Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/09/2015

L'imagination condensée du siècle

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Le tombeau de l'Empereur, pour des Français de vingt ans, ce n'est point le lieu de la paix, le philosophique fossé où un pauvre corps qui s'est tant agité se défait ; c'est le carrefour de toutes les énergies qu'on nomme audace, volonté, appétit. Depuis cent ans, l'imagination partout dispersée se concentre sur ce point. Comblez par la pensée cette crypte où du sublime est déposé ; nivelez l'histoire, supprimez Napoléon : vous anéantissez l'imagination condensée du siècle. On n'entend pas ici le silence des morts, mais une rumeur héroïque ; ce puits sous le dôme, c'est le clairon épique où tournoie le souffle dont toute la jeunesse a le poil hérissé. »

Maurice Barrès, Les Déracinés

 

11:03 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

10/09/2015

Il n’est rien dont l’homme ait aussi peur que la liberté

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« On voit s’élever une race de bûcheurs, des gens qui n’ont jamais le temps de rien. Or, tout type supérieur se reconnaît à ce qu’il a du temps, donc est maître souverain des heures. Placé devant ce dilemme, il préfèrera l’existence de raté à celle de cuistre. Au reste, le règne des cuistres est sans cesse à nouveau interrompu par la révolte des ratés de génie. C’est l’une des révolutions qui se reproduisent toujours, et, fait remarquable, dans une totale indépendance envers les arguments qui se trouvaient être à la mode. Ainsi s’expliquent l’aristocrate parmi les jacobins, et d’autres types que chacun connaît. [...] Pour ceux qui sont grandement doués, l’échec dans le métier fait bien plutôt partie des débuts favorables, pour autant que, traversant le rideau de la société, ils peuvent se colleter avec la liberté [...]. Au fond, il n’est rien dont l’homme ait aussi peur que la liberté - d’où l’affluence qui règne devant les casernes de notre époque. »

Ernst Jünger, Le contemplateur solitaire

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (1) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Il serait vain de se détourner du passé pour ne penser qu'à l'avenir...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Il serait vain de se détourner du passé pour ne penser qu'à l'avenir. C'est une illusion dangereuse de croire qu'il y ait même là une possibilité. L'opposition entre l'avenir et le passé est absurde. L'avenir ne nous apporte rien, ne nous donne rien ; c'est nous qui pour le construire devons tout lui donner, lui donner notre vie elle-même. Mais pour donner il faut posséder, et nous ne possédons d'autre vie, d'autre sève, que les trésors hérités du passé et digérés, assimilés, recréés par nous. De tous les besoins de l'âme humaine, il n'y en a pas de plus vital que le passé. »

Simone Weil, L'enracinement

 

13:25 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Quand tu recevras cette lettre je me sentirai bien mieux qu'avant...

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

Le 22 février 1942, Stefan Zweig, ne voyant plus ce qu'il pouvait encore faire dans un monde livré à la barbarie nazie, préfère le quitter, en compagnie de son épouse, en absorbant du Véronal.

On retrouva leurs corps sans vie dans la petite maison qu'ils habitaient, quartier de Valparaiso à Petrópolis, dans l'État de Rio de Janeiro. La lettre qu'il laissa avant de se donner la mort, donne une idée de son extrême désarroi...

« Avant de quitter la vie de ma propre volonté et avec lucidité, j'éprouve le besoin de remplir un dernier devoir : adresser de profonds remerciements au Brésil, ce merveilleux pays qui m'a procuré ainsi qu'à mon travail, un repos si amical et si hospitalier. De jour en jour, j'ai appris à l'aimer davantage et nulle part ailleurs je n'aurais préféré édifier une nouvelle existence, maintenant que le monde de mon langage a disparu pour moi et que ma patrie spirituelle, l'Europe, s'est détruite elle-même. Mais à soixante ans passés il faudrait avoir des forces particulières pour recommencer sa vie de fond en comble. Et les miennes sont épuisées par les longues années d'errance. Aussi, je pense qu'il vaut mieux mettre fin à temps, et la tête haute, à une existence où le travail intellectuel a toujours été la joie la plus pure et la liberté individuelle le bien suprême de ce monde. Je salue tous mes amis. Puissent-ils voir encore l'aurore après la longue nuit ! Moi je suis trop impatient, je pars avant eux. »

 

Écrite le même jour : Lettre à Friderike Maria Zweig (sa précédente épouse)...

 

« Petropolis 22.11.1942

Chère Friderike,

Quand tu recevras cette lettre je me sentirai bien mieux qu'avant. Tu m'as vu à Ossining, et après une bonne période paisible, ma dépression est devenue bien plus aiguë — je souffrais tant que je ne pouvais plus me concentrer. Et puis, la certitude — la seule que nous ayons eue — que cette guerre allait prendre des années, qu'il faudrait une éternité avant que nous, dans notre position spécifique, nous puissions nous installer à nouveau dans notre maison, était trop déprimante, j'aimais beaucoup Petropolis, mais je n'avais pas les livres que je voulais et la solitude, qui dans un premier temps avait un tel effet apaisant, a commencé à devenir oppressante — l'idée que mon travail central, le Balzac, ne serait jamais terminé sans deux années de vie paisible et que tous les livres aient été très difficiles à obtenir, et puis cette guerre, cette guerre éternelle qui n'est pas encore à son apogée. J'étais trop fatigué pour tout cela (et pauvre Lotte… elle n'avait pas une belle vie avec moi, en particulier parce que sa santé n'était pas des meilleures). Toi tu as tes enfants et avec eux le devoir de tenir bon, tu as un vaste champ d'intérêts et une activité intacte. Je suis sûr que tu verras encore une époque meilleure et que tu me donneras raison de ne pas avoir attendu plus longtemps, moi qui ai le « foie noir ». Je t'envoie ces lignes dans les dernières heures, tu ne peux imaginer à quel point je suis heureux depuis que j'ai pris cette décision. Dis toute mon affection à tes enfants et ne me plains pas — rappelle-toi ce bon Joseph Roth et Rieger, combien j'étais heureux pour eux qu'ils n'aient pas eu à traverser ces épreuves. Avec toute mon affection et mon amitié, et courage, tu sais que je suis paisible et heureux. »

Stefan Zweig, Correspondance 1932-1942

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

09/09/2015

Vos "âmes éclairées"

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Pour la fumée qui sort d’une chaudière, vous avez renié toutes les croyances que tant de millions de héros, de penseurs et de martyrs vous avaient léguées depuis plus de six mille années, vous qui ne datez que d’un sempiternel Demain dont le soleil pourrait fort bien ne se lever jamais.

À quoi donc avez-vous préféré, depuis hier à peine, les prétendus principes immuables de vos devanciers, sur la planète, ― rois, dieux, famille, patries ? À ce peu de fumée qui les emporte, en sifflant, et les dissipe, au gré du vent, sur tous les sillons de la terre, entre toutes les vagues de la mer ! En vingt-cinq années, cinq cent mille haleines de locomotives ont suffi pour plonger vos "âmes éclairées" dans le doute le plus profond de tout ce qui fut la foi de plus de six mille ans d’Humanité.

Souffrez que je me défie quelque peu des subites et prétendues clairvoyances d’un être collectif dont l’erreur aurait si longtemps duré ! »

Auguste Villiers de l'Isle-Adam, L'Eve future

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La seule vie réellement vécue

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature. »

Marcel Proust, Le temps retrouvé

 

10:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Celui qui versera son sang avec moi sera mon frère

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Et la Saint-Crépin ne reviendra jamais, d'aujourd'hui à la fin du monde, sans qu'on se souvienne de nous, de notre petite bande, de notre heureuse petite bande de frères !
Car celui qui aujourd'hui versera son sang avec moi sera mon frère ; si vile que soit sa condition, ce jour l'anoblira. »

William Shakespeare, Henry V

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

08/09/2015

Une chose solennelle et grandiose

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Tout cela nous a fait de la guerre une chose solennelle et grandiose. Nous nous sentions les héritiers et les supports d'idées transmises à travers les siècles, portées de génération en génération vers leur accomplissement. Sur toute pensée, sur tout acte pesait l'obligation la plus lourde, honneur suprême et terme radieux : la mort pour son pays et sa grandeur. »

Ernst Jünger, La guerre comme expérience intérieure

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ce retour au réel leur est scandale

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ce sont les enfants du rock débile, les écoliers de la vulgarité pédagogique, les béats nourris de soupe infra idéologique cuite au show-biz, ahuris par les saturnales de "Touche pas à mon pote". Ils ont reçu une imprégnation morale qui leur fait prendre le bas pour le haut. Rien ne leur paraît meilleur que n’être rien, mais tous ensemble, pour n’aller nulle part.

Leur rêve est un monde indifférencié où végéter tièdement. Ils sont ivres d’une générosité au degré zéro, qui ressemble à de l’amour mais se retourne contre tout exemple ou projet d’ordre. L’ensemble des mesures que prend la société pour ne pas achever de se dissoudre : sélection, promotion de l’effort personnel et de la responsabilité individuelle, code de la nationalité, lutte contre la drogue, etc., les hérisse.

Ce retour au réel leur est scandale. Ils ont peur de manquer de mœurs avachies. Voilà tout leur sentiment révolutionnaire. C’est une jeunesse atteinte d’un sida mental. Elle a perdu ses immunités naturelles ; tous les virus décomposant l’atteignent. Nous nous demandons ce qui se passe dans leurs têtes. Rien, mais ce rien les dévore.

Il aura suffi de cinq ans pour fabriquer dans le mou une telle génération. Serait-ce toute la jeunesse ? Certainement pas. Osons dire que c’est la lie avec quoi le socialisme fait son vinaigre. »

Louis Pauwels, Le Monome des zombies. Éditorial du Figaro Magazine, 6 décembre 1986

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

07/09/2015

Dans l’ignorance des choses

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« De ce dîner par un beau soir profond sous les arbres des Champs-Élysées, Sturel emporta le pressentiment que jusqu’alors il avait vécu dans une convention dans l’ignorance des choses. C’est un thème banal, l’opposition qu’il y a entre la vie, telle qu’on se l’imagine, et sa réalité, mais cette banalité soudain pour Sturel devint douloureusement vivante et agissante. Elle infecta toutes les opinions qu’il s’était composé des hommes et des choses. Chaque jour de cette semaine, il fut plus déniaisé, mais plus sombre. Il apprit que si toutes les convictions ne sont pas déterminées par l’argent, presque toutes du moins en rapportent, ce qui atténua leur beauté à ses yeux. Il constata que si certains hommes prenant certaines attitudes sans subvention, certains autres sont subventionnés pour les prendre, et qu’ainsi le plus désintéressé, toujours suspect aux malveillants, n’a même pas la pleine satisfaction de se savoir en dehors des combinaisons pécuniaires : sans en profiter, il les sert. »

Maurice Barrès, Les déracinés

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Je n’estime que le courage sans mesure

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Il n’est rien au monde que je vomisse autant que le pessimisme, qui représente à la fois, pour l’horreur de ma pensée, toutes les impuissances imaginables (...). Je n’estime que le courage sans mesure et je n’accepterai jamais d’être vaincu, - moi ! »

Léon Bloy, Le Mendiant ingrat

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

06/09/2015

Sur un canapé

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Les temps nouveaux ont à ce point perdu le sens des grandes fins que Jésus, aujourd'hui, mourrait sur un canapé. »

Emil Cioran, Le crépuscule des pensées

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Les êtres nobles aiment rarement la vie

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Les êtres nobles aiment rarement la vie, ils lui préfèrent les raisons de vivre, et ceux qui se contentent de la vie sont toujours des ignobles. La vie qu'a-t-elle de si désirable, lorsqu'elle n'est sublime ? »

Albert Caraco, Post-Mortem

 

12:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Passéiste

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Quand "être absolument moderne" est devenu une loi spéciale proclamée par le tyran, ce que l’honnête esclave craint plus que tout, c’est que l’on puisse le soupçonner d’être passéiste. »

Guy Debord, Panégyrique

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

05/09/2015

Tout cela finira très mal

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Quand l'auteur de "Mein Kampf", qui recommande l'extermination de l'ennemi héréditaire, devient Führer, puis Reichführer à vie, je crains qu'il y ait excès d'optimisme à espérer que ces fonctions lui sont conferées en vue d'une églogue.
Ce sont de telles évidences que tout le monde reconnaît. Au bout de cinq minutes, elles sont oubliées et l'on se livre à d'autres combats. Je commence à croire aussi que tout cela finira très mal. »

Jacques Bainville, Doit-on le dire ? (Chroniques dans l'hebdomadaire "Candide")

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Socialistes

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« On se moquait autrefois du paysan qui disait avec naïveté lorsqu'on lui demandait ce que faisait son fils :
- Mon fils, il a une bonne place de curé.
- Il y a maintenant de bonnes places de socialistes. »

Jacques Bainville, Doit-on le dire ? (Chroniques dans l'hebdomadaire "Candide")

 

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

04/09/2015

La sociologie

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« L’étincelle a jailli à Nanterre, faculté consacrée, pour une large part, à des enseignements particulièrement destructeurs, la sociologie notamment, science balbutiante dont beaucoup de spécialistes ont d’autant plus d’assurance que leurs connaissances sont plus incertaines et bien souvent, en France au moins, mal assimilées. Comme les sophistes de Platon, les scolastiques du XVe siècle, ou les médecins de Molière, ils cherchent leur autorité et leur prestige dans un jargon spécifique, inaccessible au profane, et appliquent leur intelligence et les détours de leur esprit à critiquer une société où de fait ils n’ont aucune utilité clairement définie. »

Georges Pompidou, Le Nœud gordien

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Partir, marcher droit, arriver quelque part

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 


Dessin de Péguy

« Toute la question est précisément de savoir si la pensée aussi n’est pas mieux n’importe où que dans le milieu d’une forêt. Ce que je dis, c’est que justement parce que sa morale était provisoire, justement parce qu’elle n’entrait pas dans son système, parce qu’elle n’était pas arrêtée, parce que pour ainsi dire elle n’était pas officielle, justement parce qu’il s’y est moins défendu, moins observé, c’est elle qui nous livre son secret. Son secret c’est bien d’aller toujours dans le même sens et, le soir, d’arriver quelque part.
Toute la question est en effet de savoir si la pensée elle-même n’entre point dans de certaines conditions, si elle n’est point soumise à de certaines conditions générales de l’homme et de l’être, qui sont des conditions organiques, et dont l’une précisément serait que tout vaut mieux que de tourner en rond.

Partir, marcher droit, arriver quelque part. Arriver ailleurs plutôt que de ne pas arriver. Arriver où on n’allait pas plutôt que de ne pas arriver. Avant tout arriver. Tout, plutôt que de vaguer. Et que la plus grande erreur c’est encore d’"errer" : voilà sa nature même et la race de son secret. »

Charles Péguy, Note sur M. Bergson

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

03/09/2015

La philosophie ne va pas en classe de philosophie

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Une grande philosophie n'est pas celle qui est le premier en composition. Ce n'est pas celle qui est le premier en dissertation. C'est dans les classes de philosophie que l'on vainc par des raisonnements. Mais la philosophie ne va pas en classe de philosophie. Une philosophie aussi n'est point une chambre de justice. Il ne s'agit pas d'avoir raison ou d'avoir tort. C'est une marque de grande grossièreté (en philosophie), que de vouloir avoir raison ; et encore plus, que de vouloir avoir raison contre quelqu'un. Et c'est une marque de la même grossièreté que d'assister à un débat de philosophie avec la pensée de voir un des deux adversaires avoir tort ou avoir raison. Contre l'autre. »

Charles Péguy, Note sur M. Bergson

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ils avaient un honneur, absolu, comme c'est le propre d'un honneur

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ces ouvriers ne servaient pas. Ils travaillaient. Ils avaient un honneur, absolu, comme c'est le propre d'un honneur. Il fallait qu'un bâton de chaise fût bien fait. C'était entendu. C'était un primat. Il ne fallait pas qu'il fût bien fait pour le salaire ou moyennant le salaire. Il ne fallait pas qu'il fût bien fait pour le patron ni pour les connaisseurs ni pour les clients du patron. Il fallait qu'il fût bien fait lui-même, en lui-même, pour lui-même, dans son être même. Une tradition, venue, montée du plus profond de la race, une histoire, un absolu, un honneur voulait que ce bâton de chaise fût bien fait. Toute partie, dans la chaise, qui ne se voyait pas, était exactement aussi parfaitement faite que ce qu'on voyait. C'est le principe même des cathédrales. »

Charles Péguy, L'argent

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

02/09/2015

La faiblesse de notre raison

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« C’est-à-dire que les cours d’histoire étaient élégamment truqués dans le sens de la vérité républicaine.
Je n’en fais pas grief à la République : tous les manuels d’histoire du monde n’ont jamais été que des livrets de propagande au service des gouvernements.

Les normaliens frais émoulus étaient donc persuadés que la grande révolution avait été une époque idyllique, l’âge d’or de la générosité, et de la fraternité poussée jusqu’à la tendresse : en somme, une explosion de bonté.

Je ne sais pas comment on avait pu leur exposer — sans attirer leur attention — que ces anges laïques, après vingt mille assassinats suivis de vol, s’étaient entre guillotinés eux-mêmes.

Il est vrai, d’autre part, que le curé de mon village, qui était fort intelligent, et d’une charité que rien ne rebutait, considérait la Sainte Inquisition comme une sorte de Conseil de Famille : il disait que si les prélats avaient brûlé tant de Juifs et de savants, ils l’avaient fait les larmes aux yeux, et pour leur assurer une place au Paradis.

Telle est la faiblesse de notre raison : elle ne sert le plus souvent qu’à justifier nos croyances. »

Marcel Pagnol, La Gloire de mon père

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La condition mystérieuse

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« C’est que la sensualité est la condition mystérieuse, mais nécessaire et créatrice, du développement intellectuel. Ceux qui n’ont pas senti jusqu’à leur limite, soit pour les aimer, soit pour les maudire, les exigences de la chair, sont, par là même, incapables de comprendre toute l’étendue des exigences de l’esprit. »

Pierre Louÿs, Préface à "Aphrodite"

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

01/09/2015

La satisfaction d’être un bon client et un bon citoyen en dépensant son argent

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Nous en sommes arrivés, sans nous en rendre compte, à un régime où il n’est pas permis de penser incorrectemernt, et où il n’est pas permis non plus de vivre incorrectement. Comme le marxisme, la démocratie tient qu’il existe une vérité morale parce qu’elle croit comme le marxisme à un progrès de l’humanité et par conséquent à un sens de l’histoire. Quiconque admet ce credo doit en accepter le corollaire : s’il y a un sens de l’histoire, tout ce qui va dans ce sens, pensées, jugements, aspirations, est bon, et tout ce qui va dans le sens contraire, réflexes, regrets, répugnances, est erroné. Comme les marxistes, les démocrates distinguent donc des idées qui sont correctes et d’autres qui ne le sont pas : et aussi des attitudes qui sont correctes et d’autres qui ne le sont pas. L’idée et l’attitude deviennent inséparables, car l’attitude est l’incarnation de l’idée dans la vie, dans ce que les marxistes appellent la praxis et les démocrates, moins savants, la conduite. L’alignement sur une pensée correcte entraîne donc nécessairement la soumission à une attitude correcte, laquelle dans la société de consommation, comprend la bonne volonté, l’optimisme, le désir d’acheter, l’ambition d’être aujourd’hui semblable à son collègue et demain pareil à son chef de bureau, la satisfaction d’être un bon client et un bon citoyen en dépensant son argent au guichet où il est indiqué, dans l’intérêt général, de le dépenser. Ainsi, la conscience industrielle est complétée par une éducation industrielle qui fait de nous, non des citoyens à part entière, mais des consommateurs intégralement téléguidés. »

Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Ne pas accepter la défaite qui en nous s'installe

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ne pas succomber, ne pas rompre. Ne pas plier les genoux. Ne pas accepter la défaite qui en nous s'installe. Récuser la laideur qui nous lèche, en vue de jouissances immondes, de sa langue tiède. Dire Non pour sauver notre Oui. Notre courage, pour l'heure, est solitaire en cette forêt. Que faire ? Défricher. Tracer un sentier. »

Jean Cau, La grande prostituée

 

07:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

31/08/2015

La pensée que l'amour est nécessaire pour former un heureux mariage

=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=

 

« Ce qui m'a longtemps abusée, et qui peut-être vous abuse encore, c'est la pensée que l'amour est nécessaire pour former un heureux mariage. Mon ami, c'est une erreur ; l'honnêteté, la vertu, de certaines convenances, moins de conditions et d'âges que de caractères et d'humeurs, suffisent entre deux époux ; ce qui n'empêche point qu'il ne résulte de cette union un attachement très tendre qui, pour n'être pas précisément de l'amour, n'en est pas moins doux et n'en est que plus durable. »

Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse

 

16:00 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook