11/09/2014
Vocatus
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« Non, je ne suis pas un écrivain. Si je l’étais, je n’eusse pas attendu la quarantaine pour publier mon premier livre (…) Je ne repousse d’ailleurs pas ce nom d’écrivain par une sorte de snobisme à rebours. J’honore un métier auquel ma femme et mes enfants doivent, après Dieu, de ne pas mourir de faim. J’endure même humblement le ridicule de n’avoir encore que barbouillé d’encre cette face de l’injustice dont l’incessant outrage est le sel de ma vie. Toute vocation est un appel — vocatus — et tout appel veut être transmis. Ceux que j’appelle ne sont évidemment pas nombreux. Ils ne changeront rien aux affaires de ce monde. Mais c’est pour eux, c’est pour eux que je suis né. »
Georges Bernanos, Les Grands Cimetières sous la lune
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Une organisation totalitaire et concentrationnaire universelle
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« La menace qui pèse sur le monde est celle d’une organisation totalitaire et concentrationnaire universelle qui ferait tôt ou tard, sous un nom ou sous un autre, qu’importe ! de l’homme libre une espèce de monstre réputé dangereux pour la collectivité tout entière, et dont l’existence dans la société future serait aussi insolite que la présence actuelle d’un mammouth sur les bords du lac Léman. »
Georges Bernanos, La liberté pour quoi faire ?
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08/09/2014
Quand il n’y a pas assez de contrevenants, on en fabrique
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« Gouverner des hommes innocents est impossible. Le seul pouvoir d’un État, c’est de mettre les contrevenants hors d’état de nuire. Et quand il n’y a pas assez de contrevenants, on en fabrique. Il suffit de déclarer tellement de choses hors la loi qu’il devient impossible de vivre sans l’enfreindre. Qui voudrait d’une nation de citoyens respectueux des lois ? Que pourrait-on en tirer ? Mais si vous promulguez des lois qui ne peuvent être ni respectées ni appliquées ni objectivement interprétées, vous fabriquez une nation de fraudeurs… Et là, il ne reste plus qu’à en récolter les fruits. »
Ayn Rand, La Grève
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Et même l'Antechrist ne l'approche qu'en tremblant...
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« Que je me souviens bien du jour où, à l'expiration de mon année de noviciat, me présentant devant le Siège Suprême, je fus initié par l'orateur public au projet du voyage en Orient et où, quand je me fus donné corps et âme à ce projet, on me demanda avec bienveillance ce que je me promettais de ce voyage au pays des contes !
En rougissant, mais en toute franchise et sans hésiter, je confessai devant tous les supérieurs assemblés le voeu de mon coeur, d'être admis à voir de mes yeux la princesse Fatma.
Et l'orateur, traduisant les gestes des assistants voilés, me posa amicalement la main sur la tête, me bénit et prononça la formule qui confirmait mon admission comme membre de l'Ordre.
"Anima pia" ["âme pieuse"], tels sont les mots dont il usa pour s'adresser à moi, et il m'invita à la fidélité dans la croyance, à l'héroïsme dans le danger, à l'amour fraternel.
Bien préparé durant mon année de noviciat, je prêtai serment, abjurai le monde et ses erreurs et reçus au doigt l'anneau de l'Ordre, où étaient inscrits ces mots d'un des plus beaux chapitres de notre histoire :
"Sur terre et dans les airs, dans l'eau et dans le feu,
Les esprits lui sont assujettis ;
Sa vue effraie et dompte les monstres les plus sauvages
Et même l'Antechrist ne l'approche qu'en tremblant..." »
Herman Hesse, Le Voyage en Orient
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Plus rien ni plus personne n’est différent de rien ni de personne
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« Plus rien ni plus personne n’est différent de rien ni de personne, sous l’effet de la déferlante hyperfestive, et ce ne sont jamais, pour dire le vrai, que des effondrements de frontières dont se réjouit Homo festivus, avec l’exubérance que l’on sait, chaque fois qu’il descend dans la rue : la destruction de la très vieille loi oedipienne (dont la défaite ouvre enfin une voie royale au matriarcat), l’effacement de la fonction paternelle, la disparition du passé, le triomphe de la vision infantile du monde, la réduction à néant de la différence sexuelle, l’évanouissement de l’univers concret et de ses divisions obsolètes (intérieur/extérieur, public/privé, intime/social)sont ses profondes et vraies raisons de faire la fête. »
Philippe Muray, Après l'Histoire
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07/09/2014
Cette société oisive et frivole
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« Toute élite qui n’est pas prête à livrer bataille, pour défendre ses positions, est en pleine décadence, il ne lui reste plus qu’à laisser sa place à une autre élite ayant les qualités viriles qui lui manquent. C’est pure rêverie, si elle s’imagine que les principes humanitaires qu’elle a proclamés lui seront appliqués : les vainqueurs feront résonner à ses oreilles l’implacable "vae victis". Le couperet de la guillotine s’aiguisait dans l’ombre quand, à la fin du siècle dernier (fin XVIIIe), les classes dirigeantes françaises s’appliquaient à développer leur "sensibilité". Cette société oisive et frivole, qui vivait en parasite dans le pays, parlait, dans ses soupers élégants, de délivrer le monde de "la superstition et d’écraser l’infâme", sans se douter qu’elle-même allait être écrasée. »
Vilfredo Pareto, Les Systèmes socialistes
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Avez-vous oublié à quoi ressemblait la vie sur cette "terre de joie" ?
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« Staline et les autres bolcheviks ont menti en prétendant que la Russie de Tolstoï et Stolypine accusait cent ans de retard sur l'occident. Elle était en train de rattraper ce retard. Ce n'et donc pas que la Russie était attardée : c'est plutôt que les bolcheviks lui ont brisé les jambes, lui ont fracassé la cervelle, et l'ont poussée à faire machine arrière. Par le biais d'une inquisition totale, c'est la fine fleur de la nation qui a été anéantie : des aristocrates, des marchands, des officiers, des professeurs et d'autres encore (ou, selon les termes de Lénine, toute cette "intelligentsia de merde"), étiquetés comme des sorcières, suivant leur degré de culpabilité. Un procès en sorcellerie qui a duré soixante-dix ans. Un camp de concentration qui a eu pour nom socialisme.
Avez-vous oublié à quoi ressemblait la vie sur cette "terre de joie" ? Vous achetiez une bouteille de vodka - le bonheur -, un bout de saucisse, ou mieux encore, une paire de bottines pour femme ou un réfrigérateur - autant d'occasions de fêtes débridées, dans un flot d'alcool. Pas question d'échapper à la viande avariée et aux patates pourries - aucune aide non plus à attendre de la part des indicateurs et pas moyens de se libérer de ces débats dénonciateurs au sein du Parti et des commissions syndicales pour savoir qui... et comment... et avec la femme de qui. Le Maréchal Joukov et le metteur en scène de théâtre Georgy Tovstonogov avaient des chambres à coucher pleines de micros. Nos maîtres avaient l'esprit inquisiteur, une soif de connaissance.
En URSS et en Russie, la réforme s'est avérée un processus compliqué au plan politique et économique, et encore plus au plan psychologique. En nous efforçant de réformer le pays, nous avons beaucoup sous-estimé cette difficulté (et je fais partie du lot) - surtout l'état psychologique de cette société, qui s'est révélée plus inerte, plus indifférente et plus dépendante que nous ne l'avions imaginé. Encore à ce jour, beaucoup de gens attachent leurs espoirs à un grand homme, à une idole, et ils rêvent de dirigeants "forts". Et nous y voici : l'"énigme" de l'âme russe. »
Alexandre Nikolaïevitch Iakovlev, Le cimetière des innocents
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02/09/2014
Rien n’est beau comme un enfant qui s’endort en faisant sa prière
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« Rien n’est beau comme un enfant qui s’endort en faisant sa prière, dit Dieu.
Je vous le dis, rien n’est aussi beau dans le monde.
Je n’ai jamais rien vu d’aussi beau dans le monde,
Et pourtant j’en ai vu des beautés dans le monde
Et je m’y connais. Ma création regorge de beautés.
Ma création regorge de merveilles.
Il y en a tant qu’on ne sait pas où les mettre.
J’ai vu les millions et les millions d’astres rouler sous mes pieds comme les sables de la mer.
J’ai vu des journées ardentes comme des flammes ;
Des jours d’été de juin, de juillet et d’août.
J’ai vu des soirs d’hiver posés comme un manteau. J’ai vu des soirs d’été calmes et doux comme une tombée de paradis.
Tout constellés d’étoiles.
J’ai vu ces coteaux de la Meuse et ces églises qui sont mes propres maisons.
Et Paris et Reims et Rouen et des cathédrales qui sont mes propres palais et mes propres châteaux,
Si beaux que je les garderai dans le ciel.
J’ai vu la capitale du royaume et Rome capitale de la chrétienté.
J’ai entendu chanter la messe et les triomphantes vêpres.
Et j’ai vu ces plaines et ces vallonnements de France
Qui sont plus beaux que tout.
J’ai vu la profonde mer, et la forêt profonde, et le coeur profond de l’homme.
. . . . . . . . . . . . . . . . . .
Or je le dis, dit Dieu, je ne connais rien d’aussi beau dans tout le monde
Qu’un petit enfant qui s’endort en faisant sa prière
Sous l’aile de son ange gardien
Et qui rit aux anges en commençant de s’endormir ; Et qui déjà mêle tout ça ensemble et qui n’y comprend plus rien ;
Et qui fourre les paroles du "Notre Père" à tort et à travers pêle-mêle dans les paroles du "Je vous salue Marie"
Pendant qu’un voile déjà descend sur ses paupières,
Le voile de la nuit sur son regard et sur sa voix.
J’ai vu les plus grands saints, dit Dieu. Eh bien je vous le dis
Je n’ai jamais vu de si drôle et par conséquent je ne connais rien de si beau dans le monde
Que cet enfant qui s’endort en faisant sa prière
(Que ce petit être qui s’endort de confiance)
Et qui mélange son "Notre Père" avec son "Je vous salue Marie".
Rien n’est si beau, et c’est même un point
Où la Sainte Vierge est de mon avis
Là-dessus.
Et je peux bien dire que c’est le seul point où nous soyons du même avis.
Car généralement nous sommes d’un avis contraire,
Parce qu’elle est pour la miséricorde
Et moi il faut bien que je sois pour la justice. »
Charles Péguy, Le mystère des saints innocents
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31/08/2014
Matigot était garçon boucher, mauvais coucheur, joli coeur
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« C’est alors que, soudain, je vis Matigot. Tué, bien tué, net, pâle, pur. C’était comme ça que j’imaginais que j’allais être tué, une balle en plein coeur. Matigot était garçon boucher, mauvais coucheur, joli coeur. Naturellement la mort lui donnait de la noblesse, Matigot, le premier tué que j’aie vu. Si le coeur ne restait pas contraint par les convenances même au milieu d’une bataille, je me serais arrêté au milieu des balles – mais Rabutin se serait moqué de moi – et je me serais couché sur Matigot, et je l’aurais embrassé. Matigot m’a ému autant que ma mère morte. »
Pierre Drieu la Rochelle, La Comédie de Charleroi
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25/08/2014
En fait de vérités, il n'en a avancé que de faciles à saisir par n'importe quel esprit médiocrement ouvert
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« Mahomet a séduit les peuples par des promesses de voluptés charnelles au désir desquelles pousse la concupiscence de la chair. Lâchant bride à la volupté, il a donné des commandements conformes à ses promesses, auxquels les hommes charnels peuvent obéir facilement. En fait de vérités, il n'en a avancé que de faciles à saisir par n'importe quel esprit médiocrement ouvert. Par contre, il a entremêlé les vérités de son enseignement de beaucoup de fables et de doctrines les plus fausses. Il n'a pas apporté de preuves surnaturelles, les seules à témoigner comme il convient en faveur de l'inspiration divine, à savoir quand une oeuvre visible qui ne peut être que l'oeuvre de Dieu prouve que le docteur de vérité est invisiblement inspiré. Il a prétendu au contraire qu'il était envoyé dans la puissance des armes, preuves qui ne font point défaut aux brigands et aux tyrans. D'ailleurs, ceux qui dès le début crurent en lui ne furent point des sages instruits des sciences divines et humaines, mais des hommes sauvages, habitants des déserts, complètement ignorants de toute science de Dieu, dont le grand nombre l'aida, par la violence des armes, à imposer sa loi aux autres peuples. Aucune prophétie divine ne témoigne en sa faveur : bien au contraire, il déforme les enseignements de l'Ancien et du Nouveau Testament par des récits légendaires, comme c'est évident pour qui étudie sa loi. Aussi bien, par une mesure pleine d'astuces, il interdit à ses disciples de lire les textes de l'Ancien et du Nouveau Testament qui pourraient le convaincre de fausseté. C'est donc chose évidente que ceux qui ajoutent foi à sa parole croient à la légère. »
Thomas d'Aquin, Somme contre les gentils
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24/08/2014
Résistance communiste
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« On a beaucoup dit en France que le Parti communiste était le principal parti de la Résistance. Moi, j'ai vu le Parti communiste détruire des foyers de résistance parce qu'ils n'étaient pas communistes. En mars 1944, j'ai vu, dans notre région, un maquis communiste détruire et tuer tous les membres d'un maquis gaulliste, simplement parce qu'ils étaient gaullistes. »
Jacques Ellul, Ellul par lui-même – Entretiens avec Willem H. Vanderburg
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Lois
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« Légitime, légal : s'il existe deux mots pour exprimer la notion générale de conformité à la loi, c'est bien qu'ils en traduisent des aspects différents. Il y a en effet lois et lois : celles que les hommes fabriquent à leur guise, et celles dont l'homme n'est pas maître, qui s'imposent à lui parce qu'elles sont les lois de sa nature ou de sa vocation. Est légitime ce qui se rapportent à celles-ci, légal ce qui se rapporte à celles-là. Les lois de la nature et de la civilisation sont intangibles. Vis-à-vis d'elles, l'homme n'a qu'un pouvoir, mais qui ne les affecte pas, celui de les reconnaître ou de les nier. Mais, suivant celle des deux attitudes qu'il adopte quand il légifère, il établit une légalité légitime ou illégitime. »
Louis Daménie, La cathédrale effondrée (Ouvrage Collectif : 5 essais par Henri Massis, Pierre Debray, Louis Daménie)
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Tout ce qui conserve, dans la société, une position indépendante est, méthodiquement, soumis aux contraintes étatiques
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« Il n'y a plus d'esprit public. Tout ce qui conserve, dans la société, une position indépendante est, méthodiquement, soumis aux contraintes étatiques. Tout ce qui garde la volonté d'entreprendre se voit découragé par système. Une politique de centralisation abolit ce qui restait des libertés communales, remplace partout le responsable par le gestionnaire, intervient jusque dans les familles pour disputer aux parents le choix de l'éducation et de l'orientation des enfants. En même temps que les institutions sclérosent, étouffent les cellules vivantes, les mœurs se dégradent. La grande presse, spéculant sur la bassesse de l'âme, exploite tous les scandales et toutes les immoralités.
Dans ces conditions, nous ne saurions purement et simplement reprendre les analyses de nos maîtres, car celles-ci datent d'une époque où la société demeurait saine, si l'Etat était corrompu. Ils opposaient le pays réel au pays légal, le même pays d'ailleurs, mais pris soit dans son abstraction démocratique, soit dans son expression concrète. Au moment où cette distinction passe dans le langage courant, elle tend à perdre sa valeur, puisque la société s'étatise à mesure que l'Etat se socialise. Il n'y a pratiquement plus d'activité qui ne soit de quelque manière contrôlée, réglementée, et à la limite, commandée par la bureaucratie dirigeante.
De même, nos maîtres estimaient que, pour empêcher la ruine de la cathédrale, il suffisait de restaurer la clef de voûte. S'ils y étaient parvenus, tout aurait été, effectivement, sauvé. Ce ne fut pas. Comment jeter une clef de voûte sur une ruine ? Elle s'effondrerait avec elle. Il ne subsiste plus que les fondations, que le dessein général de l'édifice. La France ressemble à ces cités antiques, Glanum ou Amporia, que le barbare a rasées au sol, mais dont on retrouve, en creusant, le plan, inscrit dans la pierre.
Il faut nous contenter, pour l'heure, de jeter sur le chantier une bâche de fortune, et travailler humblement, en partant du bas, de ce qui demeure, qui n'est pas beaucoup. Nous avons à reconstruire la société en même temps que l'Etat. Cette double tâche pose des problèmes nouveaux.
La fidélité à nos maîtres commandes de nous attacher à leur méthode, l'empirisme organisateur, plutôt qu'aux résultats contingents qu'ils ont obtenus, par l'usage, d'ailleurs correct en son temps, de cette méthode. Nous n'avons pas à les répéter, scolairement, en mauvais élèves, mais à les imiter. Etre empirique, cela consiste à constater que le temps fait son œuvre. Pour le pire, comme pour le meilleur. Etre organisateur, cela consiste à partir de ce qui existe, afin d'en conserver les formes et de les projeter dans un avenir qu'il nous appartient d'inventer. »
Avant-propos de l’Editeur (L’Ordre Français), in La cathédrale effondrée (Ouvrage Collectif : 5 essais par Henri Massis, Pierre Debray, Louis Daménie)
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Maurice G. Dantec : Les Résidents
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23/08/2014
La nation préexiste au nationalisme
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« Les cités humaines sont soumises à la loi du temps. Il faut des siècles de patience pour que naisse une nation. Réciproquement, s’il fut un temps où il n’y avait pas encore de France, peut-être en viendra-t-il un où il n’y aura plus, dans la mémoire de l’homme, que la trace lumineuse de son passage. C’est ce qui confère, aux yeux des nationalistes français, son tragique à la politique. Il n’est sans doute pas vrai que chaque conscience poursuit la mort de l’autre. Le spectacle de l’histoire n’est sans doute pas très édifiant, et les âmes sensibles en éprouvent de l’horreur. Devant tant de crimes et de guerres, il est des moments où l’on subit la tentation de la solitude. Si nous étions les habitants d’une île bienheureuse, comme le rêvait Fénelon, il nous serait peut-être permis, d’y céder, mais chaque peuple est environné d’ennemis, occupés à retourner contre lui ses fautes. Si le groupe humain auquel nous appartenons, la nation pour nous autres Français, s’affaiblit par notre faute, nous serons solidaires de son malheur et, sinon nous, nos enfants. Que survienne un désastre, parce que nous aurons préféré notre intérêt particulier, notre confort ou nos passions idéologiques au bien de la nation, nous serons jetés sur les routes de l’exode, réquisitionnés comme du bétail par l’occupant, frustrés de notre honneur et aussi bien des joies les plus humbles. Le nationalisme français ne veut être rien d’autre que l’art de lutter contre la mort de la nation. D’autant que tout ce qui affaiblit ou diminue la France atteint chaque Français dans son particulier, mais aussi le genre humain pris en tant que corps. Les nationalismes français sont en effet convaincus que notre nation possède une mission de caractère universel, car elle est pétrie de tradition catholique. Ce n’est pas en vain qu’elle fut nommée la fille aînée de l’Eglise. Encore faut-il qu’elle ne soit pas infidèle à son passé. Dans la mesure où elle renie les héros et les saints qui l’ont fondée, elle trahit sa vocation et, du même coup, perd son rayonnement et sa force. Ainsi l'attachement à la nation, loin d’être contradictoire avec un sentiment œcuménique, le soutient. La France est la nation croisée ou elle n’est pas.
Non que les nationalistes français fassent de la nation un absolu, une manière d’idole. Bien au contraire, ils insistent sur son caractère contingent. Sans la volonté patiente et tenace de la dynastie capétienne, il n’y aurait pas eu de nation, car aucun impératif de la géographie ou de la race n’imposait sa constitution. Rien donc, dans une certaine mesure, de plus relatif que la nation. Rien non plus de plus nécessaire, puisqu’il ne nous appartient pas d’être autre chose que ce que l’Histoire nous a faits.
Cette France, dont nous sommes les héritiers, s’est historiquement constituée en nation. Il aurait pu en être autrement. C’est un fait, cependant, contre lequel il n’est pas permis d’aller sans manquer à la piété envers les ancêtres.Si, demain, la France cessait d’être une nation, elle cesserait d’être. Aucun de nous n’a le droit de décider que la nation ne sera plus.
Le nationalisme français se veut donc uniquement de conservation. Il refuse toute volonté d’impérialisme, tout dessein agressif. Il s’agit pour lui de maintenir l’œuvre des pères. C’est qu’en effet, dans un pays comme la France, la nation préexiste au nationalisme. Il a fallu, pour la forger, plus d’un millénaire. Pas davantage, il n’est fait de mépris ou d’hostilité pour les autres peuples. Se reconnaître héritier d’une certaine Histoire, c’est admettre qu’il y a d’autres héritages et des Histoires différentes. Pas plus que nous n’admettons d’être dépossédés, nous ne concevons de déposséder. Le respect d’autrui nous conduit à admettre que les nations n’obéissent pas à la même règle de constitution. Une raison unique ne gouverne pas les empires. »
Louis Daménie, La cathédrale effondrée (Ouvrage Collectif : 5 essais par Henri Massis, Pierre Debray, Louis Daménie)
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L’insurgé qui meurt pour une idée qu’il a faite sienne
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« Quand dit-on qu’un homme a mis sa vie en ordre ? Il faut pour cela qu’il se soit mis d’accord avec elle et qu’il ait conformé sa conduite à ce qu’il croit vrai. L’insurgé qui, dans le désordre de sa passion, meurt pour une idée qu’il a faite sienne, est en réalité un homme d’ordre parce qu’il a ordonné toute sa conduite à un principe qui lui paraît évident. Mais on ne pourra jamais nous faire considérer comme un homme d’ordre ce privilégié qui fait ses trois repas par jour pendant toute une vie, qui a sa fortune en valeurs sûres, mais qui rentre chez lui quand il y a du bruit dans la rue. Il est seulement un homme de peur et d’épargne. Et si l’ordre français devait être celui de la prudence et de la sécheresse de cœur, nous serions tentés d’y voir le pire désordre, puisque, par indifférence, il autoriserait toutes les injustices. »
Albert Camus, article paru dans « Combat - 12 octobre 1944 »
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Reconstruire lentement un homme nouveau
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« Il est clair que vainqueurs et vaincus sont désormais sur le même plan et que le seul résultat de la Deuxième Guerre mondiale a consisté à rabaisser l’Europe au rang d’objet de puissances et d’intérêts extraeuropéens. Il faut d’ailleurs reconnaître que la dévastation qui nous entoure est de caractère essentiellement moral. Nous sommes dans une atmosphère d’anesthésie morale générale, malgré tous les mots d’ordre en usage dans une société de consommation et démocratique : le fléchissement du caractère et de toute dignité vraie, le marasme idéologique, la prédominance des intérêts les plus bas, la vie au jour le jour, voilà ce qui caractérise, en général, l’homme de l’après-guerre. Reconnaître cela, signifie aussi reconnaître que le premier problème, au fondement de tous les autres, est de nature intérieure : se relever, renaître intérieurement, se donner une forme, créer en soi-même ordre et droiture. Ceux qui s’illusionnent, aujourd’hui, sur les possibilités d’une lutte purement politique et sur le pouvoir de telle ou telle formule, de tel ou tel système, qui n’auraient pas pour contrepartie précise une nouvelle qualité humaine, ceux-là n’ont rien appris des leçons du passé récent. Il est un principe qui, aujourd’hui plus que jamais, devrait être d’une évidence absolue : si un État possédait un système politique et social qui serait, en théorie, le plus parfait, mais si la substance humaine était tarée, eh bien cet État descendrait tôt ou tard au niveau des sociétés les plus basses, alors qu’un peuple, une race capable de produire de vrais hommes, des hommes à l’intuition juste et à l’instinct sûr, attendrait un haut niveau de civilisation et résisterait aux épreuves les plus calamiteuses, même si son système politique était défectueux et imparfait. Qu’on prenne donc nettement position contre le faux « réalisme politique », qui ne pense qu’en termes de programmes, de problèmes d’organisation des partis, de recettes sociales et économiques. Tout cela appartient au contingent, non à l’essentiel. La mesure de ce qui peut encore être sauvé dépend en fait de l’existence, ou non, d’hommes qui se tiennent debout devant nous non pour prêcher des formules, mais pour être des exemples, non pour aller à la rencontre de la démagogie et du matérialisme des masses, mais pour réveiller des formes différentes de sensibilité et d’intérêt. A partir de ce qui peut encore subsister parmi les ruines, reconstruire lentement un homme nouveau , l’animer grâce à un esprit et une vision de la vie bien précis, le fortifier par l’adhésion intransigeante à certains principes – tel est le vrai problème. »
Julius Evola, Orientations
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22/08/2014
Un peuple qui a besoin d’aimer et ne trouve rien pour satisfaire son amour
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« C’est une terrible pitié que de voir un peuple qui a besoin d’aimer et ne trouve rien pour satisfaire son amour. Il est permis d’interpréter les malheurs de ce pays dans un langage pompeux, en invoquant les courbes de la natalité, l’absence de pétrole ou la recherche d’un idéal. Mais j’ai le sentiment que nos ancêtres, qui faisaient pourtant d’assez grandes choses, ne se torturaient pas pour trouver un idéal : ils l’avaient dans le sang, ou, si l’on veut, à portée de main, en chair et en os, ou en bois sculpté. Le roi de France, Napoléon, le bon Dieu, étaient des êtres de tous les jours, auxquels on pouvait parler, raconter ses affaires sans s’entendre répondre comme le ferait un idéal moderne : "Monsieur, votre honorée du 10 courant nous est bien parvenu. La loi du 8 septembre 1935, modifiée par le décret du 7 Août 1946, vous donne toutes les précisions sur la question. Reportez-vous au journal officiel. Sans doute, les hommes de l’ancienne France connaissaient-ils un grand nombre de lois ; mais ils n’étaient pas perdus dans ces textes comme un écureuil dans sa cage, qui court, affolé, en croyant au progrès parce que le sol bouge sous ses pieds »
Roger Nimier, Le Grand d'Espagne
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Le néant est à la mode
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« Il est temps de nous séparer. Des tâches différentes nous attendent. Où il vous est permis de mépriser, je vais tenter d’oublier. Le premier devoir est de se boucher les oreilles, l’autre est d’imaginer une civilisation.
Amusante ou non, la civilisation nous convient. Elle nous changera d’air. C’est un pari difficile. Par cette difficulté même, elle nous entraînera où nous mènent toujours les personnes sérieuses : au mariage quand nous ne songeons encore qu’au plaisir.
Si jeunes et déjà civilisés ! Cette idée, à votre place, m’effraierait. Le néant est à la mode. Les démocraties, en tremblant d’aise, y songent comme les vieilles filles songent au séducteur. Elles le voient sous les traits d’un voyou musclé.
Tout cela, mon père, n’est qu’à moitié votre faute. Une civilisation exige une société et une culture. Vous nous avez transmis la culture, mais il n’y a plus de société. Dire qu’à moins de vingt ans, voilà une question urgente. Quelle barbe !
Ce problème sera religieux. N’en doutons pas, chaque journal aujourd’hui représente un sacrifice humblement comparable à la messe des chrétiens. Mais ici, c’est l’intelligence qui est crucifiée. Les fidèles, les fidèles lecteurs, s’en frottent les mains.
Si nous ne trouvons pas cette civilisation, cet état de la grandeur durable où chacun peut aller un peu plus loin parce que les autres ont déjà fait une partie du chemin à sa place – alors nous irons au plus pressé ; pour sortir de cette angoisse, nous retournerons dans la guerre. Car les religions modernes, malgré leur emphase et leurs inquisiteurs nombreux, pèchent par un détail : elles ne sont pas révélées. Leur assurance ne les garde pas d’un doute obscur. Personne ne se fait tuer pour le cinéma, l’hygiène ou les élections cantonales. Voilà l’erreur. Sans martyrs, les religions clament leur peine et ne savent pas vivre. Leur hésitation les oppose. C’est un grand vacillement des vérités ivres mortes. Dans ce temps-là s’avance la jeune barbarie et la seule réponse à tant de questions se nomme la guerre. Dans la guerre, on se sacrifie tout à son aise. Une morale sévère, un ordre, un culte de tous les instants s’imposent aux hommes. Cette conviction est une chose d’importance, au cœur de chacun – et qui saigne pour un faux mouvement.
Guerre ou civilisation, évidence contre évidence, une génération va choisir. Il y a dans la bassesse des choses une certitude apaisante : c’est qu’elle exige leur conclusion. Notre nature et notre horizon sont limités. Les beaux enfants de la terre n’ont pas mille façons d’expier leurs crimes. Un archange, toujours, se tient à la porte des limbes. Ne craignons rien, il parlera. Il parlera – et, quel que soit son visage, si terrible soit-il, la justice est toujours bonne à prendre. »
Roger Nimier, Le Grand d'Espagne
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Il ne lui restait en mémoire que la fatigue des bras aiguillonnés par l’orage ou les gelées prochaines
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« Alors il se mit à expliquer ce qui n’allait point dans l’agriculture ; comme quoi la terre ne rapportait pas. Combien Edouard Moisan devait s’estimer plus heureux de vivre en ville, “parmi le monde”, avec tous les samedis le salaire qui arrive non pas en blé à couper, en pommes de terre à arracher, mais en bon argent qui tombe directement dans la main, infailliblement, “qu’il mouille ou qu’il vente”. Edouard ne s’en défendit pas, car il était vaniteux ; et les plaintes mi-spécieuses, mi-sincères d’Euchariste le confirmaient dans son sentiment de supériorité, lui, le Moisan de la ville, sur le Moisan de la campagne. Aussi bien, d’ailleurs, n’avait-il jamais regretté la ferme paternelle d’où il s’était évadé à vingt ans pour venir épouser une citadine contre le gré de son père ; en vérité, l’attrait de la ville n’avait pas été pour peu dans sa décision, ainsi qu’un fond de paresse insouciante auquel le travail de boutique convenait mieux que la dure corvée du labour. Jamais il ne songeait à ces satisfactions que sont la joie de soigner un bien qui est à soi, la stimulation des espaces larges, le triomphe des récoltes réussies ; tous agréments qui sont théoriquement vrais mais que, en fait, le paysan perçoit bien rarement, si jamais.
Et moins encore à la beauté claironnante des matins sur les prés humides de rosée, à toute cette poésie agreste que seuls goûtent ceux pour qui rien de tout cela n’est quotidien. Il ne lui restait en mémoire que la fatigue des bras aiguillonnés par l’orage ou les gelées prochaines ; du souci de la moisson menacée par un nuage gonflé de grêle. Certes, la nature champêtre lui paraissait grande, si grande, en vérité, qu’il se sentait annihilé par son immensité même. Il aimait mieux dépendre d’un homme. Et de tout cela il ne regrettait parfois que les longues flâneries de l’hiver. Sa boutique lui donnait un sentiment que son cousin ne pouvait connaître ; celui d’être le maîtres des choses. Non, pas un instant il n’avait regretté la terre. »
Ringuet, Trente arpents
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21/08/2014
Je n'ai pas cru que tes édits pussent l'emporter sur les lois non écrites et immuables des dieux
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« CRÉON : Et ainsi, tu as osé violer ces lois ?
ANTIGONE : C'est que Zeus ne les a point faites, ni la Justice qui siège auprès des dieux souterrains. Et je n'ai pas cru que tes édits pussent l'emporter sur les lois non écrites et immuables des dieux, puisque tu n'es qu'un mortel. Ce n'est point d'aujourd'hui ni d'hier qu'elles sont immuables ; mais elles sont éternellement puissantes et nul ne sait depuis combien de temps elles sont nées. »
Sophocle, Antigone
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L’inattendu
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« Par la colère, plonge-les dans le désarroi, par l'humilité, dans l'orgueil. Par la fuite, épuise leurs forces, sème la division en leur sein. Prends-les au dépourvu, déplace-toi dans l'inattendu. Sois subtil, jusqu'à l'invisible ; Sois mystérieux, jusqu'à l'inaudible ; Alors tu pourras maîtriser le destin de tes adversaires. »
Sun Tzu, L'art de la guerre
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Ruse
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« Tout l'art de la guerre est basé sur la ruse. Donc, si nous sommes en mesure d'attaquer, nous devons en paraître incapables ; si nous employons nos armées, nous devons paraître inactifs ; si nous sommes proches de l'ennemi, nous devons lui faire croire que nous sommes loin ; et lorsque nous sommes éloignés, nous devons lui faire croire que nous sommes près. Utilisez des appâts pour attirer l'ennemi. Feignez le désordre, et écrasez-le. »
Sun Tzu, L'art de la guerre
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20/08/2014
C’est le jour des révoltes que la vie rentre dans l’ordre
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« Il se disait que, si agréables qu’elles soient pour certains, les périodes de paix sociale ne sont pas chose naturelle ni logique, et que c’est le jour des révoltes que la vie rentre dans l’ordre. Quels que puissent être ses excès et ses injustices de détail (lamentables, certes), c’est malgré tout le jour des révoltes que la situation redevient normale et satisfaisante pour l’esprit. »
Henry de Montherlant, Les jeunes filles
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Celui qui, isolé et privé de sa patrie par la marche de l’univers, se voit enfin livré au néant
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« Nous appelons ainsi celui qui, isolé et privé de sa patrie par la marche de l’univers, se voit enfin livré au néant. Tel pourrait être le destin d’un grand nombre d’hommes, et même de tous - il faut donc qu’un caractère s’y ajoute. C’est que le Rebelle est résolu à la résistance et forme le dessein d’engager la lutte, fût-elle sans espoir. Est Rebelle, par conséquent, quiconque est mis par la loi de sa nature en rapport avec la liberté, relation qui l’entraîne dans le temps à une révolte contre l’automatisme et à un refus d’en admettre la conséquence éthique, le fatalisme. A le prendre ainsi, nous serons aussitôt frappés par la place que tient le recours aux forêts, et dans la pensée, et dans la réalité de nos ans. »
Ernst Jünger, Le traité du Rebelle ou le recours aux forêts
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