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09/06/2015

Parler et écrire...

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« C’est réellement une drôle d’affaire que de parler et d’écrire ; la vraie conversation n’est qu’un pur jeu de mots. On ne peut qu’admirer l’erreur ridicule des gens qui se figurent parler en fonction des choses. Mais précisément, personne ne sait que le propre du langage est de s’occuper purement et simplement de lui-même. Voilà pourquoi le langage est un mystère si admirable et si fécond, - celui qui ne parle que pour parler exprime justement les vérités les plus splendides, les plus originales. »

Novalis, Fragments

 

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Maladie littéraire

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« Lui (le lettré ), lit pour lire, pour retenir ce qu'il a lu. Pour lui, le livre n'est pas l'ange qui s'envole aussitôt qu'il a ouvert les portes du jardin céleste, mais une idole immobile, qu'il adore pour elle-même, qui, au lieu de recevoir une dignité vraie des pensées qu'elle éveille, communique une dignité factice à tout ce qui l'entoure. Le lettré invoque en souriant en l'honneur de tel nom qu'il se trouve dans Villehardouin ou dans Boccace, en faveur de tel usage qu'il est décrit dans Virgile. Est-il besoin de dire que si je qualifie de malsains ce goût, cette sorte de respect fétichiste pour les livres, c'est relativement à ce que seraient les habitudes idéales d'un esprit sans défauts qui n'existe pas, et comme font les physiologistes qui décrivent un fonctionnement d'organes normal tel qu'il ne s'en rencontre guère chez les êtres vivants. Dans la réalité, au contraire, où il n'y a pas plus d'esprits parfaits que de corps entièrement sains, ceux que nous appelons les grands esprits sont atteints comme les autres de cette "maladie littéraire". Plus que les autres, pourrait-on dire. Il semble que le goût des livres croisse avec l'intelligence, un peu au-dessous d'elle, mais sur la même tige, comme toute passion s'accompagne d'une prédilection pour ce qui entoure son objet, a du rapport avec lui, dans l'absence lui en parle encore. Aussi, les plus grands écrivains, dans les heures où ils ne sont pas en communication directe avec la pensée, se plaisent dans la société des livres. N'est-ce pas surtout pour eux, du reste, qu'ils ont été écrits ; ne leur dévoilent-ils pas mille beautés qui restent cachées au vulgaire ? A vrai dire, le fait que des esprits supérieurs soient ce que l'on appelle livresques ne prouve nullement que cela ne soit pas un défaut de l'être. De ce que les hommes médiocres sont souvent travailleurs et les  intelligents souvent paresseux, on ne peut pas conclure que le travail n'est pas pour l'esprit une meilleure discipline que la paresse. Malgré cela, rencontrer chez un grand homme un de nos défauts nous  incline toujours à nous demander si ce n'était pas au fond une qualité méconnue, et nous n'apprenons pas sans plaisir qu'Hugo savait Quinte-Curce, Tacite et Justin par coeur, qu'il était en mesure, si on contestait devant lui la légitimité d'un terme, d'en définir la filiation, jusqu'à l'origine, par des citations qui prouvaient une véritable érudition. (J'ai montré ailleurs comment cette érudition avait chez lui nourri le génie au lieu de l'étouffer, comme un paquet de fagots qui éteint un petit feu et en accroît un grand).

Maeterlinck, qui est pour nous le contraire du lettré, dont l'esprit est perpétuellement ouvert aux mille émotions anonymes communiquées par la ruche, le parterre ou l'herbage, nous rassure grandement, sur les dangers de l'érudition, presque de la bibliophilie, quand il nous décrit en amateur les gravures qui ornent une vieille édition de Jacob Cats ou de l'abbé Sanderus. Ces dangers, d'ailleurs, quand ils existent, menaçant beaucoup moins l'intelligence que la sensibilité, la capacité de lecture profitable, si l'on peut ainsi dire, est beaucoup plus grande chez les penseurs que chez les écrivains d'imagination. Schopenhauer, par exemple, nous offre l'image d'un esprit dont la vitalité porte légèrement la plus énorme lecture, chaque connaissance nouvelle étant immédiatement réduite à la part de réalité, à la portion vivante qu'elle contient. »

Marcel Proust, Sur la lecture

 

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L'initiatrice

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« Il n'y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. »

« Tant que la lecture est pour nous l'initiatrice dont les clefs magiques nous ouvrent au fond de nous-même la porte des demeures où nous n'aurions pas su pénétrer, son rôle dans notre vie est salutaire. Il devient dangereux au contraire quand, au lieu de nous éveiller à la vie personnelle de l'esprit, la lecture tend à se substituer à elle, quand la vérité ne nous apparaît plus comme un idéal que nous ne pouvons réaliser que par le progrès intime de notre pensée et par l'effort de notre coeur, mais comme une chose matérielle, déposée entre les feuillets des livres comme un miel tout préparé par les autres et que nous n'avons qu'à prendre la peine d'atteindre sur les rayons des bibliothèques et de déguster ensuite passivement dans un parfait repos de corps et d'esprit. »

Marcel Proust, Sur la lecture

 

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La place inviolable du Passé

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« Tout autour, les jours actuels, les jours que nous vivons circulent, se pressent en bourdonnant autour des colonnes, mais là brusquement s’arrêtent, fuient comme des abeilles repoussées ; car elles ne sont pas dans le présent, ces hautes et fines enclaves du passé, mais dans un autre temps où il est interdit au présent de pénétrer. Autour des colonnes roses, jaillies vers leurs larges chapiteaux, les jours actuels se pressent et bourdonnent. Mais, interposées entre eux, elles les écartent, réservant de toute leur mince épaisseur la place inviolable du Passé : – du Passé familièrement surgi au milieu du présent, avec cette couleur un peu irréelle des choses qu’une sorte d’illusion nous fait voir à quelques pas, et qui sont en réalité situées à bien des siècles ; s’adressant dans tout son aspect un peu trop directement à l’esprit, l’exaltant un peu comme on ne saurait s’en étonner de la part du revenant d’un temps enseveli ; pourtant là, au milieu de nous, approché, coudoyé, palpé, immobile, au soleil. »

Marcel Proust, Sur la lecture

 

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Tout se fragmente et tout se désassemble

« Tout se fragmente et tout se désassemble, les notions - que l'on jugeait acquises - se défont, le grand ébranlement prélude et chacun rompt les instruments dont se servaient nos pères.
Dans les pays où règne la censure, on se consume à nier l'évidence; dans les pays où la censure est abolie, on dit n'importe quoi; la différence paraît insensible, car il revient au même de mentir ou de se perdre et l'on présume que ceux-là, qui mentent, rejoindront quelque jour ceux qui se sont perdus. Les Muses ont abandonné la terre et voilà plusieurs générations que les beaux-arts sont morts, les imposteurs ont le champ libre et jamais il ne s'en vit de plus incroyables, mais le pire est que ceux qui s'opposent à leur imposture, ne nous proposent rien, rien que des platitudes.
Nos villes sont des cauchemars, leurs habitants deviennent pareils aux termites, tout ce qui s'édifie est d'une laideur monstrueuse et nous ne savons plus bâtir de temples, de palais ni de tombeaux, de places triomphales ni d'amphithéâtres. A chaque pas, la vue est offensée, l'oreille abasourdie et l'odorat désespéré, nous nous demanderons bientôt :
- A quoi bon l'ordre ? »

Albert Caraco, Bréviaire du Chaos

 

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Agréable, huileux et tiède

« Le christianisme, qui n'avait su ni vaincre ni mourir, fit alors comme tous les conquis. Il reçut la loi et paya l'impôt. Pour subsister, il se fit agréable, huileux et tiède. Silencieusement, il se coula par le trou des serrures, s'infiltra dans les boiseries, obtint d'être utilisé comme essence onctueuse pour donner du jeu aux institutions et devint ainsi un condiment subalterne, que tout cuisinier politique put employer ou rejeter à sa convenance. On eut le spectacle, inattendu et délicieux, d'un christianisme converti à l'idolâtrie païenne, esclave respectueux des conculcateurs du Pauvre, et souriant acolyte des phallophores.
Miraculeusement édulcoré, l'ascétisme ancien s'assimila tous les sucres et tous les onguents pour se faire pardonner de ne pas être précisément la volupté, et devint, dans une religion de tolérance, cette chose plausible qu'on pourrait nommer le catinisme de la piété. »

Léon Bloy, Le désespéré

 

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Mystères...

« J'ai abordé, sans le savoir, des mystères qui me confondent. »

Sainte Bible, Livre de Job, 42 : 3

 

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Le leurre

« Après le lycée Jeanson, le lycée Henri-IV, où elle avait approfondi sans ménager sa peine la littérature française, et la philosophie, l’anglais, et la littérature anglaise. A vingt ans, après le lycée Henri-IV, l’Ecole normale supérieure de Fontenay, avec l’élite intellectuelle française... "on n’en reçoit que trente par an". Thèse : "Le déni de soi chez Georges Bataille" (Bataille, allons bon, pour changer !). A Yale, les étudiants chics travaillent tous sur Bataille ou Mallarmé. Il n’a pas grand mal à comprendre ce qu’elle cherche à lui faire comprendre, d’autant qu’il connaît un peu Paris pour y avoir, grâce à une bourse Fulbright, passé un an avec femme et enfants, du temps qu’il était jeune professeur ; il connaît un peu ces jeunes Français ambitieux, formés dans les lycées d’élite. Parfaitement préparés, connaissant les intellectuels qui comptent, des jeunes très intelligents, immatures, dotés de l’éducation française la plus snob, se préparant ardemment à être enviés toute leur vie. On les voit traîner le samedi soir dans des petits restaurants vietnamiens pas chers rue Saint-Jacques, parler des grands problèmes, jamais de banalités, jamais de la pluie et du beau temps – débats d’idées, philosophie et politique, à l’exclusion de tout autre sujet. Même pendant leurs loisirs, lorsqu’ils sont en tête à tête avec eux-mêmes, ils pensent l’incidence de Hegel sur la vie intellectuelle française au XXème siècle. L’intellectuel s’interdit d’être frivole. La vie c’est la pensée. Conditionnés à être violemment marxistes ou violemment antimarxistes, ils souffrent d’un effarement congénital devant tout ce qui est américain.[...] Ses jeunes étudiants l’amusent. Elle cherche encore leur côté intellectuel. Elle est sidérée par la façon dont ils s’amusent. Leur façon de penser, de vivre, hors de toute idéologie, dans le chaos. Ils n’ont jamais vu un film de Kurosawa – même ça, ils l’ignorent. Elle, à leur âge, elle avait vu tout Kurosawa, tout Tarkovski, tout Fellini, tout Antonioni, tout Fassbinder, tout Wertmuller, tout Satyajit Ray, tout René Clair, tout Wim Wenders, tous les Truffaut, les Godard, les Chabrol, les Resnais, les Rohmer et les Renoir. Eux, ils n’avaient vu que Star Wars.[...] A contrecoeur, elle pose sa candidature, et la voilà, avec son kilt et ses bottes, dans le bureau du doyen Silk, en face de lui. Pour avoir le prochain poste, le poste chic, il faut en passer par Athena. Sauf que pendant près d’une heure le doyen Silk va l’écouter quasiment se disqualifier pour le poste en question. Structure narrative et temporalité. Les contradictions internes de l’oeuvre d’art. Rousseau s’avance masqué, mais sa rhétorique le trahit (la tienne aussi, en somme, se dit le doyen, au vu de l’essai autobiographique [Delphine a écrit un essai autobiographique pour présenter sa carrière universitaire...]). La voix du critique n’a pas moins de légitimité que celle d’Hérodote. Narratologie. Diégétique. La différence entre diégésis et mimésis. L’expérience entre parenthèses. La qualité proleptique du texte. Coleman n’a pas besoin de lui demander ce que ce jargon veut dire. Il le sait, dans l’original grec, ce que ces mots de Yale veulent dire, ce que les mots de l’Ecole normale supérieure veulent dire. Et elle, le sait-elle ? Il y travaille depuis trois décennies, il n’a pas de temps à perdre. Il se demande : pourquoi une femme aussi belle tente-t-elle de dissimuler la dimension humaine de son expérience sous ces mots-là ? Peut-être parce qu’elle est si belle, justement. Il se dit : Elle est si contente d’elle, elle se leurre tellement. »

Philip Roth, La tache

 

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Nul fruit ne mûrit pour nous qui n’ait tenu dans les orages de fer

« Le combat demeure une chose sainte, un jugement de Dieu entre deux idées. Notre nature profonde nous pousse à défendre notre cause avec toujours plus d’acharnement, de sorte que le combat est le dernier mot de notre raison, et que seul ce qu’il nous acquiert peut être possession véritable. Nul fruit ne mûrit pour nous qui n’ait tenu dans les orages de fer, et tout, jusqu’au meilleur et au plus beau, exige d’être conquis de haute lutte.

Qui creuse ainsi jusqu’aux racines du combat et vénère l’authentique esprit combattant, qu’il le vénère partout, même chez l’adversaire. Aussi la réconciliation après le combat devrait-elle rassembler d’abord les hommes du front. C’est en guerrier que j’écris cela, qui peut n’être point au goût du jour : mais pourquoi ne tenterions-nous pas, nous autres guerriers, de nous trouver sur notre ligne à nous, celle de la bravoure virile ? Nous n’y saurions rencontrer pire insuccès que les hommes d’État, les artistes, les savants et les dévots sur la leur. N’avons-nous pas souvent serré les mains qui venaient de nous lancer des grenades, alors que ceux de l’arrière s’empêtraient toujours plus profond dans les taillis de leur haine ? N’avons-nous pas planté des croix sur les tombes de nos ennemis ? Nous sommes restés les plus décents de tous, nous qui chaque jour trempions nos mains dans le sang. La lutte est une façon d’être qui reste ce qu’elle est, mais on peut l’ennoblir par l’esprit chevaleresque. »

Ernst Jünger, La guerre comme expérience intérieure

 

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07/06/2015

La tempe de l’Occident

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« Nous ignorons les arcanes de l’économie pétrolière. Nous négligeons le fait que le carburant consommé alimente les guerres, fournit sa force à certains réseaux terroristes. Le pétrole est le sang de l’islamisme, le nerf de la radicalité. La houille est le carburant d’une idéologie fossile. Et à chaque fois que nous mettons le pistolet de la pompe dans le trou du réservoir, on l’appuie en fait sur la tempe de l’Occident. »

Sylvain Tesson, L’or noir des steppes

 

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L’idéal du chien crevé

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« La pensée qui domine l’ensemble de la société, c’est justement l’existence d’un cours de l’histoire, implacable, nécessaire, qui suppose que tout effort est vain s’il ne se situe pas dans le bateau qui suit le courant… Or, le lieu commun du sens de l’histoire correspond exclusivement à l’idéal du chien crevé. Bon petit chien bien gonflé (nécessaire pour surnager) qui s’installe au filet le plus fort du courant et descend le fil de l’eau en se dandinant gravement avec des airs de docteur ès sciences politiques et qui oscille à droite ou à gauche selon les vaguelettes (ses opinions mûrement pensées); parfois un remous lui fait perdre la bonne direction, il hésite en tournoyant (ce sont les scrupules de conscience), il dérive vers un banc de sable (c’est la manifestation de la liberté de sa personne); il se trouve aspiré par un entonnoir vers les fonds (c’est l’angoisse); mais il surmonte bientôt bravement ces tentations, une vague le remet à flot et il poursuit victorieusement son chemin ayant enfin retrouvé la bonne ligne, qui le porte, évidemment, vers la fin nécessaire. Et plus il avance, plus il se gonfle orgueilleusement d’horribles certitudes sur sa liberté et le sens de l’histoire, qui le font s’affirmer plus turgide chaque fois, jusqu’au moment où l’imprégnation de l’âme par cette corruption le fait s’en aller en lambeaux de matières affreuses, à jamais décomposées. »

Jacques Ellul, Exégèse des nouveaux lieux communs

 

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Tout est prêt pour l’apparition d’un racisme de type nouveau, basé sur le masochisme

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« "A l’époque où les Blancs se considéraient comme supérieurs, dit-il, le racisme n’était pas dangereux. Pour les colons, les missionnaires, les instituteurs laïques du XIX siècle, le Nègre était un gros animal pas très méchant, aux coutumes distrayantes, une sorte de singe un peu plus évolué. Dans le pire des cas on le considérait comme une bête de somme utile, déjà capable d’effectuer des tâches complexes ; dans le meilleur des cas comme une âme fruste, mal dégrossie, mais capable par l’éducation de s’élever jusqu’à Dieu - ou jusqu’à la raison occidentale. De toute façon on voyait en lui un "frère inférieur", et pour un inférieur on n’éprouve pas de haine, tout au plus une bonhomie méprisante. Ce racisme bienveillant, presque humaniste, a complètement disparu. A partir du moment où les Blancs se sont mis à considérer les Noirs comme des égaux , il est clair qu’il en viendrait tôt ou tard à les considérer comme supérieur. La notion d’égalité n’a nul fondement chez l’homme" continua t’il en dressant à nouveau l’index.

Je crus un moment qu’il allait citer ses sources - La Rochefoucauld , ou je ne sais qui - mais finalement non. Lionel plissa le front. "Les Blancs se considérants eux mêmes comme inférieurs , poursuivit Robert, soucieux d’être compris, tout est prêt pour l’apparition d’un racisme de type nouveau, basé sur le masochisme : historiquement, c’est dans ces conditions qu’on en arrive à la violence, à la guerre interraciale et au massacre. Tous les antisémites, par exemple, s’accordent à attribuer aux Juifs une supériorité d’un certain ordre : si vous lisez les écrits antisémites de l’époque, vous serez frappé par le fait que le Juif est considéré comme plus intelligent, plus malin, qu’on lui prête des qualités spéciales dans le domaine de la finance - et, par ailleurs, de la solidarité communautaire. Résultat : six millions de morts." »

Michel Houellebecq, Plateforme 

 

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Industrialiser l’oecumène

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« Nos maîtres furent de tout temps nos ennemis 
et maintenant plus que jamais, plus que
 jamais nos maîtres sont faillibles, car si nous 
sommes innombrables, c’est leur faute, voilà des
 siècles et des millénaires qu’ils veulent que les subalternes 
multiplient, afin de les embesogner et de les
 mener à la mort.

Aujourd’hui même que le monde éclate et que la 
terre manque aux hommes, leur rêve est de 
construire des maisons ayant cinquante étages et
 d’industrialiser l’oecumène, sous le prétexte de 
fournir aux besoins de ces milliards qui naissent, car 
il leur faut toujours plus de vivants, toujours, malgré 
ce qu’ils affirment. Ils organisent méthodiquement 
l’Enfer, où nous nous consumons, et pour nous
 empêcher de réfléchir, ils nous proposent des
 spectacles imbéciles, où notre sensibilité se barbarise 
et notre entendement achèvera par se dissoudre, ils
 iront consacrer ces jeux en présidant à leur manie
 avec toute la pompe convenable.

Nous revenons au cirque de Byzance et nous en
 oublions nos vrais problèmes, mais sans que ces 
problèmes nous oublient, nous les retrouverons 
demain et nous savons déjà que lorsqu’ils seront
 insolubles, nous irons à la guerre. »

Albert Caraco, Bréviaire du chaos

 

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L’aventure

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« Quand il n’y aurait qu’une chance sur mille de trouver l’aventure au coin de la rue, il faudrait aller au coin de la rue. »

Henry de Montherlant, Carnets

 

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Fait de cellules et de sang

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« L'homme, on a dit qu'il était fait de cellules et de sang. Mais en réalité, il est comme un feuillage. Il faut que le vent passe pour que ça chante. »

Jean Giono, Que ma Joie demeure

 

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Pour l’instant, l’homme n’est qu’un pionnier de lui-même...

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« L’homme - mais bien sûr, mais comment donc, nous sommes parfaitement d’accord : un jour il se fera ! Un peu de patience, un peu de persévérance : on n’en est plus à dix mille ans près. Il faut savoir attendre mes bons amis, et surtout voir grand, apprendre à compter en âges géologiques, avoir de l’imagination : alors là, l’homme ça devient tout à fait possible, probable même : il suffira d’être encore là quand il se présentera. Pour l’instant il n’y a pas de transes, des rêves, des pressentiments… Pour l’instant, l’homme n’est qu’un pionnier de lui-même. Gloire à nos illustres pionniers ! »

Romain Gary, Gloire à nos illustres pionniers

 

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04/06/2015

Taches grises dans le 93

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« Les renseignements généraux ont établi la liste des cent soixante-douze "cités interdites" de France, où les lois de la République ne sont plus en vigueur. Si un géomètre urbaniste se penchait sur le sujet, il calculerait -cadastre en main- la superficie de ces zones de non-droit. nous saurions ainsi quelle proportion du territoire français est tombée dans cette catégorie nommée par les géographes "taches grises", ces étendues -- comme le Changtang tibétain, la Corée du Nord ou la ligne de contrôle indo-pakistanais -- rendues inaccessibles par une situation politique et qui retournent peu à peu à l’état de terres méconnues où toutes les explorations redeviennent possibles. »

Sylvain Tesson, Géographie de l'instant

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Ces lieux où l’on trouve encore des vierges

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« Au sommet du Petit Dru, dans le massif de Chamonix, il y a une Vierge Marie en aluminium. Elle regarde vers le couchant. L’alpiniste qui arrive au sommet - passablement épuisé - se porte vers elle instinctivement, la touche, la caresse et la photographie. Il lui murmure quelques mots de gratitude. Le crâne de la statue est constellé d’impacts qui ont fait fondre le métal. Une vierge n’est pas à l’abri des coups de foudre. »

Sylvain Tesson, Géographie de l'instant

 

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On se réfugiera dans le cinquième tome du très profond "Journal" d'Ernst Jünger...

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« Parution des "Mémoires" du légendaire Pierre Guillaume. Ce lieutenant de vaisseau est un Surcouf en habit d'officier avec un coeur d'or, une volonté d'airain, et une tête aussi dure que le granit armoricain. Guerres d'Indochine et d'Algérie, clandestinité, navigations solitaires, naufrages, emprisonnements, évasions, renflouements de bateaux : les chapitres de sa vie se succèdent comme les salves d'une fantasia.
Hégel disait de Napoléon qu'il était l'esprit de l'Histoire sur un cheval. Pierre Guillaume c'est l'esprit d'aventures au bord d'une Jonque. Et par "aventure", il faut entendre la grande : celle qui fait du monde un théâtre, de l'action une mystique, de la vie une monture, de l'obstacle un objectif. Son existence fut tout entière dédiée à la mer, dont les Bretons déplorent que les accidents de la tectonique l'aient empêché de recouvrir la totalité du globe terrestre.
Un bémol cependant à la lecture du livre : le passage où les marins français se livrent à ce que l'auteur n'appelle pas un viol collectif mais qui en est bel et bien un : pendant la guerre, cinquante matelots passent sur deux femmes philippines séquestrées dans le bateau où Guillaume est en poste. Tout en réprouvant ses camarades, il lâche laconiquement : "La plus jeune en avait ramassé une vingtaine et était assez "out". Toutes les deux étaient des putains, mais enfin, à cette cadence... Tout cela n'était quand même pas glorieux..."
Etrangement après cet infâme épisode, on perd un peu de sa capacité d'indignation devant les épreuves subies ensuite par les valeureux officiers français ! On se réfugiera dans le cinquième tome du très profond "Journal" d'Ernst Jünger où l'officier allemand évoquant sa campagne de France écrit : "Je n'ai pas vus d'atrocités de mes yeux. Je les ai arrêtées dans l'oeuf." »

Sylvain Tesson, Géographie de l'instant

 

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Séduisante chimère

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« Ceux qui avaient interprété la démocratie individualiste issue des Lumières comme une décadence, semblent souvent justifiés aujourd’hui. Elle est bel et bien entrée elle-même en décadence par rapport à ses propres valeurs et à ses ambitions. Son système de sociabilité qui n’a jamais bien fonctionné en Europe est en plein dérapage, surtout en France, lieu de sa fondation. La république contractuelle une et indivisible implose sous nos yeux. Dans sa lucidité, Raymond Aron, pourtant libéral convaincu, l’avait pressenti au terme de ses "Mémoires"(Julliard, 1983): "Sans adopter l’interprétation spenglérienne selon laquelle la civilisation urbaine, utilitaire, démocratique marque en tant que telle une phase de décadence des cultures, il est légitime de se demander, [...] si l’épanouissement des libertés, le pluralisme des convictions, l’hédonisme individualiste ne mettent pas en péril la cohérence des sociétés et leur capacité d’action."
De cette nocivité, la plus grande partie du monde européen était convaincue avant 1914. Mais ce qui donnait de la force au rejet de l’idéologie des Lumières et de 1789, c’est que ce monde européen des monarchies et de l’ancien ordre féodal rénové était aussi le plus efficace, le plus moderne et le plus compétitif sur le terrain économique, social et culturel. Ce fait oublié, il convient de le rappeler. D’abord parce que c’est une réalité historique et à ce titre méritant d’être connue. Ensuite, parce que cette réalité permet de prendre du champ par rapport à l’illusion d’optique que les victoires répétées des Etats-Unis ont imposé depuis la fin du XXe siècle. Illusion qui fait prendre le phénomène particulier et contingent de la société américaine pour une nécessité universelle. Cette séduisante chimère s’est installée d’autant plus aisément que dans nos sociétés les esprits ont été formés depuis longtemps par l’imprégnation inconsciente de la vulgate marxiste à une interprétation déterministe et finaliste de l’histoire où le succès momentané vaut preuve. »

Dominique Venner, Le Siècle de 1914

 

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29/05/2015

La présence des autres affadit le monde

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« C'est fou ce que l'homme accapare l'attention de l'homme. La présence des autres affadit le monde. La solitude est cette conquête qui vous rend jouissance des choses. »

Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie

 

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28/05/2015

Des choses dangereuses, inflammables

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« Je ne peux écrire qu’en touchant à des choses dangereuses, inflammables et qui déplaisent. »

Philippe Muray, Ultima Necat I - Journal intime (1978-1985)

 

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Adolfo Wildt

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et

 

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« De même que je vous ai recommandé de garder votre marbre toujours propre, y compris pour des raisons d'ordre spirituel, je vous conseille de ne pas laisser prendre à votre personne, dans le maniement de vos outils (foret, ciseau ou autre), des attitudes grossières ou vulgaires ; faites plutôt preuve d'énergie et de correction : car tout se reflète dans l'esprit, et par là dans l’œuvre. »

Adolfo Wildt, L’Art du marbre

 

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Aimez votre solitude, supportez-en la peine

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« Aussi, cher Monsieur, aimez votre solitude, supportez-en la peine : et que la plainte qui vous en vient soit belle. Vous dites que vos proches vous sont lointains ; c'est qu'il se fait un espace autour de vous. Si tout ce qui est proche vous semble loin, c'est que cet espace touche les étoiles. »

Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète

 

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La Nature ouvre toujours les bras pour étreindre l’homme

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« Même en des lieux isolés, parmi des objets sordides, un acte vrai ou héroïque semble toujours attirer vers lui le ciel pour en faire son temple et le soleil son cierge. La Nature ouvre toujours les bras pour étreindre l’homme, si ses pensées sont à la hauteur. »

Ralph Waldo Emerson, La Nature

 

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