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10/06/2013

L’attitude actuelle de l’Europe est parfaitement infâme...

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« Au nom de ce même Dieu dont je parle sans cesse, ne vous emballez pas trop sur les Grecs. Il n’y a pas au monde un peuple moins intéressant, et tout le bruit qu’on fait autour d’eux n’est qu’une vile blague. Je refuse absolument de compatir à ces schismatiques, habitants d’une terre vouée, depuis trois mille ans, à tous les démons, et dont les ancêtres au moyen âge ont fait rater toutes les Croisades. Leur histoire n’est qu’une traînée de pourriture et de sang.

L’attitude actuelle de l’Europe est parfaitement infâme, sans doute ; mais ne remarquez-vous pas que tout ce potin grec est surtout en vue de faire oublier l’Arménie, dont l’épouvantable massacre n’a ému aucun de nos chevaleresques étudiants, qui parlent aujourd’hui de se faire tuer pour la Grèce et qui seraient fort embêtés si on les prenait au mot ?

Pourtant, savez-vous ce que c’est que l’Arménie ? C’est le pays le plus mystérieux du monde, le lieu choisi pour la Réconciliation. C’est là que le déluge prit fin et que recommença la multiplication humaine.

Depuis une dizaine de siècles, au moins, il n’y a jamais eu qu’une Question d’Orient, question à triple face et à triple tour. Extermination ou du moins expulsion des Musulmans, extermination des Grecs et conquête du Saint-Sépulcre. Tout le reste est imbécillité ou mensonge.

Mais que penser de ce Pape qui s’occupe de politique parlementaire pendant qu’on débite par petits morceaux deux ou trois cent mille chrétiens en Arménie ? Ah ! il faut avoir une foi robuste et ne vraiment compter que sur Dieu. »

Léon Bloy, Lettre à Henry de Groux, le 14 janvier 1897, repris dans son "Journal" de la même année

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Les intellectuels tournent de l’œil facilement... C’est qu’aussi ce sont des intellectuels...

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« J’ai tâché de trouver la mesure, ce qui ne m’a pas épargné les faux pas. La grande difficulté est celle-ci pour un artiste qui veut s’engager dans son opinion. Pour bien savoir ce que vaut cette opinion qui le tente, il lui faut s’engager dans une action. Or, entre une opinion toute pure, toute logique, toute belle et l’action qui l’incarne, il y a autant de différence qu’entre une vierge et une femme cabossée par dix accouchements. Si vous n’avez point chevillé au corps un véritable amour pour quelque chose dans cette opinion – cela pourra ne pas être son principe, mais l’un de ses aspects secondaires, qui botte particulièrement votre sensibilité – vous tournerez de l’œil devant les métamorphoses de votre fiancée. Les intellectuels tournent de l’œil facilement dans ces cas-là ; ou bien ce sont de petits intrigants qui se moquent bien de la fiancée et ne souhaitent que de tirer des sous de la dame cabossée. Les intellectuels tournent de l’œil facilement... C’est qu’aussi ce sont des intellectuels. Je n’aime pas beaucoup les intellectuels, j’aime mieux les artistes. Un artiste, c’est un homme qui sait que la vie, ça ne va pas tout droit – ce qui n’empêche pas de travailler. Un artiste n’est jamais content de ce qu’il a fait ; il pardonnera donc beaucoup aux hommes d’action qui ont pris en main son opinion, qui se sont chargé de la faire vivre dans le siècle, qui l’on épousée. Il sera d’autant plus indulgent qu’il risque beaucoup moins qu’eux. Certes, c’est le métier des hommes d’action de risquer leur peau, comme c’est celui des hommes de guerre. Et, d’autre part, moi qui fait du journalisme politique, je peux très bien finir au poteau... Non, mon vrai risque, c’est d’écrire de mauvais livres. Si je suis fusillé, ce sera comme tant d’autres. »

Pierre Drieu La Rochelle, Article de Journal dans "Je suis partout", 12 juin 1937


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09/06/2013

Par la machine, l’homme s’éloigne de plus en plus de son corps et de la nature...

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Si Pierre Drieu La Rochelle avait totalement saisi la profonde signification de ce qu'il écrit là, jamais il ne se serait engagé dans la néfaste collaboration avec l'occupant nazi qui l'a conduit au suicide suite, très certainement, à la compréhension apocalyptique de son erreur.

Il n'y a, en effet, rien de plus machinique que le nazisme, le fascisme, le communisme... et de nos jours l'Islam, suivi de près par les démocraties occidentales étatistes et Keynésiennes nées de la Révolution Française et de la Face Sombre des prétendues Lumières... 

 

« Par la machine, l’homme s’éloigne de plus en plus de son corps et de la nature. Il s’engage dans une spéculation terre à terre, dans une mythologie de plus en plus confinée à la surface des objets, dans une idolâtrie, un fétichisme sans frémissement. La machine engendre la machine, et la multiplication des objets qu’on dit utiles fait une inutilité énorme, terne, morne, sans rayonnement, un encombrement destructeur. »

Pierre Drieu La Rochelle, Notes pour comprendre le siècle


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Notre seule plénitude, c’est une civilisation vue de loin, où les joies et les chagrins se mêlent...

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« Les gens ne savent plus s’ils doivent encore travailler ou ne plus rien faire. Ils ne savent pas s’ils doivent jouir ou s’abstenir. Je dis qu’individus épuisés, ils ne peuvent plus jouir que des grandes figures de l’esprit dessiné par le corps social. Regardez les abeilles, les fourmis, que pouvons-nous faire d’autre ? Notre seule plénitude, c’est une civilisation vue de loin, où les joies et les chagrins se mêlent. Il n’en reste que le dessin. Tout est dans le dessin. La qualité. La qualité se retrouvera, le jour où la quantité sera limitée. »

Pierre Drieu La Rochelle, Socialisme Fasciste


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08/06/2013

L’indispensable prise de possession de son propre destin

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« Je me rappelle avoir entendu un jour un président du Conseil expliquer la situation, dans la quiétude peu croyable de son grand cabinet Louis XV. Il répéta pendant une heure : "ils ne comprennent pas ceci, ils ne font pas cela, ils..." J’avais envie de lui crier : "Mais enfin, qui ils ? C’est vous le chef, c’est vous qui êtes au centre, ils ne disent et ne font que ce que vous ne les empêchez pas de dire ou de faire. Dites : Je". Il ne dit "je" qu’une fois : "Je m’en f...". Eh bien, évidemment, ce "président", qu’il eût été éduqué dans une école primaire ou dans un lycée, qu’il fût passé par l’Ecole normale ou par Polytechnique, n’avait jamais entendu parler de cette sainte vertu qu’on appelle Responsabilité. On l’avait bourré de notions sur la géographie ou sur la prosodie d’Homère, sur les mathématiques pures ou sur la physique la plus théorique, mais aucun de ses maîtres ne s’était occupé de mettre dans les muscles et les nerfs de son corps, dans les réflexes de son âme l’indispensable prise de possession de son propre destin et de celui des autres hommes qu’est pour un homme le prononcement sérieux et conscient de ce maître-mot : Je. »

Pierre Drieu La Rochelle, Ne plus attendre


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Que m’importe de n’avoir pas vu le Parthénon ?

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« Que m’importe de n’avoir pas vu le Parthénon ? C’est le chef-d’œuvre d’un Grand Siècle. Le Ve avant Jésus-Christ, c’est comme le XVIIe, le Parthénon c’est Versailles. Aujourd’hui quelle leçon pouvons-nous prendre à Versailles ? Nous redevenons des Barbares, en mal de formes neuves et inconnues ; aussi ce qui nous attire dans l’histoire, ce sont les premiers mouvements. Certes, je ne suis pas dupe, je sais bien que la faiblesse des contemporains, qu’ils soient européens, indiens ou chinois, n’est pas plus capable d’imiter les rudiments primitifs que l’exquise complexité de l’achèvement. Mais près de retomber dans le creuset obscur, penchés sur le prochain abîme, nous rêvons des germinations de demain à travers les effondrements et les pourritures qui nous entraînent. Nous sommes à bout de souffle, rien ne renaîtra plus de nous dans les formes que nous connaissons, la force de création ne reprendra en Europe qu’après de terribles dissolutions ; mais alors que le fleuve de notre civilisation est près de déboucher dans la mer qui noie tout, parcourant d’un trait le cycle récurrent des évaporations, des nuages et des pluies, notre imagination se rejette vers les sources d’où sortira le fleuve nouveau. Je rôde autour des abîmes parce que je sais que j’y retombe et que j’en ressortirais... »

Pierre Drieu La Rochelle, Une femme à sa fenêtre


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07/06/2013

Tout est honteux, rampant, lent...

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« Le courage est devenu peur, et quand on voit encore du courage, ce n’est plus que la peur qui se hérisse. Chacun a peur de tous et tous ont peur de chacun. Tout est honteux, rampant, lent. Tout va trop lentement et soudain tout va trop vite et il y a un choc si violent qu’on ne sent plus rien. A ce moment-là, on ferait n’importe quoi. Et puis, recommence la lente fièvre de tous les jours. Cette maladie qui est dans la nation l’a divisée, elle a tant envenimé certains hommes qu’elle les a retournés contre les autres. »

Pierre Drieu La Rochelle, Charlotte Corday

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Chaque héros nourrit dix grands artistes...

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« La musique a besoin de grandes formes qui se lèvent sur l’horizon. Shakespeare doit tout à Elisabeth, et Goethe n’aurait pas fait le second Faust s’il n’avait pas eu sous les yeux la Révolution française. Donnez-nous de grands hommes et de grandes actions pour que nous retrouvions le sens des grandes choses. Chaque héros nourrit dix grands artistes ; Goethe et Hugo se sont trempés dans le sang versé par Napoléon. »

Pierre Drieu La Rochelle, L'homme à cheval

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06/06/2013

Le fléchissement de notre pouvoir créateur

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« A l’intérieur de la civilisation libertaire et industrielle, sur cette planète toute gagnée à cette mode, toute engagée dans ce pari moderne, il faut lutter contre tout ce qui attaque l’esprit créateur, contre tant de nouveautés qui étaient belles hier, qui sont déjà laides aujourd’hui. La stérilité, l’onanisme, l’inversion sont des maux spirituels. L’alcoolisme, les drogues sont le premier degré qui mène à cette défaillance de l’imagination, à cette décadence de l’esprit créateur, quand l’homme préfère subir que s’imposer. Le sport mal compris, contaminé par l’argent, réduit à des simulacres de cirque entre professionnels pour nourrir le cauchemar de foules inertes, le militarisme, sont des perversions de l’instinct de lutte, du goût antique et sain pour la destruction et le sacrifice. La fabrication en séries, le renoncement au travail des mains qui sont des outils de l’esprit, l’abandon aux machines du pouvoir de l’homme sur la matière manifestent, comme l’onanisme, le fléchissement de notre pouvoir créateur. »

Pierre Drieu la Rochelle, Mesure de la France


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Et peut-être ce que j’appelle France, demain se prononcera autrement...

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« Je peux dire que j’aime les Français. Ils bénéficient tous à mes yeux de la même faveur. C’est ainsi qu’on aime les femmes, et parmi elles des brutes, des lâches, des goinfres. Mais je ne les aime pas tant parce que leur génie est tel et tel, mais parce que ce sont les hommes au milieu desquels j’ai vécu. Et si notre nation, par suite de pittoresques catastrophes toujours prévisibles dans l’Histoire, quittait cette contrée-ci pour aller camper ailleurs, au bout de quelques siècles le génie de mes camarades changerait sous le charme d’un autre horizon ? Mais je puis anticiper ma fidélité à ceux qu’ils deviendraient ; car dans les êtes aimés, on aime tout ce qu’ils sont, chacune des particularités par quoi ils se rendent sensibles et aussi un point abstrait comme nous aimons en nous-mêmes. La France imperceptiblement se métamorphose dans nos bras, sans qu’il y ait brusque rupture des mille liens dont chacun est accidentel et insuffisant, mais dont semble se former tout notre attachement. Et peut-être ce que j’appelle France, demain se prononcera autrement. »

Pierre Drieu la Rochelle, Etat civil


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05/06/2013

Mariage pour tous et théorie du genre...

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Car il y a quelque chose qui nous oppresse, qui nous écrase...

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« Il y a belle lurette que la guerre est finie, et pourtant, notre malheur n’a cessé depuis ce moment. Qu’est-ce qui nous oppresse ? Car il y a quelque chose qui nous oppresse, qui nous écrase... Nous ne sommes pas content de nous, nous avons honte. Honte. Pourtant les trains marchent bien et beaucoup ont chez eux un appareil de radio. Mais quand nous crevions dans les tranchées nous disions que nous ferions quelque chose, et nous n’avons rien fait, rien. Nous rêvions pourtant de quelque chose d’admirable, d’inouï. Oui, seul quelque chose d’inouï pouvait nous faire oublier cette horreur. Pourtant… Nous, les soldats, nous, les héros. Nous avons été les plus grands lâches. »

Pierre Drieu la Rochelle, Le Chef


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La guerre pour nous, nés dans un temps de longue paix, parut une nouveauté merveilleuse, l’accomplissement qui n’était pas espéré de notre jeunesse...

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« La guerre pour nous, nés dans un temps de longue paix, parut une nouveauté merveilleuse, l’accomplissement qui n’était pas espéré de notre jeunesse. Nous voulions épuiser la vie dans un irréparable élan. Or, doute que la paix nous eût assouvis aussi magnifiquement. A nous autre, jeunes hommes éduqués par le verbe orgueilleux de Nietzsche et de Barrès, Paul Adam, Maurras, d’Annunzio, Kipling, excitateurs du monde occidental, la guerre offrit une fraîche tentation.

(…)

Nous ne pouvons pas regretter la guerre. La guerre a introduit une solennité dans notre vie que nous n’espérions plus des évènements humains et dont l’absence nous faisait sentir dans l’homme une perte. »

Pierre Drieu la Rochelle, Interrogation


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04/06/2013

La passion nationaliste fait plus que tout autre pour le triomphe des révolutions et des dictatures qui en découlent

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« Le nœud qu’on voit toujours se faire entre révolution intérieur et guerre extérieure mériterait une étude particulière. Là encore, nous verrions la thèse de la lutte de classes complètement débordée ou controuvée. Toute révolution reçoit de la nécessité de faire face à l’étranger un appoint de force énorme qui facilite l’avènement, puis le maintien des forces extrémistes, jusqu’au jour où celles-ci donnent naissance au despotisme personnel qu’elles portent en germe. Les puritains ont tiré leur force de la lutte contre les Ecossais et les Irlandais, de la jalousie contre les Hollandais, de la haine contre les Français – tous sentiments dont les Stuarts prenaient le contre-pied. Et Cromwell fut adoré comme vainqueur des Irlandais encore plus que du Roi. Les Jacobins ont pris le pouvoir à la faveur de l’invasion prussienne, et l’ont gardé dans la guerre perpétuelle jusqu’à le céder à Bonaparte. Lénine a bientôt profité de la défense nationale, Staline en profite plus que jamais. Mussolini et Hitler sont nés de réactions au traité de Versailles. La passion nationaliste fait plus que tout autre pour le triomphe des révolutions et des dictatures qui en découlent. »

Pierre Drieu la Rochelle, Socialisme fasciste


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03/06/2013

Drieu Godefridi - La théorie du genre

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Drieu Godefridi

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L’étude de Mark Regnerus (US) sur les enfants ayant eu un parent homosexuel

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Concernant l’homoparentalité, une nouvelle étude de sociologie américaine nous met en garde contre l’usage abusif des science sociales dans le débat public, tout en offrant un bon aperçu de l’expérience d’avoir eu un parent homosexuel pour la génération aujourd’hui adulte. Cette étude va dans le sens de ce qui a longtemps été une évidence, et qui fait aujourd’hui l’objet de controverses : en moyenne, un enfant s’en sort mieux lorsque son père et sa mère restent mariés.

L’apport américain

La spécificité des États-Unis en matière de débat sur l’homoparentalité est double : l’évolution de la société fait que des situations d’homoparentalité de fait existent depuis les années 1990, et donc une génération d’enfants de ces foyers est parvenue à l’âge adulte ; l’autre spécificité est le grand respect pour l’apport des sciences sociales : aux États-Unis, même les sujets controversés, comme par exemple les inégalités sociales, sont abordés à travers de grandes enquêtes sociologiques et statistiques. Les chercheurs en sciences sociales jouissent d’une assez grande autonomie pour étudier divers objets sans nécessairement se soucier de l’opinion dominante.

Un des problèmes du débat français sur l’opportunité d’accorder le droit aux personnes de même sexe de se marier, et d’adopter des enfants, est la mise en avant de statistiques dont les origines sont assez obscures. Ces chiffres portent sur le nombre de foyers homosexuels où des enfants sont élevés, et sur les conséquences pour ces enfants, présentées comme égales, sinon optimales par rapport aux enfants élevés dans un foyer composé d’un père et d’une mère mariés. La plupart de ces affirmations ne sont pas fondées sur des études sociologiques françaises, mais sur des études américaines, qui se sont multipliées depuis le début des années 2000.

L’étude de Mark Regnerus

Dans un article intitulé « How different are the adult children of parents who have same-sex relationships? Findings from the New Family Structures Study » ["A quel point les enfants devenus adultes de parents ayant eu une relation homosexuelle sont-ils différents ? Résultats de l’Étude sur les nouvelles structures familiales" ] et rendu public le 11 juin 2012, Mark Regnerus, chercheur en sociologie à l’université du Texas, présente une étude considérée comme rigoureuse et complète selon l’analyse de plusieurs de ses pairs1, ou même de promoteurs de l’homoparentalité2.

Cette étude remet en cause le dogme, qui s’était établi dans le milieu scientifique et militant, selon lequel grandir dans un foyer où les parents sont de même sexe ne changerait rien, voire serait bénéfique pour l’enfant en comparaison à d’autres configurations familiales. Quelques-unes de ces études avaient même été jusqu’à affirmer la supériorité d’un foyer composé de deux femmes sur un foyer avec père et mère mariés. Cela constituait un changement de paradigme scientifique très brusque puisque au milieu de la décennie 1990, moment où les fictions télévisuelles commencèrent à présenter divers arrangements familiaux impliquant des homosexuels sous une perspective favorable (pensons à la série Friends par exemple), les experts de la famille considéraient encore que l’arrangement familial le plus favorable pour le devenir des enfants était avoir un père et une mère toujours mariés. Ce brusque bouleversement de paradigme est apparu comme suspect aux yeux de Regnerus, sociologue respecté, dont les études précédentes portent notamment sur l’activité sexuelle des jeunes gens non mariés3.

Méthodologie de l’enquête

Aidé par des collègues, Mark Regnerus a repris une base de données sociologique très fouillée appelée New Family Structures Study4, et il a posé une question à plus de 15 000 américains devenus adultes entre 1990 et 2009 et sélectionnés de façon aléatoire : « Est-ce que l’un de vos parents biologiques a eu, entre votre naissance et l’âge de vos 18 ans, une relation amoureuse avec quelqu’un de son propre sexe ? » 175 ont répondu que c’était le cas pour leur mère, 73 pour leur père. Ces personnes, ainsi qu’un échantillon représentatif de cette génération de la population américaine, ont passé un entretien approfondi portant sur leur vie, leurs relations amoureuses et leur propre éducation, – soit en tout 2 988 personnes interrogées. L’objet de l’enquête est de tester le paradigme de l’absence de différences. Pour cela, Mark Regnerus a constitué huit groupes parmi les personnes interrogées suivant les structures familiales dans lesquelles ils avaient grandi :

- Famille biologique intacte (“still-intact, biological family”) : un père et une mère marié depuis la naissance de l’enfant jusqu’à aujourd’hui. (919)

- Mère lesbienne : la mère a eu une relation amoureuse avec une femme. (163)

- Père gay : le père a eu une relation amoureuse avec un homme. (73)

- Adopté : adoption par un ou deux parents avant l’âge de deux ans. (101)

- Divorce tardif ou garde partagée : l’enfant a vécu avec ses deux parents jusqu’à 18 ans, ils ne sont plus mariés. (116)

- Belle-famille : les parents biologiques n’ont jamais été mariés ou ont divorcé, le parent ayant la garde s’est marié avec quelqu’un d’autre avant les 18 ans de l’enfant. (394)

- Monoparentalité : les parents biologiques n’ont jamais été mariés ou ont divorcé, le parent ayant la garde ne s’est pas marié ou remarié avant les 18 ans de l’enfant. (816)

- Autres configurations, dont le décès d’un des parents. (406)

Les résultats significatifs

Comparés aux enfants de “famille biologique intacte”, les enfants aujourd’hui adultes dont la mère a eu une relation amoureuse avec une femme présentent 25 différences significatives sur les 40 variables testées :

Variable testée Enfants devenus adultes de famille biologique encore intacte Enfants devenus adultes dont la mère a eu une relation amoureuse avec une femme avant leur majorité
Questions de type OUI ou NON, résultats moyens en pourcentages
En cohabitation actuellement 9% 24%
La famille a reçu des aides publiques pendant la jeunesse des enfants 17% 69%
Bénéficiaires d’aides publiques actuellement 10% 38%
Employés à temps plein actuellement 49% 26%
Actuellement au chômage 8% 28%
Ont voté à la dernière élection présidentielle 57% 41%
S’identifient comme entièrement hétérosexuels 90% 61%
Ont eu une relation extraconjugale alors que mariés ou en cohabitation 13% 40%
Ont subi des attouchements sexuels par un parent ou un adulte 2% 23%
Ont subi une relation sexuelle contre leur consentement 8% 31%
Questions portant sur une échelle continue, résultats moyens.
Niveau d’éducation atteint (échelle de 1 à 5) 3,19 2,39
Sentiment de sûreté dans la famille d’origine (1 à 5) 4,13 3,12
Impact négatif de la famille d’origine (1 à 5) 2,3 3,13
Auto-estimation de la santé physique (1 à 5) 3,75 3,38
Index de dépression (échelle de 1 à 4) 1,83 2,2
Échelle d’évaluation du degré de dépendance à autrui (1 à 5) 2,82 3,43
Niveau de revenu (1 à 13) 8,27 6,08
Relation amoureuse actuelle en difficulté (1 à 4) 2,04 2,35
Questions portant sur des fréquences, des occurrences, moyenne sur une échelle
Fréquence d’usage de la marijuana (1 à 6) 1,32 1,84
Fréquence d’usage de la cigarette (1 à 6) 1,79 2,76
Fréquence d’utilisation de la télévision (1 à 6) 3,01 3,70
Fréquence d’arrestations par la police (1 à 4) 1,18 1,68
Fréquence de ceux ayant reconnu avoir commis un délit (1 à 4) 1,1 1,36
Nombre de partenaires sexuels féminins pour les femmes (0 à 11) 0,22 1,04
Nombre de partenaires sexuels masculins pour les femmes (0 à 11) 2,79 4,02

 

Lecture : En moyenne, 9% des enfants aujourd’hui adultes dont le père et la mère sont encore mariés vivent en cohabitation sans être mariés, contre 24% des enfants devenus adultes dont la mère a eu une relation amoureuse avec une femme entre le moment de leur naissance et l’âge de 18 ans.

Les résultats présentés ci-dessus sont une sélection traduite de tableaux pris directement dans l’article de Regnerus. Ces 25 variables présentent des différences statistiquement probantes et testées entre “avoir grandi dans une famille dont les parents biologiques sont mariés”, et “avoir fait l’expérience entre 0 et 18 ans d’une mère ayant eu une relation amoureuse avec une femme”.

Quelques conclusions à retenir

- Toutes les recherches scientifiques précédentes sur l’homoparentalité sont d’une utilité quasiment nulle, car leurs conclusions ne peuvent pas être extrapolées à la population entière : d’une part, les échantillons y sont trop faibles (des échantillons de 44 personnes au maximum, d’après Regnerus, p. 754, qui donne un résumé de ces recherches) ; d’autre part, ils sont constitués de façon non aléatoire, selon la méthode « boule de neige » : les membres de l’échantillon sont sélectionnés à l’intérieur d’un réseau dont les membres se cooptent. Pour ces raisons, ces échantillons ne sauraient refléter la composition socio-économique, religieuse, raciale et géographique des Etats-Unis. Par ailleurs, les interviewés ont souvent conscience de l’impact politique de l’enquête à laquelle ils participent.

- Cette étude est novatrice car elle donne avec une grande rigueur méthodologique le point de vue de l’enfant sur le fait d’avoir eu un parent homosexuel, alors que la parole était jusqu’ici monopolisée par les parents.

- Le trait le plus marquant de cette enquête sociologique, s’il fallait en retenir un, est l’instabilité de la vie de l’enfant dont la mère a eu une relation amoureuse avec une femme : davantage de temps passé dans un foyer d’accueil, davantage de temps passé chez les grands parents, davantage de temps passé de manière autonome avant 18 ans. En fait, moins de 2% de ces enfants ont passé leur enfance entière avec leur mère et sa partenaire.5

Les limites d’une telle recherche

- Cette étude ne dit rien sur l’expérience de grandir dans des foyers homoparentaux dans la période actuelle, et ce pour deux raisons : 1. Avoir un parent ayant eu une relation homosexuelle n’est pas synonyme d’avoir grandi dans un foyer homoparental. 2. Cette étude porte sur une génération aujourd’hui adulte, pour laquelle le fait homosexuel était peut-être moins bien accepté socialement qu’aujourd’hui.

- Il ne faut pas demander aux sciences sociales plus qu’elles ne peuvent donner : une bonne recherche ne peut être normative ou prédictive. C’est la description qui doit guider la démarche, mais elle est elle-même dépendante de catégories utilisables et opportunes. Les catégories prises ici reflètent cela : ce n’est pas tant une étude de l’homoparentalité que de l’expérience d’avoir un père ou une mère biologique ayant eu au moins une fois une expérience homosexuelle avant la majorité de l’enfant. Même si dans l’échantillon, certaines personnes ont effectivement eu une expérience de vie dans un foyer homoparental, ils sont bien moins nombreux que les membres des deux catégories ciblées. (23% des enfants dont la mère a eu une relation amoureuse avec une femme ont vécu avec ces deux femmes pendant au moins trois ans avant d’atteindre 18 ans; moins de 2% des enfants dont le père a eu une relation amoureuse avec un homme ont vécu avec ces deux hommes pendant au moins trois ans avant d’atteindre 18 ans).

- Mark Regnerus met prudemment en garde contre l’utilisation d’une telle étude à des fins politiques : ses seules applications solides et concrètes seraient de défaire l’utilisation politique et idéologique des études précédentes participant du paradigme de l’absence de différences, et d’indiquer la rareté d’une telle configuration familiale pour les générations dont les enfants sont devenus adultes. La sociologie nous ordonne ici à grands frais de nous méfier d’elle, offrant une remise à plat du bruit médiatique autour de l’apport de la « Science » au débat sur la légitimité de l’homoparentalité.

- En fait, ce qui est fondamentalement en jeu ici, c’est le maintien de l’idéal de la famille biologique mariée. Pour Mark Regnerus : « La famille nucléaire biologiquement intacte et stable semble être, même si c’est une fausse impression, une espèce en voie de disparition. Cependant, elle demeure l’environnement le plus sain et sécurisant pour le développement de l’enfant. [...] Ce qu’affirmaient les sociologues Sarah McLanahan et Gary Sandefur en 1994 reste une réalité : ” S’il nous était demandé de concevoir un système destiné à répondre aux besoins essentiels de l’enfant, nous finirions probablement par inventer quelque chose d’assez proche de l’idéal d’une famille avec deux parents.” Ses avantages sont amplement démontrés : accès au temps et à l’argent de deux adultes, un système d’équilibre des pouvoirs, une double connexion biologique à l’enfant, le tout renforçant la “probabilité que les parents s’identifient à l’enfant et soient capable de se sacrifier pour cet enfant, ce qui réduirait la probabilité que l’un des parents abuse de l’enfant.” Cette étude confirme la sagesse du sens commun. »6

 

 
  1. Osborne, Cynthia. « Further comments on the papers by Marks and Regnerus ». Social Science Research 41, no. 4 (juillet 2012) : 779-783
  2. Burroway, Jim. « First Look at Mark Regnerus’s Study on Children of Parents In Same-Sex Relationships », boxturtlebulletin.com, juin 10, 2012
  3. Regnerus, Mark, et Jeremy Uecker. Premarital Sex in America : How Young Americans Meet, Mate, and Think about Marrying. Oxford University Press, USA, 2011
  4. NFSS, que l’on peut traduire par « Etude sur les nouvelles structures familiales »
  5. Mark Regnerus, « Queers as Folk », Slate, juin 11, 2012.
  6. in Mark Regnerus « Response to Paul Amato, David Eggebeen, and Cynthia Osborne », Social Science Research, juillet 2012, Vol. 41, n°4, p. 786-787

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Je me connais trop pour croire à la vertu toute pure

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« De même, on est toujours sûr de tomber, au hasard des journées, sur un Français, souvent intelligent par ailleurs, et qui vous dit que les Juifs exagèrent vraiment. Naturellement, ce Français a un ami juif qui, lui, du moins... Quant aux millions de Juifs qui ont été torturés et brûlés, l'interlocuteur n'approuve pas ces façons, loin de là. Simplement, il trouve que les Juifs exagèrent et qu'ils ont tort de se soutenir les uns les autres, même si cette solidarité leur a été enseignée par le camp de concentration. Oui, ce sont là des signes. »

Albert Camus, La Contagion in Actuelles I - Ecrits Politiques (Chroniques Politiques 1944-1948)


« Ce n'est pas me réfuter en effet que de réfuter la non-violence. Je n'ai jamais plaidé pour elle. Et c'est une attitude qu'on me prête pour la commodité d'une polémique. Je ne pense pas qu'il faille répondre aux coups par la bénédiction. Je crois que la violence est inévitable, les années d'occupation me l'ont appris. Pour tout dire, il y a eu, en ce temps-là, de terribles violences qui ne m'ont posé aucun problème. Je ne dirai donc point qu'il faut supprimer toute violence, ce qui serait souhaitable, mais utopique, en effet. Je dis seulement qu'il faut refuser toute légitimation de la violence, que cette légitimation lui vienne d'une raison d'État absolue, ou d'une philosophie totalitaire. La violence est à la fois inévitable et injustifiable. Je crois qu'il faut lui garder son caractère exceptionnel et la resserrer dans les limites qu'on peut. Je ne prêche donc ni la non-violence, j'en sais malheureu-sement l'impossibilité, ni, comme disent les farceurs, la sainteté : je me connais trop pour croire à la vertu toute pure. Mais dans un monde où l'on s'emploie à justifier la terreur avec des arguments opposés, je pense qu'il faut apporter une limitation à la violence, la cantonner dans certains secteurs quand elle est inévitable, amortir ses effets terri-fiants en l'empêchant d'aller jusqu'au bout de sa fureur. J'ai horreur de la violence confortable. J'ai horreur de ceux dont les paroles vont plus loin que les actes. C'est en cela que je me sépare de quelques-uns de nos grands esprits, dont je m'arrêterai de mépriser les appels au meurtre quand ils tiendront eux-mêmes les fusils de l'exécution. »

Albert Camus, Première réponse à Emmanuel d'Astier de la Vigerie in Actuelles I - Ecrits Politiques (Chroniques Politiques 1944-1948)


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02/06/2013

Esclavage et égalitarisme...

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Ces pierres que l'on trouve dans l'estomac des poules

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« Il y a dans toute vie un certain nombre de choses que l'homme ne confie pas même à l'être le plus proche. Elles sont semblables à ces pierres que l'on trouve dans l'estomac des poules ; la sympathie n'aide pas à les faire digérer. »

Ernst Jünger, Premier journal parisien, 2 octobre 1942


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Méluche

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J’aurais pu lui répondre que j’étais vivant, moi, mais je n’en étais pas tout à fait certain

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« Je me demande ce qu’il y a encore à détruire, dans ce secteur, a-t-il ajouté en montrant l’immense terrain vague laissé par le déblaiement des taudis de la Quarantaine.

-- Des hommes, ais-je cru bon de suggérer, souriant à mon tour pour ne pas avoir l’air trop niais.

-- Des hommes ? Non, ils sont morts, même ceux qui combattent, en ce moment, et qui se croient vivants. A un certain degré d’horreur et de bruit, on ne se bat plus pour vivre, ni pour survivre, mais parce qu’on est mort, oui, passé à l’autre bout de la vallée de larmes, et que le combat se limite à tenter de remonter chez les vivants.

J’aurais pu lui répondre que j’étais vivant, moi, mais je n’en étais pas tout à fait certain, et j’ai préféré continuer à sourire, tout en reconnaissant que j’appartenais aux ombres, que je méprisais même un peu les vivants, leur insouciance, leur incurie, leur cruauté, lezs morts, eux étant en paix les uns avec les autres, on n’y a jamais songé de cette façon, mais c’est ce qui les caractérise, outre leur invraisemblable mémoire.

Mais je n’ai rien dit. Je préférais rester un combattant simple et droit aux yeux du responsable phalangiste dont je continuais à trouver la cause noble, et la seule qui méritât d’être défendue. »

Richard Millet, La confession négative

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01/06/2013

Manipulation typique...

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C’est un immense troupeau dans la solitude, une multitude infinie de cœurs tristes à la recherche du Paradis...

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« Et le Peuple de Dieu ? me demandez-vous. Ne vous l’ai-je pas montré ? Autrefois, il y a plus de trois mille ans, le Peuple de Dieu, c’était le peuple hébreu. Les miracles ne lui manquaient pas. Jéhovah le conduisait par la main au milieu des flots et dans le désert, pour l’étonnement et l’extermination des autres peuples. Depuis Jésus-Christ, le peuple de Dieu, c’est chacun de nous, c’est moi, c’est vous, le menuisier, vous, le serrurier, vous, l’employé de bureau, le vidangeur ou le poète. C’est tout ce qui est pauvre, tout ce qui souffre, tout ce qui est humilié profondément. C’est un immense troupeau dans la solitude, une multitude infinie de cœurs tristes à la recherche du Paradis. Il y en a qui gagnent tout juste leur pain, qui n’ont jamais une heure pour la culture de leurs âmes et qui finissent par y renoncer. D’ailleurs, qui pourrait les instruire, les guider, les encourager ? Le clergé insuffisant quant au nombre est, presque toujours, d’une médiocrité épouvantable. Pour ce qui est des Léon Bloy, quand il s’en trouve, on les étrangle, on les étouffe si bien qu’il est impossible de les connaître et qu’il n’y a pas moyen de les entendre. Alors quoi ? il ne reste plus que les patrons ou les propriétaires. Franchement ce n’est pas assez. »

Léon Bloy, Journal, 10.12.1903

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Enrichir les Mafias...

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Vache laitière...

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