Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/06/2013

Des semailles d’iniquités et des moissons d’opprobres

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Décidément, il ne lui restait aucune rade, aucune berge. Qu’allait-il devenir dans ce Paris où il n’avait ni famille ni amis ? Aucun lien ne l’attachait plus à ce faubourg Saint-Germain qui chevrotait de vieillesse, s’écaillait en une poussière de désuétude, gisait dans une société nouvelle comme une écale décrépite et vide ! Et quel point de contact pouvait-il exister entre lui et cette classe bourgeoise qui avait peu à peu monté, profitant de tous les désastres pour s’enrichir, suscitant toutes les catastrophes pour imposer le respect de ses attentats et de ses vols ?
Après l’aristocratie de la naissance, c’était maintenant l’aristocratie de l’argent ; c’était le califat des comptoirs, le despotisme de la rue du Sentier, la tyrannie du commerce aux idées vénales et étroites, aux instincts vaniteux et fourbes.
Plus scélérate, plus vile que la noblesse dépouillée et que le clergé déchu, la bourgeoisie leur empruntait leur ostentation frivole, leur jactance caduque, qu’elle dégradait par son manque de savoir-vivre, leur volait leurs défauts qu’elle convertissait en d’hypocrites vices ; et, autoritaire et sournoise, basse et couarde, elle mitraillait sans pitié son éternelle et nécessaire dupe, dire que je vais rentrer dans la turpide et servile cohue du siècle ! Il appelait à l’aide pour se cicatriser, les consolantes maximes de Schopenhauer, il se répétait le douloureux axiome de Pascal, "L’âme ne voit rien qui ne l’afflige quand elle y pense", mais les mots résonnaient, dans son esprit comme des sons privés de sens, son ennui les désagrégeait, leur ôtait toute signification, toute vertu sédative, toute vigueur effective et douce.
Il s’apercevait enfin que les raisonnements du pessimisme étaient impuissants à le soulager, que l’impossible croyance en une vie future serait seule apaisante.
Un accès de rage balayait, ainsi qu’un ouragan, ses essais de résignation, ses tentatives d’indifférence. Il ne pouvait se le dissimuler, il n’y avait rien, plus rien, tout était par terre ; les bourgeois bâfraient de même qu’à Clamart sur leurs genoux, dans du papier, sous les ruines grandioses de l’Église qui étaient devenues un lieu de rendez-vous, un amas de décombres, souillées par d’inqualifiables quolibets et de scandaleuses gaudrioles. Est-ce que, pour montrer une bonne fois qu’il existait, le terrible Dieu de la Genèse et le pâle Décloué du Golgotha n’allaient point ranimer les cataclysmes éteints, rallumer les pluies de flamme qui consumèrent les cités jadis réprouvées et les villes mortes ? Est-ce que cette fange allait continuer à couler et à couvrir de sa pestilence ce vieux monde où ne poussaient plus que des semailles d’iniquités et des moissons d’opprobres ? »

Joris-Karl Huysmans, À Rebours

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

27/06/2013

Tout en découvrant les propriétés mathématiques de la nature, ils ont recouvert ou négligé tout ce qui en elle échappe à la mathématisation

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ce n'est pas pour l'ici-bas [que les modernes] ont abandonné l'au-delà, ce n'est pas au bénéfice de notre monde  qu'ils ont perdu l'autre monde. S'il est vrai qu'ils ne vont plus chercher au ciel ni Dieu ni les Idées, ils n'ont pas, pour autant, conservé ou restitué à leur séjour sur terre son épaisseur sensible ni la plénitude de ses droits. Ils n'ont pas lâché l'ombre surnaturelle pour la proie terrestre. "Compère le coup de pouce"(1) l'atteste : ils ont lâché l'ombre pour l'ombre. Ils n'ont pas rejoint, saisi ou étreint l'être vrai, ils ont taillé "un vêtement d'idées" dans "l'infinité ouverte des expériences possibles"(2). Tout en découvrant les propriétés mathématiques de la nature, ils ont recouvert ou négligé tout ce qui en elle échappe à la mathématisation. Et ils prennent aujourd'hui "pour l'être vrai ce qui est méthode"(3). Deus absconditus, disent-ils avec fierté ou la tristesse au coeur, alors que, pour être exact, c'est d'un mundus absconditus, d'une occultation, d'une dématérialisation, d'un délaissement du monde sensible, qu'il faudrait parler.

Car Dieu n'a pas disparu, il a été remplacé : l'homme absous de sa finitude, dégagé des chaînes de l'expérience terrestre et qui, "au lieu d'observer les phénomènes naturels tels qu'ils lui sont naturellement donnés, place la nature dans les conditions de son entendement"(4), cet homme n'est rien d'autre que le successeur de Dieu. Il y a donc bien, inavouée mais déterminante, clandestine mais caractéristique, une métaphysique moderne. L'âge positif est, en fait, tout empli de religiosité : "Ce siècle qui se dit athée ne l'est point, il est autothée. Ce qui est un bien joli mot, et bien de son temps. Il s'est littéralement fait son propre Dieu et sur ce point il a une croyance ferme." (5)

(...)

Impossible, en d'autres termes, d'être moderne, c'est-à-dire de faire confiance au temps. La guerre inflige un désaveu impitoyable à la religion du progrès. Elle montre alors à Péguy que tout bouge sans que rien ne change, que les découvertes se succèdent et que les inventions s'accumulent mais que l'histoire bégaie, que le développement fulgurant des techniques se combine avec le surplace accablant de l'horreur. Il faut donc en rabattre : la barbarie n'est pas la préhistoire de l'humanité mais l'ombre fidèle qui accompagne chacun de ses pas. Et quand notre monde, par le fait même de se dire moderne, affirme qu'après c'est toujours qu'avant, il généralise abusivement le modèle cumulatif des sciences et des techniques à tous les secteurs de l'existence.

(...)

Mais la réflexion de Péguy n'est pas arrêtée à cette critique – toujours actuelle – du positivisme – toujours renaissant. Née du constat que le progrès n'adoucit pas les moeurs, que le rapport de l'homme à l'homme n'est pas réglé sur le rapport de l'homme aux choses et que le savoir qui accroît le pouvoir n'accroît pas nécessairement la justice ou la sociabilité, elle s'est développée et prolongée en interrogation sur la nature même du progrès. On l'a vu plus haut, ce que Péguy a découvert, c'est que la technique ouvre un monde où l'être se définit par sa plasticité ("En ce temps-ci une humanité moderne est libre. Elle est libre de travailler une matière moderne relativement aisée, interchangeable, prostitutionnelle, qui peut servir à tout et à tout le monde..."). Moderne, autrement dit, est la substitution progressive de la manipulation au scrupule et au respect. A chaque invention, à chaque invention, à chaque avancée, la sphère de l'indisponibilité se rétrécit. Ce qui était non malléable, non monnayable, non comptable, non calculable, le devient. Ce qui était hors commerce est désormais négociable. L'irréductible est réduit. Les résistances du réel et de l'idéal sont l'une après l'autre vaincues jusqu'à ce que s'étende, de développement en développement, le règne sans partage d'une muflerie illimitée.

(...)

A l'ère de la mobilisation totale, l'être humain lui-même est, comme le métal, un "fusible matière moderne, ductile, malléable, souple, docile, interchangeable, allante et venante"... Tel est le sens profond du soldat inconnu : le héros traditionnel qui survivait dans la mémoire des hommes par la prouesse singulière attachée à son nom cède la place au héros sans nom dont la vertu "réside dans le fait qu'on puisse le remplacer et que derrière chaque tué la relève se trouve déjà en réserve"(6).

----------------

(1) Péguy, Un poète l'a dit, in Oeuvres en prose complètes, II, p.835.
(2) Husserl, La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale, Gallimard, 1976, p.60.
(3) Ibid.
(4) Hannah Arendt, Condition de l'homme moderne, Calmann-Lévy, 1983, p.299
(5) Péguy, Un poète l'a dit, op. cit., p.855.
(6) Jünger, Le travailleur, Christian Bourgois, 1989, pp.194-195.»

Alain Finkielkraut, Le mécontemporain

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La fidélité...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ce qu’elles (les femmes) appellent leur constance et leur fidélité, je l’appelle, moi, léthargie de l’habitude ou manque d’imagination. La fidélité dans la vie affective correspond à l’esprit de suite dans la vie intellectuelle : c’est simplement un aveu d’échec. La fidélité ! Il faudra que je l’analyse un jour. La passion de la possession s’y trouve. Il y a tant de choses que nous jetterions si nous ne craignions pas que d’autres les ramassent. »

Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

26/06/2013

Couper des têtes et remplir des prisons

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« S’indigner consiste à rejeter dans l’indignité les gens qui nous indignent, par conséquent à les chasser du Bien, où l’on trône avec notre dignité, pour les rejeter dans le Mal, où ils pourriront avec les autres indignes. C’est une arme idéologique qu’ont utilisée tous les dictateurs. L’indignation a beaucoup servi aux inquisiteurs de l’Eglise catholique, ainsi qu’aux révolutionnaire et contre-révolutionnaires français. Et russes. S’indigner c’est se hisser sur le socle de la morale pour faire la loi idéologique et politique, celle-ci consistant le plus souvent à couper des têtes et à remplir des prisons. »

Patrick Besson, Patrick Besson au Point

23:38 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Mes prochaines années ne sont plus si nombreuses. Mais je m’obstine à leur faire confiance.

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Arriéré ? Peut-être. Réactionnaire ? Oui et non.
Je ne suis pas hostile à réagir contre la bêtise - et d’abord contre la mienne -, contre l’oubli qui menace, contre la laideur qui monte dans notre monde affolé par l’argent, contre les risques de destruction d’une planète dont le sort est désormais entre nos mains. Mais les regrets ne sont pas mon fort. Je laisse le temps couler et, si j’osais, je l’encouragerais à le faire. Conservateur ? Sûrement pas. J’ai été fasciné par le passé, par le passé de l’univers, par le passé des hommes, par mon propre passé. Au plaisir de Dieu est un éloge ironique des miens et de ma jeunesse parmi eux. Mais ce qui m’a toujours intéressé, beaucoup plus que le passé et presque autant que le présent, c’est l’avenir. La vie n’est faite que de matins. Le monde n’est fait que d’enfants. J’ai fait mienne la formule de Woody Allen : "L’avenir m’intéresse parce que c’est là que j’ai l’intention de passer mes prochaines années." Mes prochaines années ne sont plus si nombreuses. Mais je m’obstine à leur faire confiance. Puisque nous sommes dans le temps, il faut aimer notre destin. Amor fati. »

Jean d'Ormesson, Qu'ai-je donc fait

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Une société de gogos

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« La vieille dame à qui vous offrez, dans l’escalier du métro, de porter sa valise, refuse en serrant la main avec énergie sur la poignée de ladite: elle vous a pris pour un détrousseur. La jeune femme à qui vous offrez votre place dans l’autobus ne remercie jamais et s’assoit d’un air pincé: elle vous a pris pour un entreprenant. Le monsieur à qui vous offrez, sur le trottoir, un billet de cinéma qui vous est resté pour compte, parce que Gaby ne veut pas voir de films tristes, et que le cinéma ne rembourse pas, fait beaucoup d’embarras et finalement refuse: il vous a pris pour le revendeur marron d’un billet périmé qui va lui causer des ennuis. Le gosse à qui vous offrez, sur le trottoir, un billet de cirque qui vous a été donné par une oeuvre de bienfaisance, vous regarde avec trouble, pique un fard, refuse, « justement il a une course à faire »: il vous a pris pour un satyre. Bref, à tous les échelons, cette société vit sur ses gardes, contre tout et contre tous, âprement défendu par devant, mais ouverte à qui veut par derrière. Car – et c’est sans doute le plus curieux de l’histoire – cette société de défiants et aussi une société de gogos. »

Henry de Montherlant, Le fichier parisien

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

25/06/2013

Sous l’Ancien Régime, les lois de l’Église garantissaient au travailleur 90 jours de repos...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Sous l’Ancien Régime, les lois de l’Église garantissaient au travailleur 90 jours de repos (52 dimanches et 38 jours fériés) pendant lesquels il était strictement défendu de travailler. C’était le grand crime du catholicisme, la cause principale de l’irréligion de la bourgeoisie industrielle et commerçante. Sous la Révolution, dès qu’elle fut maîtresse, elle abolit les jours fériés et remplaça la semaine de sept jours par celle de dix. Elle affranchit les ouvriers du joug de l’Église pour mieux les soumettre au joug du travail.



La haine contre les jours fériés n’apparaît que lorsque la moderne bourgeoisie industrielle et commerçante prend corps, entre les XVe et XVIe siècles. Henri IV demanda leur réduction au pape ; il refusa parce que "l’une des hérésies qui courent le jourd’hui, est touchant les fêtes" (lettre du cardinal d’Ossat). Mais, en 1666, Péréfixe, archevêque de Paris, en supprima 17 dans son diocèse. Le protestantisme, qui était la religion chrétienne, accommodée aux nouveaux besoins industriels et commerciaux de la bourgeoisie, fut moins soucieux du repos populaire ; il détrôna au ciel les saints pour abolir sur terre leurs fêtes.



La réforme religieuse et la libre pensée philosophique n’étaient que des prétextes qui permirent à la bourgeoisie jésuite et rapace d’escamoter les jours de fête du populaire. »

Paul Lafargue, Le droit à la paresse

22:46 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Aviver les antipathies profondes...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« C’est un des traits les plus singuliers de notre Etat contemporain : la suppression des distances matérielles, qui paraît confondre les races humaines en les frottant les unes aux autres, ne fait qu’établir et aviver leurs antipathies profondes, comme la suppression des distances légales et constitutionnelles qui fait confondre les classes, en fait mieux éclater les dissentiments radicaux. »

Charles Maurras, Gazette de France, 8 juillet 1902

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Le rêve de ce rassemblement, ce serait cela le fascisme

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« A la fin de la première guerre mondiale, il y avait chez certains hommes de droite le désir de dépasser les classifications d’autrefois et de réconcilier le nationalisme avec un certain socialisme. Livrée sans freins aux mécanismes des marchés, la société économique était d’une cruauté intolérable pour les pauvres. L’Etat avait le devoir de se substituer aux individus défaillants pour assurer un minimum de justice. A l’inverse du communisme qui s’attaquait à la nature même de la société et de l’homme, il fallait imaginer un socialisme moderne qui, tout en mettant un terme à la misère des travailleurs, préserverait les hiérarchies, les inégalités qui sont des faits intangibles.

L’ordre réactionnaire était une apparence stéréotypée qui prolongeait l’existence d’injustices odieuses. Le désordre révolutionnaire en revanche, était une agitation qui s’efforçait de tout niveler. Entre cet ordre imposé par l’esprit mercantile, et ce désordre entretenu par l’esprit de subversion, il importait de découvrir une voie moyenne, en rendant populaires les valeurs d’ancien régime qui étaient dignes de survivre – les métiers et leurs fêtes, les liens de maître à disciple, l’énergie vitale, les élites de la compétence – et en rendant nationales les traditions anarcho-syndicalistes et proudhoniennes – le compagnonnage, les chouanneries ouvrières en lutte pour le pain.

Dans le même temps, à gauche, d’autres hommes accueillaient un projet identique. La machine infernale du communisme avait manqué de les broyer. Ce que le dogmatisme de la secte avait d’accablant, ce que son faux internationalisme avait d’étroitement russe les indisposaient, leur inspiraient du dégoût. La nation, libérées de ses rengaines d’agioteurs, de grippe-sous et de ganaches étoilées, devenait une idée neuve. C’était, pour eux, un nouveau bonheur communautaire. Les antidémocrates, qu’ils fréquentaient, leur redisaient que la route du socialisme ne passerait jamais par le Palais Bourbon. Jadis, les syndicalistes libertaires avaient pendu Marianne à la Bourse du Travail. C’était cela qu’il fallait tenter de refaire. La hardiesse des minorités balayerait les scléroses, les combines, tout ce qui incarne la république de la peur, des salons et des académies.

Drieu, qui avait attendu en vain le six février sur la place de la Concorde la rencontre des foules hostiles, écrivait au lendemain de l’émeute avortée : "La corruption démocratique de la masse de gauche annihile le mouvement des braves d’extrême-gauche, et, d’ailleurs, la subversion déclarée des braves d’extrême-gauche rejetterait la masse de gauche sur la masse de droite. Le monde d’extrême-gauche est incapable de renverser le capitalisme, comme le monde d’extrême-droite est incapable de renverser la démocratie parce que les deux monde moyens de droite et de gauche se tiennent". Mais, ensemble, dans la fraternité d’un combat nouveau, réunis contre les bureaucrates staliniens et les commis de la technocratie, ne pourraient-ils pas venir à bout des fantômes du vieux monde ? Le rêve de ce rassemblement, ce serait cela le fascisme. »

Pol Vandromme, L’Europe en chemise. L’extrême-droite dans l’entre-deux-guerres

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

24/06/2013

La tragédie essentielle n’est pas de savoir quels dangers nous menacent, mais de définir d’abord ce qu’ils menacent en nous...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

«  Quand nous parlons d’un temps dramatique, ce mot a un sens précis : il veut dire que nous sommes pris dans une alternative qui ne nous permet plus d’exister médiocrement ; il nous faut vivre plus puissamment, ou bien disparaître, nous surpasser ou nous abolir. (…) La tragédie essentielle n’est pas de savoir quels dangers nous menacent, mais de définir d’abord ce qu’ils menacent en nous, car il importerait assez peu que nous fussions détruits, si nous avions rendu cette destruction légitime en ne valant presque rien. »

Abel Bonnard, Les Modérés

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ces jeunes femmes qui se rendent à un bureau, sans vocation, ayant oublié jusqu’au poids de leur servitude...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ces jeunes femmes qui se rendent à un bureau, sans vocation, ayant oublié jusqu’au poids de leur servitude, me bouleversent ; je ne puis les croiser dans le métro, le front absent, portant sous leurs bras des livres interminables où chaque signet marque un repas solitaire, sans éprouver un bref dégoût pour les hommes, dont je ne m’abstrais pas. Elles paient pour d’autres créatures qui arrondissent des bouches énormes pour le baiser et, au-delà de chacun de nous, sans bien nous distinguer parfois, cherchent à gober toute la vie entre leurs lèvres de carpes centenaires. »

Antoine Blondin, Un Singe en Hiver

11:07 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

23/06/2013

La présence de l’harmonie éternelle

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Il y a des instants, dit-il, ils durent cinq ou six secondes, quand vous sentez soudain la présence de l’harmonie éternelle, vous l’avez atteinte. Ce n’est pas terrestre ; je ne veux pas dire que ce soit une chose céleste, mais que l’homme sous son aspect terrestre est incapable de la supporter. Il doit se transformer physiquement ou mourir. C’est un sentiment clair, indiscutable, absolu… Et une joie si immense avec ça ! Si elle durait plus de cinq secondes, l’âme ne la supporterait pas et devrait disparaître. En ces cinq secondes je vis toute une vie et je donnerais pour elle toute ma vie, car elles le valent. »

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, Les Possédés

15:37 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

21/06/2013

Con comme un écolo

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Une engeance politique a émergé ces dernières années, dont le programme se résume à la plus grosse arnaque depuis la révolution russe : l’écologie. Démagogique au possible, cette idéologie de veaux prébubères a attiré dans ses filets biologiques tout ce que la planète comptait de frileux de l’engagement en créant une nouvelle morale plus duraille que le catéchisme des jésuites : la connerie durable. Pour lapremière fois depuis la Révolution française, on a des militants dont les principaux combats consistent à prendre un vélo pour aller faire leurs courses, à fermer le robinet en se brossant les dents et à jeter la bonne ordure dans la bonne poubelle dans des quartiers où la misère est insupportable. L’essentiel de leurs préoccupations consiste à savoir où jeter le papier, le carton, le verre et le plastique. Ce qui semble être le cœur de leur engagement suffit à satisfaire leur goût de la rébellion. Ces nouveaux cons vivent entre eux, forment de douces milices dans les quartiers et, au nom de la gauche militante et verte, créent plus encore de disparité sociale dans la cité. Plus ils font d’efforts pour être appréciés par les pauvres de quartiers, plus ils sont haïs pour leur pédantisme cynique. Préférer pédaler alors qu’on peut se payer une caisse est un concept tellement absurde pour celui qui rame au RSA, qu’il donne envie de niquer tous les Vélib’ de la terre, au grand dam de ces écolos qui ne peuvent piger la frustration des vrais pauvres. Ce sont des militants qui se battent bec et ongles pour obtenir une « recyclerie » ou un jardin potager dans des villes comptant 50% de chômage chez les jeunes, des militants récoltant leurs tomates sans engrais dans des départements sans écoles et sans crèches.
Rien n’est plus important que la préservation de la nature. Les Verts ont bien essayé de responsabiliser leur discours, mais l’écologie est antinomique à toute forme d’évolution. Les super héros écologistes totalement dogmatiques et sectaires, tels que Hulot ou autres Arthus-Bertrand, ne distinguent même plus la gauche de la droite, et s’allieraient aux pires fascistes si ceux-ci promettaient des pistes cyclables. Les braves gens qui auraient eu tendance à jouer la carte de la solidarité avec les plus démunis d’entre nous, comme le faisaient les gens de gauche, se sont laissés trimbaler par ces nouveaux cons, ils cultivent aujourd’hui les trois mètres carrés de leurs putains de jardins partagés et croient faire de la résistance en bouffant les poireaux issus de l’agriculture biologique.
Les Verts ne sont pas à un paradoxe près. Grâce à l’influence des Grünen, par exemple, l’Allemagne est aujourd’hui le pays le plus polluant d’Europe. Leur obstination maladive à combattre le nucléaire les a conduits à conserver des mines de charbon à ciel ouvert aussi grandes que Paris et à participer ainsi honteusement au réchauffement climatique. Peu leur importe : le dogme n’a pas été trahi, tous les barbus peuvent marcher la tête haute. L’ordre des priorités s’est trouvé brusquement bousculé pour satisfaire ces mous du bulbe. La promesse d’une voiture électrique dans une campagne électorale devient soudain plus importante que l’établissement de logements sociaux, et la promesse de constructions de maisons en bois équipées de panneaux solaires et de chiottes sèches est devenue l’essentiel d’un programme politique, bien avant la promesse de places en crèches pour tous les mômes.
L’écologie est un luxe de bourgeois. Pour y adhérer, il faut avoir réglé tous les autres soucis de survie. Ce luxe est imposé à tous au nom d’une nouvelle morale, qui considère que jeter un papier par terre devrait être sanctionné plus durement que voler dans la poche de son voisin. »

Étienne Liebig, Les nouveaux cons

23:29 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (3) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Des oeuvres subversives...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Les grandes oeuvres du théâtre sont toujours des oeuvres subversives qui mettent en cause l'ensemble des croyances, des idées, des modèles, l'image de l'homme, d'une société et d'une civilisation. Certes, avec le temps, les histoires de la littérature effacent ce conflit ou du moins feignent de l'ignorer, pressées qu'elles sont de tranquilliser le lecteur en présentant des oeuvres dans la suite apaisante d'une histoire et d'un déroulement. Mais à l'origine, toute grande oeuvre, même si elle ne s'affirme pas complètement, frappe, gêne, révolte. »

Jean Duvignaud et Jean Lagoutte, Le Théâtre contemporain, Culture et contre-culture

11:10 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La transformation d’un mal indéfini, ignoble, en un mal restreint

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ce qui est en jeu, c’est la reconnaissance qu’un mal a été commis dans le monde.(…) C’est la reconnaissance, enfin que ce mal est limité ; c’est la transformation d’un mal indéfini, ignoble, en un mal restreint, défini dans l’espace et dans le temps. C’est une tentative d’interruption du déroulement illimité des chaînes causales ; de la reproduction sans fin du malheur et du mal. Certains vont plus loin, et tentent de prendre appui sur ce mal pour se construire ; ils font de leur géniteur indigne un absolu contre-modèle. Certains vont vraiment loin, et je sais que ma sœur (j’espère qu’elle me pardonnera de la citer) est allée jusqu’à refuser de travailler, pour se consacrer à sa seule vocation de mère de famille ; et je sais qu’elle y est parvenue. Une sur mille, peut-être, y serait parvenue ; mais il n’y a pas de fatalité. On peut briser la chaîne de la souffrance et du mal. »

Michel Houellebecq, in Ennemis publics, Correspondance avec Bernard-Henri Lévy

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (5) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

20/06/2013

Cette connaissance où destin et liberté se rencontrent comme sur le fil du rasoir...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« A l’extrême proximité de la mort, du sang et de la terre, l’esprit revêt des traits plus durs et des couleurs plus profondes. L’existence est à tous ses niveaux plus crûment menacée, jusqu’à cette forme de faim presque tombée dans l’oubli, devant laquelle toute réglementation économique est en défaut et qui ne laisse à la vie d’autre choix que la disparition ou la conquête.



Une attitude qui veut être à la hauteur de ces décisions doit, au sein d’une destruction dont l’ampleur reste imprévisible, parvenir au point où l’on peut éprouver un sentiment de liberté. Au nombre des signes distinctifs de la liberté se range la certitude de participer au noyau le plus intime du temps - certitude qui, merveilleusement, donne des ailes aux actes et aux pensées, et dans laquelle la liberté de celui qui agit se connaît comme expression particulière de la nécessité. Cette connaissance où destin et liberté se rencontrent comme sur le fil du rasoir est le signe que la vie joue encore son jeu et se conçoit comme porteuse d’une puissance et d’une responsabilité historiques. »

Ernst Jünger, Le travailleur

15:55 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Sa pensée ne devait pas végéter sur des systèmes d’idées...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Wilfrid faisait le serment de négliger les actions de ses contemporains, afin de n’en pas souffrir. Que l’époque fût bonne ou mauvaise, il trouverait des corps féminins pour une grande quantité de noces, et, à chaque heure nouvelle, des occupations dignes d’enrichir sa connaissance de lui-même et son art de jouir des cadeaux de la terre. D’autres hommes, si cela les amusait, pourraient s’occuper des gestes du gouvernement et se mettre à feu et à sang en l’honneur des théories politiques. Wilfrid ne croyait ni à la politique, ni à la philosophie. Il croyait à l’océan Atlantique, aux oranges, aux fables de La Fontaine, à tout ce qui se touche, s’entend, se goûte, se respire et se voit. Sa pensée ne devait pas végéter sur des systèmes d’idées, mais rechercher les méthodes les plus sûres pour savoir le bon usage des êtres et des choses, femmes, loups au fenouil, navires sur la route de Sydney. »

Kléber Haedens, Salut au Kentucky


07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

19/06/2013

La France exécutait devant l’Europe entière une grossière pantomime...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« On assistait toujours à la vieille pitrerie des partis gesticulant des rôles. (…) Les finances étaient pillées, l’économie saccagée, la plus grossière démagogie substituée à toutes les règles du gouvernement des hommes. La politique extérieure, où la gabegie avait des conséquences encore plus sinistres mais moins immédiates, était le fort de ces messieurs, le terrain où ils ne faiblissaient jamais, où ils pouvaient se livrer à toutes leurs lubies et tout leur sectarisme, où leur vénalité devenait la plus profitable, où ils cueillaient à foison les arguments jetés aux prolétaires impatients et qui commençaient à soupçonner la comédie. (…) La France exécutait devant l’Europe entière une grossière pantomime, présentant un derrière fuyard et foireux quand elle devait montrer les dents, clamant qu’elle ne permettrait ni ceci ni cela, et dégringolant dans une trappe à guignol quand ceci ou cela s’était produit. »

Lucien Rebatet, Les Décombres

15:55 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Une vaste placidité...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Tout cela ressemblait à une vaste placidité. Paris tout entier exhalait l’épatement des viandes et des digestions, des loisirs fades et niais, le ruminement doux et bête de ce gros animal au repos que forment quatre millions endimanchés de bipèdes présumés pensants. »

Lucien Rebatet, Les Décombres

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

18/06/2013

On se suicide par respect pour la raison...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« On se suicide par peur de ce qui va être et il faudrait fouetter jusqu’au sang les gens qui osent flétrir cette peur, quand eux ils n’ont rien à craindre. On se suicide par respect pour la raison, quand l’âge ou la maladie enténèbrent la vôtre, et qu’y a-t-il de plus honorable que ce respect de la raison ? On se suicide par respect pour la vie, quand votre vie a cessé de pouvoir être digne de vous, et qu’y a-t-il de plus honorable que le respect de la vie ? On se suicide sans donner ses raisons, et peut-être sans raison, et on a le droit — le droit le plus sacré — de n’en pas donner : pourquoi un homme n’aurait-il pas le droit de renoncer sans explications à une vie qu’il n’a pas demandée ? Tout ce qu’on peut dire contre le suicide sort de cette case défaillante du cerveau de l’homme, d’où il tire des interdits terribles au bonheur. »

Henry de Montherlant, Les Carnets

15:55 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La vieillesse de Rembrandt

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Les dernières peintures de Rembrandt, singulièrement les portraits de lui-même vers soixante ans, où l’on est en présence d’un vieux clochard déguenillé, un chiffon sur la tête, de grosses mains aux ongles noirs, un air presque bête, lorsque je les contemplais dans ma jeunesse au Louvre, me faisaient venir les larmes aux yeux ; ils me dictaient ma vie, ils me représentaient mon avenir. Je pensais : "Pourvu que la prophétie soit juste !" Je les regardais avec plus d’envie encore que d’admiration, comme les petits ambitieux qui s’enthousiasment devant le caractère de Julien Sorel. Désirer la vieillesse de Rembrandt est bien une folie de l’adolescence, âge où l’on doute de tout ce qui est possible et de rien de ce qui est impossible, car il n’est pas à la portée du premier barbouilleur venu de mourir pauvre. »

Jean Dutourd, Le vieil homme et la France

10:09 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

17/06/2013

Mitterrandie

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Paris, 22 février 2005 -

Et puis j’ai apprécié que Jacques Attali révèle qu’à la table où il déjeuna lui-même, il y a trente ans, avec René Bousquet, sans savoir qui était cet homme si "impressionnant", il y avait Henri Frenay, le néo-nazi bien connu. Oui, j’ai apprécié que Jacques Attali se reprenne et qu’il reconnaisse enfin que François Mitterrand avait raison : 1’histoire ne s’écrit pas après coup, quand les dés sont jetés et que la Résistance ne se joue plus qu’aux Folies-Bergère.
J’ai oublié, Morlino me le rappelle ce matin, de révéler que Mireille et Emmanuel Berl, antisémites notoires, nous parlaient de Bousquet avec reconnaissance, pour ne pas dire affection. Cela ne l’innocente pas, mais devrait inviter les juges de François Mitterrand à la modération, sinon à l’indulgence.
Seul de la Mitterrandie historique, André Rousselet, que je n’ai pourtant jamais rencontré parmi le cercle des intimes du président, seul cet homme-là qui ne me doit rien, c’est le moins qu’on puisse dire, vient de me téléphoner pour me remercier d’avoir dit ce que j’ai dit. Pas un mot gentil de Danielle, rien, plus un signe d’elle depuis qu’elle m’a rendu du bout des doigts un chèque de cinq cent mille francs, le même que j’avais eu le mauvais goût de signer à sa demande pour faire sortir son fils de prison.
"Plus je connais Danielle Mitterrand, plus j’aime Anne Pingeot." Cette confidence douloureuse d’André Rousselet, qu’il ne m’a pas interdit de rapporter, je la rapporte, quoi qu’il m’en coûte, parce que je suis peiné que Danielle ne me pardonne pas d’être un garçon trop sentimental. »

Pascal Sevran, Le privilèges des jonquilles

15:55 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ce qui expliquait le succès, et à vrai dire la position dominante, de l’Occident dans le monde

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« L’une des choses qu’on nous demandait d’examiner était ce qui expliquait le succès, et à vrai dire la position dominante, de l’Occident dans le monde. Nous avons étudié tout ce que nous avons pu d’un point de vue historique, politique, économique et culturel. Au début nous pensions que c’était parce que vous aviez de meilleurs canons que nous. Puis nous avons pensé que c’était parce que vous aviez le meilleur système politique. Ensuite nous nous sommes focalisés sur votre système économique. Mais au cours des vingt dernières années, nous nous sommes rendu compte que le cœur de votre culture est votre religion : le christianisme. C’est pour cela que l’Occident est si puissant. Le fondement moral chrétien de la vie sociale et culturelle a été ce qui a rendu possibles l’émergence du capitalisme et ensuite la transition réussie vers une vie politique démocratique. Nous n’avons aucun doute la dessus. »

David Aikman, Jesus in Beijing

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

16/06/2013

Communisme et... cannibalisme

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Le 26 mai, le Comité Révolutionnaire du district se réunit pour faire le point sur la lutte des classes. Après avoir rendu compte des progrès obtenus (plus de cent vingt meurtres), les responsables des comités révolutionnaires de chaque préfecture et les chefs des Forces Armées préfectorales furent nombreux à réclamer l’arrêt des parades de luttes [exécutions publiques par lapidation ou à coup de bâtons]. Ce fléchissement, cette baisse d’enthousiasme provoquèrent le vif mécontentement du premier responsable adjoint du Comité Révolutionnaire du district et commissaire politique des Forces Armées Révolutionnaires du district, Sun Ruizhang, qui exhorta ses troupes par ces mots : "Ne soyez pas si timorés ! Que craignez-vous ? Si nous n’agissons pas ainsi, nous n’arriverons pas à écraser les ennemis de classe ni à affermir suffisamment la volonté de combat du peuple ! N’ayez pas peur, continuons à faire des parades de lutte !"

Après ce dernier meeting, la campagne d’assassinats et de cannibalisme dans la préfecture de Wuxuan entra dans sa phase culminante.

L’histoire suivante constitue un cas typique de dépeçage d’une victime encore vivante : Un jour de mai 1968, Gan Kexing, membre de la septième équipe de production du village de Datuan, dans la préfecture de Tongwan, organisa une séance de lutte contre Gan Dazuo. Celui-ci fut ensuite traîné jusqu’en bordure d’un champ voisin. Gan Yewei lui cria l’ordre de s’agenouiller, puis lui asséna un coup de bâton sur la tête. Gan Dazuo vivait encore lorsque Gan Zuyang lui enleva le pantalon pour lui couper les organes génitaux. Gan Dazuo supplia : "Attends que je sois mort pour me découper !" Mais Gan Zuyang continua à lui trancher les parties sexuelles tandis que sa victime se débattait en poussant des cris déchirants. Gan Weixing et quelques autres se précipitèrent pour prélever la chair des cuisses, puis Gan Deliu ouvrit le ventre et extirpa le foie. Les autres participants se ruèrent alors pour enlever toute la chair restante sur le corps de Gna Dazuo.

Voici maintenant un exemple caractéristique de repas communautaire cannibale : le 10 juin 1968, à la préfecture de San Li, devant la porte marquant l’entrée dans le canton de Shangjiang, se tînt une grande séance de lutte, au cours de laquelle furent tués à coups de baton Liao Tianlong, Liao Jinfu, Zhongzhenquan et Zhong Shaoting. La chair des quatre corps fut découpée puis transportée jusqu’aux cuisines de la brigade, ou on la fit cuire dans deux grandes marmites. Vingt à trente personnes en mangèrent. Au vu et au su de tous, on avait donc osé faire cuire de la chair humaine, aux sièges mêmes des gouvernements cantonaux et préfectoraux, puis organiser sur place un repas communautaire ! Les masses ne devraient pas oublier un tel exemple ! »

Zheng Yi, Stèles rouges : Du totalitarisme au cannibalisme

22:57 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

14/06/2013

Dans le monde postmoderne, le changement ne se produit plus par explosion, mais par implosion

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Dans le monde postmoderne, le changement ne se produit plus par explosion, mais par implosion. La vie commence à changer lorsqu’un nombre suffisant de citoyens se détournent du jeu institutionnel parce qu’ils considèrent que "la vraie vie est ailleurs". Ce dont nous avons le plus besoin aujourd’hui, ce n’est pas de révolutionnaires - ces figures emblématiques de la modernité -, mais de rebelles. D’hommes et de femmes sur qui les slogans à la mode glissent comme la pluie sur les canards, tout simplement parce qu’ils ont choisi de penser et de vivre autrement. »

Alain de Benoist, Entretien avec le Magazine allemand "Zinnober"

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook