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06/09/2013

Un pays pétri de mollesse bourgeoise

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« Montherlant, guerrier dans l'âme, se sent un exilé dans son propre pays pétri de mollesse bourgeoise. Il est, comme Nietzsche, un "unzeitgemäß", écoeuré par la déliquescence de la société de consommation, cette ère de l'abondance à laquelle il reproche, paradoxalement, de ne pas pourvoir aux besoins véritables de l'homme : "Un homme qui a une vitalité normale se sent, parmi les français, d'une autre espèce : il pense constamment au rebours d'eux, réagit autrement qu'eux, parce qu'il brûle plus et plus vite qu'eux... Vivant au ton de la France telle qu'elle devrait être, et telle qu'elle fut sans doute par à-coups, il se sent en France un exilé." (Montherlant, "L'Equinoxe de Septembre")

Le plus grand reproche qu'il fait à l'éducation française contemporaine est de manquer d'agressivité, d'enseigner l'idéal falot du "coeur sur la main" et de la "bonne action". Dans un passage connu de "Solstice de Juin", se gaussant de la chanson des Saint-Cyriens, "qui sont, ès qualités, le ' nec plus ultra ' de l'agressivité française", il regrette que les fameux casoars aux cheveux blancs ne flottent que "gentiment", au lieu de le faire "fièrement" ou "noblement", ou même, à la rigueur, "gaiement" : "Gentiment ! Mimi-mimi ! Ce côté cocu du caractère français n'est pas très agréable à observer (...) Depuis combien de temps la France est-elle élevée dans la haine et le mépris de la force ? ' En France, tout ce qui est un peu fort fait scandale ', écrivait déjà Stendhal !" (Montherlant, "Le Solstice de Juin")

C'est à propos de ces français petit-format qu'un Anglais de l'époque coloniale observe qu' "ils ne sont pas des gens avec lesquels on puisse aller à la chasse au tigre". (Montherlant, "L'Equinoxe de Septembre")
Montherlant méprise ouvertement et continuellement cette "nation petite-bourgeoise, et qui adore le petit". Car on y "demande pas à un homme d'avoir de la valeur, ou seulement d'être un caractère : on lui demande d'être sympathique. L'époque le demande : être sympathique, cela veut dire être coulant, se prêter aux combines, réussir". (Montherlant, "L'Equinoxe de Septembre")

On reconnaît bien là le Français moyen, pas celui de l'ère napoléonienne qui, nous dit Pierre Vial, "vivait au rythme des communiqués de la Grande Armée", mais celui de l'époque louis-philipparde (dont nous ne sommes pas sortis) qui vit "au rythme des cotations de bourse" (Pierre Vial, "L'Orléanisme n'est pas mort", in "Eléments n°: 44, Janvier 1983, pages 13-16). Son "style" c'est la "débrouille", les "trucs sympas" et l'attitude bonhomme qui permettent d'obtenir toutes sortes de gratifications en sus du menu ordinaire...
Il faut noter que Montherlant ne condamne pas cette attitude en soi : il ne propose autre chose (ce que ne fait pas le système éducatif français) qu'à ceux qui en sont capables et en éprouvent le besoin. Dans la "Lettre d'un Père à son Fils", il s'écrie : "Mais quoi ! N'avoir que des amis est une obligation de commerçant ; se faire des ennemis est une occupation d'aristocrate". (Montherlant, "Service inutile")

Il y aura, bien sûr, suffisamment de mamans bien intentionnées pour se récrier qu'on ne prêche pas ainsi aux jeunes l'amour de la mort. C'est juste, mais l'homme, lui, a autre chose à enseigner et à apprendre que le simple instinct de conservation. Dans "La Reine Morte", le roi Ferrante a ce mot : "Car les femmes disent toujours : ' Elever un enfant pour qu'il meure à la guerre ! ' Mais il y a pis encore : élever un enfant pour qu'il vive et se dégrade dans la vie". (Montherlant, "La Reine Morte")

La recherche de l'adversité (qui ne doit pas être confondu avec un tempérament irascible, une susceptibilité exagérée ou un amour vulgaire de la "bagarre") est une constante de l'oeuvre de Montherlant. L'un des principaux legs que nous ont transmis les Romains, précise-t-il, "est le sens, le goût, et comme ' l'attrait de l'adversité haute ', adversité qui finit par être le lot d'eux tous avec peu d'exceptions ; adolescent, je souhaitais presque l'adversité, ensemble pour la surmonter, pour y devenir pareil à eux, et parce qu'elle est encore une forme de bonheur, en vous forçant à accomplir plus d'humain..." (Montherlant, postface à "La Guerre Civile", citée dans "Nouvelle Ecole n°: 20, page 17)

Sur un ton comparable, Nietzsche a fustigé le "religion du coeur" et le "culte du bien-être" qui, obnubilés par un sentiment de piété aussi déplacé que bien intentionné, ignorent qu'il existe "une nécessité personnelle de malheur". Cette religion de la pitié méconnaît un trait fondamental de la psychologie, à savoir que bonheur et malheur grandissent ensemble ou restent petits ensemble. Et, nous déniant notre droit à la peur, aux privations, à la pauvreté, à la belle étoile, à l'evanture, aux risques, et aux méprises, on écarte de nous la possibilité de la joie de surmonter des obstacles, et de nous retrouver grandis de notre propre victoire.
Au lieu de la pitié ("Mitlied" = sym-pathie = con-doléance = com-passion), Nietzsche propose la "co-jubilation" ("Mitfreude"), la joie mutuelle qu'éprouvent les amis en apprenant leurs victoires respectives. (Nietzsche, "Le Gai Savoir")
Alain de Benoist, comme Montherlant, est lui aussi un héritier de Nietzsche dans cette quête des tensions et de l'adversité. Son douzième principe de "morale" est rédigé de la façon suivante : "Nietzsche : ' Qu'est-ce qui est noble ? -- Rechercher les situations où l'on a besoin d'attitudes. Abandonner le bonheur du grand nombre, ce bonheur qui est paix de l'âme, vertu, confort, mercantilisme à l'anglo-saxonne. Rechercher instinctivement les responsabilités lourdes. Savoir se faire partout des ennemis, au pis aller s'en faire un de soi-même". (Alain de Benoist, "Les idées à l'endroit")

La pitié, comme l'espérance, sont des solutions de facilité, des épanchements de coeurs perméables, incapables de se conserver entiers pour irriguer un grand dessein. Depuis l'antiquité les cultures indo-européennes ont été submergées par des marées d'ilotes et d'esclaves qui ont su profiter de cette terrible lacune, l'absence de coeurs durs, pour corrompre et amolir les empires qui étaient construits, précisément, sur une qualité d'hommes les excluant. C'est le sens de l'accusation portée par Montherlant contre la décadence dans "Le Treizième César" (1970) et "La Marée du Soir" (1972). C'est aussi le sens du terrible avertissement lancé par Jean Raspail dans son roman "Le Camp des Saints" (1971), où il dépeint un Occident lâche, succombant sous sa propre "morale", envahi par des peuples de couleur robustes et impitoyables. »

Jacques Marlaud, Chapitre "Montherlant : L'Être Homme", in "Le Renouveau païen dans la pensée française"

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J’admire au plus haut la naïveté sublime de cette foi

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« Je laisse aller ma chanson, en écrivant ces lignes, et rêve de François Pizarre, monstre de force brute devant l’infidèle et agneau devant son dieu. Il va mourir, tel César, percé de coups par des conspirateurs qui étaient ses amis. Il est seul et agonise comme une bête sur les dalles du palais mais, dans son cœur, il n’y a qu’un désespoir, il n’y a qu’une panique : il va mourir sans poser ses lèvres sur la croix que les hommes de Dieu tendent vers ceux qui s’en vont de ce monde. Que fait-il alors ? Il plonge sa main dans le sang qui coule de ses entrailles et, sur les dalles, toutes forces rassemblées, il trace une vaste croix de sang vers laquelle il rampe dans un dernier effort et sur laquelle il se couche. » Il meurt, apaisé, face contre le sol et crucifié sur cette rouge et divine souillure qu’il vient de tracer. J’admire au plus haut  la naïveté sublime de cette foi. »

Jean Cau, Le Chevalier, la Mort et le Diable

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Journée d'Action...

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Notre impuissance à posséder la vie...

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« Si le signe de l'époque est la confusion, je vois à la base de cette confusion une rupture entre les choses, et les paroles, les idées, les signes qui en sont la représentation. On juge un civilisé à la façon dont il se comporte, et il pense comme il se comporte ; mais déjà sur le mot de civilisé il y a confusion ; pour tout le monde un civilisé cultivé est un homme renseigné sur des systèmes, et qui pense en systèmes, en formes, en signes, en représentations. Toutes nos idées sur la vie sont à reprendre à une époque où rien n'adhère plus à la vie. Et cette pénible scission est cause que les choses se vengent, et la poésie qui n'est plus en nous et que nous ne parvenons plus à retrouver dans les choses ressort, tout à coup, par le mauvais côté des choses ; et jamais on n'aura vu tant de crimes, dont la bizarrerie gratuite ne s'explique que par notre impuissance à posséder la vie. »

Antonin Artaud, Le Théâtre et son double

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05/09/2013

Jean-Louis Murat : "L'au-delà"

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« Je n’ai jamais voté de toute façon. Cela ne m’intéresse pas. Je n’aime pas cette façon qu’a aujourd’hui la démocratie de se transformer en tyrannie des imbéciles. Tout le monde juge la politique sur un plan moral. Pour moi, il n’y a qu’une morale individuelle. La démocratie est un système qui n’est vraiment pas satisfaisant. On aligne tout le monde sur le plus petit dénominateur commun. Et comme je suis farouchement contre, cela fait de moi un anti-démocrate. »

Jean Louis Murat

 

 

J´avais fait le job
je rentrais chez moi
le plexus tout chose
comme à chaque fois
j´allais prendre à droite
direction Vendeix
quand la petite chose
m´a murmuré

mon amour est-il dans son quartier de lune
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà
mon amour a-t-il mis ses habits de fête
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà

La vie en plein air
il n´y a que ça
j´allais au Servière
me rafraîchir le moi
ma première framboise
j´allais savourer
quand les libellules
en choeur m´ont chanté

mon amour est-il dans son quartier de lune
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà
mon amour a-t-il mis ses habits de fête
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà

J´ai dit nom de dieu
on n´est plus chez soi
ohé libellules qui vous a dit ça
moi je prépare le tour
oh vous m´ennuyez
mais sur le bitume
j´ai chantonné

mon amour est-il dans son quartier de lune
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà
mon amour a-t-il mis ses habits de fête
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà

J´ai pas vu le poison
m´arriver au coeur
temps des fenaisons
temps du taon vengeur
toujours une fiole
le cul au frais
mais même sous alcool
j´ai chantonné

mon amour est-il dans son quartier de lune
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà
mon amour a-t-il mis ses habits de fête
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà

Que gronde l´orage
entre les rochers
mourir en montagne
mourir foudroyé
mon âme cette chienne
cette enragée
c´te pie musicienne
va pas la fermer

mon amour est-il dans son quartier de lune
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà
mon amour a-t-il mis ses habits de fête
mon amour veut-il faire un tour dans l´au-delà.

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Un Avenir Radieux vous sourit...

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Vitalité du Capitalisme

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« Selon le mot célèbre, il est des morts qu'il faut qu'on tue. Et il y a aussi ces gens qu'un personnage de théâtre tuait et qui se portaient assez bien.
Tel est le cas du capitalisme. Avait-on assez annoncé qu'il se mourait, qu'il était mort ? "Vieillard, va-t-en donner mesure au fossoyeur." On le traitait comme un cadavre. On répétait le classique jam foetet "il pue déjà". Il y a peu de temps encore, dans un congrès socialiste, un orateur s'écria superbement : "Nous n'aurons même pas besoin de le renverser. Il tombe tout seul. Il s'éboule."

Au fond, cette idée était de celles que Karl Marx appelait avec mépris "petites bourgeoises". Elle se composait d'un mélange d'esprit catastrophique, de pessimisme et de panique. Elle était inspirée par la "crise". Tout le monde sait que le gros public, moutonnier, n'achète jamais en baisse. Il suffit qu'une valeur descende à la Bourse pour qu'il la croie perdue. Il croit bon tout ce qui monte. Il ne connaît pas de milieu entre la hausse illimitée et la chute verticale et sans remède.

Quand l'homme de la rue a vu fondre les bénéfices, diminuer ou disparaître les dividendes, il s'est naturellement imaginé que c'était fini, que la prospérité ne reviendrait jamais, que le système touchait à sa fin. Le capitaliste qui désespère de son titre n'est pas dans un état d'esprit différent de celui du socialiste qui attend "l'éboulement" et la "lutte finale".


Cependant, toutes les entreprises n'ont pas sombré. Tous les grands trusts ne se sont pas effondrés. Il y a des affaires qui ont tenu bon. Et même les cours remontent. Ils ont souvent doublé en un an. Le capitalisme n'est-il donc pas mort ? Non, petit bonhomme vit toujours.

Il n'en est pas à ses premières alertes. Qu'on le demande plutôt à ces "deux cents familles" que le Rassemblement populaire dénonce comme une puissance affreuse et féodale, sans d'ailleurs les désigner une par une. On le regrette. Ce serait bien mieux s'il les nommait. On verrait qu'il n'en est pas une seule, pourvu qu'elle soit un peu ancienne, qui n'ait connu dans son histoire des moments où elle a paru tout près de la ruine. Et, sans parler des disparues, les plus puissantes ont été parfois les plus menacées. Elles n'ont pas oublié qu'elles ont souvent tremblé sur leurs bases.

Le capitalisme ne "s'éboule" pas pour la raison qu"il s'est toujours éboulé. Il est fait d'une suite de destructions et de constructions. L'inimitable dandy, le Brummel de notre temps, Boni de Castellane, enseignait aux gens de son monde "l'art d'être pauvre". Il y a aussi un art non seulement d'être riche mais d'être capitaliste, art qui consiste à savoir d'abord que les richesses ne sont pas éternelles, qu'elles sont fragiles et ensuite qu'elles se reforment sans cesse, dans d'autres conditions, rarement d'ailleurs entre les mêmes mains.


Imaginez un peu ce que les contemporains de la révolution française ont pu penser de l'avenir du capitalisme. Si le mot, alors, n'était pas employé, la chose existait. Si les valeurs mobilières n'étaient ni aussi nombreuses ni aussi répandues qu'aujourd'hui, elles étaient fort loin d'être inconnues. La haute, moyenne et petite bourgeoisie vit s'entrouvrir l'abîme, lorsque furent anéanties ces actions de la Compagnie des Indes, qui figuraient, comme on dirait aujourd'hui, dans les portefeuilles les mieux composés. La modeste dot que Mme de Chateaubriand avait apportée à son illustre époux consistait en rentes sur le clergé qui passaient pour être d'une solidité à toute épreuve et qui étaient en effet supérieurement gagées. Seulement le gage s'évanouit et, un jour, le futur auteur des Mémoires d'outre-tombe reçut pour toute compensation un lot d'assignats, qu'il eût, par surcroît, le malheur d'oublier dans un fiacre.

Il y eut pourtant des affaires qui survécurent à la tourmente révolutionnaire et aux mesures, d'un communisme incontestable, qui furent prises alors. Saint-Gobain, qui remonte au XVIIème siècle, vit toujours, après des hauts et des bas. Cependant un officier d'artillerie, qui s'appelait Choderlos de Laclos, l'auteur fameux des Liaisons dangereuses, recommandait à sa femme, au cas où il viendrait à disparaître, de ne se défaire, sous aucun prétexte, de ses "charbons d'Anzin" dont il possédait des parts. Moraliste et psychologue, Laclos avait confiance dans l'avenir du capitalisme.

Ce sont des choses qu'on se rappelle avec un certain plaisir philosophique. Nous ne mentionnerons pas non plus sans une douce et paisible ironie qu'au début de ce siècle, un journal financier très sage, très pondéré, archibourgeois et archiprudent avait organisé un concours parmi ses lecteurs non moins graves que lui pour les inviter à désigner les deux meilleures valeurs du monde. La majorité des suffrages s'était portée sur l'action des Chemins de fer du Nord et sur l'action de la Banque de Paris et des Pays-Bas. Assurément ce n'est pas le résultat que le même genre de plébiscite donnerait aujourd'hui. Qui se hasarderait à décerner cette palme et à nommer le phénix des valeurs ?

Mais les valeurs mobilières sont comme les feuilles, les fleurs et les oiseaux. Elles tombent, s'envolent et renaissent. Elles sont aussi comme les livres et les chansons qui ont leur destin. Enfin, elles sont faites surtout pour les villes, où l'on oublie vite.

A la campagne, la mémoire est plus longue. L'expérience compte plus et profite mieux. Le capitalisme est un mot abstrait qui n'offre pas beaucoup de sens. On sait ce que c'est que la propriété sous sa forme la plus visible et la plus tangible qui est la propriété foncière, la seule que l'on croie vraiment solide. Pourtant, celle-là même qui est au "soleil", on la sait sujette aux fluctuations et aux accidents. Il est encore des vieillards qui se souviennent de la crise agricole de 1892-1893. Alors les terres se louaient à vil prix. Parfois elles étaient abandonnées. Les propriétaires purent se croire ruinés. Et les prétendants prenaient la fuite lorsqu'ils apprenaient que la dot consistait en fermes.

Il y a douze ou quinze ans, au moment du grand engouement pour la terre valeur réelle, les anciens, au fond des provinces, hochaient la tête. Ils disaient que ça ne durerait pas. Et ils n'imposaient à leurs fermiers que des baux raisonnables, ils refusaient de les mettre au coefficient 7 ou 5 en faisant cette prophétie : " A quoi cela nous servira-t-il, puisque ce sont des prix que, tôt ou tard, ils ne pourront pas payer ?"

Telle est la sagesse du capitalisme rural lequel est essentiellement traditionnel et modéré et, pour cela même, éternel. Il sait que les peupliers ne montent pas jusqu'au ciel, que les chênes ne plongent pas leurs racines jusqu'au centre de la terre, que rien ne va jamais ni de plus en plus ni de moins en moins, que les catastrophes sont souvent individuelles, bien rarement collectives et totales et que ceux qui les attendent ressemblent à ces hommes qui redoutaient l'an mil et s'abstenaient de fonder et de travailler, tandis que les plus sensés, au lieu de penser à la fin du monde, continuaient leurs petites affaires. »

Jacques Bainville, Paru le 10 février 1936, lendemain de sa mort, dans le journal "L'Eclair de Montpellier", cet article est le dernier de Jacques Bainville...

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04/09/2013

Syrie ? Non !

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J'appelle classique ce qui est sain, et romantique ce qui est malade

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« J'appelle classique ce qui est sain, et romantique ce qui est malade. Ainsi les Nibelungen sont classiques comme l'est Homère : tous deux sont sains et forts. Si la plupart des oeuvres modernes sont romantiques, ce n'est pas parce qu'elles sont modernes, mais parce qu'elles sont faibles, informes et malades ; et si ce qui est antique est classique, ce n'est pas parce que c'est ancien, mais parce que c'est robuste, frais, joyeux et sain. En distinguant, selon ces caractères, le classique et le romantique, nous saurons à quoi nous en tenir. »

Johann Wolfgang von Goethe à J. P. Eckermann, 2 avril 1829 ; in "Conversations avec Goethe"

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Téléchargez en deux fichiers PDF le livre de J. P. Eckermann, "Conversations avec Goethe" via le site de Maxence Caron :

*Conversations avec Goethe - Tome I.PDF

*Conversations avec Goethe - Tome II.PDF

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Justice Socialiste

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L’expansion de l’Occident a aussi été facilitée par la supériorité de son organisation

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« L’expansion de l’Occident a aussi été facilitée par la supériorité de son organisation, de sa discipline, de l’entraînement de ses troupes, de ses armes, de ses moyens de transport, de sa logistique, de ses soins médicaux, tout cela étant la résultante de son leadership dans la révolution industrielle. L’Occident a vaincu le monde non parce que ses idées, ses valeurs, sa religion étaient supérieures (rares ont été les membres d’autres civilisations à se convertir), mais plutôt par sa supériorité à utiliser la violence organisée. Les Occidentaux l’oublient souvent, mais les non-Occidentaux jamais.

Les civilisations puissantes sont universelles : les civilisations faibles sont particularistes. La confiance en soi grandissante de l’Extrême-Orient a fait émerger un universalisme asiatique comparable à celui qui était caractéristique de l’Occident. "Les valeurs asiatiques sont des valeurs universelles. Les valeurs européennes sont des valeurs européennes" a déclaré le Premier ministre Mahatir aux chefs de gouvernement européens en 1996. Qui plus est, une sorte d’ "occidentalisme" asiatique dépeint l’Occident de la même façon, uniforme et négative, que l’orientalisme asiatique avait, naguère, de présenter l’Orient. Pour les Extrêmes-Orientaux, la prospérité économique est une preuve de supériorité morale. Si l’Inde supplante un jour l’Extrême-Orient comme zone connaissant le développement le plus rapide au monde, on débattra de la supériorité de la culture hindoue, de la contribution du système des castes au développement économique et du fait que c’est en retournant à ses racines et en abandonnant l’héritage occidental moribond laissé par l’impérialisme britannique que l’Inde a finalement réussi à trouver sa place parmi les civilisations majeures. L’affirmation culturelle suit la réussite matérielle : la puissance dure engendre la puissance douce. »

Samuel P. Huntington, Le Choc des civilisations

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03/09/2013

"Mort de la princesse de Lamballe." par Léon-Maxime FAIVRE (1856-1914)

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La liberté, l'égalité et la fraternité ne rigolent pas ! Mais ça on le savait...

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Assassinat, décapitation, éviscération et dépeçage de la princesse Marie Thérèse Louise de Savoie-Carignan, princesse de Lamballe (dite " Mademoiselle de Carignan " ou " Madame de Lamballe "), née à Turin le 8 septembre 1749, et morte lynchée à Paris le 3 septembre 1792, par des "sans-culottes".

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Esprit Libre...

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« On appelle esprit libre celui qui pense autrement qu’on ne s’y attend de sa part en raison de son origine, de son milieu, de son état et de sa fonction, ou en raison des opinions régnantes de son temps. Il est l’exception, les esprits asservis sont la règle. Ce que ceux-ci lui reprochent, c’est que ses libres principes, ou bien ont leur source dans le désir de surprendre ou bien permettent de conclure à des actes libres, c’est-à-dire de ceux qui sont inconciliables avec la morale asservie. »

Friedrich Nietzsche, Humain, trop humain

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Le journalisme subventionné...

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De grands yeux étonnés, qui ne cillaient pas en rencontrant les miens

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Hélie Denoix de Saint Marc, assis, le premier à droite...

« Je me souviens d’une nuit en pays thaï, après un parachutage. L’ennemi avait décroché au bout d’une journée de combat. Nous étions éreintés. Je n’avais pas dormi plus de quatre heures en trois jours. Je suis tombé dans un sommeil sans rêve ni réveil. Quand je suis revenu à moi, le matin s’était levé. Une légère brume tapissait le sol, à la hauteur du mauvais bat-flanc sur lequel j’avais dormi. Immobile, j’ai ouvert les yeux. Des enfants, à demi nus, se sont approchés de moi. Ils m’ont dévisagé, avec de grands yeux étonnés, qui ne cillaient pas en rencontrant les miens. Ils m’apportaient un bol de soupe. Derrière eux, un énorme buffle, sorti tout droit de la préhistoire, avançait lentement, dodelinant de la tête, dédaigneux, comme s’il inspectait son domaine personnel. La joie déferlait en moi, en ondes puissantes. Je ne pouvais pas la contrôler. J’avais l’impression de naître à nouveau. C’était une joie d’une force animale - et pourtant tellement humaine. Un nouveau jour se levait. J’avais failli ne jamais le connaître. On avait voulu me tuer. J’avais sans doute tué d’autres hommes. De l’autre côté de la montagne, des soldats pleuraient leurs camarades, tués par ma faute. Des vies, peut-être admirables, s’étaient arrêtées. Des familles étaient endeuillées pour toujours. L’horreur de la guerre était passée, à laquelle ni moi ni eux ne pouvions rien. La vie suivait son cours éternel, sans se soucier de nous. »

Hélie de Saint Marc, Les sentinelles du Soir

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02/09/2013

Poutine à propos de la Syrie : Limpide...

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Il était mûr pour l'isolement

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« Tel qu'un ermite, il était mûr pour l'isolement, harassé par la vie, n'attendant plus rien d'elle ; tel qu'un moine aussi il était accablé d'une lassitude immense, d'un besoin de recueillement, d'un désir de ne plus rien avoir de commun avec les profanes qui étaient, pour lui, les utilitaires et les imbéciles.
En résumé, bien qu'il n'éprouvât aucune vocation pour l'état de grâce, il se sentait une réelle sympathie pour ces gens enfermés dans des monastères, persécutés par une haineuse société qui ne leur pardonne ni le juste mépris qu'ils ont pour elle, ni la volonté qu'ils affirment de racheter, d'expier, par un long silence, le dévergondage toujours croissant de ses conversations saugrenues ou niaises. »

Joris-Karl Huysmans, À rebours

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29/08/2013

France, pays fertile

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Les tiroirs à double fond de la comédie humaine

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« J’ai compris en prison ce que pouvait être la vocation monastique, la contemplation. Certes, le moine choisit sa condition. Mais le monastère et la détention sont des expériences similaires. Dehors, la liberté se dissout parfois dans l’agitation. L’enfermement peut développer une force intérieure qui peut être plus grande que la violence qui nous est faite. C’est ce qui m’a sauvé plusieurs fois dans ma vie.

A ma sortie, en dehors de l’oasis familiale, j’ai connu une sorte de trou noir. Je ne reconnaissais plus ni les lieux, ni les gens, ni les enseignes, ni les voitures. Je me sentais étranger dans un monde étranger. Je n’avais plus de papiers d’identité, plus de carnet de chèques, plus de maison, plus de métier. Pour de longs mois encore, j’étais un citoyen de second rang. On m’invita à Paris quelques jours, et ce fut pire encore. J’avais une sensibilité exacerbée, presque obsessionnelle, vis-à-vis de la vanité, de l’hypocrisie, des tiroirs à double fond de la comédie humaine. On me posait des questions imbéciles sur ma détention. La moindre manifestation maladroite, qu’elle fût de mépris ou de flatterie, réveillait ma colère. Il s’en est fallu d’un rien pour que je bascule dans une délectation tragique et un puits d’amertume. »

Hélie de Saint Marc, Toute une vie

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28/08/2013

Comme la rouille érode le fer, la prison détruit

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« Une heure, un jour, j’ai tout perdu. Je me suis retrouvé seul dans une cellule. J’ai compris alors la vanité de bien des choses et l’hypocrisie de bien des hommes.

J’ai vécu les premiers mois de détention en référence constante aux camps de concentration. Ce souvenir me donnait de la force. Vingt ans plus tôt, j’avais tenu le coup. Pourquoi lâcher prise ? Le désarroi m’envahissait en pensant à ma femme, si jeune encore. Tout juste vingt-cinq ans et deux petites filles qui parlaient à peine. Dans la tempête, il est plus facile d’être seul. Quand on y entraîne les siens, les choses deviennent obscures.

Aujourd’hui encore, des souvenirs de coursive, de fenêtres ouvertes sur le béton, de nuits d’angoisse, d’ennui à couper au couteau, remontent parfois à la surface. Ce ne sont pas des images anodines. Le corps se met en berne, lourd et fatigué. Le ciel devient blafard. Je me suis senti soudain comme un prisonnier en cavale, dont l’esprit échafaude mille solutions pour ne pas être renvoyé en cellule.

Aucune solidarité humaine ne pourra jamais empêcher l’enfermement d’attaquer les prisonniers dans ce qu’ils ont de meilleur. Comme la rouille érode le fer, la prison détruit. C’est un pourrissoir moral. L’uniformité des jours m’écrasait. J’étais nourri, chauffé, logé. Je n’avais plus aucune initiative, aucune responsabilité. Chaque heure, chaque minute, il fallait résister à la destruction de soi. Au fil des mois, l’angoisse devint mon ennemie familière : l’impuissance, l’accablement des aubes sans oubli, l’ennui monstrueux que rien ne pouvait combler. L’angoisse montait à intervalles réguliers, comme une marée puissante, bousculant les résolutions, la volonté, le courage. C’était une lutte exténuante qui se déroulait dans un cadre morne, toujours semblable, dont la règle était la régularité oppressante des horaires. »

Hélie de Saint Marc, Toute une vie

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Democracy

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Les rêves de ses vingt ans

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« Si je rencontrais demain, au coin d’une rue, l’adolescent que j’ai été, je voudrais qu’il n’aie pas à rougir de ce que je suis devenu. Je portais en moi une fièvre d’absolu. Avec impatience, je rêvais d’un grand départ vers un avenir lointain. Mes études étaient laborieuses et mon visage n’était pas beau. Je me souviens de camarades éblouissants, à qui tout souriait. Ils semblaient en état de grâce. Que sont-ils devenus ? Leur facilité m’impressionnait. Je cherchais sans doute à compenser mes faiblesses par un intense désir de vivre et une exigence en toutes choses. Je reconnais aujourd’hui cette empreinte dans le regard de quelques-uns des jeunes hommes qui viennent à moi. Je ne voudrais pas briser leur élan. Cependant, je sais à présent combien il est difficile de vivre une existence « simplement honorable », au sens de Montaigne, sans trahir les rêves de ses vingt ans. »

Hélie de Saint Marc, Toute une vie

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27/08/2013

L’honneur d’Hélie de Saint Marc, par Jean Sévillia

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Nous le savions lentement aspiré par l’âge et la maladie, mais comme les vieux chênes, tant qu’il vivait et durait, il était là. Et puis est venu ce matin d’été où Hélie de Saint Marc est parti, et nous sommes nombreux, si nombreux, à être tristes. Et pourtant il n’aurait pas aimé notre tristesse, lui qui avait appris à surmonter les épreuves, toutes les épreuves que la vie lui avait infligées.

Quelle image retenir de lui, tant elles se bousculent dans la mémoire ? Enfance bordelaise et périgourdine, milieu de hobereaux désargentés. Sur une cheminée de la demeure familiale trône un buste de Marie-Antoinette. Le père, avocat, lit Charles Maurras mais veille, en 1942, à saluer dans les rues de Bordeaux les passants qui portent l’étoile jaune. Déjà un héritage de fidélité et d’esprit rebelle. Le jeune Hélie est membre d’un réseau de Résistance. En 1943, cherchant à rejoindre les forces combattantes d’Afrique du Nord, il est dénoncé, arrêté. Prison, Compiègne, Buchenwald, puis le camp satellite de Langenstein… Saint Marc en réchappe grâce à un communiste letton qui l’a pris sous sa protection. Quand il est libéré par les Américains, il pèse 42 kilos et ne se rappelle plus son nom.

Ayant frôlé la mort, il n’a plus peur. À 23 ans, il est élève à Saint-Cyr. Avec la Légion, ce sont ensuite deux séjours en Indochine, et cette scène qui le hantera jusqu’à la fin de ses jours : sur ordre du commandement, au cours d’une opération de repli à la frontière de Chine, il devra abandonner des villageois qui avaient fait confiance à l’armée française.

Ce sera ensuite la guerre en Algérie, sous la direction du général Massu, puis le putsch de 1961 dans lequel, commandant par intérim du 1er REP, il entraîne son régiment. Lors de son procès, le soldat perdu expliquera n’avoir pas voulu revivre ce qu’il avait subi en Indochine : trahir la parole donnée.

Condamné à dix ans de réclusion criminelle, gracié en 1966, il entame une carrière civile et mène enfin une vie de famille. Deux décennies d’activité professionnelle où il ressemble – en apparence – à un cadre tel que l’industrie française en emploie des milliers, mais où il mûrit en réalité une réflexion qui s’exprimera, à partir des années 1990, dans ses livres et ses conférences. Témoin et acteur d’événements tragiques, Hélie de Saint Marc devient alors un personnage public, qui raconte et commente ce qu’il a vu. Mais il ne le fait pas comme un ancien combattant ; soit dit avec le respect qu’on doit aux anciens combattants...

Ancien déporté, ancien officier ayant servi dans des guerres perdues, ancien prisonnier, ancien proscrit, Hélie de Saint Marc, quand il se racontait, ne ressassait pas ses malheurs. Au contraire, sans renier ses engagements, il sublimait sa propre histoire, parvenant à une sagesse lucide sur la destinée humaine. Ceux qui avaient l’honneur d’être reçus par lui, à Lyon ou à l’ombre de ses oliviers, dans la Drôme, le constataient : le présent et l’avenir le passionnaient plus encore que le passé.

La foi, la fidélité, l’honneur, le patriotisme, le courage, le don de soi, le service, telles étaient les valeurs qu’il prêchait, avec son profond regard et sa voix sûre, mais calme. « Il faut croire à la grandeur de l’aventure humaine », écrivait-il dans sa Lettre à un jeune de vingt ans. Adieu donc, cher Hélie de Saint Marc, à la douce pitié de Dieu. Vous aussi, à votre manière, vous étiez un Veilleur.

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Source : Boulevard Voltaire

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Nous n’avions plus de larmes

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« Avant mon séjour dans les camps de concentration, je pensais que le pire venait d’ailleurs. J’ai trouvé le pire chez les autres, mais aussi en moi. Ce n’est pas l’abandon des siens qui est le plus dure à vivre, mais la déchéance de l’homme en soi. C’est la tristesse des déportés.

Nous n’avions plus de larmes. Les appels au secours dans la nuit restaient sans réponse. L’agonie et les cauchemars, le sifflement des poumons à bout de course, les excréments vidés dans les gamelles ou à même les châlits, tant certains étaient exténués, les corps purulents sans le moindre pansement faisaient partie de notre quotidien. Nous étions des sacs d’os prononçant à peine dix mots par jour.

La pendaison, dans l’imagerie SS, représentait l’exemplarité, l’ordre implacable. La sentence était toujours exécutée avec solennité, devant tous les pyjamas rayés. Plus les SS étaient démonstratifs et moins nous étions impressionnés. Cela ne me faisait même plus d’effet. Arrivé à un tel stade, on ne pense plus. "Je vis encore cet instant", me disais-je, et puis cet autre. Ne pas avoir peur de la mort était le premier commandement du déporté. Sinon, il trébuchait aussitôt tant elle planait autour de nous. "Un pendu, me disais-je, et puis cet autre".

Un homme nu, battu, humilié, reste un homme s’il garde sa propre dignité. Vivre, ce n’est pas exister à n’importe quel prix. Personne ne peut voler l’âme d’autrui si la victime n’y consent pas. La déportation m’a appris ce que pouvait être le sens d’une vie humaine : combattre pour sauvegarder ce filet d’esprit que nous recevons en naissant et que nous rendons en mourant. »

Hélie de Saint Marc, Toute une vie

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26/08/2013

Matzneff : ne vous trompez pas de Barrès, Monsieur Valls !

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Manuel Valls s'en est pris à "la France de Barrès"... citant le poète antillais Aimé Césaire et souhaitant redonner le goût de la sécurité à une gauche qui sombre de plus en plus dans le déni de réalité...

Pauvre Valls... il faudrait lui rappeler que Léopold Sédar Senghor a créé le concept de "Négritude" après avoir lu "Les Déracinés" de Maurice Barrès que lui avait fait découvrir son ami Georges Pompidou qui, d'ailleurs, était socialiste à l'époque...

Les politiques devraient cesser de s'occuper des écrivains, la Littérature, du moins ce qu'il en reste, ne s'en portera que mieux...

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Matzneff : ne vous trompez pas de Barrès, Monsieur Valls!

Gabriel Matzneff, membre de l'Association d'amitié franco-arabe, recadre le ministre de l'Intérieur qui, ce week-end à La Rochelle, a fait un faux procès à Barrès.

Par Gabriel Matzneff...

Les écrivains ne doivent jamais perdre une occasion de proclamer le respect qu'ils éprouvent pour le ministre de l'Intérieur. Nous avons le droit de pester contre le chef de l'État, car tel est le privilège des poètes, mais le ministre de l'Intérieur, lui, est intouchable. C'est avec une déférence sans faille, et une prudence sans cesse en éveil, qu'il convient que nous nous exprimions lorsque nous écrivons sur le successeur de Fouché, de Thiers, de Chautemps, de Pierre Laval, de Jules Moch et de quelques autres.

Ce nonobstant, je ne résiste pas à l'envie de gourmander notre actuel ministre de l'Intérieur, le pétulant Manuel Valls, en espérant qu'il ne le prendra pas en mauvaise part. Mieux, je forme le voeu qu'après être rentré en lui-même et avoir médité cette brève chronique dans le silence du cabinet, le successeur de François Mitterrand et Nicolas Sarkozy à l'hôtel de Beauvau me donne raison.

À La Rochelle, lors du colloque socialiste, M. Manuel Valls a cité élogieusement Aimé Césaire, et apprendre que les poètes sont à l'honneur sur les rayons de sa bibliothèque a réjoui le coeur de tous les honnêtes citoyens. En revanche, lorsqu'il a nommé Maurice Barrès de manière hostile, méprisante, nous sommes, je pense, nombreux, à en avoir été affligés.

Barrès n'est même pas en Pléiade!

Barrès serait un écrivain à la mode, couvert d'honneurs, fêté par les medias, le critiquer pourrait être une preuve d'insolence, de liberté d'esprit. Hélas, il n'en est rien. Barrès est peu édité, peu lu, ce maître à penser et à écrire de Louis Aragon, d'Henry de Montherlant, d'André Malraux n'est même pas dans la Pléiade, et réduire son oeuvre, comme à La Rochelle l'a fait M. Valls, à l'expression d'une droite sclérosée est suprêmement injuste ; risque, venant du ministre de l'Intérieur, de dissuader le ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, de rendre en décembre prochain, à l'occasion du quatre-vingt-dixième anniversaire de sa mort, l'hommage qui est dû à l'auteur d'Amori et dolori sacrum.

Je vois bien les textes de Barrès qui déplaisent à M. Valls : le côté "la terre et les morts", l'anémique nationalisme. Ils me déplaisent à moi aussi qui suis un Français d'origine étrangère, un fils d'émigrés ; mais outre le contexte politique dans lequel de telles pages furent écrites (la défaite de 1870, la perte de l'Alsace et de la Lorraine, l'humiliation infligée à la France par l'Allemagne), elles sont peu de chose à comparaison de livres de toute beauté qui témoignent au contraire de l'ouverture d'esprit de Maurice Barrès, de sa curiosité universelle.

Écrivant cela, je ne pense pas seulement à Du sang, de la volupté et de la mort, à Greco ou le secret de Tolède, où il parle admirablement de l'Espagne, de l'Italie, mais plus encore aux ouvrages où se manifeste son amour de l'Orient arabe, tel Un jardin sur l'Oronte.

Par les temps qui courent - la tragédie qui ensanglante la Syrie, le Liban -, il serait même bon que M. Laurent Fabius, notre ministre des Affaires étrangères, emportât dans ses bagages Une enquête aux pays du Levant, écrit par Barrès en 1914, mais à cause de la guerre publié seulement en 1923, un livre où cet amour et ce respect de l'Orient arabe s'expriment de façon toute particulière. Barrès y rappelle à ses devoirs le gouvernement français, évoque l'amitié que François Ier, Louis XIV, Louis XVI, la Convention, Napoléon Ier et tous les chefs d'État français successifs manifestèrent aux habitants de cette région du monde, il transmet cette amitié à ses lecteurs, sa passion pour ce berceau des trois religions abrahamiques.

On peut aimer Éluard sans être communiste

Certes, il ne fut pas le premier : avant lui, un Volney, un Chateaubriand, un Nerval, un Flaubert, un Loti avaient célébré l'Orient arabe, ses visages multiples, ses beautés esthétiques et spirituelles ; mais l'oeuvre de Barrès demeure, dans ce domaine, indispensable, comme l'est, dans un ordre divers, l'oeuvre de ces grands arabisants que furent Émile Dermenghem et Louis Massignon. Des maîtres auxquels je ne perds jamais une occasion de rendre hommage ; sans l'exemple fécond desquels je ne serais peut-être pas, dès sa création, devenu membre de l'Association d'amitié franco-arabe ; je n'aurais peut-être jamais écrit Le carnet arabe.

On peut aimer Bossuet sans être monarchiste, Stendhal sans être bonapartiste, Rimbaud sans être anarchiste, Éluard sans être communiste. Barrès n'a jamais hésité à avouer l'estime, l'admiration qu'il ressentait pour son "adversaire" Jean Jaurès. Cher Manuel Valls, puisez en vous la générosité qui vous permettra d'aimer Barrès sans être nationaliste, de saluer ce qu'il y a dans son oeuvre de beau et de bon. Les opinions politiques ont certes de l'importance, je n'en disconviens pas, mais elles ne sont pas l'essentiel. Nous devons être capables de rendre justice à un auteur dont nous ne partageons pas les idées. Sinon, c'est la censure, l'excommunication, la mise au pilori, bref, le contraire de notre liberté chérie.

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Source : Le Point

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