29/03/2013
La vie humaine n'est qu'un songe
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« Le 26 Mai 18..
(...) La vie humaine n'est qu'un songe ; c'est ce que beaucoup ont pensé et cette idée ne cesse de me poursuivre. Quand je considère les étroites limites dans lesquelles sont considérées les facultés actives et intellectuelles de l'homme ; quand je vois que tous leurs efforts s'épuisent à satisfaire des besoins, qui n'ont d'autres buts de prolonger notre malheureuse existence ; que toute notre tranquillité, sur certains points de la science, n'est qu'une résignation fondée sur des rêves, produite par cette illusion qui couvre les murs de notre prison de peintures variées et de perspectives lumineuses ; tout cela rend muet, mon ami ; je rentre en moi-même, et j'y trouve un monde ! mais un monde fantastique, crée par des pressentiments, de sombres désirs et qui n'a aucune vivante action. Couvert d'un nuage épais, tout nage, tout flotte devant moi, et je m'enfonce en souriant dans ce chaos de rêves.
Gouverneurs, pédagogues, instituteurs, tous sont d'accord que les enfants ne savent ce qu'ils veulent. Mais que nous autres, grands enfants, parcourons ce globe en chancelant, sans savoir d'où nous venons, où nous allons ; que comme les petits, nous agissons sans but ; que comme eux, nous nous laissons mener par des gâteaux, des bonbons et la verge, c'est ce que personne ne veut croire volontiers, et à mon avis cependant cela crève les yeux.
Au reste, je t'accorde bien volontiers ( car je sais ce que tu vas me répondre ) que ceux-là sont les plus heureux qui, comme les enfants, vivent au jour la journée, traînent leur poupée çà et là, l'habillent, la déshabillent, passent et repassent avec grand respect devant le tiroir où la maman tient les sucreries, et quand elle leur en donne, les dévorent avec avidité et se mettent à crier : encore, encore ! Oui, voilà de fortunées créatures ! Heureux aussi ceux qui donnent un titre imposant à leurs futiles occupations ou même à leurs passions, pour les présenter au genre humain comme des oeuvres de géant, entreprises pour son salut et sa prospérité. Encore une fois, grand bien leur fasse, à eux et à qui peut penser comme eux.
Mais celui qui dans son humilité reconnaît le néant où toutes ces vanités doivent aboutir ; celui qui voit le bourgeois aisé arranger son petit jardin comme un paradis ; qui voit le malheureux sous le fardeau qui l'accable, se traîner sur le chemin sans se rebuter ; et tous ceux enfin également intéressés à contempler une minute de plus la lumière du soleil ; celui-là, dis-je, est tranquille, il crée son univers en lui-même, il est aussi heureux d'être homme. Quelque limité que soit son pouvoir, il entretient toujours dans son coeur le doux sentiment de la liberté ; il sait qu'il peut quitter cette prison quand il lui plaira. »
Johann Wolfgang von Goethe, Les Souffrances du jeune Werther
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28/03/2013
Ressembler à mon dernier ennemi...
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« J'ai décidé de ne plus m'en prendre à personne depuis que j'ai observé que je finis toujours par ressembler à mon dernier ennemi. »
Emil Michel Cioran, De l'inconvénient d'être né
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La responsabilité de l'individu
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« Tous mes films, d'une façon ou d'une autre, répètent que les hommes ne sont pas seuls et abandonnés dans un univers vide, mais qu'ils sont reliés par d'innombrables liens au passé et à l'avenir, et que chaque individu noue par son destin un lien avec le destin humain en général. Cet espoir que chaque vie et que chaque acte ait un sens, augmente de façon incalculable la responsabilité de l'individu à l'égard du cours général de la vie. »
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27/03/2013
Un indéfectible lien que nous firent les larmes
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« Un jour que je versais amèrement des larmes, que défaite en douleur, mon espérance allait s'évanouir, - et j'étais solitaire, debout près de ce tertre aride qui, dans son lieu obscur et resserré, détenait l'être de ma vie - solitaire comme aucun solitaire n'avait jamais été - oppressé d'une angoisse indicible, à bout de force, plus rien qu'un souffle de détresse... Comme alors je quêtais des yeux quelque secours, ne pouvant avancer ni reculer non plus, un immense regret me retenait à la vie qui fuyait, s'éteignait ; - alors, du fond des bleus lointains, de ces hauteurs de ma félicité ancienne, vint un frisson crépusculaire, - et par un coup se rompit le lien natal : la chaîne de la lumière.
Loin s'est enfuie la terrestre splendeur, et avec elle ma désolation : - le flot de la mélancolie est allé se résoudre en un nouveau, un insondable monde. O nocturne enthousiasme, toi le sommeil du ciel, tu m'emportas : - le site s'enlevait doucement en hauteur, et sur le paysage flottait mon esprit libéré de ses liens, né à nouveau. Le tertre n'était plus qu'un nuage de poussière, que transperçait mon regard pour contempler la radieuse transfiguration de la bien-aimée. L'éternité reposait en ses yeux - j'étreignis ses mains, et ce fut un étincellent, un indéfectible lien que nous firent les larmes. Les millénaires passaient au loin comme un orage. Et ce furent des larmes d'extase que je versai sur son épaule, au seuil de la vie nouvelle.
Ce fut là le premier, l'unique rêve, - et depuis lors, à jamais, je sens en moi une foi éternelle, immuable, en le ciel de la Nuit et sa lumière, la Bien-Aimée. »
Novalis, les Hymnes à la Nuit
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Jusqu'à quand pourrai-je mener mon existence "ironique" ?
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« Jusqu'à quand pourrai-je mener mon existence "ironique" ? C'est la seule question importante. C'est aussi la seule que je devrais m'interdire de me poser. Vivre l'instant. Vivre dans l'instant. Ne jamais songer au lendemain. »
« L'homme dyonisiaque n'aime pas échouer. Comme les autres, il cherche le triomphe, mais, rencontrant la défaite, il découvre avec terreur et ivresse que celle-ci peut être voluptueuse. Nihiliste par occasion et non par volonté. »
Gabriel Matzneff, Cette camisole de flammes, journal 1953-1962
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L’idée athée par excellence est l’idée de progrès
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« L’idée athée par excellence est l’idée de progrès, qui est la négation de la preuve ontologique expérimentale ; elle implique que le médiocre peut de lui même produire le meilleur.
Or toute la science moderne concourt à la destruction de l’idée de progrès et à établir que tout progrès vient du dehors. Darwin a détruit l’illusion de progrès interne qui se trouvait dans Lamarck. La théorie des mutations ne laisse subsister que le hasard et l’élimination. L’énergétique pose que l’énergie se dégrade et ne monte jamais; qu’elle se gaspille et ne s’accroît jamais; que rien ne monte sans qu’autre chose ne soit davantage descendu; et cela s’applique même à la vie végétale et animale.
Principe de l’usage de la science moderne en faveur de la véritable foi. Très important.
La sociologie et la psychologie ne seront scientifique que par un usage analogue de la notion d’énergie, usage incompatible avec toute illusion de progrès ; et alors elles resplendiront de la lumière de la vraie foi. »
Simone Weil, Cahier VIII
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26/03/2013
L'égalité, ce n'est pas important
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« La liberté et l'égalité, non seulement ne s'accordent pas, mais s'opposent résolument. En fait, seule la liberté compte. L'égalité, ce n'est pas important. Un homme intelligent n'a pas à souffrir de constater qu'il existe des gens plus beaux, plus riches et plus heureux que lui. L'essentiel, c'est ce que l'on est soi. »
Gabriel Matzneff, Cette camisole de flammes, journal 1953-1962
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L’ascèse corporelle est nécessaire pour rendre la terre du cœur apte à recevoir les semences spirituelles
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« L’ascèse corporelle est nécessaire pour rendre la terre du cœur apte à recevoir les semences spirituelles et à produire des fruits de la même espèce. Abandonner ou négliger les labeurs ascétiques, c’est rendre le sol impropre à être ensemencé et à produire du fruit : Les exagérer ou placer son espérance en eux est tout aussi nuisible ou même davantage que de les abandonner. L’abandon des observances ascétiques corporelles rend l’homme semblable à un animal, donnant libre cours et offrant un vaste champ d’action aux passions du corps, mais leur exagération le rend semblable aux démons, car elle favorise et renforce la prédisposition aux passions de l’âme. Ceux qui relâchent l’ascèse corporelle s’asservissent à la gloutonnerie, à la luxure et à la colère dans ses formes grossières. Ceux qui pratiquent une ascèse corporelle excessive, qui en font un usage déraisonnable ou qui mettent en elle toute leur espérance avec l’idée qu’elle leur confère mérite et dignité au regard de Dieu, tombent dans la vanité, la présomption, la fierté, l’orgueil, l’endurcissement, dans le mépris de leur prochain, le dénigrement et la condamnation des autres, dans la rancune, la haine, dans le blasphème, dans le schisme, dans l’hérésie, dans l’aveuglement spirituel et l’illusion démoniaque.
Estimons à leur juste valeur les pratiques ascétiques corporelles - elles sont des instruments indispensables pour acquérir les vertus - mais gardons-nous de prendre ces outils pour des vertus, de peur de tomber dans l’aveuglement et de nous priver de progrès spirituels par une fausse conception de l’agir chrétien. »
Saint Ignace Briantchaninov, Introduction à la tradition ascétique de l’Église d’Orient : Les miettes du festin
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25/03/2013
j'ai, moi aussi, la nostalgie d'une communauté chevaleresque, la nostalgie d'un Ordre
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« Mauriac écrit dans son dernier Bloc-notes de juin : "L'adolescence, dans les classes aisées, est fasciste d'instinct."
Très vrai. Pour un coeur de quinze ans, le refus de la chiennerie alentour, le refus de la société forgée par les adultes prend volontiers une forme dure, agressive, fasciste. Peut-être est-ce un mal, je n'en sais rien, mais à qui la faute, sinon à la merde petite-bourgeoise qui nous cerne de tous côtés ?
Et puis quoi ? Nous sommes des enfants perdus. Le fascisme, comme le scoutisme d'ailleurs dont il est le visage extrème, est une manière d'échapper à la solitude. Ni lorsque j'avais quinze ans ni aujourd'hui cette manière n'a été, n'est la mienne. Mais je la comprends, car j'ai, moi aussi, la nostalgie d'une communauté chevaleresque, la nostalgie d'un Ordre. »
Gabriel Matzneff, Cette camisole de flammes, journal 1953-1962
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La synchronie et l'entraînement
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« Entraînement est le terme choisi par William Condon pour désigner le processus qui se produit quand deux ou plusieurs individus s'engagent dans une relation mutuelle par l'intermédiaire de leurs rythmes et que ces rythmes se synchronisent. Condon et moi-même pensons qu'on finira par démontrer que la synchronie commence à partir de la myélinisation du nerf auditif, autrement dit, six mois après la conception d'un individu : le foetus commence alors à entendre. Immédiatement après la naissance, les mouvements du nouveau-né suivent le rythme de la voix de sa mère. L'enfant synchronise aussi ses mouvements avec la voix d'autres individus, quelle que soit la langue qu'ils parlent ! On peut donc considérer comme innée la tendance selon laquelle les individus se synchronisent avec les voix qu'ils entendent autour d'eux. Le rythme particulier qu'ils acquièrent dépend de leur environnement culturel au cours de l'apprentissage de ces modèles. On a donc de bonnes raisons de penser que des êtres humains normaux sont capables d'apprendre à se synchroniser avec n'importe quel rythme humain à condition que cet apprentissage ait lieu suffisamment tôt.
Manifestement, quelque chose d'aussi profond que le rythme, acquis par un individu au début de sa vie, élément enraciné dans l'ensemble des codes de comportement inné de l'organisme humain, et partagé par toute l'humanité, ne doit pas seulement être important, c'est probablement un des éléments essentiels qui contribuent à la survie de notre espèce. Il est tout à fait possible de découvrir dans l'avenir que la synchronie et l'entraînement sont encore plus essentiels à la survie des êtres humains que le sexe au niveau individuel, et aussi essentiels à leur survie que le sexe au niveau du groupe. Sans la capacité des êtres humains de s'entraîner mutuellement — ceci se produit dans certains types d'aphasie — il leur est pratiquement impossible de survivre. Le Dr Barry Brazelton, un pédiatre de Boston, s'est consacré pendant des années à l'étude de l'interaction entre parents et enfants dès la naissance; il a décrit les multiples et subtils niveaux de synchronie qui s'établissent entre eux dans les relations normales, et il affirme que des parents qui battent leurs enfants n'ont jamais appris à synchroniser leurs propres rythmes à ceux de leurs enfants. Le rythme fait tellement partie de la vie de chaque individu qu'il n'en remarque pratiquement pas l'influence sur son comportement. Quelque part, dans le processus de synchronie, existe un lien entre l'expérience consciente normale, et l'expérience dite métaphysique. Il n'y a qu'un pas de l'océan de rythmes dans lequel tous les individus sont mutuellement entraînés, aux théories plus contemporaines sur le phénomène de précognition. »
Edward T. Hall, La Danse de la vie : temps culturel, temps vécu
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24/03/2013
Avant la Renaissance, on concevait Dieu comme un son ou une vibration
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« Avant la Renaissance, on concevait Dieu comme un son ou une vibration. On comprend une telle conception parce que le rythme d'un peuple est vraisemblablement l'élément qui lie avec le plus de force les êtres humains entre eux. Je suis, en fait, arrivé à la conclusion que l'espèce humaine vit dans un océan de rythmes. Certains ne le perçoivent pas, alors que pour d'autres, au contraire, cela est tout à fait tangible : ce qui explique pourquoi certains compositeurs semblent vraiment capables de puiser dans cet océan, d'exprimer pour les autres des rythmes qui sont sentis, mais non encore exprimés, comme musique. Les poètes font la même chose, mais sous une forme différente. »
Edward T. Hall, La Danse de la vie : temps culturel, temps vécu
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La Lumière Incréée...
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« - Quand même, répondis-je, je ne comprends pas encore comment je puis être vraiment sûr d'être dans l'Esprit Saint ! Comment puis-je en moi-même reconnaître Sa véritable présence ? Petit Père Séraphim répondit : J'ai déjà dit, votre Théophilie, que c'était fort simple et vous ai raconté d'une façon détaillée comment les hommes peuvent être en la plénitude de l'Esprit Saint et comment il faut reconnaître Son apparition en nous. Alors, petit père, que voulez-vous de plus ?
- Il me faut, dis-je, pouvoir le comprendre mieux encore !
Alors Père Séraphim me serra fortement les épaules et dit :
- Nous sommes tous les deux en la plénitude de l'Esprit Saint ! Pourquoi ne me regardes-tu pas ?
- Je ne le puis, dis-je, petit Père car des foudres jaillissent de vos yeux. Votre face est devenue plus lumineuse que le soleil et mes yeux sont broyés de douleur !
- N'ayez pas peur, dit saint Séraphim. Vous êtes devenu aussi lumineux que moi ; vous êtes aussi, à présent, en la plénitude de l'Esprit Saint, autrement vous n'auriez pu me voir ainsi.
Et inclinant la tête vers moi, il me dit doucement à l'oreille : Remerciez le Seigneur de nous avoir donné Sa Grâce ineffable. Vous avez vu que je n'ai même pas fait un signe de croix ; seulement, dans mon coeur, en pensée, j'ai prié le Seigneur Dieu et j'ai dit : "Seigneur, rends-le digne de voir clairement avec ses yeux de chair la descente de l'Esprit Saint, comme Tu l'as fait voir à Tes serviteurs élus quand Tu daignas apparaître dans la magnificence de Ta Gloire !" Et voilà, petit père, Dieu exauça immédiatement l'humble prière de l'humble Séraphim ! Comment pourrions-nous ne pas Le remercier pour ce don inexprimable accordé à nous deux ?
Réalisez, petit père, que ce n'est pas toujours aux grands ermites que Dieu manifeste ainsi Sa Grâce. Telle une mère compatissante, cette Grâce de Dieu a daigné panser votre coeur douloureux par l'intercession de la Mère de Dieu elle-même.
Alors, pourquoi ne me regardez-vous pas dans les yeux ? Osez me regarder simplement et sans crainte ! DIEU EST AVEC NOUS !
Après ces mots, je regardai sa face et une peur surnaturelle encore plus grande m'envahit.
Représentez-vous la face d'un homme qui vous parle au milieu d'un soleil de midi. Vous voyez les mouvements de ses lèvres, l'expression changeante de ses yeux, vous entendez sa voix, Vous sentez que quelqu'un vous serre les épaules de ses mains, mais vous n'apercevez ni ses mains, ni son corps, ni le vôtre, mais seulement cette éclatante lumière qui se propage à plusieurs mètres de distance tout autour, éclairant la surface de neige recouvrant la prairie, et la neige qui continue à nous saupoudrer, le grand Staretz et moi-même. Qui pourrait imaginer mon état d'alors ?
- Que sentez-vous à présent ? demanda saint Séraphim.
- Je me sens extraordinairement bien !
- Mais... Comment cela, "bien" ? En quoi consiste ce "bien" ?
- Je ressens en mon âme un silence, une paix, tels que je ne puis l'exprimer par des paroles...
- C'est là, votre Théophilie, dit le petit Père Séraphim, cette paix même que le Seigneur désignait à Ses disciples lorsqu'Il leur disait: "Je vous donne Ma paix, non comme le monde la donne. C'est Moi Qui vous la donne. Si vous étiez de ce monde, le monde aurait aimé les siens. Je vous ai élus et le monde vous hait. Soyez donc téméraires, car J'ai vaincu le monde !"
C'est à ces hommes, que le monde hait, élus de Dieu, que le Seigneur donne la paix que vous ressentez à présent, "cette paix", dit l'Apôtre, "qui dépasse tout entendement."
L'Apôtre désigne ainsi cette paix parce qu'on ne peut exprimer par aucune parole le bien-être que ressent l'âme des hommes dans le coeur desquels le Seigneur Dieu l'enracine. Le Christ Sauveur l'appelle "Sa paix", venant de Sa propre générosité et non de ce monde, parce qu'aucun bonheur terrestre provisoire ne peut donner cette paix.
Elle est donnée d'En Haut par le Seigneur Dieu Lui-même, c'est pourquoi elle se nomme: "LA PAIX DU SEIGNEUR".
- Mais que ressentez-vous en plus de la paix ? demanda saint Séraphim.
- ...une douceur extraordinaire...
- C'est cette douceur dont parlent les Saintes Écritures : "Ils boiront le breuvage de Ta maison et Tu les désaltéreras par le torrent de Ta douceur". C'est cette douceur qui déborde dans nos coeurs et s'écoule dans toutes nos veines en un inexprimable délice. On dirait qu'elle fait fondre nos coeurs, les emplissant d'une telle béatitude qu'aucune parole ne saurait la décrire. Et que sentez-vous encore ?
- Tout mon coeur déborde d'une joie indicible.
- Quand le Saint Esprit, continua saint Séraphim, descend vers l'homme et le couvre de la plénitude de Ses dons, l'âme de l'homme se remplit d'une inexprimable joie, parce que le Saint Esprit recrée en joie tout ce qu'Il a effleuré 1 C'est de cette même joie dont parle le Seigneur dans l'Évangile : "Quand la femme enfante, elle est dans la douleur, car son heure est arrivée. Mais, ayant mis au monde un enfant, elle ne se souvient plus de la douleur. tant la joie d'avoir enfanté est grande.. Vous aurez de la douleur dans le monde, mais quand Je vous visiterai, vos coeurs se réjouiront et votre joie ne vous sera point ravie".
Pour autant qu'elle soit consolation, cette joie que vous ressentez à présent dans votre coeur, votre Théophilie, n'est rien en comparaison,de celle dont le Seigneur Lui-même a dit par le voix de Son Apôtre : "La joie que Dieu réserve à ceux qui l'aiment ne peut être vue, ni entendue, ni ressentie par le coeur de l'homme dans ce monde".
Ce ne sont que des "acomptes" de cette joie qui nous sont à présent accordés, et si déjà nous ressentons en nos coeurs douceur, jubilation et bien-être, que dire alors de cette autre joie qui nous est réservée dans le ciel à nous qui pleurons ici-bas.
Ainsi, votre Théophilie, vous aussi avez assez pleuré dans votre vie sur cette terre, et voyez par quelle joie vous console dès ici-bas le Seigneur. Maintenant, petit père, c'est à nous d'oeuvrer en accumulant les efforts, croissant de force en force pour atteindre la mesure de l'âge (maturité) dans l'accomplissement de l'oeuvre du Christ et pour que les paroles du Seigneur s'accomplissent en nous : "Ceux qui patienteront au nom du Seigneur changeront de force, obtiendront des ailes, tels des aigles, s'épancheront sans fatigue, partiront sans connaître jamais la faim, croissant de force en force, et le Dieu des dieux leur apparaîtra dans la Sion de sagesse et de visions célestes".
C'est alors que notre joie actuelle, trop petite et éphémère, nous sera donnée en sa plénitude sans que personne puisse nous la ravir et nous remplira de jouissances célestes inexprimables.
Que sentez-vous en plus de cela, votre Théophilie ?
- Une chaleur extraordinaire, répondis-je.
- Comment cela, chaleur ? Ne sommes-nous pas en pleine forêt, l'hiver, la neige sous nos pieds, qui nous recouvre d'une couche épaisse et continue à nous saupoudrer ? Quelle chaleur pouvez-vous ressentir ici ?
- Mais une chaleur comparable à celle d'un bain de vapeur à l'instant où son tourbillon vous enveloppe.
- Et l'odeur que vous sentez, est-elle aussi comme aux bains ? - Oh ! que non, dis-je. Rien sur la terre ne peut se comparer à cet aromate. Quand autrefois j'aimais danser, aux réunions et aux bals, feu ma petite mère me parfumait parfois avec des parfums qu'elle achetait dans les meilleurs magasins de Kazan. Mais ces parfums ne sont rien en comparaison de ces "aromates".
Petit Père Séraphim, alors, sourit agréablement en disant :
- Je sais, en vérité, que c'est bien ainsi et c'est exprès que je vous questionne sur ce que vous ressentez ! C'est bien vrai, votre Théophilie, rien ne peut se comparer avec le parfum que nous humons actuellement, car c'est l'aromate de l'Esprit Saint qui nous enveloppe. Quelle chose terrestre peut lui être comparée ?
Notez bien, votre Théophilie, que vous m'avez dit tout à l'heure, qu'il faisait chaud comme aux bains. Pourtant regardez, la neige qui nous recouvre ne fond point, non plus que celle qui est sous nos pieds : cette chaleur n'est donc pas dans l'air, mais à l'intérieur de nous-mêmes. C'est cette chaleur que l'Esprit Saint nous fait demander dans la prière, quand nous clamons vers Dieu: « Que Ton Saint Esprit me réchauffe !
Réchauffés par cette chaleur, les ermites ne craignaient plus le froid de l'hiver, habillés comme par des pelisses chaudes dans un vêtement tissé par la Grâce de l'Esprit Saint.
Et c'est ainsi que les choses doivent être en réalité, puisque la Grâce divine doit habiter au plus profond de nous, dans notre coeur, comme l'a dit le Seigneur : "LE ROYAUME DES CIEUX EST EN VOUS".
Et, par le "Royaume des Cieux", le Seigneur entendait la Grâce de l'Esprit Saint. C'est ce "Royaume des Cieux" qui se trouve à présent en nous, et la Grâce de l'Esprit Saint nous éclaire et nous réchauffe aussi de l'extérieur, et embaume l'air environnant de divers parfums et réjouit nos sens de célestes délices, désaltérant nos coeurs d'une inexprimable joie. Notre état actuel est celui-là même dont l'Apôtre Paul disait : "LE ROYAUME DES CIEUX N'EST POINT NOURRITURE OU BREUVAGE, MAIS LA VÉRITÉ ET LA JOIE EN L'ESPRIT SAINT". Notre foi consiste non pas en "des paroles de la sagesse terrestre mais dans la manifestation de la Force et de l'Esprit". Nous sommes actuellement avec vous dans cet état.
C'est de cet état précis que le Seigneur Dieu dit : "Certains ici présents ne goûteront point la mort avant d'avoir vu le Royaume des Cieux venir en Force".
Voilà, votre Théophilie, quelle joie incomparable le Seigneur Dieu nous accorde ! Voilà ce que signifie "être en la plénitude de l'Esprit Saint", et c'est cela qu'entend saint Macaire d'Égypte quand il écrit : "Je fus moi-même en la plénitude de l'Esprit Saint".
Maintenant le Seigneur nous a, nous aussi, humbles que nous sommes, remplis de cette plénitude de Son Saint Esprit.
Eh bien, votre Théophilie, il me semble à présent que vous n'allez plus m'interroger sur la façon dont se manifeste dans les hommes la présence de la Grâce de l'Esprit Saint... »
Entretien de St Séraphim de Sarov avec Motovilov, in Irina Goraïnoff, "Séraphim de Sarov", (Éditions Abbaye de Bellefontaine et Desclée de Brouwer)
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23/03/2013
Lorsqu'un homme juste se tient en sa petitesse
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« Comprenez bien ceci lorsque le soleil envoie ses rayons et sa clarté jusque dans une profonde vallée, située entre deux montagnes, tandis qu'il est au sommet du firmament, de façon à pouvoir éclairer le sol même et le fond de cette vallée, il se produit trois choses : la vallée s'éclaire de la lumière que lui renvoient les montagnes, elle s'échauffe ainsi davantage et devient plus fertile qu'une plaine. De la même façon, lorsqu'un homme juste se tient en sa petitesse, au plus bas de soi-même, et qu'il reconnaît n'avoir rien de soi, n'être rien et ne pouvoir rien, ni persévérer, ni progresser, et que souvent même il manque de vertus et de bonnes œuvres, alors il prend conscience de sa pauvreté et de sa détresse, et il creuse ainsi une vallée d'humilité. Et parce qu'il est humble et indigent, et qu'il connaît sa misère, il l'expose et en gémit devant la bonté et la miséricorde de Dieu. Ainsi peut-il reconnaître et la hauteur de Dieu et sa propre bassesse, et il devient une vallée profonde. Or, le Christ est un soleil de justice et aussi de miséricorde, qui se tient au plus haut du firmament, c'est-à-dire à la droite de son Père, et il brille jusqu'au fond des cours humbles ; car le Christ est toujours touché de la misère de l'homme qui en gémit et la découvre humblement. Alors s'élèvent là aussi deux montagnes formées d'un double désir, l'un de servir Dieu et de le louer dignement l'autre de pratiquer la vertu d'une façon excellente. Ces deux montagnes sont plus hautes que le ciel, car les désirs dont elles sont formées atteignent Dieu sans intermédiaire et attirent sa large libéralité. Dès lors cette libéralité ne peut plus se contenir, il faut qu'elle se répande ; car l'âme est devenue apte à recevoir des dons plus nombreux. »
Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles
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Ce monde ne vaut rien, qu’il en vienne un autre
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« Ce monde ne vaut rien, qu’il en vienne un autre.
Ça fait déjà trop longtemps que nous y sommes
À feindre des raisons suffisantes.
Soyons plus chiens que les chiens : nous savons l’art
De mordre les plus faibles, si nous commandons,
Et de lécher les mains, si nous sommes soumis. »
José Saramago, "Démission", in "Les Poèmes possibles"
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22/03/2013
Les hommes éclairés, d’un libre esprit, sont ravis plus haut que la raison
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« Les hommes éclairés, d’un libre esprit, sont ravis plus haut que la raison, jusqu’à la vision nue et sans images. C’est là que l’unité divine appelle éternellement et avec une intelligence nue et vide d’images, elles dépassent toutes les œuvres, toutes les pratiques, toutes les choses enfin, et atteignent au sommet de l’esprit. Là, leur intelligence nue est entièrement pénétrée d’éternelle lumière comme l’air est pénétré par la lumière du soleil. La volonté nue et ravie est transformée et pénétrée par l’amour sans fond comme le fer par le feu. Et la mémoire nue et ravie se sent enclose et établie dans un abîme sans formes. »
Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles
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L'impossible qui persuade
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« Pour ce qui est de la poésie, l'impossible qui persuade est préférable au possible qui ne persuade pas. »
Aristote, Poétique
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21/03/2013
De deux sortes d'humilité dans le Christ
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« Il y eut dans le Christ, envisagé comme Dieu, une double humilité.
De la première il donna la preuve en se faisant homme, et en prenant personnellement la nature humaine afin de se l'unir, malgré qu'elle fût bannie et engloutie jusqu'au fond de l'enfer ; de sorte que tout homme bon ou mauvais pût dire : le Christ, Fils de Dieu, est mon frère.
La seconde sorte d'humilité chez le Christ fut de prendre pour sa mère, non une fille de roi, mais une pauvre vierge qui devint ainsi mère de Dieu et de celui qui est Seigneur du ciel, de la terre et de toute créature. On peut ajouter que toutes les œuvres d'humilité accomplies par le Christ l'ont été par Dieu même.
Considérant ensuite l'humilité qui régnait dans le Christ, selon son humanité, sous l'influence de la grâce et des dons divins, nous voyons que son âme, avec toutes ses puissances, s'inclinait avec respect et vénération devant la haute puissance de son Père ; et un cœur qui s'incline de cette sorte est un cœur humble. Aussi le Christ accomplissait-il toutes ses œuvres en l'honneur et à la louange de son Père, ne cherchant en rien sa propre gloire humaine.
Il obéit humblement à l'ancienne loi et à ses prescriptions, parfois même à de simples coutumes, quand cela était utile. Il fut circoncis, présenté au Temple, racheté selon l'usage, et il paya l'impôt à César comme les autres juifs. Il se soumit en toute humilité à sa mère et à saint Joseph, les servant avec une sincère déférence en tous leurs besoins. Il choisit pour compagnons de ses courses apostoliques des pauvres et des méprisés, afin de convertir le monde, et il en fit ses Apôtres. Au milieu d'eux il garda son attitude d'humble abaissement comme avec tous les hommes. Aussi était-il prêt à secourir quiconque était dans la détresse intérieure ou extérieure, se montrant le serviteur de tous.
Voilà ce qui nous apparaît tout d'abord dans le Christ, notre Époux. »
Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles
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20/03/2013
Le ténébreux silence
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« Dans cet abîme insondable de la Simplicité, toutes choses sont embrassées dans la béatitude. Mais l’abîme lui-même ne peut être embrassé par rien si ce n’est par l’unité essentielle.
C’est en lui que doivent se résorber tout ce qui vit, car il n’y a ici que repos dans l’embrassement du flot de l’amour... C’est là le ténébreux silence… »
Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles
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Le jeûne est un bon maître
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« Il est nécessaire pour le chrétien de jeûner afin d'éclairer son intellect, d'élever et de développer ses sentiments et de stimuler sa volonté pour avoir une activité utile. Il est aussi nécessaire pour un chrétien de jeûner parce que le Fils de Dieu prit sur Lui notre humaine nature, afin que la nature humaine soit élevée au plan divin, et à présent, nous nous hâtons vers le Royaume de Dieu qui n'est ni nourriture ni boisson, mais justice et paix, et joie dans le Saint Esprit.
Le jeûne est un bon maître : il fait vite comprendre à tous ceux qui jeûnent que l'homme a besoin de peu de nourriture et de boisson, et qu'en général, nous sommes gourmands et que nous mangeons beaucoup plus qu'il n'est nécessaire.
Le jeûne expose clairement tous les péchés et les défauts, toutes les faiblesses et les maladies de notre âme, de même que lorsque l'on remue un eau boueuse et stagnante, les reptiles et la terre qui s'y trouvent sont révélés.
Cela nous montre la nécessité de nous tourner vers Dieu de tout notre cœur, de rechercher Sa miséricorde, Son aide et Sa grâce salvatrice.
Le jeûne nous montre toute l'habileté, la ruse et la malice des esprits incorporels que nous avons involontairement servis. »
Jean de Cronstadt, Ma Vie en Christ
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La multiplication des patries
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« Le dernier et le plus fatal des excès du nationalisme, c’est la multiplication des patries. Il y a maintenant une démocratie des patries, comme il y a une démocratie des individus. Le traité de Versailles a fait de l’Europe une mosaïque d’Etats moyens ou petits, une Suisse nombreuse. (…) D’ailleurs cet excès finit même par se retourner contre le nationalisme et le menacer : le provincialisme tuera peut-être le nationalisme. (…) Chaque grande patrie, déchirée intérieurement par dix petites patries, acceptera plus facilement de s’humilier et de céder une part de son autorité à une patrie supérieure, européenne. »
Pierre Drieu La Rochelle, Genève ou Moscou
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19/03/2013
Dieu peut tout, sauf contraindre l’homme à l’aimer
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« Si Dieu se cache, s’il refuse d’être évident, c’est pour que nous soyons libres. On parle souvent de la puissance de Dieu, et de sa force. Il serait plus fécond de mettre l’accent sur sa vulnérabilité. Avoir créé l’homme et l’avoir créé libre est un risque extraordinaire. Si l’homme n’était pas libre, tout irait comme sur des roulettes au paradis des esclaves béats, au royaume du Grand Inquisiteur ; mais l’homme a été créé libre, et cette liberté est un terrible soleil. Dieu peut tout, sauf contraindre l’homme à l’aimer. »
Gabriel Matzneff, Journal "Le Monde, 14 avril 1979"
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18/03/2013
Pour s’encrapuler et souffrir
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« Les hommes qui étaient restés intactes dans la paix de l’ignorance, on les a arrachés de force à leurs friches pastorales et entassés dans la mélée rageuse des villes, pour s’encrapuler et souffrir. »
Giovanni Papini, Histoire du Christ
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Nous vivons dans l’ère chrétienne. Et elle n’est pas finie.
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« Pourtant, après tout ce gâchis de temps et d’esprit et de talent, le Christ n’a toujours pas été expulsé de la terre. Sa mémoire est partout. Sur les murs des églises et des écoles, au sommet des clochers, des tabernacles et des montagnes, à la tête des lits et des tombeaux, des millions de croix rappellent la mort du Crucifié. Décollez les fresques des églises, enlevez les tableaux des autels et des maisons, et la vie du Christ remplira les musées et les galeries d’art. jetez au feu les missels, les bréviaires et les eucologes et vous retrouverez son nom et ses paroles dans tous les livres de toutes les littératures. Les blasphèmes eux-mêmes sont un souvenir involontaire de sa présence. Quoi que l’on fasse, le Christ est une fin et un début, un abîme de mystères divins au milieu de deux tronçons d’histoire humaine. La Gentilité et la Chrétienté ne pourront plus jamais se souder l’une à l’autre. Avant le Christ et après le Christ. Notre ère, notre civilisation, notre vie commencent avec la naissance du Christ. Ce qui a été avant lui, nous pouvons le rechercher et le connaître, mais il ne nous appartient plus, il est marqué par d’autres chiffres, circonscrit dans d’autres systèmes, il ne remue plus nos passions : c’est peut-être beau, mais c’est mort. César a fait, en son temps, plus de bruit que Jésus, et Platon enseignait plus de sciences que le Christ. On dispute encore de l’un et de l’autre, mais qui s’échauffe pour ou contre César ? Et où sont, aujourd’hui, les platonistes et les antiplatonistes ? Le Christ, en revanche, est toujours vivant en nous. Il y en a encore qui l’aiment, et d’autres qui le haïssent. Il y a une passion pour la passion du Christ et une passion pour le détruire. Et l’acharnement de beaucoup contre lui dit clairement qu’il n’est pas encore mort. Ceux-là mêmes qui se damnent pour nier sa doctrine et son existence passent leur vie à rappeler son nom. Nous vivons dans l’ère chrétienne. Et elle n’est pas finie. Pour comprendre notre monde, notre vie, pour nous comprendre nous-mêmes, il faut se reporter à lui. »
Giovanni Papini, Histoire du Christ
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17/03/2013
Nous découvrons que la race – ou ce que l’on entend généralement par ce terme - est une fonction parmi d’autres de la culture
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« Ce sont les formes de culture qu’adoptent ici ou là les hommes, leurs façons de vivre telles qu’elles ont prévalu dans le passé ou prévalent encore dans le présent, qui déterminent dans une très large mesure, le rythme de leur évolution biologique et son orientation. Loin qu’il faille se demander si la culture est ou non fonction de la race, nous découvrons que la race – ou ce que l’on entend généralement par ce terme - est une fonction parmi d’autres de la culture. »
Claude Lévi-Strauss, Race et culture
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Pâles...
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« Les Blancs méritent de plus en plus le nom de pâles que leur donnaient les indiens d’Amériques. »
Emil Michel Cioran, De l’inconvénient d’être né
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