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26/04/2008

Cheminement humain trop humain

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=

Demain c'est la Pâques Orthodoxe. Et ce sera la fin de mon deuxième carême. Le deuxième de ma vie. J’ai eu quelques écarts. Dieu est grand et je suis tout petit petit minus de peu de consistance. Qu'il me pardonne.

J’ai traversé les quarante jours de mon premier carême en songeant au Christ au moins pendant quelques secondes, si ce n’est quelques minutes, à chaque repas, tous les jours. La lecture qui m’avait accompagné : La Colline inspirée de Maurice Barrès. De quoi faire se hérisser le système pileux de tous les crétins tellement heureux de leur hédonisme consumériste post-moderne, de leurs certitudes démocratiques, de leurs croyances parfumées. François, Quirin et Théobald, ombres crépusculaires aveuglées par une foi destructrice et païenne, croyant avoir trouvé le lieu et la formule, noyés dans l’onde de leur avancée mortelle, ô Gloire, ô Chute, ô Rédemption. Âtre. Foyer. Appartenance. Souvenir. Fondation. Sauvés, au final, par leur sincère dévotion par-delà l’agonie. Noces du pardon. Écarlate blancheur.

Le soir de Noël, repas en famille, chez ma mère. La présence de ma défunte petite mamie dans mon cœur. La bougie que fait brûler ma mère pour elle dans ce qui fut la chambre de son agonie. Parfois, au détour d’un objet, un peu de son odeur est venue me clouer, me transpercer de part en part.
Je ne suis rien, rien du tout. Je ne sais rien, rien du tout. Mais je ressens tout, je respire et souris, ris encore avec le temps qui me flingue, et si tu es là, Seigneur, ou plus près, ou plus loin, que sais-je ? puisque je ne sais rien, sers ma petite mamie, ou son souvenir pour le jour des rétributions, contre ton cœur, contre ton feu ardent qui ne brûle pas mais réchauffe, éclaire, illumine par l’Amour, ô prend soin d’elle, pardonne, abrège le mal en elle, révèle, touche, atteint au plus profond, atténue, équilibre, forme, façonne, Verbe Saint, Christ-Roi, Justice, Vérité.

Curieusement, mélange de tristesse, de satisfaction, de désœuvrement.

Pour ce deuxième carême, j'ai médité un peu plus. Un appel sourd vers le dedans de mon âme... si elle existe. Curieux cheminement humain trop humain... et parcours biblique tâtonnant. Je fais ce que je peux.

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25/04/2008

"Je Veux"

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=

Comme Sartre, je pourrais retenir du fameux mythe de Sisyphe que le rocher, à l’approche du sommet, dégringole de la pente laissant l’homme laborieux face à l’absurde et l’obligeant par la damnation des dieux à redescendre en bas pour se remettre à l’ouvrage malgré la folie de l’acte qui se répète de tentative en tentative vouées à l’échec. Nulle foi n’anime cette cause à défendre qui n’en est même pas une. La foi est abolie. Sartre, parlant de Merleau-Ponty, chrétien dans sa jeunesse, affirme qu’il cessa de l’être car : « On croit qu’on croit mais on ne croit pas », par cette formule faussement lapidaire — dont l’existentialisme a le talent pailleté d’un faussaire — pense contribuer à saper l’édifice de la civilisation dont il fut l’avorton. Mais Camus veille. Dans son "Mythe de Sisyphe" il retient, lui, que Sisyphe y retourne. Il a même le culot de l’imaginer heureux. Il faut en tout cas beaucoup de volonté, contrairement à ce que pense mon ami Pierre, pour retourner dans la fournaise infernale de la damnation, même si le calvaire que les dieux ont imposé à Sisyphe semble éternellement le lier, l’attacher à un destin funeste écrit d’avance. À ce titre, Merleau-Ponty a une analyse non dépourvue d’intérêt lorsqu’il dit dans La Structure du comportement (1942) : « À partir du moment où le comportement humain est pris "dans son unité" et dans son ensemble, ce n’est plus à une réalité matérielle qu'on a affaire et pas d'avantage d'ailleurs à une réalité psychique, mais à un ensemble significatif ou à une structure qui n’appartient en propre ni au monde extérieur, ni à la vie intérieure. C’est le réalisme en général qu’il faut mettre en cause. »

Le réalisme en général, c’est-à-dire la totalité phénoménologique de la réalité car selon Merleau-Ponty, ce qui importe c’est « le sens qui transparait à l’intersection de mes expériences et de celles d’autrui, par l’engrenage des unes et des autres. » Ce potentiel de significations à découvrir, de champs des possibles, éloigne Merleau-Ponty de Sartre pour lequel « l’homme n’est qu’une situation… Totalement conditionné par sa classe, son salaire, la nature de son travail, conditionné jusqu’à ses sentiments, jusqu’à ses pensées. » (Situations, II) et qu’il ne peut exercer sa volonté qu’en fonction de ce déterminisme. À mes yeux « l’intersection » dont parle Merleau-Ponty éloigne considérablement son existentialisme de celui de Sartre. Je ne sais s’il a perdu vraiment la foi selon la formule sartrienne que j’ai citée plus haut mais cette notion d’« intersection » a quelque chose de chrétien par-delà la négation existentialiste supposée. Il est évident que nous sommes fondés par un milieu socio-culturel, une langue, une ethnie, une région, un pays. Je frémis d’ailleurs, au passage, de ce que seront les générations à venir sans culture digne de cette appellation, analphabêtisées par une novlangue cybernétique et « SMS-isée », sans aucune idée de l’Histoire et apatrides. De nouveaux mythes apparaîtront. Néanmoins, ne croyant pas en une volonté pure, encore moins en une volonté de volonté, je reste persuadé que l’homme a le choix et la capacité de se dépasser en créant et en se créant, aussi, soi-même. En poursuivant l’écriture de ce qui a été écrit précédemment.
Dans la nuit des temps à l’instant même du big-bang l’univers a-t-il eut la volonté d’advenir pour que ce caillou bleu advienne à son tour et que la conscience émerge du dehors de la valse des étoiles dans le déploiement de l’infini ? La volonté de l’univers ou bien celle de Dieu ?

Curieux comme la vie des bactéries incite les scientifiques à parler, les concernant, déjà, de « vouloir vivre ». De ce « vouloir vivre » primitif (comme un premier pallier à un programme d’hominisation ?), essentiel à toute matière organique de base, s’est dégagé au fil du temps la volonté qui a tendu vers une indépendance plus grande, rêvant même d’atteindre à l’indépendance du pur esprit. Mais la matière, la chair ont de curieuses raisons et, quant à moi, je bande souvent, et sans volonté, de façon purement mécanique, malgré moi. Nietzsche, comme toutes les grandes sagesses, a tenté de penser un être parvenu à un ultime niveau de possession de soi capable de chevaucher son destin avant que celui-ci ne le chevauche. Selon mon ami Pierre c’est une chimère. Et une chimère est difficile à appréhender, c’est dans sa nature, alors sa dissection semble encore plus compromise. Notre esprit est aussi, ne l’oublions pas, une lourde incarnation, modelée par un environnement dont nous ne pouvons faire l’économie de la considération. Information esprit-corps, corps-esprit ; affects, organisme. Le « vouloir vivre » devenu volonté créatrice de civilisations, se perd parfois, s’immobilise, se sclérose, se noue. La volonté a des anomalies de fonctionnement. D’ailleurs, quand je parle de volonté, je ne la conçois pas comme un ordinateur froidement calculateur. Je laisse ces fantasmes aux tyrans et aux despotes, la pureté n’est pas de mon ressort. Cette volonté de puissance est, à mon sens, destructrice. Loin de vouloir faire croire que la volonté annihile les puissances divines ou démoniaques qui tentent perpétuellement de nous façonner, je crois plutôt qu’elle les organise, les met en ordre et les utilise pour augmenter la conscience sous le couvert de la raison. Les personnes volontaristes vivent d’ailleurs un apprentissage sans fin, je n’ai pas peur de le dire : une initiation.

J’ai un côté taoïste aussi. La volonté ultime ne serait-elle pas dans le fait de non pas être apte à prendre une décision tranchante ou d’entreprendre une action éclatante mais bien plutôt dans la capacité à organiser les choses, sans même employer la force, sans même la montrer, selon une pente naturelle et ordonnée ? Nous avons tous des instants de volontarisme évidents, lorsque les circonstances de la vie l’exigent et qu’il faut pouvoir faire face. Mais la plupart du temps la volonté se dissout dans une attitude programmée par des habitudes réfléchies qui deviennent vite des banalités irréfléchies, par des sentiments et des opinions balisées. Ce cercle existentiel vulgaire est bien plus puissant que les éclats rayonnants et les explosions volontaristes. La volonté étant liée à la raison, c’est dans ce cercle quotidien qu’il convient aussi de la travailler et de la faire surgir.
« L’empreinte chez l’homme n’est pas un déterminant absolu comme le croyait Lorenz puisque chaque stade de son développement est gouverné par des déterminants de nature différente. Encore faut-il qu’à chaque niveau de la croissance le cerveau établisse des transactions avec les enveloppes sensorielles, verbales et culturelles. » (Boris Cyrulnik, De chair et d’âme)
« L’intersection » dont parlait Merleau-Ponty.

En 1940, il y avait 2500 habitants à Dieulefit, un village en Drôme provençale. Durant l’occupation le nombre d’habitants monta jusqu’à 5000. À la mairie de Dieulefit on fabriqua de faux papiers. L’école accueillit des enfants juifs, puis leurs parents arrivèrent aussi, enfin un nombre considérable de peintres, de poètes, de penseurs, de photographes, de médecins. Tous Juifs. Le village doubla sa population dans le miracle d’une résistance silencieuse qui ne fit pas la moindre vague. Les 2500 habitants de Dieulefit envahis par 2500 Juifs pourchassés ne dénoncèrent personne. Le village entier de Dieulefit fut un village de justes qui surent probablement l’importance de « l’intersection » qu’évoquait Merleau-Ponty avec justesse. Durant 4 ans Juifs et villageois vécurent en bonne intelligence par la grâce de Dieu. Pierre Vidal-Naquet, réfugié dans le village durant ces années sombres, parle même de Dieulefit comme de la « capitale intellectuelle de la France » tellement les intellectuels de sa communauté s’y sentirent bien tandis qu’au dehors de ce cercle régnaient la grisaille et se propageait la moisissure.
Je ne sais pas qu’elle fut la nature de l’empreinte des Dieulefitois et dans quelle mesure on pourrait dire que les décisions du moindre villageois furent prédestinées. Je pense qu’il a fallu exercer un libre-arbitre digne de ce nom pour prendre les décisions qui s’imposaient et traverser les quatre années d’une France collaborationniste dans un mutisme angélique sans attirer la moindre attention. Que les SS eurent découvert les agissements de ce village et Oradour-sur-Glane passerait pour un pétard mouillé. Libre arbitre mais volonté aussi et résistance ordonnée pour que chacun collabore à la résistance en question. Confronté à des situations extrêmes la vie devient une conquête permanente jamais fixée d’avance ni par nos gênes, ni par notre fondation psycho-socio-familiale. Rien n’interdit l’évolution sur le champ des possibles. Et chaque saut qualitatif arrive en temps et en heure au terme parfois d’une vie de préparation dans une banale quotidienneté.

« Quel est le grand dragon que l'esprit ne veut plus appeler ni Dieu ni maître ? "Tu dois" s'appelle le grand dragon. Mais l'esprit du lion dit : "Je veux".» Friedrich Nietzsche Ainsi parlait Zarathoustra

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24/04/2008

Démerde-toi Camarade

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=

Aux pires instants de ma vie j’ai brûlé tant de feuillets épars, déchiré des cahiers maudits, égaré volontairement des carnets confidentiels. Je me suis allégé comme j’ai pu, pour ne pas devenir fou. Parfois des phrases me reviennent, des mots écrasés, des vers délabrés qui me surprennent comme une lointaine musique dont je n’arrive pas à déterminer le titre et l’auteur, jusqu’au moment où, surpris, je réalise que ce sont mes mots à moi, mes maux jamais vraiment guéris, qui remontent comme de lointains vestiges. Oui. Dans la sincérité la plus absolue possible on finit toujours par tricher pour ne pas avoir à couler dans les abysses. Profond, profond, profond sous le niveau de conscience un démon redoutable mène la danse qu’il veut. Démerde-toi Camarade.

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23/04/2008

Déjà le 23 Avril...

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=

Déjà le 23 Avril. J'ai le sentiment d'être au lendemain du 1er Janvier. Wagons de jours qui passent. Les voeux sont morts et enterrés. Bonne année, bien-sûr. Identique rengaine qui se répète d’année en année. Souhaiter quoi à qui ? Les mêmes banalités à n’en plus finir. En début d’année on mesure surtout tout ce qu’on n’a pas su faire, tout ce qu’on a pas su entreprendre pour atteindre un but qui ait de l’épaisseur lors de l’année écoulée. On brûle, de toute façon, sa vie comme on peut, vous permettez ?

Parfois je me dis, sans blague, que toute ma vie fut une série de cuisants échecs. Il n’y aurait mon couple et mes enfants, je n’aurais qu’à m’autoriser à sombrer dans le nihilisme le plus radical. Je me torture tout seul à trouver un sillon lumineux à cette dépravation hasardeuse qu’est ma vie, un bouquet de Rédemption. Pas même un bouquet, juste une pétale. Une pétale de Rédemption qui m’allégerait le corps et l’âme. Je ne dis rien, mais intérieurement je rumine comme un vieux fou (que je suis probablement déjà) quémandant un peu de repos.

Dormir longtemps, d’un sommeil serein et profond, sans alcools, sans substance autre que celle de la sève vivante que je ne parviens plus, depuis bien trop longtemps, à capter, à sucer comme une glace de l’enfance ou comme des seins de femme dressés tels des autels, délicats et durs, suc de l’abondance. Dormir d’un sommeil calme, léger. Un sommeil d’eau limpide. Un sommeil aquatique clair, reconstitutif de mes dérives terrestres désastreuses.

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22/04/2008

Le Revenant... Jehan Rictus

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

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"Après Verlaine, il y avait encore celui-là, Poète catholique sans le savoir et sans que personne l’ait jamais su, excepté moi, mais le dernier, sans aucun doute. Personne, maintenant, ne passera plus par cette porte."

"Jehan Rictus est un de ces monstres de mélancolie et de pitié qui ne connaissent pas Dieu et qui crèvent de l’amour de Dieu. Voilà tout. L’espèce n’en est pas très-rare."


Léon Bloy, "Le Dernier Poète Catholique", in Les Dernières Colonnes de l’Eglise.

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Le Revenant par Jehan Rictus

=_- I -_=

I

Des fois je m’ dis, lorsque j’ charrie
À douète... à gauche et sans savoir
Ma pauv’ bidoche en mal d’espoir,
Et quand j’ vois qu’ j’ai pas l’ droit d’ m’asseoir
Ou d’ roupiller dessus l’ trottoir
Ou l’ macadam de « ma » Patrie,

Je m’ dis : — Tout d’ même, si qu’y r’viendrait !
Qui ça ?... Ben quoi ! Vous savez bien,
Eul’ l’ trimardeur galiléen,
L’ Rouquin au cœur pus grand qu’ la Vie !

De quoi ? Ben, c’lui qui tout lardon
N’ se les roula pas dans d’ beaux langes
À caus’ que son double daron
Était si tell’ment purotain

Qu’y dut l’ fair’ pondr’ su’ du crottin
Comm’ ça à la dure, à la fraîche,
À preuv’ que la paill’ de sa crèche
Navigua dans la bouse de vache.

Si qu’y r’viendrait, l’Agneau sans tache ;
Si qu’y r’viendrait, l’ Bâtard de l’ Ange ?
C’lui qui pus tard s’ fit accrocher
À trent’-trois berg’s, en plein’ jeunesse
(Mêm’ qu’il est pas cor dépendu !),
Histoir’ de rach’ter ses frangins
Qui euss’ l’ont vendu et r’vendu ;
Car tout l’ monde en a tiré d’ l’or
D’pis Judas jusqu’à Grandmachin !

L’ gas dont l’ jacqu’ter y s’en allait
Comm’ qui eût dit un ruisseau d’ lait,
Mais qu’a tourné, qui s’a aigri
Comm’ le lait tourn’ dans eun’ crém’rie
Quand la crémière a ses anglais !

(La crémièr’, c’est l’Humanité
Qui n’ peut approcher d’ la Bonté
Sans qu’ cell’-ci, comm’ le lait, n’ s’aigrisse
Et n’ tourne aussitôt en malice !)

Si qu’y r’viendrait ! Si qu’y r’viendrait,
L’Homm’ Bleu qui marchait su’ la mer
Et qu’était la Foi en balade :

Lui qui pour tous les malheureux
Avait putôt sous l’ téton gauche
En façon d’ cœur... un Douloureux.
(Preuv’ qui guérissait les malades
Rien qu’à les voir dans l’ blanc des yeux,
C’ qui rendait les méd’cins furieux.)

L’ gas qu’en a fait du joli
Et qui pour les muffs de son temps
N’tait pas toujours des pus polis !

Car y disait à ses Apôtres :
— Aimez-vous ben les uns les autres,
Faut tous êt’ copains su’ la Terre,
Faudrait voir à c’ qu’y gn’ait pus d’ guerres
Et voir à n’ pus s’ buter dans l’ nez,
Autrement vous s’rez tous damnés.

Et pis encor :
— Malheur aux riches !
Heureux les poilus sans pognon,
Un chameau s’ enfil’rait ben mieux
Par le petit trou d’eune aiguille
Qu’un michet n’entrerait aux cieux !

L’ mec qu’était gobé par les femmes
(Au point qu’ c’en était scandaleux),
L’Homme aux beaux yeux, l’Homme aux beaux rêves
Eul’ l’ charpentier toujours en grève,
L’artiss’, le meneur, l’anarcho,
L’entrelardé d’ cambrioleurs
(Ça s’rait-y paradoxal ?)
L’ gas qu’a porté su’ sa dorsale
Eune aut’ croix qu’ la Légion d’Honneur !



II

Si qu’y r’viendrait, si qu’y r’viendrait !
Tout d’un coup... ji... en sans façons,
L’ modèl’ des méniss’s économes,
Lui qui gavait pus d’ cinq mille hommes
N’avec trois pains et sept poissons.

Si qu’y r’viendrait juste ed’ not’ temps
Quoi donc qu’y s’ mettrait dans l’ battant ?
Ah ! lui, dont à présent on s’ fout
(Surtout les ceuss qui dis’nt qu’ils l’aiment).

P’têt’ ben qu’y n’aurait qu’ du dégoût
Pour c’ qu’a produit son sacrifice,
Et qu’ cette fois-ci en bonn’ justice
L’aurait envie d’ nous fout’ des coups !

Si qu’y r’viendrait... si qu’y r’viendrait
Quéqu’ jour comm’ ça sans crier gare,
En douce, en pénars, en mariolle,
De Montsouris à Batignolles,
Nom d’un nom ! Qué coup d’ Trafalgar !

Devant cett’ figur’ d’honnête homme
Quoi y diraient nos négociants ?
(Lui qui bûchait su’ les marchands)
Et c’est l’ Pap’ qui s’rait affolé
Si des fois y pass’rait par Rome

(Le Pap’, qu’est pus riche que Crésus.)
J’en ai l’ frisson rien qu’ d’y penser.
Si pourtant qu’y r’viendrait Jésus,

Lui, et sa gueul’ de Désolé !




=_- II -_=



III

Eh ben ! moi... hier, j’ l’ai rencontré
Après menuit, au coin d’eun’ rue,
Incognito comm’ les passants
Des tifs d’argent dans sa perrugue
Et pour un Guieu qui s’ paye eun’ fugue
Y n’était pas resplendissant !

Y n’est v’nu su’ moi et j’y ai dit :
— Bonsoir... te v’là ? Comment, c’est toi ?
Comme on s’ rencontr’... n’en v’là d’eun’ chance !
Tu m’épat’s... t’es sorti d’ ta Croix ?
Ça n’a pas dû êt’ très facile...
Ben... ça fait rien, va, malgré l’ foid,
Malgré que j’ soye sans domicile,
J’ suis content d’ fair’ ta connaissance

— C’est vraiment toi... gn’a pas d’erreur !
Bon sang d’ bon sang... n’en v’là d’eun’ tuile !
Qué chahut d’main dans Paris !
Oh ! là là, qué bouzin d’ voleurs :
Les jornaux vont s’ vend’ par cent mille !
— Eud’mandez : « Le R’tour d’ Jésus-Christ ! »
— Faut voir : « L’Arrivée du Sauveur !!! »

— Ho ! tas d’ gouapeurs ! Hé pauv’s morues,
Sentinell’s des miséricordes,
Vous savez pas, vous savez pas ?
(Gn’a d’ quoi se l’esstraire et s’ la morde !)

Rappliquez chaud ! Gn’a l’ fils de Dieu
Qui vient d’ déringoler des cieux
Et qui comme aut’fois est sans pieu,
Su’ l’ pavé... quoi... sans feu ni lieu
Comm’ nous les muffs, comm’ vous les grues !!!

— (Chut ! fermons ça... v’là les agents !)
T’entends leur pas... intelligent ?
Y s’ charg’raient d’ nous trouver eun’ turne.
(Viens par ici... pet ! crucifié.)
Tu sais... faurait pas nous y fier.
Déjà dans l’ squar’ des Oliviers,
Tu as fait du tapag’ nocturne ;

— Aujord’hui... ça s’rait l’ mêm’ tabac,
Autrement dit, la même histoire,
Et je n’ te crois pus l’estomac
De r’subir la scèn’ du Prétoire !
— Viens ! que j’ te r’garde... ah ! comm’ t’es blanc.
Ah ! comm’ t’es pâl’... comm’ t’as l’air triste.
(T’as tout à fait l’air d’un artiste !
D’un d’ ces poireaux qui font des vers
Malgré les conseils les pus sages,
Et qu’ les borgeois guign’nt de travers,
Jusqu’à c’ qu’y fass’nt un rich’ mariage !)

— Ah ! comm’ t’es pâle... ah ! comm’ t’es blanc,
Tu guerlott’s, tu dis rien... tu trembles.
(T’ as pas bouffé, sûr... ni dormi !)
Pauv’ vieux, va... si qu’on s’rait amis
Veux-tu qu’on s’assoye su’ un banc,
Ou veux-tu qu’on balade ensemble...

— Ah ! comm’ t’ es pâle... ah ! comm’ t’ es blanc,
T’ as toujours ton coup d’ lingue au flanc ?
De quoi... a saign’nt encor tes plaies ?
Et tes mains... tes pauv’s mains trouées
Qui c’est qui les a déclouées ?
Et tes pauv’s pieds nus su’ l’ bitume,
Tes pieds à jour... percés au fer,
Tes pieds crevés font courant d’air,
Et tu vas chopper un bon rhume !

— Ah ! comm’ t’ es pâle... ah ! comm’ t’ es blanc,
Sais-tu qu’ t’ as l’air d’un Revenant,
Ou d’un clair de lune en tournée ?
T’ es maigre et t’ es dégingandé,
Tu d’vais êt’ comm’ ça en Judée
Au temps où tu t’ proclamais Roi !
À présent t’ es comme en farine.
Tu dois t’en aller d’ la poitrine
Ou ben... c’est ell’ qui s’en va d’ toi !

— Quéqu’ tu viens fair’ ? T’ es pas marteau ?
D’où c’est qu’ t’ es v’nu ? D’en bas, d’en haut ?
Quelle est la rout’ que t’ as suivie ?
C’est-y qu’ tu r’commenc’rais ta Vie ?
Es-tu v’nu sercher du cravail ?
(Ben... t’ as pas d’ vein’, car en c’ moment,
Mon vieux, rien n’ va dans l’ bâtiment) ;
(Pis, tu sauras qu’ su’ nos chantiers
On veut pus voir les étrangers !)

— Quoi tu pens’s de not’ Société ?
Des becs de gaz... des électriques.
Ho ! N’en v’là des temps héroïques !
Voyons ? Cause un peu ? Tu dis rien !
T’ es là comme un paquet d’ rancœurs.
T’ es muet ? T’ es bouché, t’ es aveugle ?
Yaou... ! T’ entends pas ce hurlement ?
C’est l’ cri des chiens d’ fer, des r’morqueurs,
C’est l’ cri d’ l’Usine en mal d’enfant,

C’est l’ Désespoir présent qui beugle !



IV

— Ed’ ton temps, c’était comme aujord’hui ?
Quand un gas tombait dans la pure
Est-c’ qu’on l’ laissait crever la nuit
Sans pèz’, sans rif et sans toiture ?

— (Pass’ que maint’nant gn’a du progrès,
Ainsi quand gn’a trop d’ vagabonds
Ben on les transmet au Gabon.)
Ceux d’ bon gré et ceux d’ mauvais gré
Et ceuss comm’ toi qu’ont la manie
D’ trouver que l’ monde est routinier,
Ben on les fout dans l’ mêm’ pagnier.
(Dam ! le Français est casanier,
Faut ben meubler les colonies !)

— On parle encor de toi, tu sais !
Voui on en parle en abondance,
On s’ fait ta tête et on s’ la paie,
T’ es à la roue... t’ es au théâtre,
On t’ met en vers et en musique,
T’ es d’venu un objet d’ Guignol,
(Ça, ça veut dir’ qu’ tu as la guigne.)

— Ousqu’il est ton ami Lazare ?
Et Simon Pierre ? Et tes copains...
Et Judas qui bouffait ton pain
Tout en t’ vendant comme au bazar ?
Et tes frangins et ta daronne
Et ton dab, qu’était ben jean-jean !

Te v’là, t’es seul ! On t’abandonne !

— Et Mad’leine... ousqu’alle est passée ?
(Ah ! pauv’ Mad’leine... pauv’ défleurie,
Elle et ses beaux nénés tremblants,
Criant pitié, miaulant misère,
Ses pauv’s tétons en pomm’s d’amour
Qu’ étaient aussi deux poir’s d’angoisse
Qu’on s’ s’rait ben foutu dans l’ clapet.)

— C’était la paix, c’était la Vie.
Ah ! tout fout l’ camp et vrai, ma foi,
T’ aurais mieux fait d’ te mett’ en croix
Contr’ son ventr’ nu... contr’ sa poitrine,
Ces dardés-là t’euss’nt pas blessé,
Sûr t’aurais mieux fait... d’ l’embrasser :
A n’avait un pépin pour toi !



V

Ah ! Généreux !... ah ! Bien-aimé,
Tout ton monde y s’a défilé
Et comm’ jadis, au Golgotha :
Eli lamma Sabacthani,
Ou n, i, ni c’est ben fini.

Eh ! blanc youpin... eh ! pauv’ raté !
Tout ton Œuvre il a avorté
Toi, ton Étoile et ta Colombe
Déringol’nt dans l’éternité ;
Tu dois en avoir d’ l’amertume.
Même à présent quand la neig’ tombe :

(On croirait tes Ang’s qui s’ déplument !)

Là, là, mon pauv’ vieux, qué désastre !
Gn’en a pas d’ pareil sous les astres,
Et faut qu’ ça soye moi qui voye ça ?
Et dir’ que nous v’là toi z’et moi,
Des bouff-la-guign’, des citoyens
Qu’ ont pas l’ moyen d’avoir d’ moyens.

Et que j’ suis là, moi, bon couillon,
À t’ causer... à t’ fair’ du chagrin,
Et que j’ sens qu’ tu vas défaillir
Et que j’ai mêm’ rien à t’offrir,
Pas un verre... un bol de bouillon !

Ohé, les beaux messieurs et dames
Qui poireautez dans les Mad’leines,
Curés, évêques, sacristains,
Maçons, protestants, tout’ la clique,
Maqu’reaux d’ vot’ Dieu, hé ! catholiques,
Envoyez-nous un bout d’hostie :

G’na Jésus-Christ qui meurt de faim !



VI

— Et pourtant, vrai, c’ qu’on caus’ de toi !
(Ah ! faut voir ça dans les églises,
Dans les jornaux, dans les bouquins !)
Tout l’ monde y bouff’ de ton cadavre
(Mêm’ les ceuss qui t’en veul’nt le plus !)

Sous la meilleur’ des Républiques
Gn’en a qu’ ont voulu t’ décrocher,
D’aut’s inaugur’nt des basiliques
Où tu peux seul’ment pas coucher.

— Et tout ça s’ passe en du clabaud !
Et quand y faut payer d’ sa peau,
Quand faut imiter l’ Fils de l’Homme,
Oh ! là, là, gn’a rien d’ fait... des pommes !

Les sentiments sont vit’ bouclés,
À la r’voyure, un tour de clé !
Les uns y z’ont les pieds nick’lés,
Les aut’s y les ont en dentelles !

— (Toi au moins t’ étais un sincère,
Tu marchais... tu marchais toujours ;
(Ah ! cœur amoureux, cœur amer)
Tu marchais mêm’ dessur la mer
Et t’ as marché... jusqu’au Calvaire !)

— Et dir’ que nous v’là dans les rues
(Moi, passe encor, mais toi ! oh ! toi !)
Et nous somm’s pas si loin d’ Noël ;
T’es presque à poils comme autrefois,
Tout près du jour où ta venue
Troublait les luisants et les Rois !

Ah ! mes souv’nirs... ah ! mon enfance
(Qui s’est putôt mal terminée),
Mes ribouis dans la cheminée,
Mes mirlitons... mes joujoux d’ bois !

— Ah ! mes prièr’s... ah ! mes croyances !
— Mais ! gn’a donc pus rien dans le ciel !

— Sûr ! gn’a pus rien ! Quelle infortune !
(J’ suis mêm’ pas sûr qu’y ait cor la Lune.)
Sûr ! gn’a pus rien, mêm’ que peut-être
Y gn’a jamais, jamais rien eu...



VII

Mais à présent... quoi qu’ tu vas foutre ?
Fair’ des bagots... ou ben encor
Aux Hall’s... décharger les primeurs !
(N’ va pas chez Drumont on t’ bouff’rait)
Après tout, tu n’étais qu’un youtre !

— Si j’ te servais tes Paraboles !

Heureux les Simpl’s, heureux les Pauvres,
Eul’ Royaum’ des Cieux est à euss.

— (C’est avec ça qu’on nous empaume,
Qu’on s’ cal’ des briqu’s et des moellons)
Ben, tu sais, j’ m’en fous d’ ton Royaume ;
J’am’rais ben mieux des patalons
Eun’ soupe, eun’ niche et d’ l’amitié.

(Car quoiqu’ t’ ay’ ben fait ton métier
Toi, ton grand cœur et ta pitié,
N’empêch’nt pas d’avoir foid aux pieds !)

— Ainsi arr’gard’ les masons closes
Où roupill’nt ceuss’ qui croient en Toi.
Sûr qu’ t’es là, su’ des bénitiers
Dans les piaul’s... à la têt’ des pieux ;
Crois-tu qu’un seul de ces genss’ pieux
Vourait t’abriter sous son toit ?



VIII

Ah ! toi qu’on dit l’Emp’reur des Pauvres
Ben ton règne il est arrivé.
Tu d’vais r’venir, tu l’as promis,
Assis su’ ton trône et « plein d’ gloire »
Avec les Justes à ta droite ;
Et te v’là seul dans la nuit noire
Comm’ un diab’ qu’est sorti d’ sa boîte !
Sais-tu seul’ment où est ta gauche ?

Oh ! voui t’es là d’pis deux mille ans
Su’ un bout d’ bois t’ouvr’ tes bras blancs
Comme un oiseau qu’ écart’ les ailes,
Tes bras ouverts ouvrent... le ciel
Mais bouch’nt l’espoir de mieux bouffer
Aux gas qui n’ croient pus qu’à la Terre.

Oh ! oui t’es là, t’ouvr’ tes bras blancs
Et vrai d’pis Y temps qu’on t’a figé
C’ que t’en as vu des affligés,
Des fous, des sag’s ou des d’moiselles
Combien d’ mains s’ sont tendues vers toi
Sans qu’ t’aye pipé, sans qu’ t’aye bronché !

Avoue-le va... t’ es impuissant,
Tu clos tes châss’s, t’ as pas d’ scrupules,
Tu protèg’s avec l’ mêm’ sang-froid
L’ sommeil des Bons et des Crapules.
Et quand on perd quéqu’un qu’on aime,
Tu décor’s, mais tu consol’s pas.

Ah ! rien n’ t’émeut, va, ouvr’ les bras,
Prends ton essor et n’ reviens pas ;
T’ es l’Étendard des sans-courage,
T’ es l’Albatros du Grand Naufrage,
T’ es le Goëland du Malheur !



IX

Quiens ! ôt’-toi d’ là et prends ta course,
Débin’, cavale ou tu vas voir,

Aussi vrai qu’ j’ai un nom d’ baptême
Et qu’ nous v’là tous deux dans la boue,
Aussi vrai que j’ suis qu’eun’ vadrouille,
Un bat-la-crève, un fout-la-faim
Et toi un Guieu magasin d’ giffes.

Ej’ m’en vas t’ buter dans la tronche,
J’ vas t’ boulotter la pomm’ d’Adam,
J’ m’en vas t’ rincer, gare à ta peau !

En v’là assez... j’ m’en vas t’ saigner.
J’ai soupé, moi, des Résignés
J’ai mon blot des Idéalisses !

— Arrière, arrièr’, n’ va pas pus loin !
Un moment vient où tout s’ fait vieux,
Où les pus bell’s chos’s perd’nt leurs charmes :

(Oh ! v’là qu’ tu pleur’s, et des vraies larmes !
Tout va s’écrouler, nom de Dieu !)

— Ah ! je m’ gondole... ah ! je m’ dandine...
Rien n’ s’écroule, y aura pas d’ débâcle ;
Eh l’Homme à la puissance divine !
Eh ! fils de Dieu ! fais un miracle !



X

— Et Jésus-Christ s’en est allé
Sans un mot qui pût m’ consoler,
Avec eun’ gueul’ si retournée
Et des mirett’s si désolées
Que j’ m’en souviendrai tout’ ma vie.

Et à c’ moment-là, le jour vint
Et j’ m’aperçus que l’Homm’ Divin..
C’était moi, que j’ m’étais collé
D’vant l’ miroitant d’un marchand d’ vins !

On perd son temps à s’engueuler...


=_- III -_=


"Il suffit d’un Homme pour
changer la face du monde."

Jehan Rictus



XI

Mais ça fait rien si qu’y r’viendrait
Quéqu’ nuit d’Hiver quand l’ frio semble
Fair’ péter pavés et carreaux
(Mais durcir les cœurs les pus tendres),
Et g’ler les pleurs aux cils qui tremblent,
Si qu’y planquait son blanc mensonge
Quéqu’ nuit autour d’un brasero !

Ça s’rait p’têt’ moi qui yi dirait
Les mots qui s’raient l’ pus nécessaire
Et ça s’rait p’têt’ ben moi qui s’rait
L’ pus au courant d’ sa grand’ misère,
Ça s’rait p’ têt’ moi qui l’ consol’rais...

— Ah ! qu’ j’y crierais, n’ va pas pus loin,
A branl’nt dans l’ manch’ tes cathédrales ;
N’ va pas pus loin, n’ va pas pus loin,
Ton pat’lin bleu est cor pus vide
Qu’ nos péritoin’s réunis.
Ah ! enfonc’-toi les poings dans l’ bide
Jusqu’à la colonn’ vertébrale !

— Arrière, arrièr’, n’ va pas pus loin !
Ou n’ viens qu’ la s’main’ des quat’-jeudis
Car tu r’trouv’rais tes Ponce-Pilate
Présent en limace écarlate,
Trempée dans l’ sang des raccourcis !

— Arrière, arrièr’, n’ va pas pus loin !
(Car l’Iscariot a fait des p’tits)
Tu pourrais pus confier ta peine
Qu’aux grands torchons ou... à la Seine.

T’ as cru à l’Homm’ toi, ma pauv’ vieille ?
Ah ben ! tu sais, moi je n’ sais pus !
{Ventre affamé n’a pas d’oreilles
Et les vent’s pleins n’en ont pas plus !)



XII

— Pleur’ ! Pleure encor, pleur’ tout’s tes r’ssources
(Comm’ pleur’ le gas qui n’ peut payer
Son enterr’ment ou son loyer).
Qu’ tes trous à voir d’vienn’nt deux gross’s sources
Et qu’ l’Univers en soye noyé !

— Pleur’ ! pleure encore et sois béni,
Ta banq’ d’amour a fait faillite
Coffret d’ sanglots, boîte à génie.

Ah ! le beau rêv’ que t’ as conté.
Ton Paradis ? La belle histoire
Sans c’te vach’ de Réalité :

— T’ étais l’ pus pauv’ d’entre les Hommes
Car tu sentais qu’ tu pouvais rien
Contre leur débine indurée :

(Or comm’ les Pauv’s n’ont d’aut’ moyen
Pour bouffer un peu leur chagrin
Que d’ se réciter leur détresse
Ou d’en dir’ du mal à part eux
Et rêvasser quéqu’ chose de mieux
Pour le surlend’main des lend’mains)

— Toi, t’ as voulu sécher d’un coup
Le très vieux cancer des Humains
Et pour ça leur en faire accroire...
Ton Paradis ? la belle histoire !
Et tu leur aimantas les yeux
Vers le vide enivrant des cieux
Qui dans ton pat’lin sont si bleus !

(Ton Paradis ? Eh ben ! c’était
Un soliloque de malheureux !)



XIII

— Ah ! sors-toi l’ cœur, va, pauv’ panné,
Ton cœur de pâle illuminé,
Au lieur d’histoir’s à la guimauve
Hurle ta peine à plein gosier.

— Pisqu’y gn’a pus personn’ qui t’aime
Et qu’ te v’là comme abandonné
Le cul su’ ta Mason ruinée,
Sors-moi ton cœur désordonné
Lui qui n’a su que pardonner,
Tremp’-le dans la boue et dans l’ sang
Et dans ton poing qu’y d’vienne eun’ fronde
Et fous-le su’ la gueule au monde
Y t’en s’ra p’têt’ reconnaissant !

(T’ en as déjà donné l’exemple
Mais d’puis... l’a passé d’ l’eau sous l’ pont)
Faut rester l’ gas au coup d’ tampon
Qui boxait les marchands du Temple !

— Chacun a la Justice en lui,
Chacun a la Beauté en lui,
Chacun a la Force en lui-même,
L’Homme est tout seul dans l’Univers,
Oh ! oui, ben seul et c’est sa gloire,

Car y n’a qu’ deux yeux pour tout voir.

Le Ciel, la Terre et les Étoiles
Sont prisonniers d’ ses cils en pleurs.
Y n’ peut donc compter qu’ su’ lui-même.
J’ m’en vas m’ remuer, qu’ chacun m’imite,
C’est là qu’est la clef du Problème,
L’Homm’ doit êt’ son Maître et son Dieu !



XIV

— Quiens ! V’là l’ Souriant en flanquet bleu,
V’là l’ coq qui crach’ son vieux catarrhe
Comme au matin d’ ton agonie
Alors que Pierr’ copiait Judas

(Tu vois c’te bête alle a s’en fout
A sonn’ la diane de la Vie,
La Vie qui n’ meurt pas comm’ les Dieux !)

— Viens çà un peu que j’ te délie
Et que j’ t’aide à sortir tes clous
(Eustach’s pour qui qui nous touch’ra)

Viens avec moi par les Faubourgs,
Par les mines, par les usines
On ballad’ra su’ les Patries
Où tes frangins sont cor à g’noux
(Car c’est toi qui les y a mis !)

Faut à présent leur prend’ les pattes,
Les aider à se r’mett’ debout,
Y faut secouer au cœur des Hommes
Le Dieu qui pionc’ dans chacun d’ nous !



XV

Ou ben alorss si tu peux pas,
Si tu n’as pus rien dans les moëlles,
Retourn’ chez l’Accrocheur d’Étoiles
Remont’ là-haut ! Va dire au Père,
À celui qui t’a envoyé,
Quéqu’ chos’ qu’aurait l’air d’eun’ prière
Qui s’rait d’ not’ temps, eh ! crucifié.
[modifier]XVI
Notre dab qu’on dit aux cieux,

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

Notre daron qui êt’s si loin
Si aveug’, si sourd et si vieux,

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

Que Notre effort soit sanctifié,
Que Notre Règne arrive

À Nous les Pauvr’s d’pis si longtemps,

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

Su’ la Terre où nous souffrons
Où l’on nous a crucifiés
Ben pus longtemps que vot’ pauv’ fieu
Qu’a d’jà voulu nous dessaler.

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

Que Notre volonté soit faite
Car on vourait le Monde en fête,
D’ la vraie Justice et d’ la Bonté,

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

Donnez-nous tous les jours l’ brich’ton régulier
(Autrement nous tâch’rons d’ le prendre) ;
Fait’s qu’un gas qui meurt de misère
Soye pus qu’un cas très singulier.

(C’est y qu’on n’ pourrait pas s’entendre !)

Donnez-nous l’ poil et la fierté
Et l’estomac de nous défendre,

(Des fois qu’on pourrait pas s’entendre !)

Pardonnez-nous les offenses
Que l’on nous fait et qu’on laiss’ faire
Et ne nous laissez pas succomber à la tentation
De nous endormir dans la misère
Et délivrez-nous de la douleur
(Ainsi soit-il !)"


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JEHAN RICTUS par Rémy de Gourmont

"Du temps que M. Gabriel Randon sculptait la Dame de Proue d'une nef qui n'a pas encore vu la mer, nul ne prévoyait que, nouveau Bruant, il dût lancer aux foules troublées les apostrophes argotiques, violentes et goguenardes qui ont fait à Jehan Rictus la réputation singulière d'un poète du pavé et d'un déclamateur du tréteau. Il y a des vocations soudaines et des aiguillages imprévus. M. Randon avait été l'une des voix de l'anarchisme littéraire, au temps où de futurs académiciens démolissaient (très peu) la Société au moyen de phrases élégantes et de sarcasmes spirituels. C'est à lui, je crois, qu'on doit le mot fameux : « Il n'y a pas d'innocent », mot terrible et digne d'un prophète plus biblique, opinion grave qui nous mettait plus bas que la ville maudite d'où Loth ne devait sortir, il est vrai, que pour donner un exemple fâcheux aux familles futures. Enfin, les poètes ayant réintégré leur campement, aux sources de l'Hippocrène, on s'aperçut de la disparition de celui qui taillait, avec un soin délicieux, la proue vierge d'un navire en partance pour les Atlantides : peu de temps après, nous fûmes informés de la naissance de Jehan Rictus et des Soliloques du Pauvre.

Il y avait une rumeur du côté de Montmartre : quelque chose de nouveau surgissait d'entre la foule des diseurs de gaudrioles et de bonne aventure; quelqu'un, pour la première fois, faisait parler, avec un abandon original et capricieux, le Pauvre des grandes villes, le trimardeur parisien, le loqueteux en qui il reste du bohème, le vagabond qui n'a pas perdu tout sentimentalisme, le rôdeur en qui il y a du poète, le misérable capable encore d'ironie, le déchu dont la colère s'évapore en malédictions blagueuses, dont la haine recule si

L'espoir luit comme un brin de paille dans l'étable,

dont l'amertume n'est que du désir ranci, l'homme enfin qui voudrait vivre et que l'égoïsme des élus rejette éternellement dans les ténèbres extérieures.

C'est là un type humain, admissible à la fraternité. Il posera peut-être une bombe, un jour de désespoir ; il ne surinera pas un pante le long des fortifs. Entre ce Pauvre et les humanités basses que célébra M. Bruant, il y a toute la profondeur des douves qui séparent l'homme de l'animalité et l'art de la crapule.

Le Pauvre de Jehan Rictus penche certainement vers l'anarchisme. Comme il est privé de toute jouissance matérielle, les grands principes le laissent froid. Le Socialiste en paletot et le Républicain en redingote lui inspirent un identique mépris et il ne conçoit guère comment les malheureux, doucement leurrés par les politiciens gras, peuvent encore écouter sans rire la honteuse promesse d'un bonheur illusoire autant que futur. Il n'est pas sot, il pense à aujourd'hui et non à demain, à lui-même, qui a faim et froid, et non aux problématiques mômes encore prisonniers dans les reins faciles du prolétariat :

Nous... on est les pauv's'tits Fan-fans,
Les p'tits flaupés... les p'tits fourbus,
Les p'tits fou-fous... les p'tits fantômes
Qui s'ont soupé du méquier d'môme...


Elle est très amusante, cette ronde biscornue, la Farandole des Pauv's'tits Fan-fans.

C'est surtout dans la première pièce du volume, l'Hiver, qu'il faut chercher la pittoresque expression de ce mépris du Pauvre pour tous les professionnels de la politique ou de la bienfaisance, pour les sereines pleureuses, entretenues par la misère qui les écoute et les paie, rentées par les larmes des crève-la-faim, pour tous les hypocrites dont le fructueux métier est de « plaind' les Pauvr's » en faisant la noce. Dans les sociétés égoïstes et avachies, nul commerce ne rapporte davantage que celui de la pitié, et la traite des Pauvres demande moins de capitaux et fait courir moins de dangers que la traite des nègres. C'est tout plaisir. Jehan Rictus dit cela ironiquement, en son langage :

Ah ! c'est qu'on n'est pas muff' en France,
On n' s'occup' que des malheureux ;
Et dzimm et boum ! la Bienfaisance
Bat l'tambour su'les ventres creux !

L'en faut, des Pauv's, c'est nécessaire,
Afin qu'tout un chacun s'exerce,
Car si y gn'avait pas d'misère,
Ça pourrait ben ruiner l'commerce.


Le poème le plus curieux, le plus étrange et aussi le plus connu des Soliloques est le Revenant. On en connaît le thème : le Pauvre attardé dans la nuit resonge à ce qu'on lui a confié jadis d'un Dieu qui s'est fait homme, qui vécut, lui aussi, pauvre parmi les pauvres, et qui, pour sa bonté et la divine hardiesse de sa parole, fut supplicié. Il était venu pour sauver le monde ; mais la méchanceté du monde a été plus forte que sa parole, plus forte que sa mort, plus forte que sa résurrection. Alors, puisque les hommes sont aussi cruels, vingt siècles après sa venue, qu'aux jours de sa venue, peut-être l'heure a-t-elle sonné d'une incarnation nouvelle, peut-être va-t-il descendre pareil à un pauvre de Paris, de même que jadis il vécut pareil à un pauvre de Galilée ? Et il descend. Le voilà :

Viens ! que j'te rgarde... ah ! comm' t'es blanc.
Ah ! comm' t'es pâle... comm' t'as l'air triste...
. . . . . . . . . . . .

Ah ! comm' t'es pâle... ah ! comm' t'es blanc.
Tu grelottes, tu dis rien, tu trembles

(T'as pas bouffé, sûr... ni dormi !),
Pauv' vieux, va... Si qu'on s'rait amis ?

Veux-tu qu'on s'asseye su' un banc,
Ou veux-tu qu'on balade ensemble ?
. . . . . . . . . .

Ah ! comm' t'es pâle... ah ! comm' t'es blanc !
Sais-tu qu't'as l'air d'un Revenant ? . . . .


Et le Pauvre continue, faisant du Christ des misérables un portrait qui, trait pour trait, s'applique à lui, le Pauvre. L'idée n'est pas banale et je ne suis pas surpris qu'à l'audition, dit avec émotion et force par le poète, ce morceau soit d'un effet saisissant.

Plus loin, après avoir exposé à Jésus combien sa religion a dégénéré avec la bassesse des prêtres et la lâcheté des fidèles, Jehan Rictus, le Pauvre, se souvient qu'il est aussi poète lyrique ; il y a là une strophe qui est belle et qui le serait davantage en style pur :

Toi au moins, t'étais un sincère,
Tu marchais... tu marchais toujours ;
(Ah ! cœur amoureux, cœur amer),
Tu marchais même dessus la mer
Et t'as marché jusqu'au Calvaire.


Cela finit par de durs reproches qui ne manquent pas de grandeur :

Ah ! rien n't'émeut, va, ouvr' les bras,
Prends ton essor et n'reviens pas ;
T'es l'Etendard des sans-courage,
T'es l'Albatros du grand Naufrage,
T'es l'Goéland du Malheur !


Ici, c'est l'idée de la résignation qui trouble le Pauvre ; comme tant d'autres, il la confond avec l'idée bouddhiste de non-activité. Cela n'a pas d'autre importance en un temps où l'on confond tout et où un cerveau capable d'associer et de dissocier logiquement les idées doit être considéré comme une production miraculeuse de la Nature. Passons. Finalement le Pauvre reconnaît qu'il a interpellé son lamentable reflet dans la glace d'un marchand de vins. La conclusion de la troisième partie est brutale, mais bien dans le ton de sincérité libertaire qui anime les Soliloques : Toi qui as jeté les hommes à genoux, maintenant remets les debout,

Y faut secouer au cœur des Hommes
Le Dieu qui pionc' dans chacun d'nous.


A la fin du livre intitulé Déception, il y a un morceau particulièrement curieux et qui n'est pas sans faire songer que la grande poésie n'est peut-être pas incompatible avec le style populaire, et souvent grossier, adopté par Jehan Rictus. Il s'agit de la Mort.

Tonnerr' de dieu, la Femme en Noir
La Sans-Remords... la Sans-Mamelles,
La Dure-aux-Cœurs, la Fraîche-aux-Moelles,
La Sans-Pitié, La Sans-Prunelles,
Qui va jugulant les plus belles
Et jarnacquant l'jarret d' l'Espoir;

Vous savez ben... la Grande en Noir
Qui tranch' les tronch's par ribambelles
Et dans les tas les pus rebelles
Envoie son Tranchoir en coup d'aile
Pour fair' du Silence et du Soir !


Les apocopes et les mots déformés n'ont pu gâter tout à fait ces deux strophes, mais comme elles auraient gagné à être écrites sérieusement ! Il m'est vraiment difficile d'admettre le patois, l'argot, les fautes d'orthographe, les apocopes, tout ce qui, atteignant la forme de la phrase ou du mot, en altère nécessairement la beauté. Ou, si je l'admets, ce sera comme jeu ; or, l'art ne joue pas ; il est grave, même quand il rit, même quand il danse. Il faut encore comprendre qu'en art tout ce qui n'est pas nécessaire est inutile ; et tout ce qui est inutile est mauvais. Les Soliloques du Pauvre exigeaient peut-être un peu d'argot, celui qui, familier à tous, est sur la limite de la vraie langue ; pourquoi en avoir rendu la lecture si ardue à qui n'a pas fréquenté les milieux particuliers où il semble que l'on parle pour n'être pas compris ? Ensuite, l'argot est difficile à manier ; Jehan Rictus, malgré son abondance, évolue assez difficilement parmi les écueils de ce vocabulaire. Beaucoup des mots qu'il emploie ne sont peut-être plus en usage, car l'argot, malgré ce qu'il retient de permanent, se transforme avec tant de rapidité que d'une année à l'autre les choses les plus usuelles ont changé de nom. Autrefois, le grand mot des voleurs (et des autres), l'argent, ne gardait que très peu de temps son manteau argotique ; constamment rhabillé, il échappait à la connaissance immédiate des non-initiés. Dès que le nom argotique de l'argent avait passé dans le peuple, les voleurs en imaginaient un autre. Il paraît qu'il n'y a plus de jargon ou argot spécial aux voleurs ; c'est-à-dire que son domaine se serait étendu et aurait pénétré jusque dans les ateliers et les usines : une telle langue n'en demeure pas moins une langue secrète. Tout cela ne m'empêche pas de reconnaître le talent très particulier de Jehan Rictus. Il a créé un genre et un type ; il a voulu hausser à l'expression littéraire le parler commun du peuple, et il y a réussi autant que cela se pouvait ; cela vaut la peine qu'on lui fasse quelques concessions, et qu'on se départisse, mais pour lui seul, d'une rigueur sans laquelle la langue française, déjà si bafouée, deviendrait la servante des bateleurs et des turlupins."

Rémy de Gourmont - "Le IIe Livre des masques, 1898"

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Voyez, aussi, cet article de qualité : Le Dernier poète catholique malgré lui

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Extrait 1

 

Extrait 2

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21/04/2008

Les cadres aussi sont mortels

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=


Je me surprends, vraiment, quand dans le calme je me considère avec distance, à ne pas savoir comment ni où je parviens à puiser la force pour affronter la bêtise quotidienne de mes collègues de travail et de mes supérieurs hiérarchiques qui n’ont rien de supérieur et de hiérarchique que le statut. Recevoir des ordres de ces pauvres satisfaits qui se branlent juste de se savoir là où ils sont est un enfer pour moi. Bien entendu je me fais une raison. Il faut toujours se faire une raison, seul moyen de survivre à la crasse mentale qui m’assiège au jour le jour. La manière qu’a "untel", ô triste cadre, « cadrillon de service » empreint de félicité sociale de me demander chaque jour si « ça va ? » et de me lâcher quelque information professionnelle plus pour afficher devant moi sa maîtrise, oui, la maîtrise qu’il a de sa vie, de son travail, de son accomplissement, que pour être dans l’échange et le partage humain est d’un comique malheureux. Du vent tout cela, mon pauvre trouduc. En temps voulu le sol se dérobera sous tes talons, ou alors tu te retrouveras assailli par les vagues et tu n’auras plus pieds. Je sais ce qu’il pense, c’est écrit dans ses yeux vides qui ont même perdu la verve adolescente qu’ils recelaient il y a encore 5 ou 6 ans de ça : « alors lecteur de Nietzsche de mes deux, seigneur de pacotille, tu as lu 1000 livres que je ne pourrais même pas concevoir mais je suis CADRE A LA FNAC et toi un magasinier sinistre, avec ta vie de merde, tes soucis de fric et ta grande gueule qui ne peut que te desservir. J’ai réussi à éloigner qui il faut de toi, de ton sombre labyrinthe, de tes idées néfastes. Je suis vainqueur par K.O. technique et c’est tout ce que tu mérites, que je te le rappelle à chaque fois que je te croise. »

Oui oui oui, "machin", c’est bien.

J’imagine très bien les chuchotements, à mon égard, cinq jours sur sept, quand à la cantine je m’assois seul avec mon plateau, accompagné de Roger Nimier, Edouard Mörike ou Barrès. Ça doit se concentrer pour ne pas avaler de travers et puiser quelque satisfaction intérieure pour se donner une conscience convenable face à son reflet dans le miroir des chiottes de l’entreprise. Ah ! Ils peuvent tous se targuer d’avoir réussi la saison, d’avoir réceptionné et servi la marchandise en temps et en heure, la prime d’intéressement, la prime de participation n’en seront que plus convaincantes. Ils se foutent du Peintre Nolten ou de savoir si Les épées brillent encore au sommet de La Colline inspirée. Ils veulent du CASH, des divertissements et la fausse assurance qu’ils tiennent leur vie en laisse. ABSURDE. Ils sont tellement mortels.

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20/04/2008

Point Mort...

=--=Publié dans la Catégorie "Humeurs Littéraires"=--=

Être brûlé par ces lectures dont les mots tissent une trame à chaque fois singulière, à chaque fois nouvelle qui m’érige un peu plus loin, un peu plus haut hors la glèbe du potier. Je n’ai rien d’autre, ma fatigue mise à part.

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17/04/2008

Les soviets masqués d'Europe.

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=


Vladimir Boukovsky n'est pas le premier clampin venu... et il n'a pas sa langue dans sa poche...

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13/04/2008

La société

=--=Publié dans la Catégorie "Brèves"=--=

On sait se tenir dans notre jolie société...

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07/04/2008

Le Vin de mes Pères

=--=Publié dans la Catégorie "Musique : Rêve Vénitien..."=--=

Depuis la mort de Willy, je suis un peu éteint et méditatif. Afin de prolonger encore un peu ma méditation, voici 3, non pas versions, mais faces différentes d'un même morceau. "Le Vin de mes pères"... Car Venice c'était ça aussi... de l'expérimentation et de la mise en perspective.

Vous trouverez là une sorte de vision trinitaire...

la Version du Père,

Le Vin de mes Pères - I (mp3) (Paroles : Eric James/Musique : Nebojsa Ciric-Eric James-Franck Schaack-Jean Marc Joffroy)


la version du Fils,

Le Vin de mes Pères - II (mp3) (Paroles : Eric James/Musique : Nebojsa Ciric-Eric James-Franck Schaack-Mourad Baali)



et la version du Saint Esprit...

Le Vin de mes Pères - III (mp3) (Paroles : Eric James/Musique : Frédéric Laforêt-Eric James-Nebojsa Ciric)



Puissance, Douceur et Langue de Feu...

Sur les deux premières versions :

Eric James : Chant
Mourad Baali : Basse
Franck Schaack : Batterie
Nebojsa Ciric : Guitares électriques et acoustiques

Sur la troisième version :

Eric James : Chant et Voix
Frédéric Laforêt : Synthés, programmations
Nebojsa Ciric : Guitares

Texte :

"Plus de silence, plus de vents guérisseurs
Rien que l’Ivresse et les festins de paille
Ceinturé de siècles abêtisseurs
Porte mon seul et tout premier Je t’aime

A l’instant je déconstruis l’Espoir
Etourdi, comme un esprit de la Terre s’installe
S’installe en moi

Comme un Vénitien saoul, je vais sans égards
Ainsi guidé, en aveuglé j’opère
Pas de rêveurs ni de suiveurs, où la Vigne
Pour moi et les Amants se dresse

Au déclin je vais rouler sans peine
Estourbi par un esprit de la Terre
J’accède et cède

En aspirant le Vin de mes Pères
Expulsé du Ciel
Et tant pis pour l’Esprit du Large
L’Esprit du Large...

...From the Apson to the space around
Past the Reason, a white horse through my heart
...Coming straight to this world where there’s nothing I can hide
Coming straight to this life
...When I’m drinking the Wine..."


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30/03/2008

Willy...

=--=Publié dans la Catégorie "Musique : Rêve Vénitien..."=--=


Willy Vedder...


...celui en bermuda, qui s'avance, guitare à la main, lors de balances sonores avant un concert nocturne en plein air dans l'Oise...


...et sur cette photo, dans le fond à droite...


...Willy Vedder, cher compagnon d'infortune, est mort.



Mickey, un fidèle de Venice, m'a appelé Vendredi soir dernier pour me l'annoncer. Je n'en sais pas plus. Il est passé comme une comète dans Venice, de l'été 1997 à l'été 1998, grosso modo. Ce fut un plaisir de jouer à ses côtés. Un mec bien. Gentil. Un vrai manouche dans l'âme. En été il aimait dormir à la belle étoile. Mais au bout d'un an de présence au sein du groupe, ses démons l'ont rattrapé, l'alcool, la drogue, et il a lâché le groupe à notre plus grand regret à tous, après un incendie chez lui, en nous en parlant avec un air gêné. Après son départ je n'ai plus eu envie de jouer avec un autre guitariste.

Je n'ai connu Willy qu'au sein du groupe. Sa fragilité, son talent évident, son manque de rigueur aussi, qui n'enlevait rien cependant à son efficacité... et sa guitare pourrie que lui seul parvenait à faire sonner. Mais je pense à lui avec Force et Nostalgie. Je pense à lui au présent, aussi. Là, dans mon coeur.

Si je suis en mesure, un jour, de mettre la main sur d'autres photos et des enregistrements avec lui, je les mettrai en ligne... pour la beauté du geste et conter ce qui fut notre Geste à nous. En attendant, voici 4 titres pour penser à lui tout de même, même si il ne joue pas dessus... 4 "démos" enregistrées fin 2001/début 2002... ces morceaux ne sont pas les versions qu'on retrouve sur l'album définitif, "Soudain l'Ouverture", elles n'étaient, ici, qu'à l'état d'élaboration, en construction.

Les Récifs du Mal (Démo 2002).mp3

Les Récifs du Mal (Paroles : Eric James/Musique : Nebojsa Ciric-Franck Schaack-Frédéric Laforêt-Eric James)


"N'attend pas que je te revienne
Revienne faire face
La pleine mer est comme un long rêve
Dont on ne sort pas

Je t'invite à stopper les recherches
Te convie à mieux baisser les bras
Puisses-tu faire luir le feu sans flammes

Un seul corps pour véhicule magique
Quand l'esprit n'a plus d'importance
Les pensées, dans le ciel s'imbriquent
En clownesques éminences

Un souple nauffrage
M'a désarmé de tout courage
Sur un semblant d'esquif
Je dérive entre les récifs

J'ai quitté la ville saturée de lumières
Pour une sombre nuit dénuée d'adversaires
Le fruit défendu que ta bouche dévore
Je n'aurais pas même su le mordre

Un triste nauffrage
Hors du destin et de ses rouages
Dieu me sort de tes griffes
Pour me perdre entre les récifs

Il n'est pas d'autre sortie secrète
Pour une âme en perdition
Que de s'exercer à mourir
Pour apprendre à vivre

Dieu est nauffrage
Il m'a sourit, il me dévisage
Sous son oeil attentif
Je dérive entre les récifs
Je dérive entre les récifs
Entre les récifs, entre les récifs
Entre les récifs du Mal
Les récifs du Mal..."


L'Art (Démo 2002).mp3

L'Art (Paroles : Eric James/Musique : Nebojsa Ciric-Frédéric Laforêt-Eric James-Franck Schaack)

"Et puis le drame réclame un autre artiste
Qui saurait l'art d'oeuvrer sans artifices
Qu'il sache rire aux éclats du miroir
Rire de son plus long calvaire
Et tout peut commencer

Melusine croise mon regard
Au carrefour des chemins
Chevelure-terre, corps-ivoire
Douce avalanche carmin de sa langue fourche
Je divague
Confesse le coup de foudre
Me glisse dans l'éclaircie
Dans le cercle transi. L'épilogue
Pour débrouiller le fil
Détacher ma pirogue
Remonter la rivière insipide

Un coeur brisé
Un coeur asservi
Au calvaire tout peur commencer
Recommencer

Je vois descendre sur moi
La fine manne au goût de fiel
Dans le rang des carnassiers
On vaque à une vive affaire
Une curieuse affaire
Que le vent tourne et fléchisse vite
Nos légions d'âmes factices et revèches
Nausée du brave. Précipice. Drague.
Du fond l'imposture se révèle
Serpent de haine !
Il a faim de forces
Butine au torse

Un coeur épuisé. Brisé.
Somnifère
Un coeur asservi
Au calvaire tout peut commencer
Recommencer

Melusine vient s'enlacer. Elle fait le héros prisonnier
Pas d'issue. C'est l'issue :
Apprivoiser l'art
Dans la peau du carnassier. Mon addiction résignée.
Pas d'issue. C'est l'issue
Apprivoiser l'art
Eblouissant tour de force. Tuer le serpent à la noce.
Pas d'issue. C'est l'issue :
Apprivoiser l'art"


Bon Appétit aux Tueurs (Démo 2002).mp3

Bon Appétit Aux Tueurs (Paroles : Eric James/Musique : Mourad Baali-Nebojsa Ciric-Frédéric Laforêt-Eric James-Franck Schaack)

"Sèche tes beaux yeux attristés
Par l'envie des hommes
Cette folie des hommes
Laisse les venir confisquer ta couronne.
C'est le temps des mauvaises actions
Des maledictions
Et si la vie tourne à l'échec
Serre moi fort

S'ils veulent nous décimer
Nous voir assassinés
Qu'ils viennent
C'est un beau jour si l'on meurt
Bon appétit aux tueurs

Intrépides, pauvres et sauvages
A quoi bon s'enquérir d'un nouvel âge
En ce pays tombe la discorde
Et les faux derviches tourbillonnent à se tordre
Edifiant tous les chiens du nouvel ordre

S'ils veulent nous décimer
Nous voir assassinés
Qu'ils viennent
C'est un beau jour si l'on meurt
Bon appétit aux tueurs

Bon appétit aux tueurs, longue vie aux tueurs
Soyons vivants, soyons dignes
Quand à fruits nous fait signe
Et s'ils veulent nous décimer, qu'ils viennent...
Intensifions nos prières, intensifions l'incantation
C'est un beau jour si l'on meurt
Bon appétit aux tueurs..."


Danse du Soleil (Démo 2002).mp3

Danse du Soleil (Paroles : Eric James/Musique : Eric James-Nebojsa Ciric-Frédéric Laforêt-Franck Schaack)

"Insoumis en vase clot.
Ton allure est si terne.
A moins que tu n'exploses,
Que tu n'oses l'étincelle

Dans le sang des hécatombes,
Que le Diable additionne
Dans les cendres et les décombres,
Tu n'es rien ni personne

A nouveau proscrit en enfer
Creuse voir sous la chair
Et trouve la perle.
L'or du Mexique
Use tes flèches.
Roi des tropiques

L'homme dérisoire s'en ira au supplice
Sur le fil du rasoir, sous le vent de la crise
Ou les portes lui sont closes et retiennent son épouse
Ou se prostitue la rose Babylone et ses fourbes

Ami, quel cancer nous infeste ?
Quelle féerie nous guette ?
Et souille la perle.
Ruine le Mexique.
Brise nos flèches.
Noie les tropiques

Dame fortune.
Je ne sais pas
Si les jeux sont déja faits
ou s'ils se préparent
Je suis mis de coté.
Posé a terre. Un corps paralisé.
En état de siège
Une obscure ruse essayant de taire
Ces voix qui m'obligent à la vision claire
C'est un homme à craindre
Celui qui approche, Celui que j'incarne
Sous une autre forme, sous une autre forme...
Creuse voir sous la chair

Et trouve la Perle.
L'or du Mexique
Tire tes flèches.
Roi des tropiques
Et trouve la perle. Trouve la perle..."


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Sur ces quatre titres :

Franck Schaack : Batterie, percussions
Eric James : Chant, orgue sur "Les Récifs du Mal"
Frédéric Laforêt : Basse, claviers, guitare acoustique accordée en "Do" sur "Bon Appétit aux Tueurs", second orgue sur "Les Récifs du Mal"
Nebojsa CIRIC : Guitares
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Willy... ô Willy...

"Et des enfants grandissent, aux regards profonds
Qui ne savent pas, grandissent et meurent
Et les hommes vont leur chemin.

Et les fruits, d'amers deviennent doux
Et tombent de nuit, comme l'oiseau mort
Et demeurent l'espace de quelques jours et pourrissent.

Et toujours souffle le vent et toujours encore
Nous entendons et proférons mainte parole
Et sentons passer le plaisir et la fatigue dans nos membres.

Et des routes courent parmi l'herbe, et ça et là
Sont des lieux habités avec leurs torches, leurs arbres ; leurs étangs
Et menaçants et desséchés comme la mort...

Pourquoi les a-t-on construits ? ne deviendront-ils jamais
Semblables ? Et ne sont-ils pas infiniment nombreux ?
En quoi se changent le rire, les larmes et la pâleur ?

Que nous importe cela et tous ces jeux ?
A nous qui sommes grands pourtant, et solitaires
Et errants sans jamais poursuivre aucun but ?

Que nous importe d'en avoir tant vu ?
Cependant il en dit long celui qui prononce ces paroles :
« Voici le soir », mots d'où deuil et signification
S'écoulent comme le miel lourd du rayon vide."



Hugo von Hofmannsthal (Ballade de la vie Extérieure)

"Chaque fois que nous ouvrons la bouche, dix mille morts parlent à travers nous." Hugo von Hofmannsthal

29/03/2008

Extase... et... Initiation...

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Extase...


Magma... toujours là...

et...

Initiation...

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27/03/2008

Le talent...

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Ce jeune Sungha Jung manie une guitare plus grande que lui... mais c'est déjà un grand...








Et ici... la Totale...

15:00 Publié dans Music... | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Sungha Jung, Guitare | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

25/03/2008

Les Portes de la Perception...

=--=Publié dans la Catégorie "Music..."=--=
















James Douglas Morrison, An American Poet

Texte publié dans la revue Eye, copyright Jim Morrison, 1968



"Il s'exposait délibérément, et vivait l'horreur de tenter l'assemblage d'un mythe devant un milliard d'yeux mornes, secs et impitoyables. En quittant son avion, il s'avançait résolument vers la clôture métallique, dédaignant les conseils de ses agents, pour toucher des mains. Toutes proches et prêtes à répondre à son invitation à venir l'admirer, de l'adoration ou des armes. Cette constante certitude intérieure inexprimée que son corps était une cible à chaque instant public. Des perceptions nerveuses nouvelles fleurirent au creux du jardin de la moelle épinière de son cou. On disait que lorsqu'il vous regardait, il mettait à nu le contenu de votre boîte crânienne. Naturellement. Car les sourires d'un admirateur bien intentionné cachent aisément la mort derrière des dents de chat. Ni paranoïa ni insouciance ignorant la mort, mais une connaissance délicate et sensuelle de la violence dans un présent éternel.

Cyclopes. Les gens qui ressemblent aux lézards primitifs ont un joyau à l'intérieur du crâne. Appelé la "glande pinéale", il est situé dans le cerveau à la jonction des deux hémisphères du cervelet. Chez certains individus ce vestige de troisième oeil est encore sensible à la lumière.

L'œil résiste à une analyse séparée. Prenez conscience que les yeux sont en fait deux globes mous qui flottent dans l'os.

Les impressions me voient.

Demandez à quiconque quel sens il préserverait par-dessus tout autre. La grande majorité répondrait la vue, abdiquant un million d'yeux à l'intérieur du corps en faveur de deux yeux dans le crâne. Aveugles, nous pourrions vivre et peut-être trouver la sagesse. Sans le toucher, nous deviendrions des blocs de bois.

L'oeil est une bouche avide
qui se nourrit du monde.

Architecte de mondes-images
en concurrence avec le réel.

Il y a des planètes jumelles
dans le crâne.

L'œil est dieu. Et il est le monde,
car il a son propre équateur .

Arrachez l'œil d'un animal dans l'obscurité et placez-le devant un objet, clair et brillant, une fenêtre se détachant sur le ciel. Le contour de cette image se grave sur la rétine, visible à l'œil nu. Cet oeil excisé est un appareil photographique primitif, le pourpre rétinien tenant lieu d'émulsion.

Kuhne (1), à la suite des résultats positifs qu'il avait obtenus sur des lapins, se vit présenter la tête d'une jeune victime de la guillotine. L'œil fut extrait et fendu suivant son équateur. L'opération fut réalisée dans une pièce spéciale, rouge et jaune. La rétine de l'œil gauche présentait une image distincte mais ambiguë, impossible à déterminer. Il passa les années suivantes à rechercher sa signification, la nature exacte de l'objet, si objet il y avait.

Les fenêtres sont les yeux de la maison. Regardez à l'extérieur de votre prison corporelle, d'autres jettent un coup d'œil à l'intérieur. Le mouvement n'est jamais à sens unique. "Voir" implique toujours l'éventualité d'une atteinte à notre intimité, car en nous dévoilant l'immensité du monde extérieur, nos yeux ouvrent aux autres l'accès de l'infinité de nos propres espaces intérieurs.

Quel est le sort des yeux pendant le sommeil ? Ils bougent constamment, comme les spectateurs d'un théâtre.

Les pupilles se dilatent lors d'états anormaux. Les drogues, la folie, l'ébriété, la paralysie, l'épuisement, l'hypnose, le vertige, une intense excitation sexuelle. L'oeil découvrant son océan lorsque l'idée même d'océan est révolue.

Enkidu (2) était un homme sauvage, un animal parmi les animaux.
Un jour, à un point d'eau, une femme offrit sa nudité à son regard, et il y fut sensible. Ce jour-là il partit avec elle pour se conformer aux artifices de la civilisation.

Le choix d'un partenaire pour l'accouplement est d'abord basé sur l'attrait visuel. Pas sur l'odeur, le rythme, la peau. C'est une erreur de croire que l'œil peut caresser une femme. Une femme est-elle faite de lumière ou de chair ? Son image n'a jamais de réalité pour l'œil, elle s'inscrit aux bouts de vos doigts.

Dans l'Ars Magna, la Grande Oeuvre, l'Alchimiste crée le monde dans sa cornue.

Les yeux sont les organes génitaux de la perception, et eux aussi ont établi une tyrannie. Ils ont usurpé l'autorité des autres sens. Le corps devient une mince tige maladroite pour supporter l'œil dans ses rondes.

De quel droit les yeux devraient-ils être qualifiés de " fenêtres de l'âme" et de clé de la communion humaine la plus profonde, et le toucher réduit à un vague contact charnel.

Le corps n'est pas la maison, il est l'intérieur de la maison.

Les aveugles copulent, des yeux dans leur peau.

L'oeil est de la "lumière au repos".

(Est-ce nous qui créons la lumière dans l'œil ? La lumière est-elle nôtre, ou nous vient-elle du monde ?)

Dans la mythologie égyptienne, l'œil est le symbole d'Osiris, d'Isis, d'Horus, et du dieu soleil Râ.

Ptah (3) enfanta les hommes par sa bouche, les dieux par ses yeux.

Temple-cité de Brak (3000 av. J.-C.). Découverte de milliers de petits visages humains plats en albâtre noir et blanc, dépourvus de nez, de bouches, d'oreilles, mais aux yeux gravés et minutieusement peints. Appelé le Temple de 1'Oeil : pour abriter ces offrandes à une divinité.

OEdipe. "Réalité" de ses seins dénudés. Son corps. "Tu as porté ton regard sur ce que tu n'aurais jamais dû voir." Yeux arrachés avec une broche de la robe de la défunte Jocaste.

Punissez les yeux. Seins ridés d'une vieille femme. Il est conduit de village en village par un jeune garçon. Et partout ils attendent ses paroles.
Tirésias, dont on dit que pendant sept ans il se fit passer pour une femme, découvrit par hasard Athéné qui se baignait dans la forêt. Elle rendit aveugles les yeux importuns.

Saül de Tarse sur la Route de Damas. La cécité l'éleva jusqu'à saint Paul.
Pourquoi la cécité est-elle signe de sainteté ?

L'alchimie offre à l'homme une forme originale d'héroïsme. Le Mani (4) enseignait que l'homme est un aide créé par le Dieu Suprême de la Lumière pour contribuer par sa vie et par ses efforts au rassemblement des atomes de lumière diffus, et de ce fait affaiblis, et pour les élever de nouveau. Car la lumière a brillé dans les ténèbres et s'est gaspillée, et elle est en grand danger d'être entièrement absorbée.

Le procédé de transformation des métaux de base en or est appelé "projection".

Dans la pénombre, la forme est sacrifiée à la lumière. En pleine lumière, la lumière est sacrifiée à la forme.

Code de la lumière. L'œil est malade. Arrachez-le. Le docteur supprime l'œil pour sauver le corps. Pour ce faire, il doit sectionner le nerf optique qui relie l'œil au cerveau. Avant la pratique de l'anesthésie, on a souvent rapporté que l'incision du scalpel induisait de la lumière au lieu de la douleur.

Progressivement, les objets se définissent à l'extérieur du corps.

L'œil est issu de la lumière, pour la lumière. Des organes et des surfaces indistinctes évoluent vers leur forme unique. Le poisson est façonné par l'eau, l'oiseau par l'air, le ver par la terre. L'œil est une créature du feu."








Les notes appartiennent au texte original, à l'exception de la (3).

(1) Wilhelm Kuhne, physiologiste allemand du XIX' siècle, qui fit d'importantes découvertes dans le domaine de la chimie de la digestion et dans celui de la physiologie des muscles et des nerfs.

(2) Enkidu, héros légendaire qui apparaît comme le compagnon d'un personnage nommé Gilgamesh, dans l'épopée littéraire de Gilgamesh, écrite vers 2000 av. J.-C. à Sumer, région qui correspond à l'Irak contemporain.

(3) Ptah est un dieu intéressant.

(4) Mani, fondateur au troisième siècle en Iran de la religion manichéenne, interprétation dualiste du monde, qu'elle divise entre bien et mal. Il prêchait l'ascétisme et répandit sa nouvelle foi à travers la Perse entière.

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24/03/2008

Islam ?

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

Un peu d'humour...





Et un peu de réalité...



LA Religion qui est en expansion n'est plus l'Islam, mais le Christianisme tendance évangélique. Le mouvement a même tendance à exploser au Maghreb... en Iran... les barbus font la grimace. Ne doutez pas un seul instant que les USA ne soient pas derrière cette affaire... et c'est tant mieux !

21:08 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : Islam, Christianisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

20/03/2008

« Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté. »

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

Chez les barbus, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté.



Je sais pas... mais le monsieur il a l'air énervé... ou alors il est défoncé. Probablement les deux.

15:00 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Islam, Hamas | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

18/03/2008

Neil Young, Apocalypto, Sollers... et les Jésuites.

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

Adolescent, j'écoutais la chanson de Neil Young, "Cortez the killer" en jubilant.

Les sons de guitares chaleureux, la voix plaintive de Monsieur Young, la production serrée et sèche comme un désert de poussière, tout cela me parlait, évoquant dans mon âme des choses secrètes que je ne parvenais pas à formuler, mais qui faisaient, d'écoute en écoute, leur chemin vers le palais de ma compréhension. Il y avait, surtout, les parties "lead" de la chanson, exécutées par un Neil inspiré, avec une guitare aux intonations mélancoliques, sur mode mineur, comme si elles décrivaient en saignant les effluves d'un monde serein évanoui dans une lointaine douleur dont le feedback n'en finissait plus de nous parvenir encore et encore.

"He came dancing across the water
With his galleons and guns
Looking for the new world
In that palace in the sun.
On the shore lay Montezuma
With his coca leaves and pearls
In his halls he often wondered
With the secrets of the worlds.

And his subjects
gathered 'round him
Like the leaves around a tree
In their clothes of many colors
For the angry gods to see.
And the women all were beautiful
And the men stood
straight and strong
They offered life in sacrifice
So that others could go on.

Hate was just a legend
And war was never known
The people worked together
And they lifted many stones.
They carried them
to the flatlands
And they died along the way
But they built up
with their bare hands
What we still can't do today.

And I know she's living there
And she loves me to this day
I still can't remember when
Or how I lost my way.

He came dancing across the water
Cortez, Cortez
What a killer.


Bon, à part la rapide allusion au sens du sacrifice, "And the women all were beautiful, And the men stood straight and strong, They offered life in sacrifice, So that others could go on", sans que l'on puisse d'ailleurs vraiment comprendre de quel type de Sacrifice il s'agit, on retient surtout que les femmes étaient toutes belles, les hommes dignes, et ô miracle, "la haine n'était qu'une légende et la guerre jamais connue" ("Hate was just a legend, and war was never known"), de quoi se faire s'ébahir les tenants démocrates de la pensée unique, naïve et pleurnicharde qui croient par cette curieuse haine de soi que l'homme blanc surtout, l'européen génocidaire symbolisé ici par le tueur Hernán Cortés, est à l'origine de tous les malheurs sur la surface de ce globe et que s'il abandonnait un peu ses valeurs égocentriques et conquérantes le monde (comprenez : le tiers-monde surtout) ne s'en porterait que mieux.

J'ai 42 piges et j'aime toujours beaucoup cette chanson, à la différence que je peux, aujourd'hui, l'entendre avec les oreilles qui conviennent et ne pas céder aux sirènes lisses et ensorceleuses qui s'y cachent.

De fil en aiguille...

L'autre soir, vers 2h00 du matin, je suis tombé sur le saisissant film de Mel Gibson, "Apocalypto", sur Canal +. J'ai bien calé le casque sur mes oreilles, me suis posé dans le canapé, et armé de thé vert et de fumigènes, j'ai entamé le voyage initiatique. Détendu mais concentré. "Bateau Ivre" descendant l'Amazone ou l'Orénoque.

Pardonnez-moi mes égarements, je sais bien que les Mayas, évoqués dans le film, ne se trouvent pas aux contours de l'Amazone ou de l'Orénoque, mais j'aime bien utiliser mes figures de style. J'écris aussi pour m'amuser, faut pas déconner, n'est-ce pas ?

... et je me suis pris une claque comme il faut. Le jeu des acteurs, la fougue de la mise en scène et la volonté du réalisateur controversé de "La Passion du Christ" de faire passer sa vision, non pas de l'Amérique précolombienne contrairement à ce que tout un tas d'abrutis lecteurs de Télérama ont pu croire, mais de notre monde d'aujourd'hui, ici et maintenant si je puis dire, tout cela fait oublier l'absence de nuances quant à la description des indiens en question et les erreurs historiques que les spécialistes de la question ont reproché au réalisateur. Tout comme Zack Snyder avec le film "300" ou Francis Ford Coppola avec le film "Apocalypse Now", Mel Gibson se sert d'un substrat historique pour développer sa vision de notre monde finissant. Je doute fort qu'il ait souhaité faire avec "Apocalypto" un film sur la civilisation Maya. Ce n'est pas son propos. C'est notre Civilisation qui est dans sa ligne de mire. Et il ne l'épargne pas, par de multiples suggestions visuelles et verbales, à commencer par cette citation de Will Durant mise en exergue au début du film : « Une grande civilisation n’est conquise de l’extérieur que si elle est détruite de l’intérieur. » De même que Zack Snyder se sert de la bataille des Thermopyles, en 480 avant JC, pour nous parler de la confrontation entre un Empire Cosmopolite (symbolisé par Xerxès Ier) et un peuple libre aux moeurs identitaires, aristocratiques et guerrières (symbolisé par le Roi Léonidas Ier de Sparte) avec le sens du sacrifice comme valeur suprême, de même que Francis Ford Coppola utilise la guerre du Viêt Nam moins pour parler de la guerre et de la violence que de la noirceur de l'âme humaine, Mel Gibson a souhaité faire un film Chrétien et il y est parvenu avec style, sans évoquer ni le Christ, ni le monothéisme, ce qui est un exploit, à part les quelques secondes finales où l'on voit arriver les premiers conquistadors accompagnés d'un prêtre tenant une croix.

L'humble tribu de "Pat de Jaguar", le héros du film, veille le soir en écoutant le vieux sage de la tribu conter des paraboles presque bibliques mais transposées dans l'univers culturel indien. Durant une veillée collective il leur dit que l’être humain en désirant toujours plus finira par épuiser la terre qui le nourri :

Un homme était assis seul
profondément enfouis dans la tristesse.
Et tous les animaux vinrent près de lui et dirent :
"Nous n'aimons pas te voir triste
demande nous ce que tu veux et tu l'auras."
L'homme dit : "Je veux avoir une bonne vue."
Le vautour lui répondit : "Tu auras la mienne."
L'homme dit : "Je veux être fort."
Le jaguar dit : "Tu seras fort comme moi."
L'homme dit : "Je désire connaître les secrets de la terre."
Le serpent répondit : "Je te les montrerai."
Et il en fut ainsi de tous les animaux.
Et quand l'Homme eut tous les cadeaux qu'il purent donner,
il partit.
Le hiboux dit alors aux autres : 
"Maintenant l'homme sait beaucoup de choses et est capable d'en faire autant..."
"Et j'ai soudain peur."
Le cerf dit : "L'homme a tout ce dont il a besoin. Sa tristesse va cesser."
Le hiboux répondit : "Non."
"J'ai vu un creux dans l'Homme... profond tel une faim qu'il ne pourra jamais assouvir..."
"C'est cela qui le rend triste et lui fait vouloir..."
"Il continuera à prendre et à prendre..."
"Jusqu'au jour où le monde dira : Je ne suis plus et n'ai plus rien à donner."

Ils vivent simplement en chassant, leurs moeurs sont celles du clan uni par des règles ancestrales, ils font preuve d'humour et d'amour, ont des loisirs sans chichis, ne s'embarrassent pas de langage châtié et puritain pour nommer les choses ou parler de sexe. Des gens normaux en quelque sorte, Vivant en harmonie avec leur environnement.

Les guerriers qui viennent s'emparer d'eux, par contre, car c'est là le point de départ du film, viennent de la ville construite en Pierre au milieu d'une jungle déforestée (déjà), avec des habitants dévorés par une sorte de peste, l'environnement pollué par les déjections des taudis, les ressources naturelles épuisées dans des champs en terrasses asséchés, la compassion n'y règne pas, ni à l'égard des malades, ni à l'égard des sacrifiés qui ne le sont que pour trouver la faveur des dieux et une sortie hors leur situation de crise qui semble universelle. Dans la cité, les nobles bénéficient de positions sociales enviées, tandis que le bas peuple des paysans espère misérablement que les sacrifices lui seront favorables. Les regards que jette le peuple sur des dames aristocrates locales se frayant un chemin vers la pyramide, hissées au dessus de la masse par des porteurs, montrent bien, sans qu'il y ait nécessité de mots, que la haine couve. Et les dames en question ne semblent pas du tout rassurées. Par contre, peuple comme aristocrates, communient d'un même cri unanime à chaque coeur arraché et présenté au Soleil, à chaque tête tranchée et précipitée comme un ballon du haut des marches sacrées de la pyramide, au sommet desquelles le prêtre et le prince se sourient avec cette assurance satanique de posséder le pouvoir et de manipuler tous ces sujets entre leur pouce et leur index comme bon leur semble. Enfin, tout ce joli monde hystérique semble en proie à la transe, à la fièvre, à la communion collective festive, aux drogues probablement, si ce n'est à des formes de possession. Le Démon est bel et bien là lorsqu'on ne le soupçonne guère. On se croirait à un défilé de Jean-Paul Gould, mâtiné de Techno Parade, de cohortes de Nuremberg aux plus obscures heures de l'Histoire du XXème Siècle, et l'ivresse qui se saisit du peuple face au prêtre ressemble, à s'y méprendre, à l'ivresse qui s'emparait des allemands lors des discours fédérateurs du Führer ou qui s'empare encore des fanatiques lors des concerts Rock. Souvenez-vous du propos du groupe Pink Floyd dans leur chef-d'oeuvre The Wall. Les masses ont besoin de religiosité pour garder la tête haute et les salauds qui mènent la danse l'ont très bien compris. Le Führer, le Duce... ou notre chère démocrassouillardise avec ses nobles idéaux humanitaristes. Certes, la démocratie qui est la nôtre n'ouvre pas des camps d'extermination, ne brûle pas les livres en autodafés religieusement organisées, mais par d'autres voies, très douces et mièvre, nous arrache le coeur et nous tranche la tête avec... l'assentiment général.


apocalypto
13mn28s



Nous sommes loin, dans le film, des paroles ingénues de Neil Young. Et même si la volonté de Mel Gibson n'a pas été de suivre à la trace les faits historiques connus sur les Mayas, il faut reconnaître que sa description de la cité macabre où les sacrifices s'enchaînent à la pelle comme autant de sollicitations propitiatoires que le sang des victimes vient quémander à d'obscures divinités, n'est pas très loin de ce qu'étaient les cités Mayas ou Aztèques à la veille de leurs chutes. Il est vrai que la confusion règne un peu, car au moment de l'arrivée des espagnols les cités Mayas sont vides, leur civilisation étant déjà depuis un moment en décadence avancée. C'est plutôt la civilisation des Aztèques située aux contours de Mexico dans les haut-plateaux du Mexique central qui brille encore, alors que les cités Mayas, situées plus au sud, vers les actuels Honduras, Belize et Guatemala se sont éteintes depuis un moment.

Mais les faits historiques, que disent-ils ?

Les chroniques espagnoles disent une chose, mais depuis quelques années les archéologues ont découvert de très nombreuses preuves matérielles qui viennent corroborer les chroniques en question. Les archéologues ont prouvé que les sacrifices pré-hispaniques mettaient en œuvre un large éventail de méthodes pour tuer avec brutalité et intentionnellement. De nombreux chercheurs ont cru que les récits espagnols étaient faussés afin de dénigrer des cultures considérées comme primitives et sauvages, d’autres affirmaient que les sacrifices étaient limités aux guerriers capturés, certains admettaient que les aztèques étaient sanguinaires mais pensaient comme Neil Young que les mayas l’étaient moins. « Nous avons à présent les preuves matérielles pour confirmer les chroniques littéraires et picturales », déclare l’archéologue Leonardo López Luján. Il ajoute : « Les courants “pro-indiens” ont toujours nié ce qui était arrivé ; ils disaient que les textes mentaient ».Davíd Carrasco, un expert en religions d’Amérique Centrale de la Harvard Divinity School déclare : « Les espagnols ont probablement exagéré le nombre des victimes pour justifier une guerre supposée juste contre l’idolâtrie, mais il n’y a plus l’ombre d’un doute sur la nature des tueries. Les textes illustrés indiens, connus sous le nom de Codex, aussi bien que les chroniques espagnoles de l’époque, indiquent que les indiens pratiquaient de multiples formes de sacrifices humains.» Une confirmation est venue sous la forme de tests chimiques poussés sur les planchers de stuc des temples aztèques, tests par lesquels il a été démontré qu’ils avaient été maculés en grande quantité de fer, d’albumine et de matériaux génétiques correspondant à du sang humain.
L’élite Maya et Aztèque étaient obsédées par le sang et le rite de la saignée constituait un important aspect de tout grand événement du calendrier maya. La saignée servait à se concilier le Dieu Soleil. Dans le film de Mel Gibson, le Maître de Guerre qui livre les prisonniers au prêtre pour le sacrifice, se saigne la paume de la main en signe d'allégeance au Dieu Soleil et à la communauté qui est la sienne. C'est le sang qui nourrit l'Univers.



Les deux individus qui ont contribué à la conquête première de l'Amérique Latine étaient Francisco Pizarro et Hernán Cortés qui au début du 16ème Siècle s'aventurent vers les territoires intérieurs, alors que Christophe Colomb se contente lors de son premier voyage (en 1492) d'accoster les Bahamas, Cuba, Saint-Domingue ; lors de son deuxième voyage (1493/1496) il explore la Guadeloupe, Porto Rico et la Jamaïque ; enfin, lors de sa troisième expédition (1498/1500) il ne s'aventure par le delta de l'Orénoque que vers les limites de la Colombie.
Christophe Colomb est un homme désintéressé, qui prie, qui pense qu'il faut convaincre les indigènes par la douceur et l'exemple du bien fondé de sa foi catholique. Francisco Pizarro et Hernán Cortés, eux, sont des guerriers qui vivent comme de véritables aventuriers. Pizarro est illettré. Tous deux témoignent d'une rapacité rare, "La Fièvre de l'Or" ne leur en fera pas trouver autant qu'ils le souhaitent.

Cependant, à quelle réalité le doux Christophe Colomb ou les deux brutes, Pizarro et Cortés, furent-ils confrontés ?

Nous sommes dans les Caraïbes ou en Amérique Centrale et en Amérique du Sud. Les indiens qui vivent ici n'ont aucune coutume en commun avec les indiens des plaines de l'Amérique du Nord. Ici, les tribus pratiquent le Sacrifice Humain et s'adonnent joyeusement à l'Anthropophagie. Dans les Caraïbes, les guerres entre tribus sont constantes. Le But ? La "razzia" pour pouvoir s'emparer de ses congénères afin... de les bouffer.

Chez les Mayas et les Aztèques afin de rendre gloire au dieu Soleil, pour le nourrir ou l'apaiser, il fallait immoler des victimes si possible choisies chez l'ennemi. Dans certains cas, des volontaires s'offrent volontairement comme sacrifice, même parmi l'élite. Quand ils pénètrent dans les cités Aztèques, les conquistadors témoignent de leur plus profond dégoût à l'égard de ce qu'ils y trouvent, car on est loin, alors, des images "touristiques" que nous prônent les cartes postales mondialistes en provenance de ces régions... ou, comme je le disais, nous sommes à l'opposé des paroles gentillettes de Mister Neil Young : partout règne une puanteur cadavérique, les murs sont barbouillés de sang, les mouches purulent, des charniers s'amoncellent à ciel ouvert aux pieds des pyramides où se déroulent les sacrifices, des femmes (dites vierges), des prisonniers de guerre (comme dans le film de Gibson), de jeunes enfants... On leur arrache le coeur encore battant et on barbouille les murs de ce sang innocent... On précipite, ensuite, les cadavres encore chaud en bas de l'édifice afin que ceux-ci soient dépecés et dévorés. Un des témoins occulaires de l'époque, Bernal Diaz del Castillo, raconte : "Chaque jour, les indiens sacrifiaient devant nous trois, quatre, cinq hommes dont le sang couvrait les murs." Chaque jour. "Ils coupaient bras, jambes, cuisses et les mangeaient, comme chez nous, la viande de boucherie." Histoire Véridique de la conquête de la nouvelle-Espagne par Bernal Diaz del Castillo (Édition, La Découverte)

Chez les Aztèques c'était ainsi... mais dans les Andes, chez les Incas, c'était la même chose : abomination et cruauté. Les enfants promis au sacrifice étaient engraissés avant.


(Inca children fattened up for sacrifice - 1 min 32 s. - en anglais (Enfants Incas engraissés pour le Sacrifice) BBC News).


Il me semble important de préciser que si quelques 300 conquistadors ont été en mesure de dominer des Nations indiennes puissantes en quelques courtes années, ce n'est pas uniquement parce qu'ils avaient quelques armures, d'inquiétants chevaux (le cheval est inexistant sur le territoire américain avant l'arrivée des Européens, tant au Nord qu'au Sud, et il impressionne les autochtones), des fusils et des pistolets qui tiraient un seul coup et qu'il fallait recharger, non, c'est précisémment parce qu'ils ont reçu le soutien Massif de toute une population qui n'en pouvait plus d'être esclave d'une telle terreur, les mères et les pères ne voulaient plus donner leurs filles vierges au dieu Soleil et les petites nations indiennes qui subissaient le joug des grandes voulaient s'émanciper. Ainsi, les Tlaxcaltèques fournirent à eux-seuls 6000 hommes à l'armée de Cortés.

Continuer de voir les civilisations précolombiennes comme des havres de paix et de bonheur que les horribles espagnols seraient venu souiller avec leur "fièvre de l'Or" et leur immonde Christianisme, c'est aller vite en besogne. Pour beaucoup d'indiens, les conquistadors ont été accueillis comme des Libérateurs.

Bien entendu, je ne vais pas ignorer les débordements, les saloperies, les fautes des colonisateurs. Je n'ignore pas les faiblesses humaines. Mais ne voir que cette face-là, c'est tronquer la réalité. Et je sais qu'il y a encore de nos jours, en Amérique Latine, un racisme latent de la part de certains "blancs hispaniques" à l'égard des indiens.

Deux personnages de l'époque ont largement contribué à la noirceur de la conquête espagnole, non pas parce que ces derniers auraient souillé leurs mains dans le sang indien... mais parce que les deux personnages en question ont tout bonnement écrit des livres qui ont contribués à la légende noire de cette colonisation dans le seul but de nuire à certains intérêts idéologiques et religieux d'alors :

* Théodore de Bry, Protestant Flamand, publie sur une période de 30 ans (de 1590 à 1623... il est mort en 1598, une partie de ses écrits sont publiés post-mortem) une série de récits de voyages aux Indes (on appelait encore ainsi les Amériques dans cette période) dont la volonté première est d'exposer les vices et horreurs dont faisaient preuve les Catholiques au Nouveau Monde.

* Bartolomé de Las Casas, prêtre Catholique dominicain qui idéalisa les indigènes dans son livre de 1541, Brévissime relation de la destruction des Indes, dans lequel il dénonce l'esclavage et les massacres dont les indiens sont victimes (et c'est courageux pour l'époque) mais sans tenir compte de la situation précédant l'arrivée des européens. Fils d'un des compagnons de Christophe Colomb, Bartolomé de Las Casas n'a de cesse de développer l'idée qu'il faut (tout comme le pensait Christophe Colomb) convertir les indiens par la douceur et l'exemple et non par la violence. Contrairement à de nombreux prêtres présent en Amérique Latine, Bartolomé ne parle pas un seul dialecte indien, ne prend pas la peine de pénétrer leur imaginaire, leurs croyances cruelles ou leurs Cultures.

Ce sont les postulats de ce Théodore et de ce Bartolomé qui seront repris par les philosophes des Lumières pour défendre le "le bon sauvage" que Jean-Jacques Rousseau reprendra à son compte pour fustiger la société de son temps, alors que ces philosophes n'ont jamais mis les pieds aux Amériques... et ce sont toujours ces mêmes postulats qui seront repris au XIXème Siècle par les anti-cléricaux voulant assoire leur idéologie et bouffer du curé. Ce sont toujours ces postulats qui prédominent dans les consciences de nos jours alors qu'ils sont faux ! Et même Mel Gibson est quelque peu piégé par cette image du "Bon Sauvage" puisque c'est précisément sous cet angle qu'il présente la tribu de "Patte de Jaguar". Rhétorique hollywoodienne.

De nombreux "Gôchistes" voient d'ailleurs dans Bartolomé de Las Casas, au 16ème Siècle, un précurseur de la déclaration des Droits de l'Homme. C'est aller un peu vite en besogne : Bartolomé de Las Casas était membre de l'Inquisition, dont il partageait la doctrine, et si certains voient en lui le premier porte-parole du Tiers-Monde, ils oublient qu'il fut de ceux qui conseillèrent avec ferveur l'implantation aux colonies américaines d'esclaves noirs venus d'Afrique, afin d'épargner les indiens (qui probablement trouvaient grâce a ses yeux de par leur couleur de peau plus claire que celle des nègres !).

Bon, Bartolomé a contribué à alerter Charles Quint sur le sort des indiens, ont peut lui en rendre la gloire. Mais il faut également savoir qu'il y a un écart drastique entre ce que conseillait la couronne d'Espagne et ce qui était appliqué sur le terrain, bien souvent par quelques aventuriers peu scrupuleux vis-à-vis de ces "bons sauvages". Dans les mentalités méditerranéenne du XVème Siècle, l'esclavage est monnaie courante et fait partie des pratiques bien établies dans les faits et les mentalités. Néanmoins, lorsque Christophe Colomb fait envoyer des indigènes à la cour d'Espagne comme des esclaves, Isabelle Ire de Castille les fait libérer en donnant les instructions suivantes : " Les indiens se doivent d'être traités comme des personnes libres et non comme des esclaves." (1492)
En 1504 elle renouvelle ses instructions dans son testament : "Je recommande et j'ordonne de n'admettre ni de permettre que les indigènes des îles et terre ferme subissent le moindre tort dans leurs personnes et dans leurs biens, mais au contraire de mander qu'ils soient traités avec justice et humanité." Ne la surnommait-on pas "Isabelle la Catholique" ? La monstrueuse erreur que les espagnols ont commis lors de la Reconquista a bien été d'avoir chassé les Juifs d'Espagne, sans doute à cause des préjugés anti-judaïques de l'époque, mais le comportement de la Reine à l'égard des indiens indique qu'elle n'était pas en proie à un racisme primitif comme nos thuriféraires anti-racistes veulent le faire croire. Les choses "humaines trop humaines" sont bien plus compliquées que ça et il convient de les examiner sans esprit binaire. Si ces recommandations ne sont pas suivies sur le terrain, Charles de Habsbourg, dit Charles Quint fera édicter par la suite de nouvelles lois limitant les droits des Seigneurs locaux et prohibant l'esclavage. Même si ces lois n'ont pas toujours été suivies elles contribuèrent à la définition d'un Droit, ce qui fut un progrès considérable dans le flot de l'Histoire, puisque c'est en se basant sur les lois édictées auparavant que certains juristes et avocats rebelles ont été en mesure, progressivement, de faire cesser des pratiques cruelles et injustes.

D'ailleurs, pour ce qui est des débats relatifs à l'humanité ou non des indiens... La Controverse de Valladolid reste la plus connue. En 1550, Charles Quint charge 15 juges ecclésiastiques d'examiner la meilleure façon dont la colonisation et la christianisation doivent être conduites. Réunis à Valladolid les opinions s'affrontent pendant plusieurs mois. Bartolomé de Las Casas d'un côté et Juan Ginés de Sepúlveda de l'autre. Las Casas défend le droit à la différence, selon un schéma de pensée que ne rejetteraient pas les "différencialistes" droitiers du GRECE tels Alain de Benoist (ce qui est comique lorsqu'on sait ce que nos humaniste modernes pensent du GRECE mais prennent, néanmoins, la défense de Bartolomé de Las Casas) tandis que Juan Ginés de Sepúlveda défend, une autre idée : celle de l'ingérence. On est en plein débat actuel ! Las Casas considère que seul un nombre réduit de prêtres se doit de rester au Nouveau Monde afin de contribuer à l'évangélisation tout en respectant les spécificités locales. Sepúlveda estime qu'il faut pacifier la région en supprimant par la force la barbarie des sacrifices humains et des dominations sanguinaires des Aztèques ou Incas sur les tribus mineures.

Pourtant la vérité est simple : les Européens en arrivant en Amérique Latine ont éprouvé un véritable choc ! Ce qu'ils y ont vu les a révulsé au plus profond d'eux-mêmes... même s'ils étaient, pour la plupart grossiers, incultes et analphabètes. Et d'ailleurs l'Église Catholique, n'a pas attendu Charles Quint et la controverse de Vallodid pour édicter ses principes à elle. Dés 1493, le Pape Alexandre VI, lançant la mission dans le Nouveau Monde par la bulle Piis Fidelium affirme l'unité du genre humain, puis en 1537, le Pape Paul III, par la bulle Sublimis Deus confirme : "Les indiens sont des hommes véritables, capables de recevoir la foi chrétienne par l'exemple d'une vie vertueuse. Ils ne doivent être privés ni de leur liberté, ni de la jouissance de leurs biens."

L'évangélisation, comment se déroula-t-elle ?

Au Mexique, les Franciscains apprennent les langues et dialectes indiens, en composent une grammaire, créent des dictionnaires et des catéchismes dans les langues locales !!!! Les indiens des forêts reculées n'avaient ni grammaire officielle, ni écriture digne de ce nom. Quant aux indiens des cités où les sacrifices avaient lieu, ils avait développé avec un génie certain une écriture hiéroglyphique ( les codex retrouvés l'attestent) qui fut mise à mal par l'évêque Fray Diego de Landa qui ordonna de très nombreuses autodafés, en dépit des prescriptions du Vatican. Il dû en rendre compte auprès de ses autorités. Les indiens ne connaissaient ni la roue, ni le cheval de trait, ni le boeuf. L'animal de trait c'était... la femme ! Dés 1552, à Lima, le premier concile d'Amérique avait interdit fermement la destruction des temples et des idoles ainsi que leur pillage : "Nous ordonnons que personne ne baptise d'Indien de plus de huit ans sans s'assurer qu'il y vienne volontairement ; ni ne baptise d'enfant indien avant l'âge de raison contre la volonté de ses parents."

En 1572, de retour à Londres après 5 années de trafics en tout genre dans le nouveau monde, l'aventurier anglais Henry Hawks écrit dans ses notes relatant son périple : " Les indiens révèrent beaucoup les religieux parce que grâce à eux et à leur influence, ils se voient libres d'esclavage." Le franciscain, Bernardino de Sahagún, considéré comme le père de l’anthropologie moderne, rédige une Historia de las cosas de Nueva España où il fait l’inventaire de toutes les croyances, coutumes, traditions indigènes, afin de les conserver à la mémoire des peuples de la région. Le premier archevêque de Lima, Jérôme de Loaisa, passe les dix dernières années de sa vie dans un réduit de l’hôpital qu’il a bâti pour les indiens. Au Mexique, l’évêque de Michoacan, Vasco de Quiroga, réalise un programme complet d’organisation communautaire pour les indigènes, avec maternité, infirmerie, hôpital.

L’historien français, Bartolomé Bennassar en vient à conclure : « L’église du Nouveau Monde est loin d’avoir été toujours exemplaire. Cependant, elle a exercé dans l’ensemble un rôle positif et a été à l’avant-garde de la défense des indiens contre les abus de toutes sortes. » (L’évangile débarque au Nouveau Monde—Histoire du Christianisme Magazine, Février 2000)

En 2002, le pape Jean-Paul II a consacré cette symbiose entre la culture indigène et le christianisme en canonisant à Mexico, dans la basilique Notre-Dame-de-Guadalupe, Juan Diego Cuauhtlatoatzin qui aurait assisté à une apparition de la Vierge.

Et cela nous ramène à notre film. Lorsque les membres de la tribu de "Patte de Jaguar" sont emmenés en captivité vers la cité démoniaque pour y finir comme esclaves ou comme sacrifices, leurs enfants, considérés comme inutiles, sont abandonnés en arrière. Une mère adresse une prière à une déesse locale, cependant le ton utilisé, la compassion mise dans ses mots fait penser indiscutablement à la Sainte Vierge, comme si Mel Gibson voulait nous signifier que les indiens étaient bel et bien prêts à recevoir la parole de l'Évangile. Je suis d'accord pour le suivre sur ce terrain. Question de sensibilité intellectuelle. Vous pouvez en penser ce que bon vous semble. Je pense même que tous les paganismes de cette terre préparaient les peuples à embrasser le monothéisme et il n'est pas curieux de réaliser, lorsqu'on creuse un tout petit peu, que les divinités invoquées par les primitives peuplades sur la surface de ce globe évoquent aussi, par leur face claire, les attributs, ou les noms multiples du Dieu unique, leur face sombre évoquant... le Démon. Les voies du Seigneur sont impénétrables.
Plus loin, dans la jungle, à l'approche de la ville, les captifs liés et leurs nouveaux maîtres tombent sur une petite fille malade, prostrée à côté du cadavre de sa mère, le visage dévoré de pustules qui, inspirée, assène une prophétie aux sanguinaires guerriers, d'où probablement le titre du film, révélant les intrications mystérieuses de la Providence : le jaguar vous mènera vers la fin de votre monde de haine.

Enfin, il est juste de se demander si un génocide des indiens d'Amérique Latine a bien eu lieu. Certains affirment qu’un demi-siècle après l’arrivée des européens en Amérique centrale et en Amérique latine 80% de la population indigène aurait disparu. En vérité, aucun document fiable n’atteste de ce chiffre. Ce qui est sûr c'est qu'une dépopulation subite est survenue et les européens ont été responsables… mais involontairement : ils ont introduit, malgré eux, des microbes et germes avec lesquels les indiens n’avaient pas été en contact jusque là. Au 15ème et 16ème Siècles, autant le dire, personne n’a la moindre idée des microbes et des germes. Alors qu'au 19ème Siècle, les américains du nord refileront des couvertures ou des ustensiles contaminés aux Sioux, Cheyennes et autres Commanches afin de les éliminer ouvertement selon la fameuse devise : « Un bon indien est un indien mort », mot célèbre, datant de 1968, du Général Philip Henry Sheridan. Les découvertes de Pasteur étaient, depuis, passées par là.
Médecin et directeur de recherches au CNRS et auteur de deux ouvrages sur la civilisation indienne, Nathan Wachtel, dans le magazine « L’Histoire » de Juillet-Août 1991, affirme : « La cause principale de ce désastre, on la connaît : ce sont les épidémies. Les Amerindiens n’étant pas immunisés contre les maladies (grippes, peste, variole) importées par les colonisateurs. Le terme génocide me semble impropre. Des massacres, des violences de toutes sortes ont certes eu lieu, mais on ne saurait imputer aux européens le projet conscient et raisonné d’une élimination systématique par le fer et par le feu. »



En Amérique Espagnole, la protection légale des indiens passait par la propriété des terres, qui limitait le peuplement européen contrairement à l’Amérique du Nord où les autorités ont déclaré les terres indiennes « Propriété Fédérale » permettant, ainsi, aux pionniers européens de racheter ces terres au gouvernement fédéral américain puis d’en expulser (avec l’aide de l’armée) les indigènes et de les parquer dans des réserves. L’administration américaine a fait son mea-culpa dans les années 80 et 90 en avouant que quelques 17 millions d’indiens avaient été victimes de la conquête de l’Ouest. Aux Etats-Unis les indiens ne représentent plus que 1% de la population nord-américaine. Au Mexique ce pourcentage est de 29%, auxquels s’ajoutent pas moins de 55% de métis. Il faut croire que les européens étaient moins racistes qu’on ne veut bien nous le faire croire, 55% de métis en est la preuve. Un autre exemple, au Pérou il y a 46% d’indiens et 38% de métis.

En Amérique hispanique, il n’y a pas eu de génocide, n'en déplaise à nos chers "droit-de-l'hommistes" tellement aptes à simplifier le Monde et son Histoire pour asseoir leur idéologie.


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L’aventure jésuite

"Je regarde ces sculptures, leurs formes torsadées, recueillies ; leurs couleurs. Un enfant blanc, châtain, bouclé, vêtu d’une légère tunique bleue et jaune, s’avance dans le vide, le bras gauche tendu le long du corps, le bras droit replié sur la poitrine, mais esquissant déjà un geste énergique de départ. Ses yeux sont grand ouverts, et pourtant il semble voir quelque chose que nous ne percevons pas, comme s’il regardait à l’intérieur d’eux-mêmes. Son sourire, surtout, est énigmatique : détermination ? confiance ? certitude ? joie ? ironie ? On ne sait pas. L’affirmation qui l’anime, en revanche, est indubitable. On a l’impression qu’il pourrait dire : « je ne connais pas d’autre grâce que celle d’être né. Un esprit impartial l’a trouve complète. »

Où sommes-nous ? À Rome, Vienne, Naples, Prague ? Dans l’une des capitales du baroque et de la Contre-Réforme ? Non : cette fraiche merveille enfantine nous vient du Paraguay, au XVIIIe siècle, quand les Jésuites y poursuivaient leur expérience spirituelle et formelle, divine et humaine, politique et mystique. Une très étrange histoire, qui a fait beaucoup parlé et rêvé, depuis les philosophes jusqu’à nos jours ; une aventure qu’on peut suivre d’un bout à l’autre de la planète. L’époque héroïque est sans doute passée, mais sa mémoire demeure. L’Europe, le Japon, l’Inde, la Chine, l’Amérique ? Autant d’épopées, souvent martyrologiques, celle des « réductions » du Paraguay restant la plus singulière. En tous cas, l’enfant dont je viens de parler a été anonymement façonné là-bas. Il est âgé de deux siècles et demie, mais il est en réalité millénaire puisqu’il s’agit de l’Enfant Jésus. Si nous ne le savions pas, nous aurions du mal à l’identifier. Tel est l’étrange message que les indiens Guaranis et la Compagnie de Jésus nous envoient par-delà le temps et l’espace.

On se souvient que Claudel, au début du Soulier de Satin, fait parler un père jésuite attaché à un mât, sur le pont d’un bateau dévasté par un abordage, et qui est en train de sombrer dans l’océan Atlantique :

Et c’est vrai que je suis attaché à la croix, mais la croix où
je suis n’est plus attachée à rien. Elle flotte sur la mer.
La mer libre à ce point où la limite du ciel connue s’efface
Et qui est à égale distance de ce monde ancien que j’ai
quitté
Et de l’autre nouveau.


Claudel prend soin d’ajouter, un peu plus loin, que l’action de son drame se déroule dans une dimension du temps où le passé et l’avenir sont faits « d’une seule étoffe indéchiffrable ». Le projet jésuite, à travers le monde, était, n’en doutons pas, celui-là.

Il faut, bien entendu, traverser beaucoup d’ignorance et de préjugés pour considérer calmement ces aventuriers italiens, portugais, espagnols. Ils sont Jésuites, franciscains, dominicains. Ce sont des prêtres, mais également des savants : théologiens, mathématiciens, astronomes, géographes, linguistes, juristes. Nous apprenons avec surprise qu’ils étaient, aussi, des artistes : architectes, musiciens, dessinateurs, sculpteurs. Ils ne se contentent pas de propager leur foi et de convertir, ils enseignent. Les continents qu’ils abordent sont inconnus, dangereux, et ils posent vite (surtout en Amérique du Sud) une question neuve : ces hommes qu’on a jamais vus dans l’univers « civilisé », ces Indiens, ces « hurons », sont-ils des hommes comme vous et moi, c’est-à-dire des créatures divines avec une âme, ou bien des mécaniques animales, proches du démon et, par conséquent, vouées à l’exploitation et à l’esclavage ?

On sait quels effets comiques Voltaire a tirés de cette situation. L’Ingénue en est la preuve. Mais c’est oublier que la tentative jésuite, au-delà des sarcasmes dont elle a été l’objet, a eu ses partisans jusque dans le camp des Lumières. Montesquieu, D’Alembert, Buffon s’y sont intéressés et Voltaire (qui est, après tout, un ancien élève de la Compagnie) y a même vu un « triomphe de l’humanité ». Les missionnaires, en effet, se sont vite opposés (et parfois par les armes, soutenus par les populations locales) au pouvoir économique et administratif, comme aux avidités meurtrières qu’il légitimait. Les « réductions » du Paraguay, l’autonomie qu’elles ont peu à peu acquises, sont ici l’exemple le plus célèbre et, en un sens, le plus mystérieux.

Ce système social inédit est mis en place dès le début du XVIIe siècle. En 1627, il compte déjà trente mille Indiens « protégés ». L’organisation agricole soustrait ces derniers à l’esclavage, et assure également la pérennité de leur langue et de leur culture (musique, chants, danse). Les Jésuites doivent à la fois se battre contre la brutalité des colons, plaider leur propre cause en Espagne et maintenir ainsi un équilibre fragile qui finira par s’effondrer. Nous ne sommes pas encore entrés dans la longue histoire des Droits de l’Homme : c’est pourtant ici qu’elle a été, la première fois, tentée.

Le Libro de Ordenes, de 1649, nous décrit le Code civil et pénal mis en place. Ainsi, la peine la plus lourde est celle de la réclusion pour dix ans. Fait unique à cette époque, la peine de mort n’existe pas. Les réductions (terres cultivées, villages) disposent d’une milice armée. Une forme de vie communautaire s’installe, au grand scandale des propriétaires terriens, et, bientôt, de leurs alliés créoles. Les Indiens se sédentarisent, et la propriété (très relative) dont ils disposent est fondée, christianisme oblige, sur la monogamie. Chaque nouveau ménage reçoit, au moment du mariage (en général précoce), une maison et un terrain à cultiver.

Les Jésuites dirigent tout. Mais ce qui nous intéresse particulièrement est le développement de l’artisanat, donc de l’art. Telle est l’origine de nos sculptures.

Édouard Pommier, dans Les Missions Jésuites du Paraguay (texte qui accompagne l’étonnant enregistrement des Vêpres solennelles de Saint-Ignace, du musicien Jésuite Dominico Zipoli, 1688-1726), donne quelques exemples frappants de la vie des réductions.

La vie est rythmée par la pratique religieuse. L’assistance à la messe dominicale est obligatoire. Les fêtes religieuses sont accompagnées de danses et de représentations théâtrales dans la langue locale. On a ainsi recueilli des fragments transmis oralement d’un opéra, Le Drame d’Adam. L’important est que la culture soit fondée sur le maintien et le respect de la langue guarani dont les Franciscains ont été les défenseurs dès 1575, les Jésuites continuant leur œuvre. En 1640, le père Ruiz Montoya, pendant son séjour à Madrid, publie deux livres sur ce sujet.

Cette politique amène la formation, parmi les Indiens, d’une classe cultivée. En 1724 et 1727 le cacique Nicolas Yapuguay publie, en guarani, un commentaire du catéchisme et un recueil de sermons.

Le développement de cette culture s’appuie sur l’introduction, dès 1695, de l’imprimerie sur le territoire des réductions (alors que Buenos Aires attendra jusqu’en 1780). Ces Jésuites sont décidément dangereux : ils vont transformer les esclaves en hommes, et même en hommes sachant lire et écrire. Pourquoi pas, aussi, en artistes ? On peut imaginer l’énorme jalousie qui se développera, à cette occasion, chez les Blancs, ou les demi-Blancs, puisqu’on oublie toujours trop facilement que la propagande anti-jésuite a été aussi une propagande « capitaliste ».

Les églises dont on voit aujourd’hui les ruines ont été construites au début du XVIIIe siècle en succédant à des constructions provisoires. Les architectes jésuites ? Ils sont italiens : Angel Petragrassa (1656-1729), José Brasanelli (1659-1728), Giovanni Primoli (1673-1747). Mais il y a aussi l’Espagnol Ribera, et le père autrichien Anton Sepp (1635-1733), qui écrit un manuel pratique de construction. Il est bon de citer ces noms méconnus pour contrebalancer une censure séculaire.

Édouard Pommier écrit : « Les statues qui ont survécu à la destruction des églises se réfèrent en grande majorité à l’iconographie du Nouveau Testament et des saints de la Compagnie. Bien que les textes manquent à cet égard, on peut supposer qu’elles sont l’œuvres des Guaranis, guidés par l’enseignement des pères et inspirées par les gravures d’œuvres européennes qui ont circulé un peu partout dans l’Amérique coloniale. La sensibilité profonde, l’émotion contenue, la spiritualité sincère dont elles sont imprégnées sont peut-être le meilleur témoignage de la valeur de l’œuvre religieuse et civilisatrice accomplie par les Jésuites. »
Par ailleurs un voyageur, José de Escandon, note ceci (nous sommes donc au XVIIIe siècle) : « Il y a des chants tous les jours de fête, ainsi que le samedi. La musique est de grande qualité, à tel point que même ici, en Espagne, elle serait considérée d’un niveau supérieur. […] Chaque village possède sa chapelle de musique, qui compte tant d’instruments et de voix qu’il n’en est pas une, petite ou grande, qui ait moins de 20 à 24 musiciens. Ceux-ci sont très habiles à la lecture, et ils jouent de tous les types d’instruments dont on se sert ici, en Europe, dans les églises. Les voix […] savent très bien écouter d’oreille ou lire les partitions qu’on leur envoie d’Espagne ou qu’on leur fabrique là-bas, car il y a de tout, et les deux méthodes sont utiles. De même qu’ils connaissent bien la musique et peuvent la déchiffrer sur les partitions, afin de la chanter et de la jouer, ils savent fabriquer, et construisent tout type d’instrument, même des orgues…»

L’iconographie du Nouveau Testament et les saints de la Compagnie seraient les seuls sujets sculptés ? Cette description ne nous dit pas grand chose et, de plus, elle est erronée, puisque beaucoup de statues représentent des saints de toutes les époques. Mieux vaudrait parler d’un théâtre du temps, avec ses points de répétitions.
Voyez cette jeune femme radieuse, emportée vers le large comme une belle frégate. Tout, en elle, est mouvement, plis, replis, bonté éblouie du visage, le jaune et le rouge exaltant son triomphe. Mais pourquoi tient-elle, sous son bras gauche, comme un rouleau biblique, cette tour à deux étages ? Il s’agit de Sainte-Barbe, mais qui est Sainte-Barbe ? Et plus généralement, pourquoi savons-nous désormais si peu de chose des saintes et des saints ? Voici une vierge et martyre du IIIe siècle, en Égypte. La légende veut que son père l’ai fait enfermer dans une tour à cause de sa beauté. Puis, apprenant qu’elle est devenue chrétienne et qu’elle se refuse au mariage, il l’a traine devant des tribunaux, la fait condamner à mort et la décapite de sa propre main. À ce moment précis la foudre le frappe. Conséquence : Sainte Barbe se retrouve patronne des canonniers et de tous les métiers qui manient la poudre, carriers et mineurs. Van Eyck lui a consacré un tableau en 1437.
Ce genre d’histoire ne se raconte pas par hasard, et touche au plus près l’imaginaire universel (suivons Freud dans sa certitude). Un père incestueux, une fille qui ne le sait que trop et préfère épouser Dieu : une Indienne Guarani peut être aussi sensible à ce récit que n’importe qu’elle Européenne du temps. Et voilà le beau navire de Sainte Barbe lancé à travers les mers. Tonnez, cannons ! pour la plus grande gloire de Dieu ! Célébrez une fille libre à la barbe de tous les pères.

Ou encore Saint Érasme : c’est un jeune gentilhomme bleu, portant, sans effort apparent, une lourde croix. Il a une attitude militaire concentrée, il appartient sans aucun doute à un corps d’élite dirigé par un grand général. Mais attention : c’est le même Saint Érasme que nous voyons, dans une autre sculpture, crucifié et atrocement supplicié par deux soldats (romains ? espagnols ?). Le ventre ouvert, le corps tailladé, il est, espérons le, soutenu dans son martyr par un angelot qui le coiffe, en douce, d’une couronne de fleurs.
Oui, mais qui est Saint Érasme ? Rien à voir, bien entendu, avec le grand humanisme du même nom, si bien peint par Holbein, et dont la vie a été une habile navigation entre catholiques et protestants. Non : Saint Érasme (appelé aussi Saint Elme) était un évêque de Formie, près de Gaète, au Ve siècle. Les Lombards ariens (l’arianisme est une hérésie tenace) l’ont affreusement torturé et mis à mort. Est-ce parce qu’il a été soumis à une douleur insupportable qu’il est vite devenu saint patron des femmes en couche ? étrange rapprochement, qui nous paraît aujourd’hui sans objet, mais c’est vouloir oublier le long cri de souffrances de la naissance ayant traversé notre espèce, l’ « ardent sanglot » dont parle Baudelaire. Regardez, côte à côte, le gentilhomme bleu acier, lumineux et inaccessible dans sa défense de la foi, et ce pauvre condamné démantibulé sur lequel des brutes grotesques s’acharnent. Le contraste est saisissant : c’est toute une pièce de théâtre qui parle aux yeux et au cœur.
Nous sommes encore dans la marine : les navigateurs du temps (et le Jésuites avec eux) connaissaient bien les feux Saint-Elme, phénomène d’étincelles électriques enflammant les mâts des bateaux pendant les orages en mer (et revoici notre père jésuite du Soulier de Satin). Saint Érasme : la chair retournée et sanglante, l’impassibilité divine, le feu du ciel. Voilà ce qui se racontait aussi dans les réductions du Paraguay, voilà qui ne manquait pas d’embraser l’imagination des artistes populaires entrés non seulement dans la communion catholique mais dans le goût européen.

Des reliques de saint Érasme sont conservées à Bologne, Naples, Vérone, Cologne et Mayence. Mais, là encore, les artistes imposent leur loi : Le Martyr de Saint Érasme est un tableau important de Poussin exécuté pour Saint-Pierre de Rome. Razzié par les français en 1797, il a été restitué au Vatican en 1815. Poussin, peintre philosophe allié des Jésuites ? Mais oui : il suffit de contempler son Saint François Xavier rappelant à la vie la fille d’un habitant de Cangoxima (Kagoshima) au Japon dit, aussi, Le Miracle de Saint François Xavier. Ce dernier tableau, on le sait, a été victime d’une cabale du camp Simon Vouet, et c’est à la suite de ces désagréments que le grand Poussin a choisi de s’expatrier à Rome. Les deux saints jésuites les plus fameux, Ignace de Loyola et François Xavier, eux, ont été canonisés ensemble, en 1622.
Et Saint Roch, ce saint bondissant ! Qui pense à le rapprocher de San Rocco ? Pourtant, c’est lui à Venise, là où l’on va admirer l’impressionnante série du Tintoret. C’est un saint français du Moyen Âge, né à Montpellier en 1293, et mort dans la même ville en 1324 (à 31 ans, donc). Il veille sur les malades, les pestiférés : on l’invoque pendant les épidémies. Ses reliques ont d’abord été en Arles, puis ont été transférés dans la Sérénissime. On le fête le 16 août. La légende veut qu’au désert son chien lui rapportait, chaque jour, un morceau de pain donné par une main inconnue.
Avoir de son côté pour combattre la peste, Tintoret, Rubens et des sculptures en bois, ce n’est pas rien ! Protégez-nous donc dans les forêts américaines, Saint Roch, Sainte Barbe, Saint Érasme, mais aussi Saint Sébastien, Sainte Catherine, Saint François d’Assises, Saint François Xavier (avec, dans la main droite, un drôle de violon) ! Et puis encore Saint Jean Baptiste, Saint Joseph ! Quoi ? Vous dites qu’il n’y a pas de sculptures de saintes ou de saints guaranis ? Patiente, cela viendra. Il suffit d’attendre trois ou quatre siècles.

À tout seigneur, tout honneur. Mais aussi toute horreur. Les représentations du Christ souffrant sont une épreuve. Elle est inévitable. Le corps humain est à franchir, ce que ne comprendrons jamais ceux qui croient naïvement, ou par calcul, à sa nécessité animale ou biologique. La leçon est dure : des blessures, du sang. Le Christ à la colonne n’est pas le même au XVIIe et au XVIIIe siècle mais les deux sont sublimes. S’ils éveillent en vous des pulsions cruelles et sadiques, ou, au contraire, de dépression masochiste, ce sera votre faute, pas la leur, puisqu’ils sont visiblement ailleurs, immergés dans une sagesse ou une sérénité incompréhensibles. On tient, là, la clé de la puissance de suggestion catholique : elle ne peut pas laisser indifférent. Soit elle déclenche la perversion, et elle la traverse et l’annule ; soit c’est la répulsion troublée, le dégoût et la preuve est faite par le refoulement. De toute manière, le regardeur est révélé, il ne dit d’ailleurs pas forcément ce qu’il ressent ou pense.

Ce dos flagellé, ces taches de sang font encore rêver ou délirer de nos jours. Une vierge en plâtre est censé pleurer des globules rouges ? Non, bien sûr, mais l’événement supposé signale l’impasse de l’art saint-sulpicien, l’affadissement est le déclin de l’art sacré depuis le XIXe siècle. Ici, au Paraguay, à l’époque héroïque, les choses sont infiniment sérieuses, directes, vraies. Les Jésuites et leurs fidèles sont dans leur moment de splendeur. Pas de mièvrerie, de bigoterie, de pruderie : l’essentiel, la force. Le Christ du XVIIe siècle est basané, il pourrait être indien. Celui du XVIIIe siècle, stigmatisé, est au contraire très blanc mais tous les deux sont liés à la même colonne qui est une sorte de temple à elle seule. La signification est claire : le martyr guarani et le martyr jésuite se situent du même côté. On dirait qu’ils déposent ensemble au tribunal de la Justice et de la Vérité. Les mains liées, le corps violé, le visage déjà dans la mort, ou plutôt dans une vision qui la surplombe, l’effet de grandeur est imparable : ecce homo.

Pour comprendre de tels chefs-d’œuvre sculptés, il faut aller à la source, c’est-à-dire non seulement au Nouveau Testament, mais aux textes du fondateur de l’Ordre, Ignace de Loyola lui-même.

Car le voici, lui. On dirait un moine ascétique, absorbé par on ne sait quelle scène (la sculpture est là pour faire voir l’invisible). Il a l’air étonné d’être en vie. Il contemple, avec respect et compassion, quelque chose. Quoi ?
« Voir Notre Dame, Joseph, la servante, et l’Enfant Jésus après qu’il est né, me faisant, moi, comme un petit pauvre et un petit esclave indigne qui les regarde, les contemple et les sert dans leurs besoins, comme si je me trouvais présent, avec tout le respect et la révérence possibles. Et réfléchir ensuite en moi-même afin de tirer quelque profit.
Regardez et considérez ce qu’il font comme, par exemple, voyager et peiner pour que le Seigneur vienne à naître dans la plus grande pauvreté et qu’au terme de tant de peines, après la faim, la soif, la chaleur et le froid, les outrages et les affronts, il meurt en croix : et tout cela pour moi. Puis, réfléchissant, tirez quelque profit spirituel.
Terminez avec un colloque et par un pater noster. »


Nous venons de lire une séquence des fameux Exercices spirituels. Mais dans son Journal spirituel, Ignace de Loyola nous raconte de drôles d’expériences. Par exemple : « allant à la messe. Avant elle, non sans larmes ; pendant, nombreuses et très apaisées. Très nombreuses intelligences de la très Sainte-Trinité, qui illuminait l’esprit, au point qu’il me semblait qu’à force d’étudier je ne saurai pas autant ; et ensuite, réfléchissant encore à ce que je ne comprenais en sentant et voyant, j’avais toujours cette impression, quand bien même j’étudierais toute ma vie. »

On voit que les exercices sont représentatifs alors que les extases sont extrêmement abstraites : la combinaison des deux définie la spiritualité jésuite. Pas de mystique sans considération des formes, pas de formes sans plongée dans l’essence divine. Telle est, en somme, la définition du baroque.

Tout cela a lieu, ne l’oublions pas près de la ville d’Asunción : Assomption. C’est ainsi que s’appelle la capitale du Paraguay. Cela doit faire un curieux effet de répondre à la question : « où habitez-vous ? » par : « Assomption. » Étrange histoire.
La noblesse de ses vierges est impressionnante. Leur recueillement dégage une lumière bouddhiste. L’Immaculée Conception règne sur la terre. La Vierge au chapelet (c’est-à-dire rosaire) partage son royaume avec son fils enfant. La Vierge Marie est une femme-fleur qui prie sans cesse, elle est pleine de grâce, elle est bénie entre toutes les femmes, elle se penche sur nous. Son drapé flottant rouge, ses mains jointes la retourne entièrement sur elle-même. La Vierge de pitié, elle, avec son barbu adulte, grand comme un enfant, sur les genoux, n’est pas indigne du sommet du genre, la Pietà de Michel Ange. C’est du même génie qu’il s’agit.

Victoire, donc, à travers la torture et la mort. Affirmation sans mélange au cœur du chaos. Ici, la figure de l’Archange guerrier : Saint Michel. Son nom, en hébreu, signifie, on le sait : « qui est comme dieu ». Il est là pour anéantir Celui qui veut être « comme » Dieu : Satan en personne. Prince de la milice céleste, protecteur d’Israël, il était logique de le rencontrer dans l’armée jésuite. Le voici donc, dans deux apparitions fulgurantes.
Il danse, l’Archange, il est un des stars du ballet divin. Il tombe du ciel sur la scène, comme s’il était animé par la vive musique de Vivaldi, de Haendel. Il vole de biais, étoffes rouges et jaunes, en foulant aux pieds, en passant, une masse informe qui n’est autre que le Démon. Regardez cette espèce de gros cerveau sanglant, ce tas de mou de veau d’où émerge à peine une tête stupide. Telle est la lutte incessante contre la maladie psychique de l’univers. On lui répond par l’élégance physique instantanée. Même désinvolture de fouet ailé dans la façon dont, l’épée à la main, dans une autre sculpture, Saint Michel triomphe de la bête qui lui sert de piédestal. La tragédie est terminée, l’horreur surmontée, le négatif nié.
Il y a le château Saint-Ange dédié à saint Michel à Rome. Et qui ne connaît, en France, le mont Saint-Michel ? On retrouve l’Archange militaire à Bruxelles, à Munich. Il a pour lui Raphael, Rubens (encore lui !), Delacroix. C’est la guerre.

« Alors, il y eut une bataille dans le ciel : Michel et ses Anges combattirent le Dragon. Et le Dragon riposta, avec ses Anges, mais ils eurent le dessous et furent chassés du ciel. On le jeta donc, l’énorme Dragon, l’antique Serpent, le Diable ou le Satan, comme on l’appelle, le séducteur du monde entier, on le jeta sur la terre et ses Anges furent jetés avec lui. Et j’entendis une voie clamer dans le ciel : " Désormais, la victoire, la puissance et la royauté sont acquises à notre Dieu, et la dénomination à son Christ, puisqu’on a jeté bas l’accusateur de nos frères, celui qui les accusait nuit et jour devant notre Dieu. Mais eux l’ont vaincu avec le sang de l’Agneau et par la parole dont ils ont témoigné, car ils ont méprisé leur vie jusqu’à mourir. Soyez donc dans la joie, vous, les cieux et leurs habitants. Malheur à vous, la terre et la mer, car le Diable est descendu chez vous, frémissant de colère et sachant que ses jours sont comptés. "» (St Jean, Apocalypse, XII, 7-11)

Pauvre terre, pauvre mer ! Beaucoup de dévastations leur sont promises ! Et nous n’avons pas la chance d’être les « habitants des cieux ». Prions donc saint Michel, comme l’ont fait les artistes guaranis, qui avaient de bonnes raisons de douter de la paix terrestre. Les massacres se multipliaient. La bestialité quotidienne était invivable (et qui dira que notre siècle ne s’est pas surpassé dans la diablerie ?). Pourtant l’opéra jésuite était là. On pouvait parfois danser, faire sonner les instruments, s’émerveiller des sculptures. La joie, après tout, se situe par définition hors du temps.
Dans quel but cet orchestre ? ce grand théâtre ?
Ad majorem Dei gloriam. Pour la plus grande gloire de Dieu. Une gloire qui brille secrètement, toujours à travers ces figures. "

Philippe Sollers (Éloge de l'Infini)

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17/03/2008

Vous avez dit "Art Contemporain ?" - II

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

Certaines Hautes Consciences se demandent peut-être si Finky n'exagère pas quand il évoque l'état dans lequel se trouve l'Art Contemporain...

Et bien, même s'il fait mouche dans ses propos, il est relativement gentil...

Après avoir vu un artiste chinois consommer un foetus... ou divers masochistes mettre en scène leur propre mutilation pour le plaisir des voyeurs les plus pervers, voici un artiste du Costa Rica, Guillermo Vargas Habacuc, qui met en scène la mort d'un chien pendant la "Bienal Centroamericana de Arte"... Attaché, l'animal est privé d'eau et de nourriture à la plus grande joie des amateurs (c'est comme ça qu'on dit ?) d'Art Contemporain... Il meurt à petit feu pendant la durée de l'exposition...

Tout va très bien, Madame la Marquise, après tout, je ne suis qu'un sale fasciste, un "nazi cool" disent mes ennemis bien intentionnés. Quel honneur que de me faire ainsi insulter par une telle engeance de rats qui n'ont pas le moindre respect pour la vie, pas même pour la vie d'un chien des rues...




"Tu es ce que tu lis"... dit l'inscription "conceptuelle"...




Notez le vif intérêt porté à l'animal...












Mais c'est bien sûr... il fallait y penser... des croquettes pour chien...


...pour nous faire réfléchir sur la famine dans le monde, probablement...







Et puisqu'il faut mettre une tronche sur la sinistre crapule qui conceptualise de telles saloperies...


Guillermo Vargas Habacuc

Voilà... comme ça, si vous le croisez un jour, vous pourrez toujours échanger quelques nobles et dignes propos en sa compagnie... ou, éventuellement, ai-je le droit de faire de l'ironie ?, l'attacher à la prochaine biennale, et le laisser crever de faim aux yeux et au nez de tous... Mais on y vient.

Bientôt des dissections en "direct live" devant les bobos ébahis ?

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Les mirages de l’art contemporain avec Christine Sourgins (Fichier "mp3"), émission issue de l'excellent site, Canal Académie, à écouter avec intérêt...

Et lire aussi cet article... pour une autre piste...

14:35 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (96) | Tags : guillermo vargas habacuc, art contemporain | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

16/03/2008

«C'est moi qui ai abattu Saint-Exupéry»

=--=Publié dans la Catégorie "Citadelle : Saint-Exupéry"=--=

Un ancien pilote de chasse de la Luftwaffe de 88 ans affirme avoir tiré sur l'avion de l'écrivain, le 31 juillet 1944.

S'il est véridique, ce récit lève le voile sur plus de soixante années de mystère.. L'avion d'Antoine de Saint-Exupéry, dont la disparition le 31 juillet 1944, n'a jamais été élucidée, aurait été abattu par un pilote de chasse de la Luftwaffe, selon Le Figaro Magazine, qui publie des extraits du livre événement de Jacques Pradel et de Luc Vanrell, «Saint-Exupéry, l'ultime secret» (Editions du Rocher).

«Après l'avoir suivi, je me suis dit, si tu fous pas le camp, je vais te canarder. J'ai tiré, je l'ai touché, le zinc s'est abîmé. Droit dans l'eau. Le pilote, je ne l'ai pas vu. C'est après que j'ai appris que c'était Saint-Exupéry», raconte l'aviateur Horst Rippert, âgé aujourd'hui de 88 ans.

En poste dans la région deux semaines avant le débarquement de Provence, l'ancien aviateur allemand explique que c'est en regagnant sa base, qu'il a aperçu un avion d'observation Lightning P-38 volant vers Marseille, trois mille mètres en dessus de lui.

Horst Rippert confie qu'il «a espéré, qu'il espère toujours que ce n'était pas lui», car, «dans notre jeunesse nous l'avions tous lu, on adorait ses bouquins».

Hors Rippert, qui fut journaliste à la ZDF (2è chaîne de télévision allemande) a été retrouvé au terme d'une longue enquête, menée par un plongeur marseillais Luc Vanrell, et par le fondateur d'une association de recherches d'avions perdus pendant la guerre, Lino von Gartzen.



«Vous pouvez arrêter de chercher»

Deux ans après la découverte en 1998, d'une gourmette au nom de «Saint-Ex», remontée dans les filets d'un pêcheur au large de Marseille, Luc Vanrell retrouvait des débris de Ligthning et démontrait qu'ils provenaient de l'avion de l'écrivain.

Les morceaux de l'épave étaient remontés à la surface trois ans plus tard par la société d'exploration et de travaux sous-marins Comex. Un numéro de série sur la carlingue permettait d'identifier l'appareil.

Des débris d'un Messerschmitt allemand avaient été retrouvés près de l'épave, orientant l'enquête vers l'Allemagne. «Vous pouvez arrêter de chercher c'est moi qui ait abattu Saint-Exupéry» a déclaré Horst Rippert lorsque Lino von Gartzen l'a contacté.

Parti le 31 juillet 1944 de Borgo, en Haute-Corse, à bord de son Lightning P38 pour une mission de reconnaissance et d'observation photographique pour préparer le débarquement de Provence, Saint-Exupéry n'était jamais rentré à sa base.

Les morceaux de l'avion de l'auteur du «Petit Prince» et de «Pilote de guerre» ont été remis en juin 2004 au musée de l'Air et de l'Espace du Bourget.





Source : Le Figaro, 15/03/2008

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"Nous risquions de confondre, un jour, l'Homme avec le symbole de la moyenne ou de l'ensemble des hommes. Nous risquions de confondre notre cathédrale avec la somme des pierres (...) En place d'affirmer les droits de l'Homme au travers des individus, nous avons commencé de parler des droits de la Collectivité. Nous avons vu s'introduire insensiblement une morale du collectif qui néglige l'Homme (...). Nous avons glissé - faute d'une méthode efficace - de l'Humanité qui reposait sur l'Homme - vers celte termitière qui repose sur la somme des individus."

Antoine de Saint-Exupéry (Pilote de Guerre)

01:35 Publié dans Citadelle : Saint-Exupéry | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : Antoine de Saint-Exupéry | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

14/03/2008

Vous avez dit "Art Contemporain ?"

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=

Lumineuse intervention de DJ Finky...

Où comment l'Art Moderne aime à traîner son cul, et notre âme, dans le caniveau...



Faites circuler...

"Le peintre qui traduit par pratique et jugement de l'oeil, sans raisonnement, est comme le miroir où s'imitent les choses les plus opposées, sans cognition de leur essence."

Léonard de Vinci "Traité de la peinture"


"J'ai la plus haute idée, et la plus passionnée, de l'art. Bien trop haute pour consentir à le soumettre à rien. Bien trop passionnée pour vouloir le séparer de rien ."

Albert Camus " Carnets II "

13/03/2008

Nietzsche, Un Voyage Philosophique

=--=Publié dans la Catégorie "Friedrich Nietzsche"=--=


"L’histoire intellectuelle de tous les temps, dans son immensité, n’offre aucun autre exemple de cette abondance, de cette extase aux épanchements enivrés, de cette fureur fanatique de la création; c’est seulement peut-être tout près de lui, et cette même année, dans la même région, qu’un peintre “éprouve” une productivité aussi accélérée et qui déjà confine à la folie: dans son jardin d’Arles et dans son asile d’aliénés, Van Gogh peint avec la même rapidité, avec la même extatique passion de la lumière, avec la même exubérance maniaque de création. A peine a-t-il achevé un de ses tableaux au blanc ardent que déjà son trait impeccable court sur une nouvelle toile, il n’y a plus d’hésitasion, de plan, de réflexion. Il crée comme sous la dictée, avec une lucidité et une rapidité de coup d’oeuil démoniaques, dans une continuité incessante de visions." ( "La lutte avec le démon - Nietzsche" Stefan Zweig )

















« - Alors j'entrepris quelque chose qui ne pouvait être l'affaire de tout le monde : je descendis dans les profondeurs : je me mis à percer le fond, je commençai à examiner et à saper une vieille confiance, sur quoi, depuis quelques milliers d'années, nous autres philosophes, nous avons l'habitude de construire, comme sur le terrain le plus solide, - et de reconstruire toujours, quoique jusqu'à présent chaque construction se soit effondrée : je commençai à saper notre confiance en la morale. [...] En nous s'accomplit, pour le cas où vous désireriez une formule, - l'autodépassement de la morale.» Friedrich Nietzsche - "Aurore" (Avant-propos)

23:15 Publié dans Friedrich Nietzsche | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : Nietzsche | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

12/03/2008

Khmers verts

=--=Publié dans la Catégorie "Franc-tireur"=--=




Dans le Magazine n°: 13 d'Actuel d'Octobre 1971, consacré à l'écologie, dans une série d'articles de tonalité apocalyptique et misanthropique on pouvait lire des choses comme celles qui suivent :

"Le Sahara avance de dix kilomètres par an. À ce jour, l'homme a détruit deux milliards d'hectares de terres, soit 24% de la totalité cultivable. La mer Baltique est une mer morte. C'est l'homme qui l'a tuée. le lac de Zurich est mort, le lac Léman moribond."

-=-

"En 1980, le Japonais moyen devra porter en permanence un masque à gaz"

-=-

"On ne pourra rien faire de New York, la ville est trop énorme, il faudra la détruire".

-=-

"Dans quatorze ans, la terre toute entière ne sera qu'un désert inexploitable"


Dans le même numéro, un des fondateurs d'Actuel, Michel-Antoine Burnier, s'irrite de ce catastrophisme et défend une position plus raisonnée :

"Comme toutes les idéologies, la pensée écologique se croit universelle : non point une réflexion sur notre société et ses contradictions, mais un impérialisme intellectuel qui prétend embrasser les lois de l'univers et juger souvairement de l'avenir. Le problème écologique est éclatant : il n'est pas question de nier la gravité des déséquilibres humains et physiques qu'entraîne la société industrielle. Encore faut-il les situer par rapport à cette société et -- dans le temps et dans l'espace -- par rapport aux sociétés différentes.

L'ouvrier français ingurgite quotidiennement une viande trafiquée. Il y a deux siècles, le paysan mangeait deux fois par jour une soupe trempée -- et certains jours pas du tout --, de la viande une fois par mois. [...] L'espérance de vie de la paysannerie européenne du XVIIe siècle ou de la paysannerie indienne contemporaine est de 30 ou 35 ans. De 60 à 70 ans pour un citoyen européen ou américain. Et pourtant la pollution menace les vies européennes et américaines.

Cela veut simplement dire que l'homme n'est pas un être de nature, que ses rapports avec son environnement physique et avec lui-même se sont toujours définis par le conflit, la mort, la souffrance. Il n'y a pas d'équilibre idéal entre l'homme et la nature, mais des équilibres successifs et précaires à chaque étape, et des ruptures. [...]

Pourquoi prophétiser à tout prix ? Nous devrions pourtant savoir depuis quelques siècles que les sociétés humaines n'évoluent jamais linéairement ; la projection pure et simple dans le futur des caractères spécifiques d'une époque relève de l'absurdité [...]"


_______________________________________

Merci à l'ami Lionel de m'avoir communiqué ces infos...

12:57 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : Réchauffement Climatique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Réchauffement Climatique

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Je ne vois pas pour quelle raison les scientifiques qui affirment avec du poids le contraire de ce qu'affirme le GIEC auraient moins de valeur que les scientifiques officiellement reconnus. Je suis comme tout le monde, les problèmes liés à la pollution me touchent et me concernent au plus haut point, seulement les films et les liens que j'ai mis en ligne, et qui sont très instructifs, montrent comment les conclusions du GIEC ont été fortement orientées par Thatcher à un moment précis où elle voulait mettre en avant le nucléaire au détriment des autres formes d'énergies, notamment le charbon (puisqu'elle avait les mineurs à museler) ou le pétrole (aucune confiance envers le moyen-orient)... de cet instant ont vu le jour de nombreuses orientations propagandistes qui ont fait naître du Business d'avenir et, depuis, on oriente les résultats afin que le business persiste et grossisse. Le Co2 est un véritable marché, une manne financière, dans laquelle Al Gore est trempé à 1000%. Ce n'est pas rien, en tout cas c'est à prendre en considération dans la réflexion qu'on peut en avoir. Le GIEC a beau affirmer que leurs spécialistes mettent en balance tous les résultats scientifiques opposés et contraires avant de conclure, force est de constater que les théories opposées au "réchauffement climatiques à cause des activités humaines" ne sont pas du tout mises en avant par aucun média ni aucun "khmer vert"... De ce point de vu là il faut garder la tête froide, si je puis dire. Et personnellement je suis bien plus inquiet par la chasse à la baleine, la déforestation de l'Amazonie ou les OGM sur lesquels il ne faut sûrement pas arrêter les recherches (bien au contraire) mais tout du moins maintenir un principe de précaution le temps d'y voir plus clair. Voilà... et je rappelle qu'entre 700 et 1300 de notre ère les anglais avaient des vignes, les scandinaves aussi (!!!) et les vikings au Groenland faisaient du fermage !!! Et à l'époque y'avait pas d'usines, pas de bagnoles, pas de mines de charbon. Cycle Solaire naturel. Et lorsque les degrés grimpent sur toutes les planètes du système solaire selon un schéma assez équivalent à celui de notre planète, alors qu'il n'y a ni martiens ni vénusiens pour y foutre le brin, il est légitime pour un cerveau bien fait de se pencher sur la question autrement que par le biais du politiquement correct habituel. De plus, les scientifiques en question qui nient les conclusions du GIEC, sont bel et bien de vrais scientifiques, ils n'ont pas plus d'intérêt à ce que la planète crève, je pense même plutôt qu'ils veulent le contraire. Les climatologues alarmistes, par contre, pour peu qu'ils considèrent le réchauffement climatique comme un problème à attaquer de front par rapport aux comportements humains, ils ont toujours des fonds à faire débloquer pour poursuivre leurs "recherches" et être payés en bonne et due forme. Vous me suivez ?

En attendant, et suite aux accords du Grenelle de l'environnement, en coulisses ça doit batailler sévèrement, à qui signera les contrats des énergies alternatives... car à long terme ça se chiffre en milliards...

00:19 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : réchauffement climatique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

10/03/2008

La réponse à Al Gore le manipulateur...

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Servez-vous un thé... ou roulez-vous un joint... et prenez le temps de voir ce film, présenté ici en 4 parties, histoire de gamberger un peu avant d'avaler toutes les jolies couleuvres que le système veut nous faire avaler.










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Voici maintenant la courbe réelle de l’histoire climatique terrestre du dernier millénaire:





La période 700-1300 est une période chaude, nettement plus chaude qu’aujourd’hui, considérée par les climatologues encore il y a peu comme un optimum climatique.

C’est à cette époque que les vikings islandais découvrent le Groenland : Greenland, la Terre Verte, et y établissent une colonie ; ils y pratiquaient l’élevage ! S’ils l’avaient découvert en l’an 1300 ou 1400, ils l’auraient sûrement appelé Huitrland, Whiteland, la Terre Blanche !



Nous possédons des gravures d’époque montrant des paturages là où ajourd’hui la langue terminale de la Mer de Glace à Chamonix recouvre le fond de la vallée.



A partir de 1200, le climat se refroidit, on estime que les colonies groenlandaises ont disparu vers l’an 1300 ; le Groeland prend la forme inhospitalière qu’il a encore aujourd’hui.



Suit “le Petit Âge Glaciaire” (1560-1830), période de fort refroidissement, c’est l’époque où en hiver les parisiens pouvaient faire du patin à glace sur la Seine et les anglais la foire sur la Tamise et où le vin gelait sur la table du roi Louis XIV.



Ces variations n’ont pas affecté le seul hémisphère Nord comme tentent de le soutenir Michael Mann et le GIEC, cherchant en permanence à retarder le moment fatidique où la supercherie éclatera aux yeux de tous, mais toute la planète : nous disposons d’éléments probants pour le monde entier.



Les partisans, car c’est bien de partisans qu’il s’agit, du réchauffement global ont toutjours délibérément nié ces deux périodes qui entraient en contradiction avec leurs théories dans leur acharnement à vouloir démontrer que le climat est resté stable de l’an 900 à l’an 1900, de façon à corréler la montée des températures avec le développement de l’industrie à partir de la fin du XIXème siècle.



En matière de science, on a le droit de faire des erreurs, d’émettre des hypothèses mal fondées, de ne pas connaître ce qui contredit ses thèses, d’arriver à de fausses conclusions, c’est humain, ; mais à partir du moment où l’on se fait démontrer ses erreurs et qu’on maintient quand même sa thèse, c’est qu’on est de mauvaise foi.



Source : Réchauffement global : Les chiffres truqués

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Autres liens...


*1-=--=Un maladroit mensonge ?=--=

*2-=--=Pression sur les Scientifiques qui ne sont pas d'accords...=--=

*3-=--=Al Gore... Mensonge, Business et Hypocrisie...=--=

*4-=--=Le réchauffement global d’Al Gore : instrument d’un nouvel impérialisme environnemental=--=

*5-=--=RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE : MANIPULATIONS ET MENSONGES DU LOBBY INDUSTRIEL=--=

*6-=--=Un site de référence... mais en anglais=--=



*7-=--=Un glaciologue à qui on ne la fait pas...=--=



*8-=--=Des scientifiques climato sceptiques... mais en anglais aussi...=--=



*9-=--=Des néo-Zeélandais... pas du tout d'accord... en anglais encore...=--=



*10-=--=Contre la pensée unique...=--=


C'est à se demander si la manipulation à propos du réchauffement climatique, en plus d'être un Immense Business, ne vise pas à simplement focaliser les habitants de toute cette pauvre planète vers un même point d'attention afin de la faire tendre vers l'Unité de la Mondialisation en cours puisqu'il est un héritage que nous avons tous en commun : celui de l'environnement... à méditer.

16:55 Publié dans Franc-tireur | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : al gore, réchauffement climatique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

08/03/2008

Jeff Healey... Rest In Peace.

=--=Publié dans la Catégorie "Music..."=--=

"Le chanteur et guitariste canadien Jeff Healey est mort, dimanche 2 mars, des suites d'un cancer de la rétine, à l'hôpital de Toronto. Il était âgé de 41 ans. Cette forme de cancer rare l'avait rendu aveugle à l'âge de 1 an. Musicien très précoce, Jeff Healey, né le 25 mars 1966, à Toronto, avait commencé la guitare à 3 ans et formé son premier groupe à 17 ans.

En 1985, les amateurs de blues, genre de prédilection de Healey, commencent à parler du musicien pour ses qualités d'instrumentiste et sa manière de jouer, la guitare posée à plat sur les genoux. Son premier album, en 1988, See The Light, de bonne facture, est un événement en termes de ventes puisqu'il dépasse le million d'exemplaires, chiffre auquel le marché du blues est peu habitué. Healey ne retrouvera pas de succès comparable par la suite, en dépit d'apports du rock dans sa musique. Au début des années 2000, Jeff Healey s'était tourné vers le jazz des années 1920 et 1930, retrouvant une forme d'authenticité. Jeff Healey avait interprété le rôle de Cody, un musicien de blues, dans le film Road House, de Rowdy Herrington (1989).
" Le Monde - 06/03/2008





07:00 Publié dans Music... | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Jeff Healey, Blues, Rock | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook