25/10/2011
On ne peut exiger des uns et piétiner les autres
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« La façon dont l’homme traite l’environnement influence les modalités avec lesquelles il se traite lui-même et réciproquement. C’est pourquoi la société actuelle doit réellement reconsidérer son style de vie qui, en de nombreuses régions du monde, est porté à l’hédonisme et au consumérisme, demeurant indifférente aux dommages qui en découlent. Un véritable changement de mentalité est nécessaire qui nous amène à adopter de nouveaux styles de vie "dans lesquels les éléments qui déterminent les choix de consommation, d’épargne et d’investissement soient la recherche du vrai, du beau et du bon, ainsi que la communion avec les autres hommes pour une croissance commune". Toute atteinte à la solidarité et à l’amitié civique provoque des dommages à l’environnement, de même que la détérioration de l’environnement, à son tour, provoque l’insatisfaction dans les relations sociales. À notre époque en particulier, la nature est tellement intégrée dans les dynamiques sociales et culturelles qu’elle ne constitue presque plus une donnée indépendante. La désertification et la baisse de la productivité de certaines régions agricoles sont aussi le fruit de l’appauvrissement et du retard des populations qui y habitent. En stimulant le développement économique et culturel de ces populations, on protège aussi la nature. […] Une sorte d’écologie de l’homme, comprise de manière juste, est nécessaire. La dégradation de l’environnement est en effet étroitement liée à la culture qui façonne la communauté humaine: quand l’ "écologie humaine" est respectée dans la société, l’écologie proprement dite en tire aussi avantage. De même que les vertus humaines sont connexes, si bien que l’affaiblissement de l’une met en danger les autres, ainsi le système écologique s’appuie sur le respect d’un projet qui concerne aussi bien la saine coexistence dans la société que le bon rapport avec la nature.
Pour préserver la nature, il n’est pas suffisant d’intervenir au moyen d’incitations ou de mesures économiques dissuasives, une éducation appropriée n’y suffit pas non plus. Ce sont là des outils importants, mais le point déterminant est la tenue morale de la société dans son ensemble. Si le droit à la vie et à la mort naturelle n’est pas respecté, si la conception, la gestation et la naissance de l’homme sont rendues artificielles, si des embryons humains sont sacrifiés pour la recherche, la conscience commune finit par perdre le concept d’écologie humaine et, avec lui, celui d’écologie environnementale. Exiger des nouvelles générations le respect du milieu naturel devient une contradiction, quand l’éducation et les lois ne les aident pas à se respecter elles-mêmes. Le livre de la nature est unique et indivisible, qu’il s’agisse de l’environnement comme de la vie, de la sexualité, du mariage, de la famille, des relations sociales, en un mot du développement humain intégral. Les devoirs que nous avons vis-à-vis de l’environnement sont liés aux devoirs que nous avons envers la personne considérée en elle-même et dans sa relation avec les autres. On ne peut exiger des uns et piétiner les autres. C’est là une grave antinomie de la mentalité et de la praxis actuelle qui avilit la personne, bouleverse l’environnement et détériore la société. »
Benoit XVI, Caritas in veritate, §51
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24/10/2011
Les formes de réception de la kabbale dans le Romantisme Allemand
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Est-il surprenant de découvrir combien Gershom Scholem, historien et philosophe juif, spécialiste en Kabbale et en mystique juive en général, fut influencé, dans sa jeunesse, et inspiré par le Romantisme Allemand ?
Dans "LE MESSIANISME HETERODOXE DANS L'OEUVRE DE JEUNESSE DE GERSHOM SCHOLEM", Michael Löwy affirme non sans raison :
« Scholem appartient aussi à la catégorie des intellectuels modernes - aussi bien juifs que non-juifs - qui ressentent cruellement le désenchantement du monde, la entzauberung der Welt caractéristique, selon Max Weber, de la modernité. Pour cette raison, il est profondément attiré par la critique romantique de la modernité, la protestation romantique - au nom de valeurs culturelles ou religieuses du passé - contre la rationalité instrumentale (la Zweckrationalität dont parle Weber), la quantification et la réification produites par la civilisation bourgeoise/industrielle moderne. Il fait partie de ce vaste courant de critique moderne de la modernité qui trouve son inspiration dans la tradition romantique allemande, et qui cherche dans le mythe, l'histoire ou la religion un antidote à la perte de sens.
Comme d'autres romantiques, Scholem est trop moderne pour désirer un retour pur et simple au passé : il ne peut plus croire à la Kabbale, où à l'avénément iminent du Messie, comme ses ancêtres. Sa stratégie de ré-enchantement du monde se situe à l'intérieur de la modernité : il deviendra l'historien de la Kabbale et du messianisme, et c'est par la médiation de l'historiographie qu'il fera révivre la fascinante magie spirituelle de la mystique juive des siècles passés. L'oeuvre de Gershom Scholem est non seulement un monument inégalé d'historiographie moderne, mais apporte aussi un regard nouveau sur la tradition religieuse juive, en lui restituant sa dimension messianique et apocalyptique escamoté par la lecture rationaliste/libérale de la Wissenschaft des Judentums et de la sociologie allemande. Max Weber et Werner Sombart n'ont vu dans la spiritualité juive que rationalisme calculateur : Scholem a mis en évidence les courants religieux souterrains, mystiques, hérétiques, messianiques et utopiques de l'histoire du judaïsme.
Né dans une famille de la petite bourgeoisie juive assimilée de Berlin, Gerhard Scholem sera d'abord nourri de culture allemande ; pendant sa jeunesse, les écrivains romantiques ou néo-romantiques seront parmi ses favoris : Jean Paul, Novalis, Eduard Mörike, Stefan George, Paul Scheerbart. »
Scholem dira du théosophe chrétien et romantique allemand, Franz Joseph Molitor, et précisément de son oeuvre "Philosophie der Geschichte oder über die Tradition (1827-1857), combien ses "intuitions profondes" et "l'effet fascinant" de son livre eurent un impact considérable sur lui. Si Scholem refusa les spéculations cristologiques de ce "disciple des philosophes romantiques Schelling et Baader", il proclame néanmoins que Molitor "comprennait mieux la Kabbale que les plus grandes autorités religieuses juives de son époque."
Michael Löwy précise : « Suite à la lecture d'un roman d'Eichendorff, Scholem proclame : "On voit ici combien profondément nous appartenons au romantisme : dans le fait que nous sommes capables d'absorber en nous-mêmes de forme achévée et intégrale les vibrations et les émotions du romantisme, avec toute leur multiplicité de couleurs et avec la grande auréole de saintété de la joie (Heiligenschein der Freude) , qui s'étend sur lui".»
Car les ponts entre la Kabbale Juive et le Romantisme allemand ne manquent pas, tant en transmission directe qu'en transmission indirecte. En tout cas, les notions Kabbalistiques ont eu une influence sur le Romantisme. Quelques extraits pour vous mettre l'eau à la bouche avant de vous livrer le lien vers un fichier PDF fort intéressant.
« Dans son accueil de la kabbale, le romantisme se caractérise, tant chez les chrétiens que chez les juifs, par un nouvel intérêt porté à la langue. La phrase de Hamann dans une lettre à Jacobi selon laquelle la langue serait "la mère de la raison et de la révélation, son alpha et oméga" marque le point de convergence des romantiques face à la raison pure de l’Aufklärung. »
« L’accueil réservé à la kabbale dans le romantisme allemand a été si varié et si complexe qu’il est nécessaire d’indiquer ici en introduction les différents éléments de cette « réception » — d’ailleurs une des significations du mot hébreu kabbala. »
« Schelling est le paradigme de la "réception" romantique indirecte de la kabbale : ce qu’il en sait et en utilise, il ne le tient pas d’un maître juif, mais de Jacob Boehme, Giordano Bruno, Knorr von Rosenroth, Oetinger, Jacobi et Molitor ou bien alors du trop fameux pamphlet antisémite Entdecktes Judenthum [Le judaïsme dévoilé] (Königsberg, 1711) de Johann Andrés Eisenmenger (1654-1704), une autre source importante du "savoir" romantique sur le judaïsme et la kabbale. »
« Goethe : à peine âgé de vingt ans, il avait lu en 1769, dans le cercle piétiste de Susanna Katharina von Klettenberg, à côté des œuvres de Paracelse et Basilius Valentinus, le Opus magocabbalisticum et theosophicum (Homburg vor der Höhe, 1735 ; seconde édition 1760) de Georg von Welling. Dans le huitième volume de Dichtung und Wahrheit, écrit en 1811, il reconstitue de mémoire comment il s’était construit toute une théogonie et cosmogonie à partir des manuels alchimistes et gnostiques les plus divers et d’œuvres ésotériques juives et chrétiennes, auxquels "l’hermétisme, la mystique et la kabbale" apportèrent leur contribution. »
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En tout cas, Scholem, pour en revenir à lui, a eu une admiration sans restrictions à l'égard d'Hölderlin - passion qu'il partagea avec son ami Walter Benjamin - qu'il n'a pas craint, dans les "Tagebuchaufzeichnungen" de 1918-19 , de comparer avec la Bible elle-même : « La vie sioniste a été vécue dans le peuple Allemand par Friedrich Hölderlin. L'être-là (Dasein) de Hölderlin est le canon de toute vie historique. Cela constitue le fondement de l'autorité absolue de Hölderlin (...) [et de] sa place aux côtés de la Bible. La Bible est la canon de l'écriture, Hölderlin, le canon de l'être-là (Dasein). Hölderlin et la Bible sont les deux seules choses dans le monde, qui ne peuvent jamais se contredire. Le canonique doit être defini comme la pure possibilité d'interprétation (Deutbarkeit). »
Michael Löwy : « Il est possible que ce paragraphe se réfère à l'Hypérion de Hölderlin, dont l'image exaltée et lyrique de la renaissance nationale grecque aurait pu inspirer à Scholem ce surprennant paralèlle avec le sionisme. »
Et Löwy ajoute plus loin :
« Scholem ne partage pas moins - comme Benjamin - la critique romantique de l'idée de progrès. Cette critique inspire ses féroces attaques contre le liberalisme de la bourgeoisie juive et son fruit intellectuel, la Wissenschaft des Judentums, dans les "Tagebuchaufzeichnungen" : "La Wissenschaft des Judentums et le capitalisme juif se trouvent dans un rapport fondamental (wessensmässiger Verbindung)."
Dans une référence implicite au positivisme comtien, il ajoute cette étonnante diatribe pimentée d'images sarcastiques : "Une révolution et une compétition métaphysiques se sont mis en place en vue d'accomplir l'identification dont on avait besoin : Ordre/Progrès. Depuis ce moment a commencé la grande re-interprétion du Judaïsme et sa transformation en haut lieu du Libéralisme, accomplie par la science et la théologie juives grâce à un horrible inceste dans la doctrine : le messianique devint le progrès infini dans le temps".
Les doctrines du progrès sont aux yeux de Scholem une misérable contrefaçon de la tradition messianique juive, dont est responsable la philosophie des Lumières. Il met en cause, avec une virulence particulière, l'école néo-kantienne de Marburg, dont Hermann Cohen était le principal réprésentant : "Le royaume messianique et le temps mécanique ont conçu, dans la tête des hommes des Lumières (Aufklärer), l'idée - batârde et digne de malédiction - du Progrès. Parce que, si l'on est un Aufklärer ...) la perspective des temps messianiques doit nécéssairement se déformer en Progrès. (...) Ici se trouvent les erreurs les plus fondamentales de l'école de Marburg : la distorsion légale et passible de déduction (die gesetzmässige, deduzierbare Verzerrung) de toutes les choses en une tâche infinie dans le sens du Progrès. Ceci est la plus pitoyable interpretation que le prophétisme a dû jamais supporter". »
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23/10/2011
Luchini réac'
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antisionisme, antisémitisme même combat...
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« Depuis la tragédie hitlérienne, l'antisémitisme politique a pratiquement disparu de la surface du globe. Non pas, bien sûr, qu'on ait cessé comme par enchantement de détester les Juifs. Mais la malveillance demeure à l'état diffus. Le préjugé ne se constitue pas en vision du monde. Ce qui lui manque pour sauter le pas ? La peur.
(...) L'idéologie raciste n'a pas résisté au naufrage du nazisme. Unanimement rejetée de la sphère politique, elle n'apparaît, avec une violence d'ailleurs redoutable, que dans le domaine privé. Nous sommes habitués à cette dichotomie : les hommes politiques parlent le langage de la justice et de l'égalité, et c'est aux particuliers qu'il revient d'exprimer brutalement leurs allergies ou leurs préventions raciales. Parions même que nombre de racistes n'aimeraient pas voir ministres et députés utiliser à la tribune les mots qu'ils emploient, eux, dans l'intimité. Ils seraient sincèrement choqués par cette intrusion soudaine, dans le vocabulaire politique, d'une violence ou d'un mépris qui n'ont rien à y faire.
(...) Ainsi, l'hostilité contre les Juifs n'est plus politisable : leur nom même y fait obstacle, parce qu'il désigne une ethnie et qu'il évoque un martyre. De là, l'importance essentielle du mot : sionisme. Les sionistes, en effet, ne sont pas les membres d'une nation ou d'une race, mais les partisans d'un système. Et l'expérience historique n'interdit pas de trouver ce système nuisible, ni même de hisser ses dirigeants à la hauteur de personnages occultes et tout-puissants qui manipulent l'opinion et qui influent sur le destin mondial. L'antisémitisme doctrinal ne pouvait guère se perpétuer qu'en se débaptisant : il l'a fait, et ce remplacement du “juif” par le “sioniste” est plus qu'un artifice rhétorique ; ce qui se révèle c'est la mutation de la pensée totalitaire. De nos jours, on persécute des idéologies et non des peuples, il n'y a plus de sous-hommes, mais des valets de l'impérialisme, des fascistes sous l'égide de l'étoile bleue, des militants, pour tout dire, d'un “nouveau type de nazisme”. Bref, le racisme n'a droit de cité dans le langage politique contemporain que sous la forme de son contraire. »
Alain Finkielkraut, Le Juif imaginaire
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22/10/2011
PRINCE Superbowl Press Conference 2007
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L’urbanisation contemporaine est décentralisation, dé-localisation et zonage
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« Le phénomène contemporain de l’urbanisation ne peut pas se penser dans l’opposition entre ville et campagne, ni comme passage d’un "monde rural" à un "monde citadin", mais disparition des deux dans leur fusion et leur indifférenciation. L’urbanisation contemporaine du monde constitue un phénomène nouveau, irréductible à la ville ancienne ; sa caractéristique la plus immédiate est précisément la suppression de la limite : la ville cesse d’être une entité spatiale bien délimitée, et se métastase indéfiniment dans ses territoires environnants. La question de la définition de la ville est d’ailleurs devenue une question insoluble, et il a fallu au XXè siècle créer des termes nouveaux tels "conurbation", "agglomération" ou "mégapole", pour désigner ces réalités nouvelles : la définition est alors toujours artificielle, et doit introduire des distinctions administratives au sein d’un continuum urbain qui se développe indépendamment d’elles ; la part du centre dans l’ensemble de la zone de peuplement se réduit ainsi sans cesse, au profit d’un accroissement continu de la banlieue. L’urbanisation du monde n’est donc pas en réalité une généralisation du modèle de la ville, mais une extension à l’infini de la banlieue, phénomène urbain majeur de notre époque, dans lequel il faut intégrer la prolifération massive du bidonville (Le constat de l’urbanisation contemporaine du monde doit tenir compte du fait que plus du tiers des citadins vit aujourd’hui en réalité dans des bidonvilles : plus de 920 millions d’hommes vivaient dans des bidonvilles en 2001, plus de 1 milliard en 2007 ; ils seront selon les projections 1,4 milliard en 2020).
Ce processus s’avère fondamental en ce qu’il met à nu la véritable nature de l’urbanisation du monde, qui n’est plus installation de l’homme dans le site de la ville, c'est-à-dire dans un centre, un pole à partir duquel le monde puisse se déployer et faire sens. La banlieue se définit par l’absence de pole, elle est un espace urbain qui a rompu les amarres avec son ancien centre sans pour autant se reconstituer elle-même à partir d’un centre. La ban-lieue est bannie de tout lieu, elle est le bannissement même du lieu (le mot « banlieue » désigne originairement le territoire d’environ une lieue autour d’une ville sur lequel s’étendait le ban, c'est-à-dire la loi du suzerain : mais la banlieue contemporaine se définit au contraire à la fois par son extension indéfinie, sur des dizaines de lieues, et par son indépendance par rapport à la loi du centre. D’où cette interprétation, fausse quant à l’étymologie mais vraie quant au sens), elle n’est pas site, mais zone, c'est-à-dire étendue urbaine non aménagée : la banlieue est hors-lieu, dé-centréen dé-localisée – elle est l’apolis redoutée par Sophocle. Le règne de l’urbain est en réalité la mort de la ville ; c’est la conclusion que Françoise Choay a tiré de sa longue réflexion sur l’urbanisme contemporain : "Nous assistons à la dédifférenciation et à l’effacement du type d’agglomération que l’Occident a appelé ville et dont, en dépit de ses banlieues, la métropole de la seconde moitié du XXè siècle fut le dernier avatar. Support mouvant de sociétés mobiles, cet espace indifférencié qui refuse centrement et circonscription, demeure inassumé par ses producteurs, méconnu tant par ceux qui le peuplent que par les analystes professionnels." (F. Choay, "Le règne de l’urbain et la mort de la ville", Pour une anthropologie de l’espace, Paris, 2006, p. 165 sq.). La technique est originairement production et configuration de lieu, de ces lieux ainsi édifiés et bâtis qui ont pris le nom de ville, mais l’urbanisation contemporaine est essentiellement décentralisation et dé-localisation, elle est un zonage à l’infini qui n’institue plus de lieux mais étend de l’espace. »
Jean VIOULAC, L’époque de la technique. Marx, Heidegger et l’accomplissement de la métaphysique
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21/10/2011
Prière à la Vie
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« Certes, comme on aime un ami
Je t’aime, vie énigmatique -
Que tu m’aies fait exulter ou pleurer,
Que tu m’aies apporté bonheur ou souffrance.
Je t’aime avec toute ta cruauté,
Et si tu dois m’anéantir,
Je m’arracherai de tes bras
Comme on s’arrache au sein d’un ami.
De toutes mes forces je t’étreins !
Que tes flammes me dévorent,
Dans le feu du combat permets-moi
De sonder plus loin ton mystère.
Être, penser durant des millénaires !
Enserre-moi dans tes deux bras :
Si tu n’as plus de bonheur à m’offrir -
Eh bien - il te reste tes tourments. »
Lou Andreas-Salomé, Ma Vie
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20/10/2011
La puissance d’annihilation porte directement sur l’être-au-monde
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« Si quotidiennement c’est l’homme qui est consommateur, il ne l’est qu’en tant que fonctionnaire d’une machinerie de consommation qui lui impose de remplir cette fonction. Or la consommation est destruction, l’usure est dégradation : non seulement la machination opère la démondanéisation du monde ambiant, c'est-à-dire qu’elle fait voler en éclat la structure de la mondanéité qui constitue le tout de l’étant en monde, mais elle est la destruction systématisée de l’étant. […].
L’époque de la technique est celle de la fin du monde, et il ne s’agit pas là d’une prévision catastrophiste mais d’un simple constat : de même qu’il n’y a plus de ville, mais une zone urbaine indéfinie, il n’y a plus de contrée mondaine, mais l’espace infini de l’univers. Dans la vaste machinerie de l’univers, la terre ne peut apparaître que comme planète, c'est-à-dire une sphère rocheuse errant dans le vide, un astre errant parmi d’autres. L’homme n’est plus au monde – ce qui rend possible l’habitation – il est sur une planète, en cela condamné à l’errance. Sa situation fondamentale peut alors être définie : « L’homme, devenu animal rationale, ce qui veut dire le vivant qui travaille, ne peut plus qu’errer à travers les déserts de la terre dévastée ». (Heidegger, Dépassement de la métaphysique, GA 7, p. 70).
La machination est l’universelle fragmentation du tout, qui réduit l’étant en pièces de son propre fonctionnement, lequel se déploie dans la puissance déchainée de la dévastation. Le déchaînement de cette puissance est « annihilation totale [vollständige Vernichtung] » (Heidegger, GA 79, p. 48), et la machination n’est finalement rien d’autre qu’annihilation. La machine d’annihilation tourne aujourd’hui à plein régime et dévaste la planète quotidiennement ; (l’époque industrielle a inauguré une extinction massive du vivant, dans des proportions et une rapidité jamais atteinte aux cours des âges géologiques, même à la fin du Cétacé : d’après E. O. Wilson, L’avenir de la vie, Paris, 2003, la moitié de toutes les espèces en vie sur la terre aura disparu avant la fin du XXIè siècle ; un rapport de l’ONU (GIEC, 2007) donne un taux d’extinction compris entre 40 et 70 %. A titre d’exemple : les réserve halieutiques mondiales ont baissé de 75 % depuis le début de la révolution industrielle, et seront totalement épuisées à l’horizon 2050 (United Nation Environnement Programme, GEO, 2007)) ; pour en être le phénomène le plus visible la désertification du monde n’est pourtant pas l’essentiel.
La puissance d’annihilation porte en effet directement sur l’être-au-monde, sur la transcendance de l’existance, qui constitue l’essance même de l’homme historial : l’homme court alors aujourd’hui « le danger de l’annihilation de son essance » (Heidegger, Nietzsche II, GA 6.2, p. 356). A l’époque de la technique l’homme est non seulement condamné à l’errance dans un désert illimité, mais il est plus profondément condamné à l’annihilation, et c’est ainsi que Heidegger définit sa condition aujourd’hui : « La bête de labeur est abandonnée au vertige de ses fabrications, afin qu’elle se déchire elle-même, qu’elle se détruise et s’annihile dans la nullité du néant » (Heidegger, Dépassement de la métaphysique, GA 7, p. 71). »
Jean VIOULAC, L’époque de la technique. Marx, Heidegger et l’accomplissement de la métaphysique
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19/10/2011
Gôche Volontaire...
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18/10/2011
Deuil...
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Le lieu d'un combat spirituel
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« Tout autour de lui, dans l'immensité et le désordre, s'étendait le pays pour lequel il souffrait. Il allait lui donner sa vie. Mais ce grand pays, qu'il était prêt à contester au point de se détruire lui-même, ferait-il seulement attention à sa mort ? Il n'en savait rien ; et tant pis. Il mourait sur un champ de bataille sans gloire, un champ de bataille où ne pouvait s'accomplir aucun fait d'armes : le lieu d'un combat spirituel. »
Yukio Mishima, Patriotisme
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Un classique : "Baby please don't go"
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17/10/2011
Quand nous avançâmes, une fureur guerrière s'empara de nous
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« Le grand moment était venu. Le barrage roulant s'approchait des premières tranchées. Nous nous mîmes en marche... Ma main droite étreignait la crosse de mon pistolet et la main gauche une badine de bambou. Je portais encore, bien que j'eusse très chaud, ma longue capote et, comme le prescrivait le règlement, des gants. Quand nous avançâmes, une fureur guerrière s'empara de nous, comme si, de très loin, se déversait en nous la force de l'assaut. Elle arrivait avec tant de vigueur qu'un sentiment de bonheur, de sérénité me saisit.
L'immense volonté de destruction qui pesait sur ce champ de mort se concentrait dans les cerveaux, les plongeant dans une brume rouge. Sanglotant, balbutiant, nous nous lancions des phrases sans suite, et un spectateur non prévenu aurait peut-être imaginé que nous succombions sous l'excès de bonheur. »
Ernst Jünger, Orages d'acier
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Eric Clapton : Driftin' Blues
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16/10/2011
No Cash & No Hope
14:07 Publié dans Brèves | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Feu d'artifice de pierre
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« Je l'avais vu d'abord de Cancale, ce château de fées planté dans la mer. Je l'avais vu confusément, ombre grise dressée sur le ciel brumeux. Je le revis d'Avranches, au soleil couchant. L'immensité des sables était rouge, l'horizon était rouge, toute la baie démesurée était rouge; seule, l'abbaye escarpée, poussée là-bas, loin de la terre, comme un manoir fantastique, stupéfiante comme un palais de rêve, invraisemblablement étrange et belle, restait presque noire dans les pourpres du jour mourant. J'allai vers elle le lendemain dès l'aube, à travers les sables, l’œil tendu sur ce bijou monstrueux, grand comme une montagne, ciselé comme un camée et vaporeux comme une mousseline. Plus j'approchais, plus je me sentais soulevé d'admiration, car rien au monde peut-être n'est plus étonnant et plus parfait. Et j'errai, surpris comme si j'avais découvert l'habitation d'un dieu à travers ces salles portées par des colonnes légères ou pesantes, à travers ces couloirs percés à jour, levant mes yeux émerveillés sur ces clochetons qui semblent des fusées parties vers le ciel et sur tout cet emmêlement incroyable de tourelles, de gargouilles, d'ornements sveltes et charmants, feu d'artifice de pierre, dentelle de granit, chef-d’œuvre d'architecture colossale et délicate »
Guy de Maupassant, La légende du Mont Saint Michel
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15/10/2011
Sylvia Ji : Santa Muerte
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Quand la France héberge des islamistes...
=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=
Des radicaux islamistes commettent des atrocités en Algérie durant la dernière guerre civile... puis, participant à la guerre de libération des Tchétchènes ils montent un attentat contre l'ambassade russe en France, ce dernier est démantelé en 2002 et ils finissent en Prison où ils purgent une peine de 10 années. Finalement libérés, ils ne peuvent être extradés vers l'Algérie où ils sont recherchés activement pour les saloperies qu'ils y ont commises au nom d'Allah. L'excuse ? "L’intégrité physique de ces hommes pourrait être menacée s’ils étaient remis, par exemple, aux Services algériens."
Et combien ça coûte au contribuable français cette jolie histoire ? "Pour lui et ses neuf autres comparses, le logement, la nourriture et l’argent de poche sont financés par le contribuable français, aux alentours de 600.000 € par an.[...] ça peut durer ad vitam aeternam."
La vie est belle... il fait bon vivre en France, ce pays de couchés.
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L'écriture
=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires..."=--=
Sur mon chemin de pèlerinage intérieur, ma Métanoïa si difficile, ma confrontation avec moi, moi-même et je, avec le Diable, autant le dire, pour accéder de la Maladie à la Grande Santé, de l'agnostique dérive à la fermeté de la Foi, je n'ai comme arme unique pour structurer ma méditation, ma réflexion et ma prière, que l'écriture, la musique me faisant défaut pour raison de nerf cubital coincé avec fourmillements handicapants.
« Tyrannique, l'écriture était le Tout, la quête mythique qui régénère et désintègre, l'acte de violence et la génuflexion, la splendeur et le simulacre, la transfiguration et le rictus : une "guerre des mondes" sans cesse recommencée, une odyssée où le cerveau, tout comme la sonde pénétrant les espaces, rencontre queues de comètes et trous noirs, fournaises solaires et blocs de méthane sale, continuant d'émettre cependant, antennes, caméras et systèmes de régulation tout entiers tournés vers le Verbe, afin d'en retrouver, qui sait, la divinité. »
Yves Adrien, "2001, Une Apocalypse Rock"
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14/10/2011
Avis de Recherche
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Rory Gallagher : Million miles away
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Perceptions littérales et binaires
=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires..."=--=
J'ai relu ceci qui m'a remué en confirmant ce que je pense :
« Toutes les consolations religieuses de la négativité sont infantiles. L'espoir d'un "ciel" qui ne connaîtrait pas la coupure des transcendances n'est qu'une inversion imaginaire de cette négativité et en quelque sorte sa confirmation. Mais les consolations blasphématoires de cette même négativité sont également infantiles, elles ne sont que la compensation ultra-négative des précédentes.
On ne peut réellement sortir de la négativité qu'en y fondant consciemment une positivité non associable, et celle-ci ne peut consister qu'en l'expérimentation et la connaissance de la loi de croissance de la négativité elle-même et de la positivité associée. »
Raymond Abellio, « Assomption de l'Europe », Chapitre : « Déterminisme et Liberté dans l'activité ineffable du "je". »
Une fois de plus on en revient à l'essentiel postulat écrit dés le premier livre de la Bible, la Genèse, dés le premier chapitre aux versets 26 et 27 :
« Puis Dieu dit : Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu'il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre, et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre.
Dieu créa l'homme à son image, il le créa à l'image de Dieu, il créa l'homme et la femme.»
Puisque nous sommes faits à son image nous nous devons de chercher à transcender les faits et la lecture que nous en avons. Pour nous consacrer au Bien Suprême et nier le Mal dans ce qu'il a de plus abominable il nous faut bien aller par-delà Bien et Mal dans notre lecture du monde en même temps que dans nos actes. Mais cette attitude qui organise son acte n'est pas donnée à tout le monde puisque nous sommes porteurs du péché depuis l'Exil et la Chute, mais quelques rares "élus", pèlerins de l'indicible, peuvent comprendre et agir en conséquence, le grand nombre, la triste multitude, ne peut que se soumettre au Décalogue et mener une vie simple aux perceptions littérales et binaires.
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13/10/2011
The Joy Formidable - Cradle
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Un peu de légèreté lumineuse face à la lourdeur ambiante...
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Patch
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Ne soyez pas effrayés, car il faut que ces choses arrivent...
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Ces mots terribles de Nietzsche, tirés du "Gai Savoir - Livre Troisième, 125" :
« Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c'est nous qui l'avons tué ! Comment nous consoler, nous les meurtriers des meurtriers ? Ce que le monde a possédé jusqu'à présent de plus sacré et de plus puissant a perdu son sang sous notre couteau. — Qui nous lavera de ce sang ? Avec quelle eau pourrions-nous nous purifier ? Quelles expiations, quels jeux sacrés serons-nous forcés d'inventer ? La grandeur de cet acte n'est-elle pas trop grande pour nous ? Ne sommes-nous pas forcés de devenir nous-mêmes des dieux simplement — ne fût-ce que pour paraître dignes d'eux ? »
Le constat est saisissant. L'Homme se retrouve seul dans le trou béant de l'Univers et il n'a d'autres issues, s'il veut poursuivre sa course en ce bas monde, que de trouver un moyen de remplacer la Divinité absente. Dans ces jours qui sont les miens, je ne puis que rentrer en résonance avec ce que nous certifie ici le philosophe. Oh, non pas que je souhaite revenir en arrière, avant ma rencontre violente avec le souffle de Dieu, mais je lis entre les lignes du penseur allemand combien sa relation au Christianisme ressemble bien plus à une paradoxale lutte avec la Divinité plutôt que contre, à l'image de Jacob exigeant de voir la Sainte Face. On connaît la suite, au terme d'une nuit de lutte Dieu ne l'autorisera à le voir uniquement que de dos, est-il dit, sans que cela ne soit d'une lumineuse clarté sur le plan littéral.
Pourtant dans "Ecce Homo", au chapitre "Pourquoi je suis si avisé", Nietzsche est bien plus proche d'une démarche chrétienne, qu'il n'en n'a l'air, en faisant l'éloge de l'Amor Fati.
« Ma formule pour ce qu'il y a de grand dans la vie est amor fati : ne rien vouloir d'autre que ce qui est, ni devant soi, ni derrière soi, ni dans des siècles et des siècles. Ne pas se contenter de supporter l'inéluctable, et encore moins de se le dissimiler - tout idéalisme est une manière de se mentir devant l'inéluctable - mais l'aimer. »
La seule vraie liberté n'est possible que dans l'adhésion sereine à un Ordre dépassant notre petite finitude humaine trop humaine et non pas comme un processus issu des impulsions négatives de notre petit Moi social qui se croit l'égal des dieux symboliques de l'Olympe ou du Dieu Créateur de l'Univers, une adhésion qui rentre en résonance avec l'acceptation stoïcienne de ce qui est, la vacuité taoïste qui pousse au non-agir (qui, paradoxalement, est la meilleure action qui soit) ou l'abandon chrétien qui n'est pas une résignation, mais un acquiescement aux choses qui se doivent d'arriver. Comme il est dit au Chapitre 21 de l'Evangile de Luc : « Ne soyez pas effrayés, car il faut que ces choses arrivent. »
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