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29/01/2017

La chimère du service militaire

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Chose improbable il y a encore quelques années, certains dirigeants politiques appellent aujourd’hui au retour du service militaire. Une attitude qui tient davantage de l’effet d’annonce que d’une vision réaliste de la Défense française alors que le général Vincent Desportes vient d’affirmer que « l’armée manque de tout ».

C’était au printemps 2007. En pleine campagne présidentielle, Ségolène Royal, avec ce mélange d’ingénuité et de calcul politique qui la caractérise, déclarait alors à propos des finances de l’État : « J’en fais ici le serment, cette marge de manœuvre supplémentaire, cette valeur-là, n’ira pas à la Défense nationale mais ira à l’Éducation nationale. » Une déclaration qui préfigure déjà la saignée des budgets militaires entamée par Nicolas Sarkozy, poursuivie ensuite en début de présidence Hollande. Depuis, dix années ont passé et la France est « en guerre » selon les mots de François Hollande, affirmation prononcée lors du solennel discours devant le Congrès du 16 novembre 2015. Face à ce retour violent de l’Histoire dans leur vie quotidienne, les Français semblent aujourd’hui vouloir le retour d’un pouvoir régalien fort même si celui-ci s’évapore un peu plus chaque jour.


Discours devant le Congrès du 16 novembre 2015

 

Ainsi, les treillis et les Famas retrouvent grâce aux yeux des Français. « Les jeunes doivent retrouver le chemin des casernes », tel est le nouveau son de cloche. Pour certains politiques et intellectuels, le retour du service militaire serait la solution miracle pour palier aux maux qui touchent notre pays. Dans Le Jour où la France tremblera (2006) Guillaume Bigot proclame naïvement : « Jeunes banlieusards et enfants des beaux quartiers porteraient le même uniforme et seraient placés dans un même cadre. Dans identité, il y a identique. Dans notre devise, il y a aussi égalité et fraternité. Nombre d’études en attestent, là où le service militaire a été maintenu, les djihadistes sont proportionnellement moins nombreux. Ce rétablissement du service militaire peut s’opérer en un an (les officiers et les sous-officiers sont à recruter). Cette décision audacieuse mais réaliste réduirait le risque djihadiste, casserait la dynamique communautariste et ressouderait la jeunesse. »


Soldats de l’opération Sentinelle

 

Même le Parti socialiste, pourtant peu sensible au charme de la Grande Muette, retrouve le goût des valeurs martiales. Jean-Christophe Cambadélis, son secrétaire général, a déclaré en novembre 2016 : « Alors que la France se trouve confrontée à un défi lourd et durable, les conditions requises par la loi pour rétablir la conscription semblent pour la première fois depuis 20 ans réunies. » Pour combler les effectifs de l’armée mobilisés dans le cadre de l’opération Sentinelle, le service militaire se présente comme un remède miracle. Disparu des radars il y a dix ans car jugé poussiéreux et anachronique, il redevient un thème important du débat politique et probablement de la future campagne présidentielle, bien qu’il ait depuis la Révolution française clivé la société.

L’appel du soldat

Sous l’Ancien Régime, les armées sont composées de professionnels. La Révolution française, dans le domaine militaire comme dans les autres, va opérer une profonde rupture. Face à l’invasion étrangère, alors que le sang du roi vient tout juste de couler sur l’échafaud, la Convention nationale déclare, le 24 février 1793, la levée en masse. Le recrutement de 300 000 hommes est décidé afin de se porter aux frontières menacées. Le citoyen devient dès lors le premier rempart du pays. Toutefois, c’est sous le Directoire que voit le jour la première loi de conscription : la loi Jourdain-Delbrel, votée le 5 septembre 1798. Son article 1 proclame que « Tout Français est soldat et se doit à la défense de la patrie ». C’est l’acte de naissance du service militaire sur lequel s’appuiera jusqu’en 1815 Napoléon Bonaparte pour asseoir la puissance militaire française et sa domination sur l’Europe. Le système fonctionne cependant encore sur le tirage au sort et les plus aisés peuvent se faire remplacer moyennant paiement. Tout le monde n’est donc pas appelé à servir.


Fragment de la bataille de Champigny – Le fond de la giberne

 

Sous la Restauration, l’armée, toujours bonapartiste, est considérée avec méfiance et Louis XVIII supprime la loi Jourdain-Delbrel. C’est la IIIe République qui mettra en place le service militaire moderne, tel que beaucoup de Français l’ont connu au XXe siècle. Après la débâcle de 1870 s’ensuit la Commune de Paris, douloureuse guerre civile qui marque profondément le pays et son élite bourgeoise assoiffée d’ordre. La nouvelle République, alors divisée et dominée par les monarchistes au Parlement, s’unit autour des grandes lois militaires. Même les plus antimilitaristes sont maintenant convaincus de l’utilité du service militaire pour préparer la revanche mais surtout pour ressouder le pays autour de ses soldats. Ainsi, le duc d’Audiffret-Pasquier déclare à l’Assemblée sous les applaudissements unanimes : « Et, quand, à côté de cela, nous voyons le spectacle que nous donne notre armée. Quand nous nous souvenons que c’est elle qui nous a sauvés en 1848, que c’est elle qui nous a sauvés en 1871. Nous nous demandons si ce n’est pas là l’école où il faut envoyer ceux qui paraissent l’avoir oublié, apprendre comment on sert […] son pays. Que tous nos enfants y aillent […] et que le service obligatoire soit la grande école des générations futures ! »

Un outil de contrôle social

Au-delà de la préparation d’une future guerre contre l’Allemagne, l’armée est un outil au service du nouveau régime qui sert à étouffer au cœur de la nation toute étincelle révolutionnaire. Le sabre contre l’anarchie. Selon le nouveau pouvoir, c’est donc à partir de l’armée que naîtra une nation ressoudée après les divisions de la Commune, nation prête à affronter les menaces extérieures. Comme aujourd’hui, d’anciens pacifistes semblent alors convaincus des bienfaits de l’armée. On y voit Jules Ferry, pilier de la nouvelle République, écrire : « Vous rappelez-vous ces vagues aspirations vers le désarmement général, le détachement manifeste de tout esprit militaire, cette tendance à la création d’une sorte de garde nationale universelle qui caractérisaient la démocratie d’alors ? Ces idées-là eurent des partisans ; plusieurs d’entre nous les ont professées, y ont incliné, s’y sont laissé prendre. Mais, je vous le demande, en est-il un seul aujourd’hui qui n’ait été converti par les événements ? Ce pays a vu la guerre de 1870 ; il a tourné le dos pour jamais à ces utopies périlleuses et décevantes. » Mais c’est quelques années plus tard, en 1905, qu’est votée la loi qui met en place le service militaire comme la France le connaîtra jusqu’en 1997, date de sa suspension par Jacques Chirac.


Charles Péguy en uniforme, à droite

 

Cette nouvelle loi de 1905 instaure un service de deux ans et supprime le système de tirage au sort, tout en interdisant, dans un souci égalitaire, toute exemption autre que médicale. En plus d’être un outil au service de la revanche face à la ligne bleue horizon qui occupe l’imaginaire de tous les jeunes Français, le service militaire devient donc un moyen de pacification et d’adhésion envers une République encore fragile. L’école et les casernes, dans lesquelles on enseigne les valeurs militaires, servent ainsi à former des générations de républicains prêts à mourir pour la France. Verdun sera la preuve de l’incroyable efficacité de cette éducation patriotique au service de la patrie. En 1913, alors que l’ombre de la guerre plane déjà, on décide de prolonger le service à trois ans, ce qui amène des débats fratricides dans lesquels s’affronteront Péguy et Jaurès. Quelques années plus tard, Bernanos, dans La France contre les robots, rejette lui radicalement cette institution qu’il considère comme une « idée totalitaire ».

Aujourd’hui, ce n’est pas la Défense nationale qui motive le rétablissement du service militaire. Il est plutôt perçu comme un substitut à l’éducation, comme un moyen de combler les défaillances de notre société. Mais cette volonté risque de se fracasser sur l’implacable réalité budgétaire. Rétablir le service militaire impliquerait en effet, selon les experts, un coût de 5 ou 6 milliards d’euros pour incorporer les 800 000 jeunes hommes et femmes d’une classe d’âge. Or, le budget de l’armée ne sera pas capable de prendre en charge de telles dépenses quand les soldats de métier combattent parfois avec des équipements de l’âge de leurs pères. L’autre problème insoluble est que l’armée a, depuis vingt ans, vendu un bon nombre des casernes aptes à accueillir les appelés. Il est donc bien improbable que le nouveau président, élu en mai prochain, malgré les intentions et les effets d’annonce martiaux actuels, puisse concrètement rétablir le service national. Et même l’idée défendue par Manuel Valls lors du dernier débat à la primaire de gauche d’un service civique obligatoire semble difficilement applicable en raison de la frilosité de beaucoup d’associations caritatives.

Il est donc plus réaliste d’envisager une augmentation des moyens destinés aux services militaires adaptés prévus pour les DOM-TOM et maintenant mis en place en métropole, ainsi que ses Epide (Établissements publics d’insertion de la défense) créés pour les jeunes décrocheurs scolaires souhaitant intégrer un cadre militaire dans une perspective de réinsertion professionnelle et sociale. Leurs résultats positifs, unanimement reconnus, prêchent en ce sens. L’autre mesure, élaborée par l’actuel gouvernement, est la création d’une Garde nationale. Il ne s’agit pas en réalité d’une nouvelle institution mais juste d’un renforcement de la réserve opérationnelle destinée à soutenir les armées dans leurs nombreuses missions tant en France que dans le cadre d’opérations extérieures. Le plus probable est que le futur gouvernement accentuera ses efforts pour développer cette réserve. Au risque d’en décevoir certains, les jeunes n’iront donc pas rejoindre en masse le chemin des champs de tir après un réveil au clairon. L’expression « c’est la quille ! » est donc bien appelée à disparaître.

 

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SOURCE : Philitt.fr 

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Le Grand Mensonge des Démocrates Américains

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On ne peut pas blâmer les Démocrates américains de tenter, par tous les moyens, de masquer la portée de leur échec en l’attribuant à toutes sortes de motifs, même les plus fantaisistes. La pilule est certes amère. Toutefois, la part la plus intéressante de cette hystérie collective est le phénomène d’auto-persuasion qui en est le moteur et que la plupart des grands médias du pays alimentent.

 

 

L’argument numéro un des perdants est la faillite du système électoral et, en particulier, le fait que la candidate démocrate, Hillary Clinton, a remporté le scrutin populaire. C’est oublier que la situation, même si elle n’est pas commune, s’est produite à quatre reprises au cours de l’Histoire des Etats-Unis, et qu’elle ne constitue pas de difficulté particulière aux termes de la Constitution. De plus, le 115ème congrès, sorti des urnes le 8 novembre 2016 et en fonction depuis le 3 janvier 2017, a vu 52% des électeurs voter pour les Républicains au Sénat et 55% à la Chambre des représentants. Il n’y a donc aucune anomalie dans les élections de 2016 de ce point de vue.

Le second argument est celui du piratage informatique à grande échelle des élections, sur ordre du président russe Vladimir Poutine, afin de faciliter l’élection de Donald J. Trump. Là encore, l’idée ne tient pas debout. Aucune trace de défaillance dans le nombre limité de votes électroniques aux élections n’a été décelée. Les services du renseignement américain, en dépit de leur conviction affichée selon lesquelles il existe un indice « haut » de confiance dans le fait qu’il y a eu piratage, ne sont pas tenus de produire le moindre élément de preuve au public, puisque de telles informations sont par essence classées « secret défense ». Il faut donc les croire sur parole.

Poussés par ceux qui demeurent sceptiques sur la manière dont on s’y prend pour influencer le résultat d’une élection par des moyens électroniques, des experts affirment, par dizaines, que le régime russe a répandu de « fausses informations » à grande échelle afin de porter atteinte à l’image de la candidate Hillary Clinton. Les mêmes sont incapables d’expliquer concrètement comment l’on s’y prend et pourquoi il faut des « hackers » pour influencer les esprits dans leur choix lors d’un vote.

 

Une mauvaise candidate

Hillary Clinton n’a eu besoin ni de Vladimir Poutine, ni de Julien Assange et encore moins de « pirates » pour perdre les élections de 2016. Ce ne sont pas de prétendues « fausses » informations qui ont heurté sa réputation déjà bien entamée auprès de nombreux électeurs américains, par exemple, dans l’affaire des emails, mais au contraire, son refus obstiné de prendre cette affaire au sérieux et de répondre aux interrogations. On ne voit pas, non plus, quelles « fausses » informations ont poussé l’électorat noir américain à se sous-mobiliser lors du vote du 8 novembre, ou les femmes et les plus jeunes à bouder sa candidature, après la défaite de Bernie Sanders lors des primaires démocrates.

Hillary Clinton, dont l’ambition n’est pas éteinte par la défaite, a affiché un visage froid, autoritaire et cassant, durant sa campagne. Elle n’a pas su développer un programme à la fois lisible et crédible, qui aurait pu emporter un vote, à la fois populaire et du collège électoral, si tranché qu’il n’y aurait eu aucune contestation. Comment, en effet, se revendiquer de l’héritage de Barack Obama, lorsque cet héritage peine à brandir autre chose que l’Obamacare, dont même les démocrates savent qu’il n’est pas financé au-delà de 2017 et coûte, en réalité, une fortune au regard des bénéfices qu’il apporte ?


Photo: Sur les 3145 kilomètres de frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, un tiers est déjà protégé par un mur, la poursuite de sa construction étant gelée depuis 2010, en particulier pour des raisons environnementales.

 

Mensonges et déni

Car au-delà de cette loi sur la santé qui n’est en rien un système généreux et égalitaire tel qu’on le pense du côté des Européens, c’est le vide. Même si le Secrétaire d’Etat John Kerry blâme ces derniers jours le gouvernement anglais, prétendant qu’il est à l’origine de l’incapacité d’Obama à agir plus concrètement et durablement au Moyen-Orient contre l’état islamique, la mémoire de tous est par chance encore assez fraîche pour se souvenir que les huit années de ce président ont été celles d’une grande hypocrisie diplomatique et militaire. Mais le déni, dans ce domaine comme dans bien d’autres, est plus puissant que la mémoire.

Les âmes sensibles sont outrées par l’idée de construire un mur à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. On a beau leur montrer les mille kilomètres de ce mur déjà construit, y compris sous le premier mandat d’Obama, cela n’a guère d’effet et n’entraîne aucune interrogation sur les raisons pour lesquelles le bon président n’en n’a pas retiré une seule pierre.

Un autre exemple est celui de la crise financière de 2008 et du retour au « plein emploi » huit ans plus tard : quel président n’aurait point réussi ce « prodige » en creusant le déficit de son pays, comme Barack Obama l’a fait, de près de 5000 milliards de dollars ?

La période 2008-2016 n’a pas non plus été celle de législations majeures en matière d’armes à feu, d’incarcérations, de recul de la peine de mort, de maîtrise des frais de scolarité ou de gestion des prêts étudiants parvenus à des hauteurs astronomiques.

Quel est donc ce succès dont les Démocrates se revendiquent au juste? Est-ce celui des villes défigurées sous les coups de boutoir du géant Amazon, à la fois propriétaire du puissant Washington Post et importateur massif de toutes les chinoiseries possibles qui inondent un marché américain ou l'on ne sait plus fabriquer une chaussette? Est-celui de Saint Zuckerberg, le jeune patron de Facebook, "le" média des "millénaires" qui ne savent plus à quoi ressemble un livre et qui entre désormais en politique avec de hautes ambitions? Est-ce celui du mariage gay et de la dépénalisation du cannabis, hautes priorités s'il en est dans un monde où tout le monde se fout des 250 000 morts du Sud Soudan, bien moins "sexy" que ceux de Syrie?

Quel héritage Obama ?

Alors, que reste t-il de cet héritage Obama, au juste ? Une posture, bien évidemment. Après George W. Bush et le mensonge irakien, n’importe quel président aurait été auréolé de gloire. On attendait d’Obama, toutefois, un peu plus qu’un physique avenant, un talent rhétorique et l’humour dont il a tant usé. Car c’est à ce que laisse un président que l’on mesure son impact, pas à sa performance sur la scène du pouvoir. L’Amérique n’est pas plus sympathique dans le monde qu’elle ne l’était avant son arrivée, ni plus sûre, ni plus égalitaire. Mais elle a la chance d’être un pays pragmatique : en ramenant au pouvoir, contre toute attente, les Républicains, elle a flanqué une gifle magistrale aux « progressistes » qui se croyaient tout permis. Elle ne l’a pas fait par folie ou par irresponsabilité mais parce qu’elle a confiance dans la capacité de ses institutions à « encaisser » ce type de choix démocratique, si perturbant soit-il pour des milieux qui s’estiment mieux éduqués et éclairés que les autres. On appelle cela l’alternance, une banalité que les Démocrates veulent aujourd’hui faire passer pour un scandale et une catastrophe.

Cherchez l’erreur.

 

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SOURCE : Stéphane Trano pour Marianne 

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Procès de Georges Bensoussan : "Leur objectif est d'interdire de penser"

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La comparution le 25 janvier devant la 17ème chambre correctionnelle de l’historien Georges Bensoussan, pour « provocation à la haine raciale », à la suite de la dénonciation du Collectif contre l’islamophobie en France et de plusieurs associations antiracistes, s’est transformée en procès idéologique. Compte-rendu d’audience.

 

De quoi le procès fait à Georges Bensoussan est-il le nom ? L’expression, usée jusqu’à la corde, est pourtant la seule qui convienne. L’audience du 25 janvier 2017 devant la 17ème chambre correctionnelle a duré douze heures et ce fut long comme un jour injuste. Un jour dont l’on retiendra la date, tristement, à l’heure future où nos enfants tenteront de comprendre quels faits, obscurs ou spectaculaires, quelles compromissions, silencieuses ou tonitruantes, nous auront conduits à cette catastrophe : l’agonie de la lucidité et la criminalisation du courage dans notre pays.

L’historien, responsable éditorial du mémorial de la Shoah, auteur de nombreux ouvrages, était, rappelons-le, poursuivi par le Parquet « pour provocation à la haine raciale » sur dénonciation du Collectif contre l’islamophobie en France. En cause : des propos tenus lors de l’émission Répliques, sur France Culture, où il évoquait l’antisémitisme dans les familles arabes en reprenant un constat du sociologue français d’origine algérienne Smain Laacher. Ce dernier s’était prétendu diffamé puis avait retiré sa plainte. Difficile en effet pour Laacher de nier avoir dit devant les caméras : « Cet antisémitisme, il est déjà déposé dans l’espace domestique. Il est quasi naturellement déposé sur la langue, déposé dans la langue... Des parents à leurs enfants, quand ils veulent les réprimander, il suffit de les traiter de juifs. Bon. Mais ça, toutes les familles arabes le savent. C’est une hypocrisie monumentale de ne pas voir que cet antisémitisme, il est d’abord domestique ». Georges Bensoussan, en s'y référant, avait usé métaphoriquement de l’expression « l’antisémitisme, on le tète avec le lait de sa mère ».

Ce sein, qu’on ne saurait voir, a déclenché toutes les fureurs. Apparemment, les choses sont bien différentes quand l’antisémitisme arabe est dénoncé par un sociologue issu de cette culture et quand la citation est reprise par un historien d’origine juive comme l’a souligné douloureusement Georges Bensoussan dans une de ses interventions. Dans le premier cas, on refuse d’écouter Laacher, puis on le somme officieusement de revenir sur ses propos. Dans le second cas, Bensoussan est trainé devant les tribunaux par la justice de son pays puisque le Parquet avait choisi d’attaquer. Ce « deux poids, deux mesures » planait dans l’air raréfié de la 17èmechambre du Palais de Justice de Paris.

Un étrange témoin

Le CCIF, représenté par Lila Charef, étroitement voilée, était appuyé par une pléiade d’associations antiracistes, Licra, Mrap, SOS racisme, la Ligue des droits de l'Homme. La Licra avait trouvé un témoin à charge surprenant en la personne de Mohamed Sifaoui. Ce dernier, qui a si souvent écrit dans nos colonnes, se retrouvait ainsi sur le même banc que le CCIF dont on pensait que le journaliste, menacé de mort par les islamistes, ne partageait pas vraiment les options. Sifaoui écrivait en effet du CCIF, le 6 juillet 2015, que cette « prétendue association antiraciste avait beaucoup de mal à condamner l’antisémitisme ». De son côté, en juin 2015, le CCIF traitait Sifaoui de « chantre de la haine ». Comment ces adversaires irréductibles se sont-ils ligués contre Georges Bensoussan ? Sans doute un de ces retournements de l’histoire qui n’augurent rien de bon pour le respect des faits. « Le déni de réalité est un cancer », écrit Elisabeth Badinter dans sa préface à l’ouvrage collectif, La France soumise coordonné par l’historien (Albin Michel)

Nous y voilà, effectivement. Georges Bensoussan, sommé de s’expliquer sur ses propos mais aussi sur ses travaux, rappelle qu’il travaille depuis un quart de siècle sur les mécanismes conduisant à la haine de l’autre. Il s’est penché, notamment, sur la condition juive en pays d’Islam. Il cite l’expression, si proche de la sienne à Répliques, utilisée en 1965 dans la revue les Temps modernes par l’auteur marocain Saïd Ghallab. Sous le titre Les juifs vont en enfer, Ghallab écrivait alors : « ... la pire insulte qu’un Marocain puisse faire à un autre, c’est de le traiter de juif, c’est avec ce lait haineux que nous avons grandi... ». Plus de cinquante ans après, en France, toutes les enquêtes réalisées sur l’antisémitisme par le think tank Fondapol, comme les témoignages multiples recueillis par les enseignants depuis la parution des Territoires perdus de la République attestent une emprise grandissante des préjugés chez les jeunes de culture musulmane. Si l’on y ajoute les fameux 28% de partisans de la suprématie de la charia sur les lois françaises dénombrés dans la dernière enquête de l’Institut Montaigne (enquête dirigée par Hakim el Karoui), il y a de quoi s’inquiéter.

Sur la toile de fond des attentats, des crimes de Mohamed Merah à ceux de l’Hypercacher (sans oublier l’enlèvement et l’assassinat du jeune Ilan Halimi, en 2004, dont le caractère antisémite avait été honteusement nié) les juifs ont peur. Les élèves juifs fuient les écoles et les lycées publics des quartiers dits « sensibles ». Bensoussan, qui se définit lui-même comme « un enfant de l’école publique », souligne qu’ils n’en sont pas partis en masse par choix mais pour d’impérieuses raisons de sécurité. Les écoles juives dans lesquelles certains ont été inscrits ne sont-elles pas gardées par l’armée ? Ce qui arrache ce cri à l’historien : « Est-ce moi qui dois me trouver devant ce tribunal aujourd’hui ? N’est-ce pas l’antisémitisme qui nous a conduits à la situation actuelle qui devrait être jugé ? »

"Une dérive judiciaire"

Cette inversion du réel s’inscrit au cœur du témoignage d’Alain Finkielkraut. « Les associations antiracistes ne luttent plus contre le racisme, s’insurge l’académicien, leur objectif est d’interdire de penser, il s’agit de soustraire la réalité à l’investigation et les musulmans à la critique. Je suis étonné d’être ici : car la question n’est pas de savoir si Georges Bensoussan s’est rendu coupable : la question, c’est de savoir s’il dit vrai ! » Et Finkielkraut poursuit :

« Si le tribunal cède à cette intimidation, ce sera à la fois une catastrophe intellectuelle et une catastrophe morale... Si on refuse de voir la réalité et si on incrimine ceux qui s’efforcent de la penser, on n’a plus aucune chance d’échapper à la division et à la montée de la haine ! »

En dénonçant « une dérive judiciaire », le philosophe cite des témoignages sur les « insultes antisémites et antifrançaises ». Du coup, l’avocat du Collectif contre l’islamophobie en France le menace de « réserver » ses propos, allusion à une procédure judiciaire dont il pourrait relever. « Ah, je suis donc moi aussi sous surveillance ! » s’exclame Finkielkraut.

Cet échange donne le ton d’un procès qui, d’heure en heure, se fait plus tendu. Ainsi se vérifie la phrase de Jean-Paul Sartre : « L’antisémitisme n’est pas une pensée, c’est une passion. »

La déposition de Mohamed Sifaoui, extrêmement violente à l’encontre de Georges Bensoussan, alourdit encore l’atmosphère. D’un côté, le journaliste si engagé contre l’islamisme reconnaît qu’au cours de ses reportages dans le monde arabe, il a « rencontré partout de l’antisémitisme, personne ne nie non plus qu’il y a un antisémitisme endémique dans la communauté musulmane en France ». Où est donc la différence de propos qui l’amène à fustiger Bensoussan ? C’est que, de l’autre côté, Sifaoui s’indigne : « Bensoussan détricote tous les moments positifs entre juifs et arabes. N’est-il pas en train d’écrire une histoire qui peut servir à des milieux douteux ? C’est un destructeur des ponts entre juifs et arabes. » En s’attardant sur la fameuse métaphore de « l’antisémitisme tété au sein », il évoque même « un biberon empli d’un lait fabriqué en Israël ! ». Une heure plus tard, l’avocat du CCIF lancera à l’historien : « Les juifs ne tuent pas d’Arabes ? Et en Palestine ? » L’inversion des faits ne suffit donc pas ! Sifaoui comme le CCIF, adversaires d’hier mais peut-être pas de demain, se coalisent pour convoquer l’ombre du conflit israélo-palestinien sous les plafonds bleu-or de la 17ème chambre.

"On ne peut pas parler de racisme quand on évoque la transmission culturelle"

Le témoignage de la philosophe Elisabeth de Fontenay, toujours vigilante et précise, allège un peu l’ambiance. Elle aussi « accepte mal qu’un chercheur qui fait état d’études de terrain soit poursuivi ». Et souligne à l’intention des accusateurs de l’historien : « On ne peut pas parler de racisme quand on évoque la transmission culturelle ».

En face, la sociologue Nacira Guénif, témoin cité par l’accusation, se fendra d’une longue analyse, véritable morceau d’anthologie, qui consiste à prendre le contre-pied de la réalité. A la présidente du tribunal, Fabienne Siredey-Garnier, qui lui demande de réagir aux propos de Smain Laacher, elle répond par une esquive et entreprend de décortiquer l’insulte arabe « espèce de juif ! » Des « explications » fournies par l’éminente universitaire, il ressort qu’en disant l’insulte « on ne pense pas ce qu’on veut dire », qu’il s’agit « d’une expression figée passée dans le langage courant ». Bref une insulte antisémite en arabe n’est pas... antisémite.

Suivra un dernier et obscur témoignage de Michèle Sibony, enseignante retraitée, par ailleurs animatrice d’une « Union juive française pour la paix » qui, en se drapant dans la cape de la bonne moralité identitaire, s’enlise dans la phraséologie la plus ossifiée pour flatter l’islamisme. Devant le tribunal, elle va manier l’injure en accusant Bensoussan de « discours digne d’un Drumont » ( Edouard Drumont, antidreyfusard, était un célèbre idéologue antisémite du début du XXème siècle). Nous sommes toujours à des années-nuits du réel et de la clarté intellectuelle.

"Pour la première fois de ma vie j’ai eu la tentation de l’exil"

Il y aura heureusement l’intervention d’Yves Ternon, historien qui salue « Georges Bensoussan, le lanceur d’alerte », puis la lettre de soutien adressée d’Algérie par le grand écrivain Boualem Sansal, et lue par la présidente :

« Les propos reprochés ne sont en rien un acte d’islamophobie... (...) J’ai moi-même dénoncé cette culture de la haine inculquée dans les familles arabes à leurs enfants, haine contre le juif, le chrétien, l’homosexuel... »

Boualem Sansal ose ensuite écrire : « Dire que l’antisémitisme relève de la culture, c’est simplement répéter ce qui est écrit dans le Coran et enseigné à la mosquée ».

Suivront les plaidoiries des associations, aussi creuses que leurs accusations, puis celle, incisive et brillante, de Me Michel Laval, avocat de Georges Bensoussan. Le réquisitoire de la Procureure sera à l’image du procès, intégralement idéologique.

« Ce soir, Madame la présidente, concluera Georges Bensoussan, dans le silence de la nuit qui s’est abattue sur le Palais de justice, pour la première fois de ma vie j’ai eu la tentation de l’exil. » C’était un jour dans la vie de la justice française. Jugement le 7 mars.

 

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SOURCE : Martine Gozlan pour Marianne

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17/01/2017

De Sartre à Taubira : cette gauche qui combat la nation

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Cet article du Figaro a un an, déjà... je ne le découvre que maintenant... 

 

 

 

FIGAROVOX/TRIBUNE - Pour Paul-François Paoli, le débat sur la déchéance de la nationalité est révélateur des divisions historiques de la gauche française sur la notion de patrie.

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Paul-François Paoli est chroniqueur littéraire au Figaro et essayiste. Son essai "Quand la gauche agonise" est paru le 25 janvier 2016 aux Editions du Rocher.

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Le débat sur la déchéance de la nationalité est révélateur de la vision, ou plutôt de l'absence de vision, que la gauche et une partie des élites de ce pays se font de la nationalité réduite à une collection de droits et de prétendus devoirs. On peut évidemment arguer que cette mesure de déchéance n'aura aucune portée puisque, par définition, les radicaux de l'islam se fichent comme d'une guigne de la nationalité. L'islamisme, comme le communisme hier, est un messianisme révolutionnaire qui nie les distinctions entre les peuples et il n'est pas anodin de constater qu'une certaine gauche fait preuve d'indulgence, voire de complaisance, à l'endroit de l'islam politique. N'a-t-on pas vu, en juillet 2014, lors des fameuses émeutes de Barbès à Paris, les militants du NPA de Besancenot mêler leurs drapeaux à ceux du Hamas? A gauche le refus de se désolidariser avec les ennemis de leur propre pays est une vieille histoire. Nul ne met plus en question, aujourd'hui, l'allégeance du PCF à l'égard de l'URSS stalinienne. Stéphane Courtois a récemment rappelé que Maurice Thorez fut déchu de sa nationalité par la République en février 1940. « Le Parti communiste n'est pas à gauche mais à l'Est » dira un jour Léon Blum. Jacques Duclos, dirigeant historique du PCF, a été sa vie durant, ainsi que l'a montré Frédéric Charpier dans L'agent Jacques Duclos (Seuil), un serviteur zélé de l'Urss sans pour autant passer pour un traître au regard des Mélenchon de l'époque. C'est que, pour une certaine gauche, trahir la France comme réalité c'est encore la servir comme idée. Le sophisme fonctionne ainsi et il est imparable: la France est le pays de la Révolution et de la fameuse « fraternité » entre les peuples, si elle n'est plus digne de ses valeurs, il faut la combattre au nom des idéaux qu'elle a elle-même prônés. Comme l'expliquera Sartre, les valeurs républicaines d'égalité et de fraternité exigent le socialisme pour ne pas rester lettre morte, incantation fumeuse.

C'est ainsi que les trotskistes ont, en 1940, prôné le pacifisme et refusé de combattre les « prolétaires allemands » de la Wehrmacht. C'est ainsi que les mêmes trotskistes ont porté des valises pour le FLN, de même qu'ils s'étaient solidarisés avec le Vietminh. C'est ainsi que le lugubre Georges Boudarel, communiste rallié au Vietminh, finit par persécuter ses camarades français dans les camps du Vietminh après la chute de Dien Bien Phu. Ces gens ne se sont jamais perçus comme les collaborationnistes mais comme des internationalistes conséquents. Marx n'a t'il pas écrit que les prolétaires n'avaient pas de patrie? N'a-t-il pas mis en valeur le processus historique qui allait rendre obsolète les Etats et les frontières? Aujourd'hui encore, pour beaucoup d'hommes et de femmes de gauche, depuis Taubira à Duflot, en passant par Lang ou Mélenchon, la France est moins un pays qu'une idée. Langue, sensibilité aux régions et aux terroirs, sentiment d'appartenance, tout cela n'existe pas. Le jeune Pol Pot, qui admirait la terreur de 1793 était plus français aux yeux d'un Badiou, qui tressera des lauriers au Kampuchéa démocratique en 1979, que le paysan du Berry, car le paysan du Berry n'est pas une figure de l'Universel, il incarne l'horrible puanteur du particulier.

Plus généralement, et cela ne concerne pas que la gauche, les élites françaises sont frappées d'une étrange névrose: la prétention de s'identifier à l'universel alors que cette notion d'universel doit aujourd'hui se conjuguer au pluriel. Qui ne voit que l'islam est un universalisme rival du laïcisme républicain ? Nous ne vaincrons pas l'islamisme avec des discours sur les valeurs de la République auxquels les jeunes radicaux sont imperméables puisqu'ils ont justement fait le choix d'autres valeurs, plus consistantes à leurs yeux: celles de la fraternité islamique. Nous devons affirmer que la France est un pays avant d'être une idée et que ce pays a une histoire qui ne doit rien à l'islam. Qu'il est porteur d'une langue et d'une culture, dont le rayonnement a été universel et l'est encore, dans une certaine mesure, grâce à la francophonie. Nous devons avoir le courage d'expliquer que la France n'est pas une formalité administrative et demander aux détenteurs extra-européens de la double nationalité de choisir entre leur nationalité affective et une nationalité fictive. Pourquoi Marocains et Algériens qui hissent leurs drapeaux à tout propos ne se contenteraient ils pas de la nationalité qui leur tient à cœur? Pourquoi la droite n'accepte-t-elle pas, comme le suggère Hervé Mariton, de mettre en cause un droit du sol qui est l'immaculée conception de ceux qui réfutent toute tradition? Qui ne sent que ce que l'on vous donne automatiquement, sans que vous l'ayez demandé, n'a guère de valeur, comme la rappelé un jour le psychanalyste Daniel Sibony ? Redonner une valeur symbolique à la nationalité suppose de ne pas la partager avec qui la dénigre ou la tient pour rien. En réalité un formidable changement de perception de l'histoire nationale est intervenu dans les années 70, après la découverte des crimes de Vichy.

Les Français étaient si fiers autrefois de « descendre des Gaulois » — même si c'était une filiation mythique — qu'ils ont eu la prétention extravagante d'expliquer aux Africains colonisés qu'ils en descendaient aussi! Aujourd'hui c'est l'inverse, le mot de Gaulois est devenu suspect pour ceux qui se pâment d'admiration pour tous les peuples premiers du monde, depuis les Toubous aux Inuit en passant par les Aborigènes d'Australie! Cette dévaluation est emblématique de la haine que certains portent aux origines et à l'histoire de leur pays. Une dénégation dont témoigne le discours fallacieux sur la France « pays d'immigration », laquelle a débuté, au milieu du XIXème siècle, dans un pays qui n'a cessé d'être occupé depuis le néolithique. L'historien Jean-Louis Brunaux rappelle que la France gauloise, à l'époque de Jules César, était peuplée par près de 9 millions d'habitants, voire plus! Mais les élites de ce pays ont dénié aux Français le droit d'avoir des origines, comme tous les peuples du monde, car qui dit origine dit identité, notion oiseuse ou dangereuse aux yeux des apologues de l'Universel. La France, pays de Vercingétorix et de Gambetta, mais aussi de Robespierre et de Pétain, n'était plus assez bien pour elles.

De Gaulle lui-même, dont le nom est douteux, a eu les élites intellectuelles de ce pays sur le dos. Un homme qui, en plein mai 68, alors que les niais du quartier latin braillent « CRS SS », s'adresse aux Roumains à Bucarest en ces termes: « Roumains et Français, nous voulons être nous-mêmes... c'est à dire l'Etat national et non pas l'Etat cosmopolite » se devait d'être mis à pied. Dites-moi par qui vous voulez être reconnu, je vous dirais qui vous êtes. Cette vérité est celle de tous les snobismes. L'élite intellectuelle française a préféré les Etats-Unis de Kennedy et la Chine de Mao à la France gaullienne, trop petite pour le rayonnement de sa vanité. Enfin l'Europe est arrivée à point nommé comme heureux moyen d'en finir avec l'histoire de France. La caste issue de Mai 68 fait aujourd'hui grise mine car le peuple qu'elle prétendait alphabétiser mais aussi les intellectuels, ont tendance à la ringardiser. Elle sait que son temps est compté, d'où la haine qu'exprime à l'égard de Michel Onfray, traître qui revendique ses origines plébéiennes, Gaulois perdu parmi une intelligentsia hostile. Certains Français, c'est un fait, n'ont jamais aimé leur pays mais les valeurs des droits de l'homme. Quand la France leur paraît faible ou défaillante, ils se découvrent citoyens du monde. Les bobolandais font parfois la moue quand on leur rappelle qu'ils sont Français, eux qui « se croient quelque chose dans le monde » (Saint Simon) parce qu'ils racontent leur vie sur Facebook. La noblesse propre à un certain patriotisme est l'inverse de cet état d'esprit: on n'oublie pas son pays quand il est blessé, on ne l'accable pas quand il est affaibli. Péguy, Camus, Simone Weil sont là pour nous le rappeler: les vrais esprits forts sont toujours du côté des plus faibles.

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SOURCE : Le Figaro

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11/01/2017

La principale menace n'est pas le terrorisme mais la sécession culturelle de l'islam de France

=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=

 

FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN - Deux ans après le massacre de Charlie Hebdo, le magazine Causeur a enquêté sur les «Molenbeek» français. Pour Elisabeth Lévy, « Les Français, y compris musulmans, veulent que l'islam s'adapte à la République, pas le contraire ».

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Le dernier numéro de Causeur s'intitule, «Au coin de la rue la charia». En photo, une femme entièrement voilée. Pourquoi cette couverture choc? Ne cédez-vous pas à une forme de sensationnalisme ?

Elisabeth Lévy : Ce serait sensationnel si ce n'était pas réel! Or, cette photo n'est pas un montage, elle a été prise à Paris il y a quelques années et depuis, ce genre de présence fantomatique est devenu encore plus courant dans certains quartiers, lisez Rue Jean-Pierre Timbaud, de Géraldine Smith. Et si on peut voir cela dans le centre de la capitale, imaginez ce qui se passe dans nombre de nos banlieues, la loi des Frères devient la règle. Comme le montre notre reportage à Sevran, effectué dans la foulée de celui de France 2, les femmes sont amenées à se cacher toujours plus, et, finalement, à limiter leur présence dans l'espace public au strict minimum, soit par conviction, soit pour avoir la paix. Nous n'avons pas choisi une image violente, qui suscite la peur, mais une image devenue banale. Et ce qui fait peur, c'est qu'elle soit banale.

Peut-être, mais les femmes voilées ne menacent pas la sécurité publique...

Elisabeth Lévy : Oui, mais vous vous trompez lourdement en postulant que nous avons d'abord un problème de sécurité. S'il nous fallait seulement neutraliser quelques milliers de djihadistes violents, on y arriverait. Mais il n'y a pas un mur étanche entre l'islamisme pacifique et l'islamisme violent. Et aussi douloureuses soient les pertes que nous inflige le terrorisme islamiste, ce n'est pas lui qui menace à long terme la cohésion et l'existence même de notre pays, c'est la sécession culturelle dans laquelle est engagée une partie de l'islam de France et d'Europe. Le problème n'est pas seulement l'arbre mais la forêt dans laquelle il a grandi, cette contre-société islamiste qui s'est constituée au fil des ans, vit dans un entre-soi que brisent seulement les impératifs du travail et voue une hostilité croissante au mode de vie majoritaire. Pendant ce temps, le président nous complimente comme si nous étions des enfants, pour être restés bien gentils les uns avec les autres. Admettez que c'est un peu court.

Ce n'est pas une infime minorité mais une fraction notable des musulmans français qui n'habitent plus mentalement le même temps et le même espace que nous.

Après tout François Hollande a raison de se féliciter que la France soit restée unie...

Elisabeth Lévy : Eh bien pendant que François Hollande se félicite, que d'autres proclament que nous ne céderons pas et que d'autres encore font la chasse aux islamophobes, un nombre croissant de quartiers passent sous la férule d'une idéologie séparatiste érigeant une barrière entre purs et impurs, fidèles et kouffars, putes et soumises, des enfants juifs sont exfiltrés de l'école publique (pour leur sécurité, bien sûr), des collégiennes condamnées au jogging informe, des lycéens obligés d'observer le ramadan ou de faire semblant, des populations entières contraintes de se soumettre à la loi des Frères, au nom de la solidarité entre musulmans supposée prévaloir sur toute autre allégeance. Sans oublier les caricatures qu'on n'ose plus publier, les vérités qu'on n'ose plus dire, les libertés qu'on n'ose plus exercer. Or, ce que nous avons découvert, c'est que cette emprise s'exerce non seulement dans certains territoires mais aussi dans certains milieux comme le foot amateur, dans certaines entreprises: permettez-moi d'attirer votre attention sur l'enquête passionnante qu'Olivier Prévôt, auteur et critique cinéma de Causeur décédé le 25 décembre, consacre à la RATP. On y voit comment l'heureuse politique des grands frères, assaisonnée de lamento victimaire, a permis d'installer les salafistes dans la place. Et le jour même où notre numéro paraissait, on apprenait de Jean-Claude Lagarde que la fermeture de PSA à Aulnay avait été en partie due à la volonté d'échapper aux revendications islamistes.

N'exagérez-vous pas l'ampleur du problème ? Tout cela est très impressionniste…

Elisabeth Lévy : Les témoignages de professeurs enseignant dans les «territoires perdus de la République» sur l'antisémitisme, le sexisme et l'homophobie d'un grand nombre de leurs élèves, en 2002, n'étaient pas impressionnistes. Ceux que nous publions sur la RATP, les stades, l'exclusion des femmes non plus. Pas impressionnistes non plus, les travaux de Kepel ou ceux du chercheur Tarik Yildiz que nous interrogeons dans ce numéro. D'ailleurs, quand bien même ils le seraient, si autant d'impressions convergent, cela doit avoir un sens, non? Même la sociologie découvre la lune après avoir déployé toute son énergie à dénoncer le doigt, tout comme ces prétendus savants et autres idiots utiles de l'islam politique qui répétaient que le problème ne venait pas de l'antisémitisme mais de ceux qui le dénonçaient, pas du séparatisme musulman mais du racisme français, pas de l'islam mais de l'islamophobie. Le soir du 7 janvier 2015, après l'attentat de Charlie Hebdo, Edwy Plenel et Laurent Joffrin expliquaient que le problème de la France s'appelait Finkielkraut, Zemmour ou Houellebecq.

D'accord, mais les éditos de Plenel ou Joffrin ne sauraient constituer une anti-preuve…

Elisabeth Lévy : Si cela ne vous suffit pas, en deux ans on a publié plus de témoignages, d'enquêtes, de reportages, d'études, de sondages sur l'islam radical et ses diverses manifestations, que durant les treize années précédentes. Le tableau d'ensemble est de moins en moins conjectural et de plus en plus effrayant. Ce n'est pas une infime minorité mais une fraction notable (entre un quart et un tiers selon les critères retenus) des musulmans français qui n'habitent plus mentalement le même temps et le même espace que nous. Beaucoup d'autres musulmans sont les premiers surpris et l'effroi de certains responsables comme Tareq Oubrou, Kabtane et d'autres, qui ont pourtant constitué la première génération islamiste, n'est pas feint, devant le monstre qu'ils ont enfanté ou laissé prospérer - une jeunesse en colère née dans un pays qu'elle dit exécrer et qui divise le monde entre «eux» et «nous», le «eux» comprenant l'essentiel de ses compatriotes. Alors non, je ne crois pas que nous exagérions le problème.

Ainsi a-t-on recruté les barbus dans des structures locales associatives ou parapubliques, qui leur ont permis de quadriller les quartiers avec des animateurs acquis à la cause.

Comment en est-on arrivé là ?

Elisabeth Lévy : Difficile de résumer l'incroyable accumulation de bons sentiments dévoyés, de complaisances intéressées, de lâchetés inavouées, d'aveuglement volontaire et d'une énorme dose d'imbécillité à visée électoraliste, qui a permis à cet islam de s'implanter, souvent avec l'aide de l'argent public. Il faut remonter au tournant idéologique des années 1980. La droite ayant ouvert les vannes à l'immigration de masse, la gauche, se trouvant fort dépourvue quand la bise individualiste et libérale fut venue, recycla alors les immigrés en damnés de la terre avec l'antiracisme en guise de lutte des classes et l'exaltation des différences comme mantra. Ces excellentes intentions antiracistes ont finalement empêché les nouveaux arrivants de s'assimiler et même de s'intégrer. La mise en musique de ces sottises idéologiques a été réalisée par un clientélisme local parfaitement œcuménique sur le plan politique, qui assignait les descendants d'immigrés à leur culture d'origine puisque c'est cette assignation qui permettait d'obtenir leurs voix. Ainsi a-t-on recruté les barbus dans des structures locales associatives ou parapubliques, qui leur ont permis de quadriller les quartiers avec des animateurs acquis à la cause. Ensuite, la pression a fait le reste. Selon le vieil adage, les plus gênés s'en vont et une fois qu'on est entre musulmans ou presque, la conception la plus étroite c'est-à-dire celle qui permet le plus facilement au croyant d'enquiquiner ses contemporains s'impose à tous.

En somme, c'est arrivé sans que personne ne le veuille ?

Elisabeth Lévy : Je ne dirais pas tout-à-fait cela. Chez beaucoup, l'idéologie a agi comme un voile qui les empêchait de voir ce qui se passait: la jeunesse immigrée était victime des Dupond Lajoie et autres beaufs franchouillards, quand elle sombrait dans la délinquance c'était bien normal à cause du racisme si répandu. Mais d'autres n'ont pas l'excuse de l'inconscience ou de l'aveuglement. Il y a en France un parti de l'islam, que Finkielkraut appelle justement le parti de l'Autre, qui s'est prêté à toutes sortes d'accommodements avec «les Frères», représentants de la «religion des pauvres», comme disait Emmanuel Todd, non pas par cynisme électoral mais parce qu'il comprend, dans le fond, que seul l'islam pourrait effectivement le débarrasser de ce peuple qui vote de plus en plus mal et demeure, on se demande pourquoi, rétif aux séductions très relatives du multiculturalisme réel. Ramadan, les Frères musulmans de l'UOIF, et plus encore leurs alliés de l'islamo-gauche, comme Edwy Plenel ou Clémentine Autain et pas mal d'autres ont clairement encouragé la sécession que j'ai évoquée en lui fournissant des visages présentables, une panoplie idéologique de légitimation et des relais médiatiques. Et ce sont les mêmes qui ont seriné aux jeunes nés sur notre sol que nous étions coupables de tout et eux responsables de rien. On ne saura jamais à quel point ce discours victimaire a contribué à faire haïr la France par des Français.

Il y a tout juste deux ans, les attentats de Paris contre la rédaction de Charlie Hebdo puis l'Hypercacher ensanglantaient la France. Depuis rien n'a changé ?

Elisabeth Lévy : Si évidemment ! Maintenant non seulement tout le monde voit mais on a le droit de dire. Même dans Le Monde, qui a publié cette semaine une excellente enquête sur Stains où l'imam, très républicain, n'a pas vu que sa mosquée était un vivier de recrutement pour l'EI. Et même à France Télévision où on a pu voir au 20 heures de David Pujadas, le reportage sur Sevran dans lequel on voit un patron de bistrot lancer «Ici, c'est le bled!» (comprenez qu'il est normal qu'on n'y voie pas les femmes). Aujourd'hui, seule une minorité continue à nier le problème et à radoter sur les méchants islamophobes qui sont à l'origine de tout le mal. Même la lutte sacrée contre le populisme fait de moins en moins recette. Quoi qu'on pense du FN, il est difficile de prétendre qu'il est plus dangereux pour la République que l'islam radical.

Les propos de Vincent Peillon qui compare les musulmans aux juifs des années 30 laissent penser que l'influence politique des islamo-gauchistes n'a jamais été aussi grande…

Elisabeth Lévy : Ah bon, expliquez-moi en quoi. Ce qui prouverait que cette influence est grande, c'est que Vincent Peillon gagne la primaire - et l'élection présidentielle. On n'en est pas là et quelque chose me dit au contraire qu'il risque de payer fort son ânerie historique et politique. Reste une aberration que je ne m'explique pas. Sauf à croire que les électeurs de gauche vivent dans un monde enchanté protégé de tous les maux de l'époque, je ne comprends pas que les candidats à la primaire cherchent à flatter une fibre multiculti qui est plutôt chancelante, même chez les meilleurs croyants. Et s'il semble que Manuel Valls conserve un certain socle électoral, je suis convaincue que la fermeté qu'on lui prête face à cet islam y est pour beaucoup.

Sur le plan intellectuel, certaines digues ont sauté. En revanche, sur le plan politique, c'est toujours le règne de l'impuissance …

Elisabeth Lévy : Sur le plan intellectuel, il est urgent d'améliorer notre connaissance objective des faits et d'y réfléchir calmement, sans minimiser ni exagérer. L'enquête CNRS/CEVIPOF en chantier ainsi que d'autres travaux devraient nous y aider. Seulement, plus on sait qu'il faut agir, moins on sait comment agir. En effet, les enjeux sécuritaires sont infiniment moins complexes que les fractures culturelles et idéologiques. On peut traquer des criminels, couper leurs sources d'approvisionnement et de financement, les juger, les condamner ou les abattre. On peut combattre les discours de haine, en tout cas quand ils sont tenus publiquement, même si c'est plus compliqué et en grande partie vain. En revanche, on ne sait pas comment lutter contre les idées fausses qui s'emparent de certains esprits. Ou plutôt on sait que c'est une guerre de trente ans qu'il faudrait mener sans relâche sur tous les fronts où se fabrique l'esprit public: école, université, médias, justice. Tout en s'employant par ailleurs à réduire le plus possible des flux migratoires que plus personne n'est aujourd'hui en état d'accueillir, ni les issus-de ni les de-souche.

Surtout, ne laissons pas tomber ceux et surtout celles qui, dans les quartiers, refusent de céder.

Vous écrivez, "on ne saurait tout attendre des gouvernants ou de la loi". Mais les Français victimes de cette terreur lente, souvent les plus pauvres, attendent que l'Etat les protège...

Elisabeth Lévy : Il ne vous a pas échappé que nous entrons en campagne électorale? Par ailleurs, il paraît que nous vivons dans le monde merveilleux des réseaux sociaux et de la participation citoyenne. Alors, que la majorité silencieuse profite de ces quelques mois où on va la courtiser pour faire savoir à ceux qui briguent ses faveurs ce qu'elle veut - en l'occurrence rester un peuple, un peuple, divers, et même chatoyant, accueillant aux individus, mais qui n'entend pas accueillir un autre peuple, poursuivant un autre projet, et encore moins un contre-peuple poursuivant un contre-projet. Les Français, y compris musulmans, veulent que l'islam s'adapte à la République, pas le contraire.

Vous expliquez que la reconquête des territoires perdus ne se fera pas par la force. Mais le recours à l'autorité de l'Etat et du politique, y compris en prenant le risque de nouvelles émeutes, n'est-il pas le meilleur moyen d'éviter à terme la guerre civile que certains redoutent ?

Elisabeth Lévy : Quand la sécession prend des formes violentes, l'Etat doit répliquer par la force et, de mon point de vue, en faisant un tout petit peu moins de chichis - d'ailleurs c'est déjà le cas avec l'assouplissement des règles de tir pour les policiers. Je ne vois pas aujourd'hui de foyers d'émeutes tels que vous semblez les décrire, mais si des événements du type de 2005 devaient se reproduire, j'espère que la réaction serait rapide et ferme. Cependant, pour l'essentiel, la sécession qui met la République au défi est en apparence, sinon pacifique, du moins non-violente. C'est dans les esprits qu'il faut mener la reconquête des territoires perdus - ce qui veut dire à la dure, sans céder sur ce que nous sommes, pas par la force. Nous ne gagnerons pas cette guerre si la majorité silencieuse des musulmans ne choisit pas bruyamment la loi de la République contre celle des «Frères» et la majorité silencieuse le restera tant qu'elle aura plus peur du jugement des siens que besoin de l'approbation de ses concitoyens. Surtout, ne laissons pas tomber ceux et surtout celles qui, dans les quartiers, refusent de céder. Salman Rushdie dit que, si la fatwa contre lui était prononcée aujourd'hui, il serait beaucoup moins soutenu qu'à l'époque. Je veux croire qu'il se trompe et que nous sommes collectivement déterminés à résister, calmement mais fermement, à l'emprise islamiste. Faute de quoi, dans quelques décennies, on recensera les quartiers de France où il est permis de se promener en mini-jupe et de s'embrasser dans la rue.

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SOURCE : Le Figaro

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"Si on ne ralentit pas l'immigration, ce sera la soumission ou la guerre civile"...

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Alain Finkielkraut, Interview

 

Alain Finkielkraut a conservé toute la capacité d’indignation de sa jeunesse. Et une certaine propension à l’inquiétude. Le philosophe et essayiste français, membre de l’Académie française, est habité par une subtile nostalgie pour un passé qui n’est plus.

Respecté à travers le monde bien que parfois contesté en France, Alain Finkielkraut ne cesse d’égrener et d’analyser les menaces qui mettent aujourd’hui en péril les équilibres des sociétés européennes. Il le fait en cherchant méticuleusement les mots justes, dans un effort de lecture de la réalité qui semble lui paraître à la fois essentiel et très douloureux.

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De nombreux intellectuels rejettent la théorie de Samuel Huntington se basant sur le présupposé "choc des civilisations". Le font-ils parce qu’ils la considèrent infondée d’un point de vue historico-scientifique ou parce qu’elle est si intrinsèquement en contraste avec leur vision d’une société égalitaire et pacifiée ?

Alain Finkielkraut - De nombreux intellectuels européens sont encore hantés par l’histoire du vingtième siècle et particulièrement par la Seconde Guerre mondiale. La religion qu’ils professent est la religion de l’humanité. Par peur de réveiller les vieux démons, ils refusent de prendre en compte la division de l’humanité en civilisations. Or, le multiculturalisme qui est souvent proposé aujourd’hui n’est que le simple métissage des musiques et des cuisines. On célèbre d’un côté le multiculturalisme et de l’autre on ne prend plus les cultures au sérieux.

L’identité, lue à travers le prisme de la culture, n’est donc pas morte ?

Alain Finkielkraut - Le grand penseur polonais Czesław Miłosz, dans son livre "Une autre Europe", déclarait que le XXe siècle, pris de panique devant les sottises des nationalistes et des racistes, s’est efforcé de combler les abîmes du temps par des statistiques de production et quelques noms de systèmes politico-économiques. C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui. Pourtant, comme l’a précisé Huntington, l’individu n’est pas seulement la somme de ses besoins et de ses désirs. L’homo oeconomicus n’est pas une définition qui peut expliquer la nature humaine dans sa complexité.

Vous avez déclaré qu’"une société multiculturelle est une société multiconflictuelle". Une nation, aujourd’hui, n’est-elle pas condamnée à l’ouverture ?

Alain Finkielkraut - Je n’aime pas l’idée qu’une nation soit condamnée à quoi que ce soit: c’est la preuve qu’elle n’est plus maîtresse de son destin. Prenons le cas français. La France a choisi la voie de l’assimilation. Elle voulait offrir aux nouveaux arrivants la possibilité de s’imprégner de l’histoire et de la culture nationales, pas les fondre dans le même moule. Or, cette assimilation est remise en question par un nombre grandissant d’immigrés et d’enfants d’immigrés qui s’insurgent contre la civilisation française.

Le résultat: la société crispée et violente et le séparatisme culturel croissant d’aujourd’hui. Les Français autochtones des classes moyennes ou pauvres se sentent devenir minoritaires. Ils ne se sentent plus chez eux. Je ne sais pas si une société multiculturelle est toujours multiconflictuelle mais je ne peux qu’être inquiet de la fragmentation et de la dislocation du tissu social, en France comme dans d’autres pays européens.

Le Brexit et la victoire de Donald Trump soulignent-ils une intolérance croissante d’une partie des opinions publiques occidentales vis-à-vis de la mondialisation ?

Alain Finkielkraut - Il faut distinguer les deux phénomènes. Certes, dans les deux cas, on a à faire à la colère des peuples contre l’abolition des frontières et une mondialisation qui ne tient pas ses promesses et qui, au contraire, fait beaucoup de dégâts. Les Britanniques ont voulu, face à une Europe à la fois tatillonne et lointaine, retrouver la maîtrise de leur destin. C’est tout à fait compréhensible et légitime puisque l’Union européenne ne se soucie absolument pas de perpétuer la civilisation européenne telle qu’elle a été façonnée par la diversité de ses nations. L’Union est fondée sur la détestation de toute forme de nationalisme, c’est une Europe des normes, des procédures et du marché. Les Britanniques ne sont pas anti-européens mais veulent que l’Europe et la Grande-Bretagne restent elles-mêmes.

Et dans le cas des États-Unis ?

Alain Finkielkraut - Les Américains qui ont voté pour Trump ont toutes les raisons d’exprimer leur fureur. La majorité blanche se sent devenir inéluctablement minoritaire; des régions entières se désindustrialisent et les gagnants de la mondialisation ont vis-à-vis des perdants, aux États-Unis comme en Grande-Bretagne, une attitude stupidement arrogante. La différence est que Trump, celui qui a su canaliser ce désespoir, est un pitre, un histrion, un homme violent et pulsionnel. Avec le prétexte de combattre le politiquement correct, il combat le tact, la nuance, la complexité, le savoir, la civilisation elle-même. C’est un très dangereux démagogue.

Pourquoi la victoire de Trump a été si difficile à prévoir ?

Alain Finkielkraut - Je ne partage absolument pas la jubilation de ceux qui se réjouissent de la déconfiture des grands médias dans leurs prévisions erronées de ces élections. Les journalistes qui n’ont pas su prévoir la victoire de Trump ne méprisaient pas nécessairement les électeurs qui ont voté pour lui mais ne pouvaient pas imaginer qu’un homme aussi grossier et brutal puisse être élu Président des États-Unis.

Comment expliquer alors ce succès inattendu ?

Alain Finkielkraut - Une telle élection ne pouvait être possible qu’au temps où triomphent les jeux vidéos et la téléréalité. Elle est, pour parler comme Régis Debray, l’une des conséquences du passage de la graphosphère à la vidéosphère et même à la numérosphère. Aujourd’hui la seule chose que l’on puisse espérer est que Trump soit entouré de conseillers qui le calment et l’empêchent de mettre en pratique son programme politique complètement délirant.

L’Italie et la Grèce, pour des raisons essentiellement géographiques, sont en train de porter le poids des récentes vagues migratoires alors que plusieurs pays de l’Union refusent la répartition des migrants selon le système de quotas établi. Que faire ?

Alain Finkielkraut - C’est une question extrêmement délicate. Il faut absolument ralentir l’immigration et se donner même pour objectif de l’arrêter. Certes, le droit d’asile doit continuer d’être appliqué mais l’immigration économique ne doit plus être favorisée de quelque façon que ce soit. Sinon nous avons deux avenirs possibles: la soumission, pour parler comme Houellebecq, ou la guerre civile. Il faut un ressaisissement de l’Europe. Elle se pensait comme une sorte de processus en expansion indéfini, elle doit maintenant tracer ses frontières et savoir les défendre.

Peut-on raisonnablement espérer en Europe une intégration des communautés musulmanes qui soit entière, pacifique et pleinement égalitaire ?

Alain Finkielkraut - On peut l’espérer mais à condition que les règles du jeu soient fixées de la manière la plus claire. Il faut demander aux musulmans d’accepter l’apostasie, c’est-à-dire le droit pour chaque musulman de changer de religion ou de ne plus en avoir du tout, et leur demander, dans le même cadre, d’admettre le mariage avec des non-musulmans. Si ces conditions sont respectées, la preuve sera faite de la volonté des musulmans de vivre dans les sociétés européennes en acceptant leurs principes et leurs règles.

Vous ne cessez de déclarer qu’une École laïque et la formation qu’elle doit offrir sont les vrais instruments d’une pleine intégration. Pourquoi en êtes-vous si convaincu ?

Alain Finkielkraut - Je ne suis convaincu de rien parce que l’École française par exemple s’effondre. L’École, qui m’a permis d’assimiler une partie de la culture française, a révoqué cette promesse et aujourd’hui, loin d’assimiler les nouveaux arrivants, elle désassimile tout le monde. La seule chose que les membres de la nation partagent est la culture de masse, ce n’est plus la culture nationale. Et actuellement rien ne semble remplacer l’École dans sa tâche de transmission de l’héritage national, ou plutôt le rien la remplace.

Croyez-vous que l’Occident, après avoir influencé pendant des siècles le reste du monde avec sa vision, sa technique et sa volonté de puissance est en train de s’engager sur la pente descendante de son histoire ?

Alain Finkielkraut - Il est clair que l’Occident aujourd’hui bat en retraite et qu’il est de plus en plus contesté. Une minorité au sein de l’Islam pense que, l’Islam ayant été à l’origine une religion conquérante, l’heure est venue aujourd’hui de la reconquête. Et cet islamisme joue sur le sentiment de culpabilité d’un Occident naguère encore colonialiste et impérialiste. Ce que je vois se développer en France est un islamo-gauchisme qui ne promet rien de bon.

À quels espoirs se rattacher pour l’avenir ?

Alain Finkielkraut - L’espoir ne peut venir que d’un diagnostic lucide. Ce qui est particulièrement désespérant c’est l’aveuglement, le déni. Or, quand on ne sait pas faire face à une réalité inquiétante et déconcertante, celle-ci se développe et les seules incarnations de l’opposition, comme le montre le cas de Trump, sont des tribuns populistes eux-mêmes dangereux et inquiétants.

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SOURCE : L'ECHO

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27/12/2016

La domination masculine n'existe pas...

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26/12/2016

10 siècles de frontières françaises...

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23/12/2016

Tournée Générale...

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Alain Soral entre dans un bistrot , au bout du bar il avise un mec avec une Kippa sur la tête. Alors il annonce très fort à la cantonade : "Tournée générale... sauf pour le Juif !"

Quand tout le monde a reçu sa consommation le Juif le regarde avec un grand sourire et lui dit : "Merci beaucoup !"

Cette réaction a pour effet d’énerver Alain Soral qui répète plus fort encore : "Re-tournée générale sauf pour le Juif !"

On sert tout le monde à nouveau et le Juif remercie avec encore plus d’ostentation.

Alain Soral se penche alors vers le barman et lui demande : "Il est con ou quoi ce mec ? Chaque fois il me remercie !


-- Normal
, répond le barman, c’est lui le patron !!!"

 


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04/12/2016

Le réchauffement de la planète, une escroquerie

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21/11/2016

Truffaut - Godard, scénario d'une rupture

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Il y a plein de coupures de Publicité... mais c'est le prix à payer pour voir le déroulement de cette confrontation sublime... 

 



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11/09/2016

15 Years...

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« Le 11 Septembre a été l’actualisation d’une schize - sans doute terminale - dans l’histoire humaine. Voici la première guerre mondiale CIVILE. Des appareils civils frappent des tours civiles, des civils détournent des avions remplis de civils pour accomplir leur "mission" purement "symbolique". C’est l’évacuation du militaire hors de la sphère de la guerre, c’est non pas le choc des civilisations, mais leur disjonction absolue, car "synthétique", "globale". »

Maurice G. Dantec - 15 novembre 2007

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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23/08/2016

Faux Départ

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Enfin, un reportage dense et précis sur les expériences de mort imminente. Un peu plus d'une heure vingt... 

intéressant.

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22/08/2016

L'islam est le plus grave dé posé à l'Europe

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L'Europe peut-elle rester la même dès lors que sa population se modifie ? L'introduction massive de l'islam sur le Vieux Continent est-elle sans conséquence ? A ces questions, le journaliste américain Christopher Caldwell répond par la néga tive dans un livre choc. Rencontre avec un esprit libre.

L'homme n'est pas un excité, un boutefeu, un prêcheur de croisade. De manières policées, cet Américain presque quinquagénaire, diplômé de Harvard, appartient à un milieu social nourri de références culturelles européennes. De passage à Paris, il s'exprime d'une voix douce, en pesant ses mots et dans un français châtié. Journaliste, spécialiste des affaires politiques du Vieux Continent, Christopher Caldwell est éditorialiste au Financial Times et rédacteur au Weekly Standard et au New York Times Magazine.

En 2009, il publiait aux Etats-Unis un livre choc : Reflections on the Revolution in Europe: Immigration, Islam and the West. Voici cet ouvrage traduit en français, avec un titre légèrement adapté : Une révolution sous nos yeux. Comment l'islam va transformer la France et l'Europe. La préface de cette édition est signée de la démographe Michèle Tribalat, une spécialiste de l'immigration. « Les Français, et les Européens en général, écrit-elle, doivent lire ce livre car c'est d'eux qu'il est question et jamais on ne leur a parlé comme le fait Christopher Caldwell. »

Est-ce pour cette raison que plusieurs grandes maisons d'édition ont d'abord refusé de publier l'ouvrage ? Décrivant la progression de l'immigration dans tous les pays européens, spécifiquement de l'immigration musulmane, l'auteur pose une question résumée par le sous-titre de l'édition américaine : « L'Europe peut-elle rester la même avec en son sein des peuples différents ? » Question cruciale, que le politiquement correct à la française voudrait enterrer. Il faut donc se féliciter qu'un esprit libre, venu du Nouveau Monde, apporte sa contribution à un débat essentiel pour notre avenir.

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-- Comment avez-vous été amené à vous pencher sur la question de l'immigration en Europe ?

Christopher Caldwell -- Né en Nouvelle-Angleterre en 1962, j'appartiens à une génération où 80 % des bons éléments apprenaient le français au lycée, les autres étudiant l'allemand ou l'espagnol. Même si les Etats-Unis étaient le pays le plus puissant du monde, notre éducation était liée à l'Europe, dont la prééminence culturelle était reconnue. J'ai toujours voulu être écrivain. Si j'ai publié quelques romans, ce n'était pas vraiment ma vocation. Je suis devenu journaliste et, dès ce moment, les questions touchant à l'immigration et à la confrontation des cultures m'ont intéressé. L'immigration, quelles que soient les circonstances historiques, produit toujours des conflits économiques, sociaux ou culturels, or le journalisme se nourrit de conflits. J'avais idée d'écrire un livre sur Tijuana. Située à la frontière des Etats-Unis et du Mexique, cette localité était un village il y a soixante-dix ans ; aujourd'hui, c'est une métropole de 3 millions d'habitants, ville-frontière dont la population change tout le temps. Mais mes recherches en vue de ce projet m'ont donné envie d'écrire sur l'Europe, que je connais mieux que le Mexique ou même que la Californie. J'ai donc publié des articles sur l'immigration en Europe, et je pense que j'ai été parmi les premiers à le faire. C'était à la fin des années 1990, et par conséquent avant le 11 Septembre. Après le choc de 2001, les journaux américains ont été nombreux à me commander des articles sur l'immigration en France, en Grande-Bretagne, en Allemagne ou en Italie. En enquêtant sur place, j'ai découvert qu'il y avait des problèmes communs à tous les pays européens confrontés au phénomène migratoire. Afin d'aborder le sujet de manière globale, j'ai décidé alors d'écrire un livre.

-- En quoi le phénomène migratoire en Europe concerne-t-il les Américains ?

Christopher Caldwell -- Aux Etats-Unis, nous connaissons aussi le phénomène de l'immigration. Si certains le considèrent comme un problème, ce n'est pas mon cas. La grande vague migratoire, au cours des dernières décennies, est surgie du Mexique, d'Amérique centrale ou d'Amérique du Sud. Ces migrants étaient porteurs de la culture catholique latino-américaine. Or cette culture n'est pas étrangère aux Etats-Unis, pays qui compte depuis l'origine une forte minorité catholique. Les gens qui viennent d'Amérique du Sud sont très pauvres, mais leurs références et leurs façons de vivre sont à peu près similaires à celles des Siciliens, dont descendent la grande majorité des citoyens italo-américains. C'est une culture fondée sur la solidarité familiale, avec des taux de divorce beaucoup plus bas que les nôtres, sur une grande piété et sur des valeurs morales affirmées. Pour la société américaine, une telle population n'est pas un problème : c'est au contraire un atout. Avec nos immigrés, nous n'avons donc pas un problème culturel comme vous.

Le débat européen sur l'immigration tourne autour de la distinction entre l'assimilation et l'intégration. Chez nous, nous avons une bonne tradition d'assimilation. Il y a cependant une chose qui ne s'assimile jamais : c'est la religion. Tout le monde, aux Etats-Unis, a la religion de la mère de la mère de sa mère. On peut avoir une ascendance irlandaise lointaine, mais on reste un catholique irlandais. Ce n'est pas une difficulté dans un pays qui possède tous les éléments pour faire vivre ensemble les protestants, les catholiques et les juifs. Toutefois, il ne va pas de soi que les religions puissent coexister. Donc cette question de la croyance religieuse est une vraie question en Europe, car l'islam est une culture religieuse qui veut structurer la société. Est-ce compatible avec la tradition européenne ? Vous me demandez en quoi l'immigration en Europe concerne les Américains. Ce n'est pas pour en tirer des leçons pour les Etats-Unis, car la situation est très différente. En fait, les Américains s'y intéressent pour des raisons géostratégiques : leur interrogation porte sur les populations non assimilées de l'Europe, vues comme des sources potentielles de terrorisme ou d'antiaméricanisme. Personnellement, ce n'est pas là que se situe ma préoccupation. Mon livre s'attache à réfléchir aux conséquences de l'immigration d'origine musulmane sur la société européenne en tant que telle.

-- L'Islam représente une anthropologie différente de celle de la civilisation judéo-chrétienne. N'est-ce pas là que commence la difficulté ?

Christopher Caldwell -- C'est une bonne question, mais ce n'est pas la mienne. Je ne cherche nullement à démontrer la valeur comparée de la culture occidentale ou de la culture islamo-arabe. Mon objectif est le suivant. Dans une démocratie, il faut partager des règles. Or deux cultures incarnant des visions différentes du monde ont du mal à s'accorder sur de telles règles. Cela ne veut pas dire qu'il est impossible d'y parvenir, mais que c'est difficile. Je crois que l'Islam et le monde chrétien représentent des visions différentes de la société. Est-ce circonstanciel ? Verrons-nous un jour un féminisme musulman ? Je ne sais pas. Ce que je sais, aujourd'hui, c'est que la conception occidentale de la femme ne s'accorde pas avec la conception arabo-musulmane de la femme.

-- Votre livre traite de l'ensemble de l'Europe. Mais n'y a-t-il pas des situations dissemblables selon les pays ?

Christopher Caldwell -- Je me suis concentré sur les pays où j'ai effectué des reportages et que je pense connaître assez bien : la France, l'Allemagne, l'Italie, la Grande-Bretagne, le Danemark, l'Espagne, les Pays-Bas, la Suède. Certes, selon les pays que j'ai étudiés, des différences sont perceptibles dans les rapports entre la société d'accueil et la population immigrée. Cependant, ce sont les mêmes problèmes qui reviennent d'une manière ou d'une autre. Pour commencer, l'inté gration des immigrés s'apparente globalement à un échec. Et les mêmes questions sont posées partout : les taux de chômage et de délinquance supérieurs à la moyenne dans les quartiers peuplés de migrants, les reven dications concernant les prescriptions alimentaires islamiques, les demandes de séparation des sexes à l'hôpi tal ou dans les activités sportives, la recherche d'inter locuteurs musulmans modérés... Quand on voyage d'un pays européen à l'autre, comme je l'ai fait pendant plusieurs années, on entend les mêmes préoccupations, les mêmes mots, et jusqu'aux mêmes blagues.

-- Aux lecteurs français, votre livre paraîtra d'une grande liberté de ton, parce qu'ici, ce sujet ne se manie qu'avec la plus grande prudence...

Christopher Caldwell -- Je sais que chez vous, ce thème est entouré de tabous et de non-dits. Mais je suis journaliste, et le plus grand service que puisse rendre un journaliste est d'ouvrir un débat. Si l'on cherche une différence entre pays européens quant au traitement de l'immigration, elle est précisément là : en France, la parole est verrouillée, contrairement à la Grande-Bretagne, à l'Italie ou à l'Allemagne. Pierre-André Taguieff a raison quand il évoque l'idéologie de l'« immigrationnisme ». Chez vous, il est presque illégal d'avoir une réflexion négative sur un phénomène qui, comme tout fait de société, ne devrait pas échapper à l'esprit critique. Ce que mon regard peut apporter, en tant qu'étranger, c'est un peu de distance. Citoyen américain, c'est de l'extérieur et sans passion personnelle que j'observe la société européenne.

Les Etats-Unis, comparativement à l'Europe, sont un pays jeune. Mais notre histoire nous a confrontés au choc interethnique. Ce qui m'inquiète pour vous, c'est que la situation européenne commence à ressembler au problème racial qui a longtemps empoisonné la vie américaine. Cela ne veut pas dire qu'il n'existe aucune solution pour l'Europe, ni que deux groupes ethniques ne peuvent pas travailler ensemble pour bâtir quelque chose qui soit mutuellement satisfaisant. Mais il faut avoir conscience que l'Europe fait désormais face à un problème durable. Chez nous, il a duré trois cent cinquante ans... Je pense que les enjeux de ce problème sont encore plus grands que ne le pensent les Européens. La conclusion de votre livre est peu optimiste. Entre une culture qui doute d'elle-même et une culture forte, écrivez-vous, c'est la culture forte qui va l'emporter...

Ce que je voulais montrer à la fin de mon livre, c'était qu'une culture religieuse forte et un système contractuel basé sur la tolérance sont difficiles à concilier parce que, dans une telle rencontre, c'est toujours le côté qui ne veut pas négocier qui a l'avantage. Une religion qui ne doute pas de soi et qui prétend structurer toute l'organisation sociale, comme l'islam, n'est pas prête à transiger.

-- Qu'attendez-vous de l'édition française de votre ouvrage ?

Christopher Caldwell -- Je suis journaliste et écrivain. Ce n'est pas un livre politique. Les problèmes que je décris ont évidemment une dimension politique, mais mon ouvrage n'est pas un manifeste politique, encore moins une déclaration de guerre à l'islam. C'est une description, un état des lieux, dans toutes ses facettes, de ce que je considère comme le plus grave défi posé à l'Europe.

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« Une révolution sous nos yeux. Comment l'islam va transformer la France et l'Europe », de Christopher Caldwell, préface de Michèle Tribalat, Editions du Toucan, Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Johan Frederik Hel Guedj.

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De Vienne à Bruxelles, une jeunesse musulmane

L'Autriche est un pays propice à l'étude du différentiel de croissance de la population entre autochtones et nouveaux arrivants. C'est l'un des rares pays à forte immigration non-européenne qui recueille la religion lors des recensements. L'indicateur conjoncturel de fécondité des catholiques y est de 1,32 enfant par femme. Il est de 1,21 enfant chez les protestantes et de 0,86 chez les femmes sans religion. Cet indicateur est de 2,34 chez les musulmanes. Les écarts peuvent paraître modestes, mais leurs effets vont s'accentuer au fil du temps. Selon quatre démographes de l'Institut viennois de la démographie, d'ici le milieu du siècle, l'islam pourrait être la religion majoritaire chez les Autrichiens de moins de 15 ans. En Belgique, la communauté belgo-marocaine, relativement bien intégrée, affiche un indicateur conjoncturel de fécondité deux fois et demie plus élevé que celui des Belges autochtones. A Bruxelles, où le quart des habitants sont des citoyens étrangers et où plus de la moitié des enfants nés en 2006 étaient nés de musulmans (56 %), les sept prénoms de garçons les plus courants parmi ces nouveau-nés étaient Mohamed, Adam, Rayan, Ayoub, Mehdi, Amine et Hamza.

A Duisbourg, en Rhénanie, un minaret de 34m de haut

L'établissement d'institutions religieuses est une étape habituelle, prévisible de la vie immigrée, mais les autochtones qui habitent l'ouest d'Amsterdam, de Munich et Cologne - qui ont tous assisté à de vraies batailles rangées autour de la construction de mosquées - ne voyaient pas les choses du même oeil. Le complexe de la mosquée de Duisbourg/Marxloh, le plus grand d'Allemagne, rencontra lui aussi de la résistance, alors même qu'il s'agissait d'un établissement religieux moderne, un modèle, avec ses fidèles appartenant à la moyenne bourgeoisie et ses millions d'euros de financement de l'Union européenne et des pouvoirs locaux. La demande d'autorisation de la mosquée pour l'édification d'un minaret de trente-quatre mètres de haut fut approuvée, mais celle d'un muezzin (l'appel à la prière) une fois par semaine fut d'emblée rejetée. La chaîne de télévision ZDF diffusa des déclarations à sensation selon lesquelles les Allemands devaient maintenant parler turc quand ils vaquaient à leurs occupations quotidiennes dans Marxloh. Cette grande mosquée destinée à faire entrer la communauté turque de Duisbourg dans l'ère moderne provoqua plus de craintes qu'aucune des quarante-quatre autres mosquées de la ville auparavant, même celles qui se trouvaient abritées dans des garages, des sous-sols ou des ruelles - et certaines d'entre elles étaient pourtant dirigées par des musulmans purs et durs. La raison en est évidente : la grande mosquée signifiait que l'islam était arrivé en Allemagne pour y rester.

Pour l'heure, l'avantage est à l'Islam

Le problème fondamental de l'Europe avec l'islam, et avec l'immigration en général, c'est qu'en Europe, les communautés les plus fortes ne sont, culturellement parlant, pas du tout européennes. Malgré la grande variété de mesures prises pour le résoudre - multiculturalisme en Hollande, laïcité en France, laisser-faire en Grande-Bretagne, pointillisme constitutionnel en Allemagne -, ce problème existe dans tous les pays européens. C'est avec l'islam et l'immigration que l'Europe a un problème et non avec l'usage impropre de certains moyens mis en place pour le traiter. L'islam est une religion magnifique qui a aussi été, parfois, au cours des siècles, une culture brillante et généreuse. Mais malgré toutes les protestations du contraire, ce n'est en aucun cas la religion ou la culture de l'Europe.

Il est sûr que l'Europe sortira changée de sa confrontation avec l'islam. Il est bien moins sûr que ce dernier se révèle assimilable. L'Europe se retrouve à devoir disputer à l'islam l'allégeance de ses nouveaux arrivants. Pour l'heure, l'islam est en meilleure position pour l'emporter à la fois démographiquement, c'est une évidence, et philosophiquement, même si cet avantage paraît moins net. En effet, en de telles circonstances, des mots comme « majorité » et « minorité » ont peu de sens. Quand une culture peu sûre d'elle, malléable et relativiste, rencontre une culture ancrée, confiante et renforcée par des doctrines communes, c'est généralement la première qui change pour s'adapter à la seconde.

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Par Jean Sévilla pour Le Figaro

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Le Coran questionné

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Avec Sami Awad Aldeeb Abu-Sahlieh, traducteur et commentateur en plusieurs langues du Coran. Chrétien arabe d'origine palestinienne et de nationalité suisse, Sami Awad Aldeeb Abu-Sahlieh est licencié et docteur en droit de l'Université de Fribourg, diplômé en sciences politiques de l'Institut universitaire de hautes études internationales de Genève, responsable du droit musulman et arabe à l'Institut suisse de droit comparé à Lausanne depuis 1980 et professeur invité aux Facultés de droit d'Aix-en-Provence et de Palerme.

Sa traduction française, parue en version bilingue aux éditions de l'Aire (Vevey, Suisse), suit l'ordre chronologique des révélations du Coran et se veut aussi fidèle que possible au texte arabe. Par souci de clarté et de pédagogie, elle indique aussi les variantes les plus importantes du Coran ainsi que les versets abrogés et ceux qui les abrogent. Enfin elle renvoie aux écrits juifs et chrétiens, tant reconnus qu'apocryphes, pour mieux comprendre leur influence sur le livre sacré des musulmans.

 

29 minutes pour y voir un peu clair... 

 


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21/08/2016

Ces Allemands qui quittent l'Allemagne pour fuir les migrants...

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Comme on dit, de par chez moi, dans ma Cité : "Spéciale Dédicace à mon poto Larkens ! Yo !"

 

 

L'Europe de l'Ouest peut marcher sur la tête... c'est la Mittel Europa qui sauvera tout le continent...

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C'est à l'Islam de s'adapter...

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03/08/2016

La Taqiya ou le concept coranique qui permet aux musulmans radicaux de dissimuler leurs véritables croyances

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Historiquement, cette pratique devait permettre aux musulmans de survivre et de conserver leurs convictions dans des régions où ils étaient minoritaires, qu'il s'agisse des morisques qui vivaient dans la très chrétienne Espagne ou des chiites en terre d'islam, alors que le sunnisme est majoritaire.

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Atlantico : Utilisée à plusieurs reprises pour planifier des attentats, la Taqiya est un concept du djihad. Comment cela permet-il à nos agresseurs entre deux assauts ?

Annie Laurent : La Taqiya est effectivement une technique visant à dissimuler un djihadiste entre deux attentats.

C'est une évidence. C'est une pratique de tapis qui consiste à revêtir un masque de modernité pour mieux se mêler à la foule. Ainsi, le djihadiste fera semblant de vivre comme tout le monde, ira danser et boire, s'habillera comme la plupart des gens… C'est une tactique qui implique de faire tapis, de se dissimuler.

C'est une stratégie qu'on a constaté à Montauban mais également à Toulouse : après les attentats et pendant l'enquête, l'ensemble des proches et le voisinage tendaient à dire que rien ne laissait soupçonner une radicalisation, des projets terroristes… Extérieurement, les djihadistes donnaient unanimement le sentiment d'être bien intégrés. A Saint-Denis, par exemple, on entend dire que les djihadistes mangeaient des pizzas. C'est un procédé utilisé régulièrement pour planifier des attentats sans être repéré et qui permet, si la cause le justifie, d'enfreindre la loi islamique et les prescriptions concernant l'alimentation notamment. La fin justifie les moyens. Cela ne signifie bien évidemment pas que chaque musulman qui s'est intégré se cache et complote un attentat, loin de là. Mais on ne peut malheureusement découvrir qu'après coup qu'un djihadiste se cachait derrière une façade occidentalisée.

Atlantico : Comment peut-on définir la taqiya et que dit le Coran sur ce sujet ?

Annie Laurent : L’islam interdit formellement aux musulmans de renoncer à leur religion, sous peine de châtiments divins et de malédictions éternelles (cf. Coran 2, 217 ; 3, 87 ; 4, 115 et 16, 106). Les musulmans ne peuvent donc en principe dissimuler leur identité religieuse et travestir leurs croyances. Cependant, le Coran et la Tradition prophétique (Sunna) ouvrent la voie à des dérogations quant au caractère absolu de la croyance dans le Dieu de l’islam et surtout quant à l’obligation de son attestation publique, ainsi qu’à l’observance du culte ou de la loi islamique (charia). De tout temps et selon des formes variées, des oulémas (docteurs de la Loi) ont légitimé la pratique de la taqiya (dissimulation) que l’on appelle aussi ketman (secret ou restriction mentale). Ces agissements se sont manifestés en diverses circonstances historiques et retrouvent une certaine actualité de nos jours.

Le Coran contient deux passages sur lesquels s’appuient les théoriciens de la taqiya. Ils correspondent à deux types de situations particulières.

- "Celui qui renie Dieu après avoir eu foi en Lui – excepté celui qui a subi la contrainte et dont le cœur reste paisible en sa foi -, ceux dont la poitrine s’est ouverte à l’impiété, sur ceux-là tomberont le courroux de Dieu et un tourment terrible" (16, 106). Dans ce verset, pour notre sujet, c’est l’incise qui compte (italique). La taqiya est donc autorisée en cas de contrainte extérieure, quelle qu’en soit la forme : persécution, menace sur la vie, absence de liberté religieuse (de conscience et de culte), etc.

- "Que les croyants ne prennent pas pour alliés des infidèles au lieu de croyants. Quiconque le fait contredit la religion d’Allah, à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d’eux. Allah vous met en garde à l’égard de Lui-même. Et c’est à Allah le retour. Dis : Que vous cachiez ce qui est dans vos poitrines ou bien que vous le divulguiez, Allah le sait. Il connaît tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Allah est omnipotent" (3, 28-29).

Deux membres de phrases (italique) sont importants. Comme ailleurs dans le Coran, Dieu recommande ici aux musulmans (eux seuls sont qualifiés de "croyants") de ne pas entretenir de relations d’amitié ou de sujétion avec les non-musulmans (cf. 3, 118 ; 5, 51 ; 9, 23 ; 60, 13), mais il autorise des dérogations au principe lorsque le fait de s’opposer à ces derniers les met en danger. La sécurité ou le besoin de se faire accepter priment alors sur l’affirmation de la religion.

En fait, dans ces situations, ce qui compte c’est l’intention du musulman ou la réalité intime de sa croyance. Peu importe alors la profession de foi publique puisque Dieu connaît les dispositions des cœurs et les pensées. Telles sont les sources qui fondent la doctrine de la dissimulation, en matière de religion et de tout ce qui peut lui être connexe. La validité du recours à la taqiya a été confirmée et précisée par les oulémas (docteurs de la Loi) dès les débuts de l’islam, notamment par Tabarî (m. 923).

Il en résulte qu’un musulman peut abjurer extérieurement ses croyances, professer publiquement une autre religion, accepter d’être réputé non-musulman ou renoncer aux exigences cultuelles et législatives conformes à l’islam, tout cela s’il se trouve dans des conditions qu’il estime être de contrainte justifiant une telle attitude. Si l’on veut comparer avec la position chrétienne sur ce sujet, il convient de se référer à une parole de Jésus-Christ dans l’Evangile : "Qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile la sauvera" (Mc 8, 35).

Atlantico : Quelles en sont les applications historiques et contemporaines ?

Annie Laurent : La taqiya a toujours existé dans l’Oumma (la Communauté des musulmans), mais elle s’est d’abord surtout développée en milieu chiite, ceci pour des raisons de nécessité, suite à la "Grande discorde" (Fitna) qui a engendré au VIIè siècle le clivage avec l’islam sunnite.

Dans le chiisme :

Depuis cette rupture, les sunnites ont le plus souvent gouverné l’Oumma. Dans ces périodes, les chiites, minoritaires, ont recouru à lataqiya pour défendre leur identité, souvent niée par l’autorité qui les assimilait au sunnisme, ou pour échapper aux persécutions.

Les imams chiites ont justifié, et même conceptualisé, cette pratique, qui a dès lors été comprise comme une obligation de conscience, donc comme faisant partie de la religion. Tous les traités chiites contiennent un chapitre spécial, intitulé "Livre de la taqiya".

Selon Sami Aldeeb Abou-Sahlieh, professeur de droit islamique à l’Université de Lausanne, la tradition chiite rapporte trois cents récits dans ce sens. En voici un aperçu. "La dissimulation fait partie de ma religion et de la religion de mes ancêtres" ; "Si tu agis par dissimulation, ils ne pourront rien contre toi. La dissimulation sera une forteresse pour toi et servira de digue entre toi et les ennemis de Dieu qu’ils ne pourront jamais percer. Si tu dis que celui qui abandonne la dissimulation est comme celui qui abandonne la prière, alors tu dis la vérité" ;"La dissimulation est le meilleur des actes du croyant parce qu’elle sert à le sauvegarder et à sauvegarder ses frères des impies" (Cf. Le secret entre droit et religion, 2004, diffusion Internet).

Henri Lammens (1862-1937), jésuite belge, orientaliste arabisant de renom établi au Liban, a écrit à ce sujet : "Parmi les adversaires de ses croyances, il [le chiite] peut parler et se conduire comme s’il était un des leurs. En agissant de la sorte, en prêtant, s’il le faut, des faux témoignages et des faux serments, quand l’intérêt de la communauté l’exige, ou simplement un avantage personnel, il croit obéir à l’ordre de l’imam suprême."

Et de commenter :"Inutile de relever les conséquences morales de cette théorie, de cette loi du secret, laquelle entretient et légitime une perpétuelle équivoque et rend les chiites impénétrables" (L’Islam, croyances et institutions, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1943, p. 190-191 ; livre réédité en France aux éditions du Trident).

A l’instar des chiites, les adeptes de confessions dissidentes du chiisme (alaouites, alévis, druzes, ismaéliens) ressortissants d’un califat ou d’un Etat sunnite, parce que minoritaires, ésotériques, considérés comme hérétiques et donc maltraités pour ces motifs, ont le devoir de pratiquer la taqiya pour se protéger, en tant qu’individus et communautés. On retrouve cette situation chez les bahaïs dans la République islamique d’Iran, chiite.

Ces minorités recourent par ailleurs à la taqiya lorsqu’elles ont besoin de légitimer une position dominante qu’elles ont pu acquérir. Ainsi, quand Hafez El-Assad (père de Bachar, l’actuel président syrien), membre de la communauté alaouite, s’est emparé du pouvoir à Damas, en 1970, il a multiplié les gestes destinés à se faire passer pour un musulman orthodoxe aux yeux du monde sunnite (prière rituelle à la Mosquée des Omeyyades à Damas, fatoua de l’imam libanais chiite Moussa Sadr reconnaissant l’appartenance des alaouites à l’islam, construction d’une mosquée à Qardaha, le village natal des Assad, alors que traditionnellement les alaouites ne prient pas dans des mosquées, etc.).La taqiya existe donc en milieu islamique, et pas seulement en contexte non-musulman.

Dans le sunnisme :

Les musulmans sunnites ne rejettent pas la taqiya, mais elle n’est pour eux qu’une permission. Ils s’appuient sur des enseignements dispensés par certains de leurs oulémas, tel que celui-ci :"El-Chawkani dit que celui qui devient mécréant sous la menace de mort ne commet point de péché si son cœur est tranquille dans la foi" (S.-A. Abou-Sahlieh, op. cit.). La taqiya a été observée légitimement par les Morisques vivant sous un pouvoir chrétien en Andalousie. Ainsi, en 1504, le mufti Ahmed Ibn Jumaïra publia une fatoua (avis juridique) donnant des consignes précises à ce sujet. Si les chrétiens obligeaient les musulmans à injurier Mahomet, ils devaient le faire en pensant que cette parole était prononcée par Satan. S’ils étaient obligés de boire du vin ou de manger du porc, ils pouvaient le faire mais en sachant que c’était un acte impur et à condition de le condamner mentalement.

S’ils étaient forcés de renier leur foi, ils devaient essayer d’être évasifs ; si on les pressait, ils devaient intérieurement nier ce qu’on les obligeait à dire. De nos jours, les musulmans sont présents sur tous les continents. Vivant en dehors de leurs territoires traditionnels, ils sont donc sur des "terres de mécréance" (Dar el-Kufr) où il leur est permis, voire recommandé, de pratiquer la taqiya, mais sous une autre forme, à titre individuel ou collectif. Il s’agit de s’adapter extérieurement au contexte en respectant les lois, principes et habitudes des pays concernés tant que les circonstances ne sont pas favorables à l’instauration de l’islam comme religion dominante et à la pleine application de la charia.

Atlantico : Quand on aborde le sujet de la Taqiya, on entend régulièrement le terme "esquive". De quoi s’agit-il ?

Annie Laurent : L’esquive consiste à utiliser un vocabulaire qui plaît aux Occidentaux pour décrire l’islam comme une religion inoffensive, apportant "la paix, la tolérance et l’amour". Certaines personnalités musulmanes profitent de l’ignorance de leurs interlocuteurs non musulmans pour faire passer des messages tronqués quant à l’enseignement véritable de l’islam, en particulier sur certains sujets sensibles (violence, liberté de conscience, droits de l’homme, statut de la femme, respect des non-musulmans, égalité entre les hommes, etc.). Ces personnalités utilisent dans ce but les tribunes qui leur sont ouvertes dans la presse ou même les rencontres de dialogue interreligieux. Il s’agit en fait de rassurer les non-musulmans quant aux valeurs libérales et pacifiques de l’islam, en présentant des comportements moralement inacceptables comme des dérives, des déformations, voire des trahisons de la religion. On peut comparer cette attitude avec la parole du Christ : "Que votre langage soit : “Oui ? oui”, “Non ? non” "(Mt 5, 37).

Il faut enfin souligner que, face aux horreurs commises par des djihadistes, dont souffrent également d’autres fidèles de l’islam, certains intellectuels, dirigeants politiques et responsables religieux musulmans dénoncent aujourd’hui l’utilisation de la taqiya, demandant un examen lucide des textes sacrés sur lesquels se fondent les adeptes de la violence.

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SOURCE : ATLANTICO

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Sainte-Rita : cette gauche qui regarde les églises tomber

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FIGAROVOX/HUMEUR - L'évacuation musclée par douze cars de CRS de l'église Sainte-Rita à Paris, promise à destruction, n'était certainement pas une manière de faire quelques jours après le martyr du père Hamel, remarque Eloïse Lenesley.

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Eloïse Lenesley est journaliste. Elle collabore notamment à Causeur.

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En ce matin nuageux de juillet, les belles paroles de François Hollande résonnent comme une insulte à la clairvoyance: « Attaquer une église, tuer un prêtre, c'est profaner la République », confiait-il quelques jours plus tôt, après le sauvage assassinat du père Jacques Hamel. Et démolir la paroisse Sainte-Rita, nichée dans le 15e arrondissement, pour y construire des logements privés et sociaux, avec un parking en bonus, qu'est-ce donc ? Violenter un abbé et ses ouailles pour les jeter dehors en plein messe, qu'est-ce donc ?

Les recours juridiques, la lutte des riverains, le soutien actif de la municipalité LR du 15e, s'ils ont pu retarder l'échéance, ne sont, pour l'heure, pas parvenus à vaincre l'inexorable: la cause de Sainte-Rita semble bel et bien désespérée. Pas moins de douze cars de CRS ont débarqué pour massacrer la porte à la tronçonneuse, puis expulser les occupants protégeant l'édifice, depuis des mois, de l'épée de Damoclès qui plane au-dessus de sa voûte de béton, première du genre à avoir été érigée en France. Elle n'aura hélas pas suffi à justifier une classification « bâtiment remarquable » qui l'aurait sauvée des pelleteuses.

Sur place, Olivier Rigaud, conseiller délégué chargé de l'habitat, exceptionnellement cintré de l'écharpe du maire, nous explique avoir assisté à « l'évacuation violente », au cours de laquelle le prêtre et plusieurs paroissiens ont été «traînés par terre» et où «des élus ont été malmenés». Le procédé a de quoi choquer. « J'ai été prévenu à la dernière minute, hier soir à 21h00 par la préfecture qui a manifestement attendu que je sois absent et en congés », précise le député-maire du 15e Philippe Goujon, scandalisé, qui estime, de plus, que la police a autre chose à faire en cette période d'état d'urgence. En outre, c'est le directeur de cabinet du préfet, et non le préfet lui-même, qui l'a contacté. Pas très classe. « J'ai eu honte de voir traîner un prêtre au sol, interrompre une messe, j'ai honte pour mon pays », ajoute le député Frédéric Lefebvre. De son côté, la gauche pratique la politique de l'autruche, s'appuyant sur une décision de justice confirmée par le Conseil d'État, à la demande du propriétaire, l'association des Chapelles Catholiques et Apostoliques, et du promoteur.

Quid des revendications des riverains, farouchement opposés à la destruction, et des efforts constants de Philippe Goujon pour trouver un repreneur susceptible de perpétuer ce lieu de culte? Frédéric Lefebvre dénonce « une volonté manifeste de saborder toute tentative de reprise de l'église ». Pourtant, des orthodoxes ou des coptes égyptiens, entre autres, seraient intéressés. Une partie de la classe politique et médiatique de gauche s'ingénie à discréditer les défenseurs de la petite église en insistant sur le profil « catho tradi d'extrême-droite » de ses « squatteurs », et s'empressant d'oublier que bon nombre d'habitants de l'arrondissement, croyants ou pas, voient d'un très mauvais œil qu'une église néogothique datant de 1900 soit rasée. Le fait que des groupuscules radicaux se révèlent particulièrement mobilisés sur le terrain ne saurait ternir la noblesse de la bataille, celle qui veille à la sauvegarde d'un patrimoine culturel de plus en plus menacé par les idéologies et les basses manœuvres électorales ambiantes. Église gallicane, échappant au cadre de la loi de 1905, et non reconnue comme monument historique, célèbre pour les bénédictions pittoresques qu'elle accorde aux animaux chaque année, Sainte-Rita ne pourra compter que sur la pugnacité de ses partisans pour rester debout.

Au moment où la France s'émeut du martyr de Jacques Hamel, où Manuel Valls parle de financer les mosquées et la formation des imams, où Bernard Cazeneuve rêve de concordat, où François Hollande prétend adresser sa compassion aux chrétiens et honore de sa présence la messe de Notre-Dame - lui qui avait royalement snobé celle de l'intronisation du Pape François en 2013 -, on ne comprend pas que des églises soient abandonnées à leur triste sort et démolies, évacuées avec brutalité par les forces publiques, rayées de l'Histoire, broyées en tas de gravats, dans une indifférence qui tutoie le cynisme. On ne pouvait tomber plus mal.

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Source : Le Figaro

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02/08/2016

Taxer le halal : une mesure "ni possible, ni souhaitable"

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Des politiques proposent l'instauration d'une "taxe halal" pour financer le culte musulman en France, un système calqué sur le modèle juif. Mais selon Florence Bergeaud-Blackler, chargée de recherche au CNRS, "on ne peut pas faire avec le halal ce que l'on fait avec le cacher".

Comment financer le culte musulman en France sans qu'il ne dépende de pays étrangers? C'est la question qui agite le débat public alors que Manuel Valls a plaidé pour la fondation d'un "nouveau pacte avec l'islam de France" après l'attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray. Une des idées soutenue par le président du Conseil français du culte musulman (CFCM) et des politiques de droite comme de gauche, comme Nathalie Kosciusko-Morizet, François Bayrou ou encore Benoît Hamon: instaurer une "taxe halal".

Florence Bergeaud-Blackler, chargée de recherche au CNRS et à l'Institut de recherche et d'étude sur le monde arabe et musulman (IREMAM), explique à L'Express la complexité de la création d'une telle taxe.

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Instaurer une taxe halal" pour financer le culte musulman est-elle une idée neuve ?

Florence Bergeaud-Blackler - Non, Charles Pasqua est le premier à préconiser une taxe sur l'abattage en 1992. Dominique de Villepin avait ensuite proposé qu'elle finance la Fondation des oeuvres de l'islam en France (FOIF) qu'il a instituée. Mais ces propositions n'ont pas été suivies d'effets car les acteurs religieux et économiques n'y sont pas favorables.

Y a-t-il des exemples de mise en place d'une telle taxe dans d'autres religions ?

Florence Bergeaud-Blackler - L'idée d'un financement par la vente de viande halal est calquée sur le modèle juif de la cacheroute : un pourcentage est prélevé sur la vente de viande issue d'un abattage rituel. Il est redistribué pour payer les frais de contrôle et de certification et pour financer le culte israélite, aujourd'hui à hauteur de 30%.

Mais pour des raisons de procédures, économiques et historiques, on ne peut pas le faire avec le halal ce que l'on fait avec le cacher. La cacheroute est un système religieux multiséculaire très codifié de mise à mort de l'animal et de contrôle de la carcasse. L'Etat français a accordé un monopole de certification au consistoire israélite de Paris en 1971 parce que le principe d'une organisation centralisée de la cacheroute était déjà actée depuis 1806, sous le Concordat. Le marché du halal a, lui, été construit dans les années 1980 par des entreprises privées, selon des considérations marchandes et économiques, et, secondairement, religieuses. De plus, nous ne sommes plus sous régime concordataire.

Chez les juifs, les certifications cacher sont attachées à des autorités rabbiniques alors que les certificats halal sont vendus par des entreprises commerciales qui n'ont pas à rendre compte à une autorité religieuse. Car il ne faut pas confondre des agences commerciales de certification halal qui peuvent être créées par n'importe qui, un musulman ou même un non musulman, et l'agrément ministériel pour l'habilitation des sacrificateurs qui a été accordé par l'Etat à trois grandes mosquées (celles de Paris, d'Evry et de Lyon).

L'agrément permet seulement d'homologuer le personnel d'abattage et rapporte bien moins d'argent que la certification, qui est un véritable business détenu par une petite dizaine d'agences halal qui vendent ces certifications et décident elles-mêmes du cahier des charges du halal et des modalités de contrôle d'un marché estimé à 5,5 milliards.

Cette piste de financement ne vous paraît donc pas praticable et souhaitable ?

Florence Bergeaud-Blackler - Elle ne me paraît ni possible, ni souhaitable dans un Etat laïque. Instaurer une taxe sur ces agences privées de certification induirait une concurrence déloyale. Et à qui serait reversée cette taxe, comment serait-elle redistribuée, sur quelles bases? Les industriels de la filière viande y sont opposés car ils estiment qu'ils n'ont pas à rémunérer une mosquée puisqu'ils paient déjà des agences de certification halal.

Cela appuyerait ce mouvement consumériste religieux et l'extension du périmètre du halal. Surtout si comme Nathalie Kosciusko Morizet le propose, tous les produits labellisés halal sont taxés, c'est-à-dire aliments, cosmétiques, ou même hôtels halal. On oublie qu'il y a seulement vingt ans beaucoup de musulmans qui s'appuyaient sur un verset coranique estimaient qu'à l'exception du porc, toutes les viandes étaient licites aux musulmans.

Et puis il y a un problème de cohérence. Ces jours-ci, on entend surtout le gouvernement dire "on s'en occupe mais c'est à vous de le faire". Mais ce n'est pas à l'Etat, qui ne peut légalement pas lever cette taxe, de s'occuper des affaires religieuses. Enfin, si l'objectif de cette taxe est d'éviter les financements étrangers, je ne vois pas en quoi l'augmentation des financements français dissuadera les mécènes étrangers de verser de l'argent aux religieux par un moyen ou un autre.

Mais pourquoi cette idée apparaît comme un serpent de mer depuis des années ?

Florence Bergeaud-Blackler - Le président actuel du CFCM, Anouar Kbibech, soutient cette idée qui séduit les politiques car ils la voient comme une solution miracle. Mais cette taxe semble surtout être une des dernières ficelles pour tenir un discours volontariste politiquement audible sur l'islam.

Alors comment financer le culte musulman en France ?

Florence Bergeaud-Blackler - La première chose est de savoir de combien d'argent a besoin l'islam en France. Aujourd'hui, il n'existe aucune étude sur le sujet même si l'on sait que dans certaines régions, confrontées à un accroissement de la population, il y a de vrais besoins de construction de mosquées par exemple. Mais c'est aux musulmans de se mettre d'accord. L'Etat essaye de forcer cette organisation depuis au moins vingt ans, sans succès. Il négocie avec des représentants des pays d'origine des populations musulmanes, et même si des efforts sont faits pour élargir le panel, je pense que l'Etat devrait se tenir à l'écart de telles initiatives et s'en tenir à faire respecter la loi. On n'a pas démontré que l'islam a un problème d'argent, mais il est avéré que les discours idéologiques et politiques prononcés dans certaines mosquées sont hors la loi. Le financement est en réalité un faux débat. Les vraies questions sont d'ordre idéologique, de la formation des imams et de l'éducation.

 

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SOURCE : L'EXPRESS

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Islam et christianisme : les impasses du dialogue interreligieux

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Cet article (qu'il faut lire attentivement) date de Janvier dernier... mais il faut enfoncer le clou...

 

 

FIGAROVOX/GRAND ENTRETIEN - L'islamologue François Jourdan revient sur les différences spécifiques qui distinguent l'islam du christianisme. Il déplore un déni de réalité ambiant qui masque les problèmes à résoudre dans le dialogue avec la religion musulmane.

Le père François Jourdan est islamologue et théologien eudiste.
Il est l'auteur de Islam et Christianisme, comprendre les différences de fond , paru en novembre 2015 aux éditions du Toucan.

 

LE FIGARO. - Votre livre Islam et christianisme - comprendre les différences de fond se penche sur une étude approfondie des conditions dans lesquelles pourraient s'amorcer un dialogue islamo-chrétien reposant sur des fondations solides. Quels en sont les principaux dysfonctionnements à l'heure actuelle ?

François JOURDAN. - Nous ne sommes pas prêts au vrai dialogue, ni l'islam très figé depuis de nombreux siècles et manquant fondamentalement de liberté, ni le christianisme dans son retard de compréhension doctrinale de l'islam par rapport au christianisme et dans son complexe d'ancien colonisateur. L'ignorance mutuelle est grande, même si on croit savoir: tous les mots ont un autre sens dans leur cohérence religieuse spécifique. L'islamologie est en déclin dans l'Université et dans les Eglises chrétiennes. Le laïcisme français (excès de laïcité) est handicapé pour comprendre les religions. Alors on se contente d'expédients géopolitiques (histoire et sociologie de l'islam), et affectifs (empathie sympathique, diplomatie, langage politiquement correct). Il y a une sorte de maladie psychologique dans laquelle nous sommes installés depuis environ 1980, après les indépendances et le Concile de Vatican II qui avaient ouvert une attitude vraiment nouvelle sur une géopolitique défavorable depuis les débuts de l'islam avec les conquêtes arabe et turque, la course barbaresque séculaire en mer méditerranée, les croisades et la colonisation.

LE FIGARO. - Sur quoi repose la perplexité des Français vis-à-vis de l'islam ?

François JOURDAN. - Sur l'ignorance et la perception subconsciente qu'on joue un jeu sans se le dire. On ne dit pas les choses, ou Œ est dit et les Ÿ restent cachés et ressortiront plus tard en déstabilisant tout ce qui a été dit auparavant; les mots ont tous un autre sens pour l'autre. Par exemple le mot prophète (nabî en hébreu biblique et en arabe coranique) ; or le prophétisme biblique actif n'est pas du tout de même nature que le coranique passif devant Dieu. Les erreurs comme sur Abraham qui serait le premier monothéiste et donc le père d'un prétendu abrahamisme commun au judaïsme, au christianisme et à l'islam ; alors que, pour les musulmans, le premier monothéiste de l'histoire est Adam. Mais chut! Il ne faut pas le dire! Pourtant l'islam est foncièrement adamique, «la religion de toujours», et non pas abrahamique puisque l'islam ignore totalement l'Alliance biblique faite avec Abraham et qui est la trame de l'histoire du Salut pour les juifs et les chrétiens où Dieu est Sauveur. En islam Dieu n'est pas sauveur. L'islam n'est pas une religion biblique. Et on se doit de le respecter comme tel, comme il se veut être… et en tenir compte pour la compréhension mutuelle que l'on prétend aujourd'hui afficher haut et fort pour se flatter d'être ouvert.

LE FIGARO. - L'Andalousie de l'Espagne musulmane présentée comme le modèle parfait de la coexistence pacifique entre chrétiens et musulmans, les très riches heures de la civilisation arabo-islamique sont pour vous autant d'exemples historiques dévoyés. Comment, et dans quel but ?

François JOURDAN. - Les conquérants musulmans sont arrivés sur des terres de vieilles et hautes civilisations (égyptienne, mésopotamienne, grecque antique, byzantine, latine) ; avec le temps, ils s'y sont mis et ont poursuivis les efforts précédents notamment par la diffusion due à leurs empires arabe et turc ; mais souvent cela n'a pas été très fécond par manque de liberté fondamentale. Les grands Avicenne et Averroès sont morts en disgrâce. L'école rationnalisant des Mu'tazilites (IXe siècle) a été rejetée. Cela s'est grippé notamment au XIe siècle et consacré par la «fermeture des portes de l'ijtihâd», c'est-à-dire de la réinterprétation. S'il y a eu une période relativement tolérante sous ‘Abd al Rahmân III en Andalousie, on oublie les persécutions contre les chrétiens avant, et après par les dynasties berbères almoravides et almohades, y compris contre les juifs et les musulmans eux-mêmes. Là encore les dés sont pipés: on exagère à dessein un certain passé culturel qu'on a besoin d'idéaliser aujourd'hui pour faire bonne figure.

LE FIGARO. - Estimez-vous, à l'instar de Rémi Brague, que souvent, les chrétiens, par paresse intellectuelle, appliquent à l'islam des schémas de pensée chrétiens, ce qui les mène à le comprendre comme une sorte de christianisme, l'exotisme en plus ?

François JOURDAN. - L'ignorance dont je parlais, masquée, fait qu'on se laisse berner par les apparences constamment trompeuses avec l'islam qui est un syncrétisme d'éléments païens (les djinns, la Ka‘ba), manichéens (prophétisme gnostique refaçonné hors de l'histoire réelle, avec Manî le ‘sceau des prophètes'), juifs (Noé, Abraham, Moïse, David, Jésus… mais devenus musulmans avant la lettre et ne fonctionnant pas du tout pareil: Salomon est prophète et parle avec les fourmis…), et chrétiens (Jésus a un autre nom ‘Îsâ, n'est ni mort ni ressuscité, mais parle au berceau et donne vie aux oiseaux d'argile…). La phonétique des noms fait croire qu'il s'agit de la même chose. Sans parler des axes profonds de la vision coranique de Dieu et du monde: Dieu pesant qui surplombe et gère tout, sans laisser de place réelle et autonome à ce qui n'est pas Lui (problème fondamental de manque d'altérité dû à l'hyper-transcendance divine sans l'Alliance biblique). Alors si nous avons ‘le même Dieu' chacun le voit à sa façon et, pour se rassurer, croit que l'autre le voit pareil… C'est l'incompréhension totale et la récupération permanente dans les relations mutuelles (sans le dire bien sûr: il faudrait oser décoder).
Si l'on reconnaît parfois quelques différences pour paraître lucide, on est la plupart du temps (et sans le dire) sur une tout autre planète mais on se rassure mutuellement qu'on fait du ‘dialogue' et qu'on peut donc dormir tranquilles.

LE FIGARO. - Une fois que le concile Vatican II a «ouvert les portes de l'altérité et du dialogue», écrivez-vous «on s'est installé dans le dialogue superficiel, le dialogue de salon, faussement consensuel.» Comment se manifeste ce consensualisme sur l'islam ?

François JOURDAN. - Par l'ignorance, ou par les connaissances vues de loin et à bon compte: c'est la facilité. Alors on fait accréditer que l'islam est ‘abrahamique', que ‘nous avons la même foi', que nous sommes les religions ‘du Livre', et que nous avons le ‘même' Dieu, que l'on peut prier avec les ‘mêmes' mots, que le chrétien lui aussi doit reconnaître que Muhammad est «prophète» et au sens fort ‘comme les prophètes bibliques' et que le Coran est ‘révélé' pour lui au sens fort «comme la Bible» alors qu'il fait pourtant tomber 4/5e de la doctrine chrétienne… Et nous nous découvrons, par ce forcing déshonnête, que «nous avons beaucoup de points communs»! C'est indéfendable.

LE FIGARO. - Pour maintenir le «vivre-ensemble» et sauvegarder un calme relationnel entre islam et christianisme ou entre islam et République, se contente-t-on d'approximations ?

François JOURDAN. - Ces approximations sont des erreurs importantes. On entretient la confusion qui arrange tout le monde: les musulmans et les non-musulmans. C'est du pacifisme: on masque les réalités de nos différences qui sont bien plus conséquentes que ce qu'on n'ose en dire, et tout cela par peur de nos différences. On croit à bon compte que nous sommes proches et que donc on peut vivre en paix, alors qu'en fait on n'a pas besoin d'avoir des choses en commun pour être en dialogue. Ce forcing est l'expression inavouée d'une peur de l'inconnu de l'autre (et du retard inavoué de connaissance que nous avons de lui et de son chemin). Par exemple, la liberté religieuse, droit de l'homme fondamental, devra remettre en cause la charia (organisation islamique de la vie, notamment en société) . Il va bien falloir en parler un jour entre nous. On en a peur: ce n'est pas «politiquement correct». Donc ça risque de se résoudre par le rapport de force démographique… et la violence future dans la société française. Bien sûr on n'est plus dans cette période ancienne, mais la charia est coranique, et l'islam doit supplanter toutes les autres religions (Coran 48,28; 3,19.85; et 2,286 récité dans les jardins du Vatican devant le Pape François et Shimon Pérès en juin 2014). D'ailleurs Boumédienne, Kadhafi, et Erdogan l'ont déclaré sans ambages.

LE FIGARO. - Vous citez des propos de Tariq Ramadan, qui déclarait: «L'islam n'est pas une religion comme le judaïsme ou le christianisme. L'islam investit le champ social. Il ajoute à ce qui est proprement religieux les éléments du mode de vie, de la civilisation et de la culture. Ce caractère englobant est caractéristique de l'islam.» L'islam est-il compatible avec la laïcité ?

François JOURDAN. - Cette définition est celle de la charia, c'est-à-dire que l'islam, comme Dieu, doit être victorieux et gérer le monde dans toutes ses dimensions. L'islam est globalisant. Les musulmans de Chine ou du sud des Philippines veulent faire leur Etat islamique… Ce n'est pas une dérive, mais c'est la cohérence profonde du Coran. C'est incompatible avec la liberté religieuse réelle. On le voit bien avec les musulmans qui voudraient quitter l'islam pour une autre religion ou être sans religion: dans leur propre pays islamique, c'est redoutable. De même, trois versets du Coran (60,10; 2,221; 5,5) obligent l'homme non musulman à se convertir à l'islam pour épouser une femme musulmane, y compris en France, pour que ses enfants soient musulmans. Bien sûr tout le monde n'est pas forcément pratiquant, et donc c'est une question de négociation avec pressions, y compris en France où personne ne dit rien. On a peur. Or aujourd'hui, il faut dire clairement qu'on ne peut plus bâtir une société d'une seule religion, chrétienne, juive, islamique, bouddhiste… ou athée. Cette phase de l'histoire humaine est désormais dépassée par la liberté religieuse et les droits de l'Homme. La laïcité exige non pas l'interdiction mais la discrétion de toutes les religions dans l'espace public car les autres citoyens ont le droit d'avoir un autre chemin de vie. Ce n'est pas la tendance coranique où l'islam ne se considère pas comme les autres religions et doit dominer (2,193; 3,10.110.116; 9,29.33).

LE FIGARO. - La couverture du numéro spécial de Charlie Hebdo commémorant les attentats du 7 janvier, tiré à un million d'exemplaires représente un Dieu en sandales, la tête ornée de l'œil de la Providence, et armé d'une kalachnikov. Il est désigné comme «l'assassin [qui] court toujours»… Que révèle cette une qui semble viser, par les symboles employés, davantage la religion chrétienne que l'islam ?

François JOURDAN. - Il y a là un tour de passe-passe inavoué. Ne pouvant plus braver la violence islamique, Charlie s'en prend à la référence chrétienne pour parler de Dieu en islam. Représenter Dieu serait, pour l'islam, un horrible blasphème qui enflammerait à nouveau le monde musulman. Ils ont donc choisi de montrer un Dieu chrétien complètement déformé (car en fait pour les chrétiens, le Père a envoyé le Fils en risquant historiquement le rejet et la mort blasphématoire en croix: le Dieu chrétien n'est pas assassin, bien au contraire). Mais il faudrait que les biblistes chrétiens et juifs montrent, plus qu'ils ne le font, que la violence de Dieu dans l'Ancien Testament n'est que celle des hommes mise sur le dos de Dieu pour exprimer, par anthropomorphismes et images, que Dieu est fort contre le mal. Les chrétiens savent que Dieu est amour (1Jn 4,8.16), qu'amour et tout amour. La manipulation est toujours facile, même au nom de la liberté.

LE FIGARO. - Toutes les religions ont-elles le même rapport à la violence quand le sacré est profané ?

François JOURDAN. - Toutes les civilisations ont légitimé la violence, de manières diverses. Donc personne n'a à faire le malin sur ce sujet ni à donner de leçon. Il demeure cependant que les cohérences doctrinales des religions sont variées. Chacune voit ‘l'Ultime' (comme dans le bouddhisme sans Dieu), le divin, le sacré, Dieu, donnant sens à tout le reste: vision du monde, des autres et de soi-même, et le traitement de la violence en fait partie. C'est leur chemin de référence. Muhammad, objectivement fondateur historique de l'islam, a été chef religieux, politique et militaire: le prophète armé, reconnu comme le «beau modèle» par Dieu (33,21) ; et Dieu «prescrit» la violence dans le Coran (2,216.246) et y incite (8,17; 9,5.14.29.73.111.123; 33,61; 47,35; 48,29; 61,4; 66,9…), le Coran fait par Dieu et descendu du ciel par dictée céleste, étant considéré par les musulmans comme la référence achevée de la révélation; les biographies islamiques du fondateur de l'islam témoignent de son usage de la violence, y compris de la décapitation de plus de 700 juifs en mars 627 à Médine. Et nos amis de l'islam le justifient.
Et selon la règle ultra classique de l'abrogation (2,106), ce sont les versets les derniers qui abrogent ceux qui seraient contraires ; or les derniers sont les intolérants quand Muhammad est chef politique et militaire. Ce n'est pas une dérive. Quand, avec St Augustin, le christianisme a suivi le juriste et penseur romain païen Cicéron (mort en 43 avant Jésus-Christ) sur l'élaboration de la guerre juste («faire justement une guerre juste» disait-il), il n'a pas suivi l'esprit du Christ. Gandhi, lisant le Sermon sur la Montagne de Jésus (Mt 5-7), a très bien vu et compris, mieux que bien des chrétiens, que Dieu est non-violent et qu'il faut développer, désormais dans l'histoire, d'autres manières dignes de l'homme pour résoudre nos conflits. Car il s'agit bien de se défendre, mais la fin ne justifie pas les moyens, surtout ceux de demain qui seront toujours plus terriblement destructeurs. Mais les chrétiens qui ont l'Evangile dans les mains ne l'ont pas encore vraiment vu. Ces dérives viennent bien des hommes mais non de Dieu qui au contraire les pousse bien plus loin pour leur propre bonheur sur la terre. Pour en juger, il faut distinguer entre les dérives (il y en a partout), et les chemins de référence de chaque religion: leur vision de Dieu ou de l'Ultime. Au lieu de faire lâchement l'autruche, les non-musulmans devraient donc par la force de la vérité («satyagraha» de Gandhi), aider les musulmans, gravement bridés dans leur liberté (sans les juger car ils sont nés dans ce système contraignant), à voir ces choses qui sont cachées aujourd'hui par la majorité ‘pensante' cherchant la facilité et à garder sa place. Le déni de réalité ambiant dominant est du pacifisme qui masque les problèmes à résoudre, lesquels vont durcir, grossir et exploseront plus fort dans l'avenir devant nous. Il est là le vrai dialogue de paix et de salut contre la violence, l'aide que l'on se doit entre frères vivant ensemble sur la même terre.

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Par Eléonore de Vulpillières, pour Le Figaro

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30/06/2016

Dantec Conservateur : "Du tueur en série comme microcosme de la Modernité"

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et

 

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Le 19 juin 2007, à la Librairie Ville-Marie de Montréal, eut lieu une rencontre publique organisée par "Égards, revue de la résistance conservatrice" autour de l'oeuvre de Maurice G. Dantec. La soirée débuta avec une conférence du philosophe et essayiste québécois, Jean Renaud, qui évoqua l'oeuvre de Dantec. Le titre de son intervention : "Du tueur en série comme microcosme de la Modernité"...

 


Jean Renaud nous parle de l'oeuvre de Maurice G. Dantec

 


Réponse de Maurice G. Dantec à Jean Renaud

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10/05/2016

Le Communisme ? C'était mieux avant...

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Georges Marchais - PCF : immigration et laïcité

 

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02/05/2016

Les cinq plus grands regrets émis avant de mourir...

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N'attendez pas... 

 


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17/03/2016

Eric Zemmour : "Et si on changeait le nom de notre pays ?"

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