversement de toute ma personne. Dès la première nuit, comme je souffrais d’une crise de fatigue cardiaque, tâchant de dompter ma souffrance, je me baissai avec lenteur et prudence pour me déchausser. Mais à peine eus-je touché le premier bouton de ma bottine, ma poitrine s’enfla, remplie d’une présence inconnue, divine, des sanglots me secouèrent, des larmes ruisselèrent de mes yeux. L’être qui venait à mon secours, qui me sauvait de la détresse de l’âme était celui, qui, plusieurs années auparavant, dans un moment de détresse et de solitude identique, dans un moment où je n’avais plus rien de moi, était entré, et m’avait rendu à moi-même, car il était moi et plus que moi (le contenant qui est plus que le contenu et me l’apportait). Je venais d’apercevoir, dans ma mémoire, penché sur ma fatigue, le visage tendre, préoccupé et déçu de ma grand-mère, telle qu’elle avait été ce premier soir d’arrivée ; le visage de ma grand-mère, non pas de celle que je m’étais étonné et reproché de si eu regretter et qui n’avait d’elle que le nom, mais de ma grand-mère véritable, où pour la première fois depuis les Champs-Elysées où elle avait eu son attaque, je retrouvais dans un souvenir involontaire et complet la réalité vivante. Cette réalité n’existe pas pour nous tant qu’elle n’a pas été recrée par notre pensée (sans cela les hommes qui ont été mêlés à un combat gigantesque seraient tous de grands poètes épiques) ; et ainsi, dans un désir fou de me précipiter dans ses bras, ce n’était qu’à l’instant – plus d’une année après son enterrement –que je venais d’apprendre qu’elle était morte. J’avais souvent parlé d’elle depuis ce moment-là, et aussi pensé à elle, mais sous mes paroles et mes pensées de jeune homme ingrat, égoïste, et cruel, il n’y avait jamais rien eu qui ressemblât à ma grand-mère, parce que, dans ma légèreté, mon amour du plaisir, mon accoutumance à la voir malade, je ne contenais en moi qu’à l’était virtuel le souvenir de ce qu’elle avait été. A n’importe quel moment que nous la considérions, notre âme totale n’a qu’une valeur presque fictive, malgré le nombreux bilan de ces richesses, car tantôt les unes, tantôt les autres sont indisponibles qu’ils s’agisse d’ailleurs de richesses effectives aussi bien que de celles de l’imagination, et pour moi par exemple, tout autant que de l’ancien nom de Guermantes, de celles combien plus graves, du souvenir vrai de ma grand-mère. Car aux troubles de la mémoire sont liées les intermittences du cœur. C’est dans doute l’existence de notre corps, semblable pour nous à un vase où notre spiritualité serait enclose, qui nous induit  à supposer que tous nos biens intérieurs, nos joies passées, toutes nos douleurs sont perpétuellement en notre possession. Peut-être est-il aussi inexact de croire qu’elles s’échappent ou reviennent. En tout cas si elles restent en nous, c’est la plupart du temps dans un domaine inconnu où elles ne sont de nul service pour nous, et où même les plus usuelles sont refoulées par des souvenirs d’ordre différent et qui excluent toute simultanéité avec elles dans la conscience. Mais si le cadre de sensations où elles sont conservées est ressaisi, elles ont à leur tour le même pouvoir d’expulser ce qui est incompatible, d’installer seul en nous, le moi qui les vécut. Or comme celui que je venais subitement de redevenir n’avait pas existé depuis ce soir lointain où ma grand-mère m’avait déshabillé à mon arrivée à Balbec, ce fut tout naturellement, non pas après la journée actuelle que ce moi ignorait, mais – comme s’il y avait dans le temps des séries différentes et parallèles – sans solution de continuité, tout de suite après le premier soir d’autrefois, que j’adhérai à la minute où ma grand-mère s’était penchée vers moi. Le moi que j’étais alors et qui avait disparu si longtemps, était de nouveau si près de moi qu’il me semblait encore entendre les paroles qui avaient immédiatement précédé et qui n’étaient pourtant plus qu’un songe, comme un homme mal éveillé croit percevoir tout près de lui les bruits de son rêve qui s’enfuit. Je n’étais plus que cet être qui cherchait à se réfugier dans les bras de sa grand-mère, à effacer les traces de ses peines en lui donnant des baisers, cet être que j’aurais eu à me figurer, quand j’étais tel ou tel de ceux qui s’étaient succédé en moi depuis quelque temps, autant de difficulté que maintenant il m’eût fallu d’efforts, stériles d’ailleurs, pour ressentir les désirs et les joies de l’un de ceux que, pour un temps du moins, je n’étais plus. Je me rappelais comme, une heure avant le moment où ma grand-mère s’était penchée ainsi, dans sa robe de chambre, vers mes bottines, errant dans la rue étouffante de chaleur, devant le pâtissier, j’avais cru que je ne pourrais jamais dans le besoin que j’avais de l’embrasser, attendre l’heure qu’il me fallut encore passer sans elle. Et maintenant que ce même besoin renaissait, je savais que je pouvais attendre des heures après des heures, qu’elle ne serait plus jamais auprès de moi, je ne faisais que le découvrir parce que je venais, en la sentant pour la première fois vivante, véritable, gonflant mon cœur à le briser, en la retrouvant enfin, d’apprendre que je l’avais perdue pour toujours. Perdue pour toujours ; je ne pouvais comprendre et je m’exerçais à subir la souffrance de cette contradiction : d’une part, une existence, une tendresse, survivantes en moi telles que je les avais connues, c’est à dire faites pour moi, un amour où tout trouvait tellement en moi son complément, son but, sa constante direction, que le génie des grands hommes, tous les génies qui avaient pu exister depuis le commencement du monde  n’eussent pas valu pour ma grand-mère un seul de mes défauts ; et d’autre part, aussitôt que j’avais revécu, comme présente, cette félicité, la sentir traversée par la certitude, s’élançant comme une douleur physique à répétition, d’un néant qui avait effacé mon image de cette tendresse, qui avait détruit cette existence, aboli rétrospectivement notre mutuelle prédestination, fait de ma grand-mère, au moment où je la retrouvais comme dans un miroir, une simple étrangère qu’un hasard a fait passer quelques années auprès de moi, comme cela aurait pu être auprès de tout autre, mais pour qui, avant et âpres, je n’étais rien, je ne serais rien. »

Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe

 

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Le mot individualisme est assez malsonnant de nos jours...

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« La tendance moderne vers le socialisme signifie une rupture brutale, non seulement avec le passé récent, mais encore avec toute l’évolution de la civilisation occidentale. On s’en rend compte en considérant cette tendance, non plus seulement dans le cadre du XIXe siècle, mais dans une perspective historique plus vaste. Nous abandonnons rapidement, non seulement les idées de Cobden et de Bright, d’Adam Smith et de Hume, ou même de Locke et de Milton, mais encore une des caractéristiques les plus saillantes de la civilisation occidentale telle qu’elle s’est édifiée sur les fondations posées par le christianisme, par la Grèce et par Rome. Ce qu’on abandonne peu à peu, ce n’est pas simplement le libéralisme du XIXe et du XVIIIe siècle, mais encore l’individualisme fondamental que nous avons hérité d’Erasme, et de Montaigne, de Cicéron et de Tacite, de Périclès et de Thucydide.
Le chef nazi qui a défini la révolution nationale-socialiste comme une Contre-Renaissance ne savait peut-être pas à quel point il disait vrai. Cette révolution a été l’acte essentiel de destruction d’une civilisation que l’homme édifiait depuis l’époque de la Renaissance et qui était avant tout individualiste. Le mot individualisme est assez malsonnant de nos jours, et il a fini par évoquer l’égoïsme. Mais l’individualisme dont nous parlons pour l’opposer au socialisme et à toutes les autres formes de collectivisme n’a pas nécessairement de rapport avec l’égoïsme. Ce n’est que petit à petit qu’il nous sera possible au cours de cet ouvrage d’expliquer le contraste entre les deux principes. En quoi consiste donc cet individualisme dont les éléments, fournis par le christianisme et par l’antiquité classique, ont connu leur premier développement complet lors de la Renaissance et sont ensuite devenus ce que nous appelons la civilisation de l’Europe occidentale ? Respecter l’individu en tant que tel, reconnaître que ses opinions et ses goûts n’appartiennent qu’à lui, dans sa sphère, si étroitement qu’elle soit circonscrite, c’est croire qu’il est désirable que les hommes développent leurs dons et leurs tendances individuels. On a tant usé du mot « liberté » qu’on hésite à l’employer pour définir l’idéal qu’il a représenté depuis la Renaissance. Le mot "tolérance" est peut-être le seul à conserver la pleine signification d’un principe qui, après une longue ascension, a connu depuis peu un rapide déclin et a fini par disparaître complètement avec l’apparition de l’Etat totalitaire.
La transformation progressive d’un système rigidement hiérarchique en un régime où l’homme peut au moins essayer de modeler son destin, où il a l’occasion de connaître plusieurs genres de vie et de choisir entre eux, cette transformation est étroitement liée au développement du commerce. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

 

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Déterminer les circonstances qui, au cours des dernières soixante-dix années, ont permis la croissance progressive et enfin la victoire d’une certaine catégorie d’idées

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« Nous ne réussirons jamais dans notre politique avec les Allemands tant que nous ne comprendrons pas le caractère et le développement des idées qui les gouvernent aujourd’hui. La théorie suivant laquelle les Allemands seraient atteints d’un vice congénital n’est guère soutenable et ne fait pas honneur à ceux qui la professent. Elle déshonore les innombrables Anglais qui, au cours des derniers siècles, ont allégrement adopté ce qu’il y avait de meilleur, et aussi le reste, dans la pensée allemande. Elle néglige le fait qu’il y a quatre-vingts uns John Stuart Mill s’est inspiré, pour son essai Sur la Liberté, avant tout de deux Allemands, Goethe et Guillaume de Humboldt. Elle oublie que deux des précurseurs intellectuels les plus importants du nazisme, Thomas Carlyle et Chamberlain, étaient l’un Ecossais et l’autre Anglais.

Sous sa forme la plus vulgaire, cette théorie déshonore ceux qui, en l’adoptant, adoptent en même temps le racisme allemand. Il ne s’agit pas de savoir pourquoi les Allemands sont méchants. Ils n’ont probablement pas plus de méchanceté congénitale qu’aucun autre peuple. Il s’agit de déterminer les circonstances qui, au cours des dernières soixante-dix années, ont permis la croissance progressive et enfin la victoire d’une certaine catégorie d’idées, et de savoir pourquoi cette victoire a fini par donner le pouvoir aux plus méchants d’entre eux. Haïr tout ce qui est allemand, et non pas les idées qui dominent aujourd’hui l’Allemagne, est de plus très dangereux. Cette attitude masque aux yeux de ceux qui la prennent une menace très véritable. Elle n’est bien souvent qu’une manière d’évasion à laquelle recourent ceux qui ne veulent pas reconnaître des tendances qui n’existent pas seulement en Allemagne, et qui hésitent à réexaminer, et au besoin à rejeter, des croyances que nous avons prises chez les Allemands et qui nous abusent tout autant qu’elles abusent les Allemands eux-mêmes. Double danger : car en prétendant que seule la méchanceté allemande est cause du régime nazi, on a un prétexte pour nous imposer les institutions qui ont précisément déterminé cette méchanceté. »

 

Friedrich August von Hayek, La Route de la Servitude

 

 

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30/03/2014

Pornographie sur demande pour nos enfants...

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Planère Stars ça s'appelle... le genre de presse people à la con pour gamin pré-pubère en mal de potins à propos de ses idoles construites à grands coups de marketing savamment orchestrés. Dans les cours des écoles primaires, au lieu de jouer aux billes ou aux gendarmes et aux voleurs, comme au temps jadis, les marmots s'échangent les dernières nouvelles à propos de leurs chanteurs, acteurs et boys band préférés. Les parfums de glace qu'ils préfèrent, leurs peines de coeurs, leurs espoirs pour un monde meilleur... ce genre de connerie qui touchaient, avant, plutôt les adolescents. Mais les temps ont changés... Bob Dylan nous avait prévenus...

 

 

 

Le dernier numéro en date était consacré aux acteurs du soap-opéra "Violetta"... Haut niveau. Le genre de magazine que certains parents achètent à leurs jeunes enfants en soupirant et en se disant que ça leur passera.

Et que trouve-t-on comme publicité dans ces magazines pour enfants pré-adolescents ? Oh, rien ma bonne Dame, rien qui ne soit normal aujourd'hui...

Mais le mieux est que vous alliez voir, par vous-mêmes, les trois liens PDF juste en-dessous et que vous aggrandissiez le visuel... c'est édifiant.

Planète Stars - 1.PDF

Planète Stars - 2.PDF

Planète Stars - 3.PDF

 

Voyez aussi ce lien...

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29/03/2014

L'Islam et ses schémas de pensée involontaires, par Daniel Pipes

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Comment l'Islam façonne-t-il la vie des musulmans ? Les prescriptions religieuses officielles sont à la base d'une structure beaucoup plus large d'habitudes qui donnent aux règles formelles de l'islam une portée aussi inattendue qu'imprévue. Quelques exemples :

Par l'interdiction formelle de la consommation de porc, le Coran a entraîné une disparition presque totale des cochons domestiqués dans les régions à majorité musulmane au profit des moutons et des chèvres. Ces derniers ont provoqué un surpâturage qui a conduit, comme l'a fait remarquer le géographe Xavier de Planhol à un « déboisement catastrophique » qui a été à son tour « une des raisons fondamentales de la nudité particulièrement sensible des pays islamiques méditerranéens ». On remarquera cette progression des injonctions coraniques sur le plan alimentaire jusqu'à la désertification sur de vastes étendues de terres. Le prescrit du texte sacré n'avait pas pour intention de provoquer des dommages écologiques mais c'est ce qui est pourtant arrivé.

L'exigence inaccessible des normes définies par l'islam quant au comportement des gouvernants s'est traduite dans l'histoire par le fait que les dirigeants en place, par leurs nombreux défauts, se sont aliéné leurs sujets musulmans qui ont, en retour, refusé de servir ces dirigeants dans l'administration et l'armée, forçant les gouvernants à rechercher du personnel ailleurs. Avec pour conséquence un déploiement systématique d'esclaves dans l'armée et l'administration, générant ainsi une façon de gouverner qui, apparue au VIIIe siècle, allait durer un millénaire.

 


Les Janissaires de l'empire Ottoman ont été le corps d'esclaves soldats le plus important et détenant le record de longévité.

 

Le sentiment de supériorité musulmane et le mépris pour la foi et la civilisation des autres instillés par la doctrine islamique ont eu deux implications majeures à l'époque contemporaine : ils ont fait des musulmans les groupes les plus rebelles au pouvoir colonial et les ont empêchés de s'inspirer de l'Occident pour se moderniser.

Les textes sacrés de l'islam inculquent également envers les non-musulmans une hostilité qui en retour engendre le sentiment que les non-musulmans nourrissent une hostilité semblable envers les musulmans. À l'époque contemporaine, cette projection a produit une sensibilité certaine aux théories du complot qui ont eu de nombreuses conséquences pratiques. Par exemple, parce que les musulmans sont les seuls à craindre que le vaccin contre la polio rende leurs enfants stériles, la polio est réellement devenue un fléau propre aux musulmans de 26 pays.

Le pèlerinage annuel à la Mecque, le hajj islamique, a commencé au VIIe siècle comme coutume locale avant de devenir un rassemblement international favorisant les échanges de tout type, depuis les idées islamistes et les mouvements politiques (l'Idrissiya en Libye) jusqu'aux produits de luxe (ivoire), aux plantes (caoutchouc vers l'Asie du Sud-Est, riz vers l'Europe) et aux maladies (méningococcies, infections de la peau, diarrhées infectieuses, maladies transmissibles par le sang, infections de l'appareil respiratoire et peut-être aussi le tout nouveau coronavirus MERS-CoV).

 


Le hajj, à l'origine cérémonie locale, s'est mué en événement international témoin de nombreux échanges.

 

D'autres injonctions de l'islam ont aussi des implications involontaires négatives sur la santé. L'impératif de modestie a amené certaines femmes musulmanes à se couvrir entièrement la tête et le corps (niqabs et burqas), ce qui engendre une carence en vitamine D, décourage l'exercice physique et entraîne toute une série de problèmes médicaux, notamment les éruptions, les maladies respiratoires, le rachitisme, l'ostéomalacie et les scléroses multiples.

Le jeûne diurne du Ramadan conduit souvent les musulmans pratiquants à bouger moins et à « se suralimenter lors de la rupture du jeûne, en consommant des repas généralement composés d'aliments lourds, gras et riches en calories », selon le responsable de l'Emirates Diabetes Society. Une enquête menée à Djeddah, en Arabie Saoudite, a montré que 60 pourcent des personnes interrogées disent se trouver en excès de poids au terme du Ramadan.

 


Paradoxalement, le Ramadan est un mois de jeûne mais aussi de suralimentation.

 

La préférence pour les mariages entre cousins germains, qui rappelle les pratiques tribales préislamiques (dans le but de maintenir les richesses au sein de la famille et de bénéficier de la fertilité des filles) a produit en l'espace d'environ cinquante générations une consanguinité largement répandue aux conséquences négatives comme un taux environ deux fois plus élevé de troubles d'ordre génétique tels que la thalassémie, l'anémie à cellules falciformes, l'amyotrophie spinale, le diabète, la surdité, le mutisme et l'autisme.

Par rapport aux femmes, les injonctions concernant le mahram [homme de la parenté avec qui la femme ne peut se marier, NdT] auxquelles s'ajoute un statut social et légal nettement défavorable, ont créé des schémas comportementaux aussi inattendus que l'isolement physique, l'obsession de la virginité, les crimes d'honneur, les mutilations génitales féminines ainsi que l'apartheid du genre (à la mode saoudienne). La polygamie crée une anxiété permanente chez les femmes.

Les orphelins jouissent d'un statut honorable dans la loi islamique (kafala) mais cet honneur étant lié à une structure tribale incompatible avec la société moderne, les orphelins musulmans subissent à l'heure actuelle des discriminations persistantes, même parmi les musulmans vivant en Occident.

Les textes sacrés de l'islam ont fourni une base à partir de laquelle se sont développées d'autres attitudes-types, notamment : fondation de dynasties par conquête et non par renversements internes ; problèmes récurrents de succession dynastique ; pouvoir menant à la richesse et non l'inverse ; quasi-absence de gouvernements à l'échelon municipal ; gestion inadéquate des villes ; lois résultant de décisions de circonstances au lieu de législations officielles ; transferts d'argent fondés sur le hawala et pratique des attentats suicides.

Les schémas de pensée involontaires, parfois appelés [en anglais] Islamicate, changent selon les époques. Certains (comme les esclaves soldats) finissent par disparaître et d'autres (comme la polio) ne font que commencer. Ces schémas demeurent aussi puissants aujourd'hui que par le passé et constituent la clé de compréhension de l'Islam et de la vie musulmane.

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Source : Daniel Pipes

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