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11/02/2019

"Juste une jolie Parisienne de gauche tendance écolo-quinoa-Naturalia"...

=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=

 

Ces nimbus sont tellement pathétiques que je n'éprouve qu'une seule envie, profonde et intransigeante : les laisser mariner un bon moment au milieu de l'univers que leur pitoyable idéologie a contribué à instaurer dans notre beau pays... car Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes...

 

 

Agressions : “Pour la première fois, ma compagne souhaite que nous quittions le quartier” l’élu Pierre Liscia témoigne

 

“Je ne veux pas que notre enfant grandisse ici, au milieu des immondices, de la crasse, de la drogue et de la violence, sans jamais pouvoir aller au parc puisque tous nos parcs sont squattés par des toxicos et des dealers”. La compagne de Pierre Liscia, élu du XVIIIe arrondissement, est enceinte et ne supporte plus ni les agressions, ni le harcèlement. Cette femme de gauche qui “n’a jamais cédé ni à la peur ni au sentiment d’insécurité” est aujourd’hui à bout. Dans le nord de Paris en effet, le quotidien des femmes ressemble de plus en plus à un épisode de The Walking Dead. Sur Twitter, l’élu a publié le témoignage suivant :

“Ces derniers temps, je ne me sens plus en sécurité. J’ai peur.“Pour la première fois, ma compagne souhaite que nous quittions le quartier.

J’habite à Paris. Ma compagne est enceinte. Et aujourd’hui, elle a peur. Elle a peur quand elle va allant travailler et qu’elle se retrouve au milieu d’une dizaine de toxicomanes qui occupent les quais du métro Marx Dormoy dès 8h du matin.

Peur de se retrouver au milieu d’une énième rixe entre trafiquants et vendeurs à la sauvette et de risquer d’y être à nouveau bousculée, comme ce fût le cas il y a une dizaine de jours.

Cet après-midi, je l’ai accompagnée en voiture à la maternité. Angoissée à l’idée de passer par la Porte de La Chapelle, notre itinéraire habituel, j’ai fait un détour. Avec la “colline du crack”, la Porte de La Chapelle est devenu un véritable enfer.

Ce soir, nous sommes allés diner vers Pigalle. En rentrant, les stations Marcadet et Marx Dormoy étaient littéralement envahies de toxicomanes. Dans la rame, un homme s’est assis à côté d’elle et a allumé sa pipe à crack.

En sortant de la rame, un autre nous a interpellé en balbutiant des phrases incompréhensibles. Il était particulièrement agressif. J’ai senti ma compagne tressaillir quand il a tendu vers nous sa main pleine de sang.

Dans la rue, un homme nous a suivi sur une cinquantaine de mètre pour nous demander d’abord si nous attendions une fille ou un garçon, avant de se montrer plus oppressant pour nous réclamer de l’argent.

En arrivant chez nous, ma compagne me dit : “Je ne veux pas que notre enfant grandisse ici, au milieu des immondices, de la crasse, de la drogue et de la violence, sans jamais pouvoir aller au parc puisque tous nos parcs sont squattés par des toxicos et des dealers”.

Ma compagne est de gauche.

Pas une socialiste. Juste une jolie Parisienne de gauche tendance écolo-quinoa-Naturalia. Elle a toujours aimé notre quartier, certes difficile, mais qui a un certain charme. Elle n’a jamais cédé ni à la peur ni au sentiment d’insécurité.

J’habite à Paris.

Ce soir, pour la première fois, ma compagne veut quitter notre quartier parce qu’elle ne s’y sent plus en sécurité : elle a peur pour elle et pour notre bébé.

Franchement. Qui peut le lui reprocher ?
Et vous Anne Hidalgo, qu’en pensez-vous ?

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SOURCE : Bellica, Femmes Entières

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10/02/2019

Réchauffement climatique : le pavé dans la mare !

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Comment le GIEC s’y est-il pris pour calculer la température moyenne dont il prétend qu’elle a augmenté d’environ 1° C au cours du dernier siècle ?

Par Thierry Godefridi

 

Si vous vous êtes demandé pourquoi il est difficile de prédire la météo sous nos latitudes à plus de quelques jours alors qu’il serait possible de prévoir le climat à l’échéance de plusieurs siècles, voire seulement quelques dizaines d’années, sur la Terre entière, Jean-Marc Bonnamy vous rassure : vous avez raison de vous interroger et il explique pourquoi dans Réchauffement climatique : Le pavé dans la mare ! », innocentant au passage le CO2 de toute responsabilité dans un « réchauffement » – ou « changement », ou « dérèglement »… – de la planète, à l’encontre des allégations du GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, créé en 1988 pour se pencher sur la question.

La question du rôle du CO2 est emblématique de la tournure politique, idéologique, quasi-religieuse du débat climatique. Dans la foulée du GIEC, les réchauffistes interprètent la corrélation statistique entre la courbe de l’élévation des températures et celle de la teneur en CO2 de l’atmosphère comme une loi physique de cause à effet, le CO2 provoquant cette élévation.

Le rôle du CO2

Ne pourrait-on pas en déduire l’inverse, à savoir que la teneur en CO2 de l’atmosphère augmente en fonction de l’élévation de la température ? Une corrélation ne peut à elle seule servir de preuve. D’ailleurs, comment s’expliquent les périodes de décorrélation entre températures et teneurs en CO2 dans les données dont fait état le GIEC lui-même ?

Jean-Marc Bonnamy résume la thèse du GIEC comme suit : la Terre se réchauffe, ce réchauffement entraînera des catastrophes, il est dû à l’effet de serre du CO2 et ce dernier résulte du développement de l’activité humaine. Et il entreprend de démontrer, dans les premiers chapitres de son livre, qu’un phénomène physique de saturation de l’effet de serre, que personne ne nie, exonère le CO2, au-delà de ce qu’il accomplit déjà, de toute incidence dans un quelconque réchauffement climatique au sens dans lequel le GIEC l’entend et que, si tant est qu’il y a réchauffement de la Terre, c’est ailleurs qu’il faut en chercher la raison.

Mais, au fait, comment le GIEC s’y est-il pris pour calculer la température moyenne dont il prétend qu’elle a augmenté d’environ 1° C au cours du dernier siècle ? Il s’est servi de donnés relevées à des dates et endroits divers par des stations météorologiques disparates, données qu’il a traitées (sans en communiquer la manière) et dont il a établi une moyenne qui est une fiction puisqu’une moyenne de températures n’est pas une température moyenne.

Mépris des données scientifiques

Et les objectifs de limitation de ladite température qui en découlent sont absurdes, outre le fait que les échelles de température Celsius et Fahrenheit sont arbitraires. Si l’on entend parler scientifiquement, ne conviendrait-il pas de parler en Kelvins ?

Jean-Marc Bonnamy dit sa surprise d’avoir constaté dans les rapports du GIEC disponibles sur la toile combien le rapport pour les décideurs politiques s’affranchissait des rapports scientifiques qui étaient supposés lui servir de base. Quand bien même les scientifiques admettent qu’aucune donnée ne permet de confirmer la réalité d’un réchauffement climatique, ni d’attribuer ce réchauffement à l’activité humaine, cela devient dans le rapport destiné aux décideurs politiques « le réchauffement climatique ne fait aucun doute et son attribution à l’activité humaine est prouvée ». Qui convient-il de croire ? Le GIEC ou le GIEC ? « Il faut cesser de considérer le GIEC comme un établissement scientifique, conclut Jean-Marc Bonnamy, et le prendre pour ce qu’il est : un lobby politique. »

Un chiffre notoirement faux

C’est en ce sens que se comprend la décision du président américain Trump de retirer les États-Unis de l’Accord de Paris sur le réchauffement climatique.

Le chiffre de 0,6 °C de réchauffement de la planète sur un siècle avancé par le GIEC sans intervalle de précision dans son rapport initial signifiait que la donnée comportait une précision de l’ordre de l’arrondi de la décimale suivante, en d’autres mots que le GIEC prétendait à une précision de l’ordre de 0,05° – 5 centièmes de degré ! Mais, outre ce chiffre d’une précision invraisemblable, le GIEC en a avancé d’autres qui étaient notoirement faux. Jean-Marc Bonnamy en dresse une liste. Les constructivistes, quel que soit l’horizon idéologique auquel ils appartiennent, ne sont jamais à court de conjectures, ni d’aplomb.

Le problème fondamental n’est-il pas que le climat, comme la météo, est un phénomène chaotique, c’est-à-dire ni stationnaire, ni cyclique, qui dépasse les limites épistémologiques de la connaissance humaine car il comprend un nombre infini de variables connues et inconnues d’une précision infinie dont le déterminisme inhérent se manifeste sur des durées de plusieurs milliers, dizaines de milliers, centaines de milliers d’années et échappe totalement à l’entendement humain ?

Reste à écrire le livre sur la question de savoir à quoi servent et, surtout, à qui profitent le GIEC ainsi que les accords, les politiques et l’agit-prop écologiste qui s’en prévalent.

 

Réchauffement climatique : Le pavé dans la mare ! (Jean-Marc Bonnamy), 164 pages, Éditions L’Harmattan.

 

Sur le Web

 

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SOURCE : Contrepoints

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09/02/2019

La virilité, premier pouvoir et dernier tabou du monde musulman

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Dans un nouvel essai, la philosophe Nadia Tazi développe l’hypothèse que la virilité dans le monde musulman serait non seulement le principe déterminant du rapport entre les hommes et les femmes, mais aussi celui du despotisme politique et social.

 

Nous avons rencontré Nadia Tazi dans le cadre des Rencontres d’Averroès à Marseille en novembre 2018 sur le thème des relations entre les sexes, d’hier à aujourd’hui, en Méditerranée. Philosophe, journaliste, essayiste, elle vient de publier Le genre intraitable. Politiques de la virilité dans le monde musulman (Actes Sud, 2018), fruit d’un travail de quinze ans.

 

Dans votre nouvel essai, vous écrivez que « la virilité est restée le premier pouvoir et le dernier tabou » . En quoi cette question est-elle taboue ?

Cette question n’est jamais politiquement énoncée comme telle. On parle de la condition des femmes, de l’inégalité entre les sexes, de l’homosexualité, mais la question des masculinités est évacuée. D’abord parce que c’est nouveau. En Occident même, cette recherche vient plus tard que celle des femmes, en réaction ou parallèlement au féminisme. De plus, on ne peut pas plaquer les schémas occidentaux sur l’Orient musulman. Évidemment, le machisme existe partout, mais il n’a pas du tout la même portée, pas les mêmes sources ni les mêmes lois. Il faut déjà commencer par poser la question dans les différents pays musulmans et réfléchir sur leur point commun : le despotisme politique. Lors de la table ronde « Des relations entre les sexes fondées sur des imaginaires et des valeurs » aux Rencontres d’Averroès, on a bien perçu les différences entre les musulmans eux-mêmes. Sur le voile, les points de vue des intervenantes turque, marocaine, algérienne n’étaient pas du tout identiques. Le voile est un joker, on lui donne le sens qu’on veut ; c’est aussi ce qui explique sa perpétuation.

 

Vous consacrez un chapitre passionnant à la complexité du voile, « une coutume immémoriale ou une surdétermination identitaire face à la menace de l’étranger – ou encore un retournement ironique au nom de la liberté et de l’identité (…) » ?

En France, le voile a une connotation identitaire : si vous l’expliquez à une Afghane qui se bat contre la burqa et qui a des problèmes pour éduquer sa fille, ou à une Pakistanaise qui constate l’accroissement du féminicide ou des crimes d’honneur, elles vous regardent comme si vous arriviez de la planète Mars…

 

Vous mettez en rapport désert et virilité. Pourquoi ?

Le désert est essentiellement rareté. Lawrence d’Arabie a eu une formule terrible : c’est « la mort vivante ». L’homme est perpétuellement sous la menace de la Nature. Pour révoquer l’idée de survie, le Bédouin, l’homme du désert, va développer une économie de la dépense. Puisqu’il ne veut pas être comme l’animal dans la seule logique de survie, il est dans l’excès. Et cet excès farouche se manifeste dans la bravoure au combat et de manière somptuaire dans l’hospitalité – des valeurs que l’islam gardera en leur donnant un sens nouveau. La virilité est née d’un parallélisme avec le désert, de la volonté de l’homme de s’élever à hauteur de cette Nature exorbitante, par lui même, sans Dieu, par la voie de son ethos, de ses mœurs et du langage qui les glorifie. D’où tant de poèmes et de récits hallucinés, une mythologie à laquelle on se réfère encore sans le savoir.

Au VIIe siècle, avec la révélation faite à Mahomet, va naître l’islam. En 630, à la tête d’une armée, le Prophète conquiert La Mecque qu’il avait dû fuir en 622 (l’Hégire) et il convertit à l’islam les tribus d’Arabie dont il devient le chef à la fois religieux, politique et militaire. Les Bédouins vont sortir du désert – une sortie physique et symbolique – et, en moins d’un siècle, les premiers califes conquièrent le monde. Inscrit dans l’inconscient collectif, cet âge d’or est d’autant plus célébré que les sociétés se vivent comme déchues. La conquête représente l’expression de la virilité archaïque du désert.

 

Vous évoquez la différence, mais aussi l’imbrication entre deux concepts au cœur de votre livre : la masculinité et la virilité…

L’islam et la Cité vont offrir un autre voie que la virilité, celle du masculin qui s’élève contre l’excès, contient la violence par la fraternité, et sublime l’honneur en le haussant jusqu’à la chevalerie. L’islam donne aux masculinités une éthique qui interdit le meurtre, invite à la tempérance et institue une communauté. L’hybris (la démesure), la dépense et la violence sont contrariés par l’idée de juste milieu, par la mesure, la modestie, la décence, constitutives de ce que je désigne comme masculin. Et ce masculin est appuyé par la prééminence de la communauté sur l’individu. La communauté qui est conservatrice (elle se fonde sur le consensus) établit une masculinité vertueuse et apaisée. Mais les normes pondératrices de l’islam ne pourront entièrement contenir les débordements des conquérants et des despotes qu’ils soient petits (domestiques) ou grands (à la tête de l’État). Il y aura toujours coexistence et balancement du viril et du masculin. La norme viriliste ne cessera de hanter l’islam, en particulier à travers la coutume.

 

Cependant, avant la tragique dérive de l’islamisme, tout ne se passait pas si mal dans la société et dans l’intimité… La virilité fait-elle de tels ravages ?

Il existait un certain équilibre autour des valeurs patriarcales fondées sur les prescriptions de l’islam et sur les lois coutumières. Au fond, comme l’avait montré l’ethnologue Germaine Tillion (1907-2008), la question des femmes dans le monde musulman était alors proche de ce qui se passait dans la plupart des sociétés méditerranéennes. À partir du partage des rôles, chacun y trouvait son compte. On estimait l’homosocialité (la non-mixité) normale : que les femmes soient à la maison, qu’elles remplissent leur rôle de mère et d’épouse et s’accomplissent ainsi, et que les hommes puissent avoir les deux sphères : le public et le privé. Plus les femmes étaient riches, plus elles vivaient cloîtrées. Mais elles avaient leur vie propre, un entre-soi agrémenté par l’art de vivre qu’elles avaient su tisser. Et elles gagnaient du pouvoir en devenant mères, c’est-à-dire en accédant à l’unicité : contrairement à l’épouse dans certaines sociétés polygamiques, la mère sera toujours l’Unique pour ses fils. Consciemment ou inconsciemment, pour asseoir ce pouvoir d’influence, elle s’attache ses garçons, les éduque et les « revirilise » en permanence. C’est auprès d’elle surtout que l’homme trouve réconfort et soutien. On aime également rappeler que les mères des sultans ottomans, par exemple, avaient des droits et des revenus importants ; elles ne régnaient pas seulement sur le harem impérial, elles fondaient des monuments, elles assistaient derrière le voile aux réunions du gouvernement… Le problème se pose de manière beaucoup plus aiguë avec l’arrivée de la modernité.

 

Pourquoi ?

Parce qu’en principe, la modernité politique ne reconnaît pas ces valeurs patriarcales. Elle met à mal le pacte implicite selon lequel l’homme est dominant / protecteur. Il est contraint par la loi musulmane de subvenir aux besoins de la femme et doit répondre de son éducation morale et religieuse. Cette prise en charge matérielle et spirituelle justifierait son pouvoir. Tout se complique quand les femmes sortent de la maison, qu’elles accèdent à l’éducation, au travail, à la contraception, etc. Mais la question du dehors-dedans est restée fondamentale. Chez soi, on fait ce que l’on veut, et on n’a de comptes à rendre qu’à Dieu, à sa conscience. Et les rapports entre les sexes y sont négociés individuellement, de manière empirique.

La virilité est par définition extravertie. Mieux, elle est ostentatoire, elle doit être reconnue comme telle par autrui, par opposition au masculin qui renvoie au for intérieur, à l’intime. À l’extérieur, l’homme doit montrer qu’il est le maître et veiller à la réputation de sa femme, sa fille ou sa sœur. Traditionnellement, la femme n’a accès au monde que voilée, protégée, c’est-à-dire contrôlée. Elle doit donner l’image d’une femme raisonnable qui, comme le disent les mollahs, «reste à sa place». À l’intérieur, elle a peu de droits, mais elle s’appuie sur l’attachement sexuel et affectif, sur l’éducation des enfants, et elle est supposée gardienne des traditions (morales, culturelles, esthétiques…). Elle conquiert son territoire. Cette séparation problématique du public et du privé, de l’apparence et de la réalité, du dire et du faire, est instituée au départ pour protéger la communauté. Avec la modernité, ces arrangements ne marchent pas.

 

Selon vous, ce principe de virilité serait au fondement du despotisme politique et social.

D’un côté, l’homme est élevé dans le culte de la virilité ; de l’autre, il est castré par les pouvoirs despotiques en place. Dans le cadre familial, le père commande le fils, lequel fils, pour assurer son pouvoir, va à son tour commander les plus jeunes, les cadets, la sœur, la femme. Comment voulez-vous que cet autre clivage ne produise pas de problèmes ? Et hors de la maison, l’homme du commun n’a pour ainsi dire pas de vie politique.

 

Jusqu’à cette démence meurtrière de l’islamisme ?

Comme le dit l’islamologue François Burgat, « on a les islamistes qu’on mérite ! » Si vous considérez les pouvoirs en place, ils ont tous sans exception matraqué leur population. Bien sûr, auparavant, la colonisation a humilié les hommes et fait des ravages à tous points de vue. Au moment des indépendances, on attendait des nouveaux régimes qu’ils améliorent le sort de la population. Ce n’est pas ce qui s’est passé. La désillusion et l’amertume ont été énormes, dévastatrices.

Il faut noter que tous les chefs historiques des islamistes ont fait de la prison. Ce ne sont pas des lettrés, formés dans les instituts de théologie ou les universités, mais des gens simples pour la plupart, élevés contre la colonie et ensuite contre l’État, qui ont passé des années derrière les barreaux et y ont produit un corpus théorique très pauvre. Si l’islam devient « politique », c’est pour une large part qu’il est depuis toujours le premier et le dernier recours contre l’oppression. Ce sont des hommes frustrés, enfermés dans les « passions tristes » : la haine, le ressentiment, l’humiliation, le sentiment d’échec. Pour fabriquer un ordre viriliste, quel qu’il soit, il faut au départ un état d’exception : des conditions extrêmes telles que le désert, la guerre, un régime tyrannique, la colonie, des mutations anthropologiques et culturelles brutales…

 

Pourquoi l’Occident est-il au centre de la haine islamiste ?

Les islamistes sont virilistes, et l’Occident, hégémonique, sécularise les sociétés, envahit les territoires et les esprits, émancipe les femmes, humilie les perdants.

Qu’ont les Occidentaux à proposer aux populations de ces pays, hormis globalement la consommation et le sexe ? Où sont les gauches et que font-elles ? L’avènement des islamistes traduit un double malaise, à la fois par rapport à leurs dirigeants et leurs sociétés en panne et par rapport à l’Occident. À l’homme ordinaire qui ne sait plus où il en est, qui a perdu ses repères, qui a été rabaissé par une modernisation exogène et par l’État, l’islamisme redonne fierté, autorité, dignité.

 

Vous commencez votre livre en évoquant Saddam Hussein. Existe-t-il un personnage plus emblématique de la virilité ?

Il est hallucinant, monstrueux, c’est un personnage shakespearien. Il faut rappeler ses mérites : en dix ans, il a amélioré le sort des femmes, a effacé totalement l’analphabétisme, a aménagé Bagdad qui était dans un état pitoyable. Mais sa virilité l’a amené à être le premier importateur d’armements au monde et à se lancer dans une guerre absurde contre l’Iran : un million de morts pour un motif ridicule. Il pensait faire une guerre éclair à l’israélienne ! « Je serai à Téhéran dans huit jours ! » La guerre a duré huit ans. Tout ce qu’il avait investi d’un côté, il l’a détruit de l’autre. Puis il y eut deux autres guerres, dont la première en particulier qui, avec l’invasion du Koweït, fut motivée par son hybris, son orgueil narcissique de macho. Il a été une calamité pour son peuple. Aujourd’hui encore, l’Irak paie le prix d’une folie viriliste.

 

Pas une folie tout court, une folie viriliste ?

C’est ce qui l’anime jusqu’au bout. Souvenez-vous quand il est pendu. Tandis que les bourreaux l’injurient et chantent le nom de leur champion chiite, il dit : « C’est ça pour vous la virilité ? » et il affronte, fait littéralement face ; on lui met la corde au cou et il refuse la cagoule qu’on lui présente. Avant, il y a deux scènes étonnantes : celle où il est déguisé en clochard, où on va le déloger de sa tanière et lui inspecter les dents comme une bête ; puis la scène du procès où, rasé et élégant, il fait face là encore, en voulant sauver l’honneur, rester le chef, le vainqueur… C’est ce qui m’a donné envie de faire ce livre et c’est ainsi qu’il commence. Je me suis demandé : c’est quoi cette histoire ? Comment en arrive-t-on là ? Saddam Hussein ne s’est pas appuyé sur l’islam – c’est un nationaliste arabe. Tous les nationalismes sont virilistes : une nation, même démocratique, c’est toujours une force face à une autre force. Mais la mémoire de l’islam joue aussi sa part.

 

Comment sortir de cette prégnance de la virilité, particulièrement lourde dans l’islam, même si elle existe ailleurs ? Vous évoquez longuement la figure du Prophète à la fois viril, masculin et féminin…

Une partie de son âme est féminine. Le culte de la vierge Marie existe en islam, et dans la légende, Mahomet est comme une page blanche, une page vierge ensemencée par la parole de Dieu que convie l’ange Gabriel. Quand il reçoit la Révélation, il est dans une posture de pur abandon et de félicité, mais aussi de crainte. Lorsqu’il est pris de tremblements, transporté comme un chamane par ce qui lui arrive, il a peur. Peur d’être possédé par un djinn, une force maléfique. C’est alors que son épouse Khadidja, la première des convertis de l’islam, le protège, l’entoure de ses bras ou de son voile, et lui dit : « C’est l’ange ! ». Elle le rassure, lui donne quelque chose d’essentiel : la confiance, soit étymologiquement la foi en quelque chose ou en quelqu’un. C’est donc une femme qui va soutenir le Prophète et cela est rarement dit, sauf par les mystiques.

 

Le Prophète est donc porteur d’une certaine douceur…

Les mystiques disent : « Dieu est doux et il aime la douceur en toute chose. » Autrement dit, Dieu n’aime pas la force, le pouvoir, l’excès ; et c’est la douceur qui constitue la vraie puissance. L’accueil du féminin peut contribuer à dissoudre l’injonction viriliste, à faire que le masculin s’enrichisse loin du bruit et des turbulences surmâles, et que l’homme se libère du fardeau qu’il s’est imposé à lui-même.

 

Concrètement, cela peut se traduire de quelle manière ?

C’est à chaque fois le retour au politique qui s’impose. Il faut développer un minimum de maturité dès la petite école pour sortir de l’infantilisme viril. Il y a une action pédagogique à conduire de toute urgence pour briser le cercle infernal où d’un côté la mère pousse en avant son fils – un demi-dieu à ses yeux – et où de l’autre, le père l’enfonce. Où sont partout disséminés des rapports de pouvoir. Je caricature, évidemment, mais ce sont ces logiques qu’on voit à l’œuvre.

Les femmes sont la clé : il est plus facile d’agir positivement, de s’appuyer sur un désir de liberté que de contraindre un genre aussi enraciné. Si on émancipe les femmes, elles ouvrent la maison au monde, et n’ont plus besoin de pousser et de reviriliser leurs fils. Et les hommes ne doivent plus se montrer à tout prix comme des maîtres. Si on va dans le sens de la liberté des femmes, on avance dans l’émancipation générale. Car le viril ordinaire ne rabaisse pas seulement les femmes ; pour s’affirmer, il rabat tout ce qui n’est pas lui et qu’il considère comme « efféminé » : l’esclave autrefois, l’intellectuel, l’artiste, les minorités sexuelle, ethnique et religieuse, le juif en particulier, l’étranger… À partir du moment où on éduque les peuples dans un sens non despotique, on en finit avec la logique selon laquelle l’homme doit retrouver sa virilité chez lui parce qu’il est opprimé au dehors. Si on donne de l’espace au masculin, on l’amène à la citoyenneté, à une responsabilité citoyenne. Et tout le monde respire. C’est assez simple en théorie, mais très compliqué à mettre en œuvre.

 

L’émancipation démocratique ne se décrète pas !

Elle se conquiert. On n’est pas très inspiré en ce moment, il n’y a pas de modèle adéquat. Et les islamistes sont d’une grande habileté politique : ils ne font pas seulement de la pédagogie on line et dans leurs mosquées, ils prennent les gens en charge, ils leur donnent une sécurité psychique et matérielle, et ils vont partout.

 

Selon vous, la montée de l’islamisme exprime plus un regain de virilisme qu’un réveil de la foi.

On ne le dit pas, mais on le pense tout bas. C’est flagrant, les seuls projets politiques de ces populistes sont l’assujettissement des femmes et le djihad. Je me suis dit : on traite toujours des opprimés. Il ne s’agit pas que des femmes, il y a les fils aussi, tout ce qu’ils subissent avant de s’affranchir du père ou du frère aîné, et les minorités en général. Le temps est venu de s’intéresser aux maîtres, aux despotes politiques et familiaux …

 

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SOURCE : LE MONDE DES RELIGIONS

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08/02/2019

Le Sénat de New York adopte un projet de loi permettant l’avortement jusqu’à la naissance

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Le Sénat de New York a adopté mardi un projet de loi qui autoriserait l’avortement jusqu’au dernier jour du terme.

Aujourd’hui, les avortements tardifs sont illégaux à New York. Si ce projet de loi aboutissait, ils seraient désormais autorisés et les non-médecins seraient autorisés à les pratiquer. Cette mesure serait la concrétisation de l’engagement du gouverneur Andrew Cuomo, accompagné de Hillary Clinton, relayé par le NY Times, qui s’était engagé dès le lundi 07 janvier à protéger et à étendre les lois sur l’avortement de l’État dans les 30 premiers jours de la nouvelle session législative.

Selon Metro USA, le projet de loi stipule que les habitants de New York auront ​​le droit de demander un avortement dans les 24 semaines suivant le début de leur grossesse, ou à tout moment si la grossesse n’est pas viable ou si existe un risque pour la santé.

Mais selon New York Right to Life, l’exception pour cause de « santé » après les 24 semaines est décrite de manière particulièrement floue. Cette clause autoriserait les femmes à avorter les bébés à naître jusqu’à l’âge de neuf mois de grossesse pour « des facteurs d’âge, économiques, sociaux et émotionnels, plutôt que la définition biologique de ‘santé’ qui vient normalement à l’esprit ».

L’organisation a publié un mémo d’opposition au projet de « Reproductive Health Act » (RHA), dénonçant les nouvelles mesures en 5 points :

  • RHA établirait l’avortement comme un droit fondamental à NY
  • RHA autoriserait l’avortement jusqu’au jour du terme
  • RHA autoriserait n’importe quel soignant à pratiquer un avortement
  • RHA limiterait les protections des femmes et des enfants à naître des avortements illégaux
  • RHA abrogerait la protection médicale standard des mères et des enfants

Un autre risque serait donc qu’une famille abusive ou un praticien malhonnête par exemple, ne soit plus jugé pour avoir tué illégalement un bébé contre la volonté de la mère. Le Catholic News Service rapporte une histoire pour illustrer le problème :

« Début décembre, un résident du comté de Saratoga a été arrêtée pour avoir frappé l’estomac d’une femme enceinte de 26 semaines dans le but de provoquer une fausse couche. L’homme a été accusé d’avortement au deuxième degré, mais sous le régime de la RHA, l’attaquant n’aurait pas été accusé de crime. »

À l’annonce de la validation du projet de loi, Karen DeWitt, une journaliste de la radio publique raconte avoir entendu une voix dans l’assemblée s’écrier.

« Que le Dieu tout-puissant aie pitié de cet État. »

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SOURCE : Info Chrétienne

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07/02/2019

Répliques : Le mystère Houellebecq

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Emission du 2 Février 2019... Que signifie être houellebecquien ? Alain Finkielkraut s'entoure d'Agathe Novak-Lechevalier et Frédéric Beigbeder pour l'éclairer.

 

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06/02/2019

Répliques : Demeurer ou partir

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Emission du 24/11/2018... Alain Finkielkraut recevait François-Xavier Bellamy et Sylvain Tesson

 

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05/02/2019

Michèle Tribalat : « Débattre de l'immigration c'est bien, se donner les moyens d'agir c'est mieux ! »

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FIGAROVOX/ENTRETIEN - Un grand débat sur l'immigration ? Michèle Tribalat reste sceptique : elle rappelle que l'État a les mains liées, notamment par ses engagements internationaux et l'interprétation qu'en font les juges français. La démographe pointe aussi les difficultés à mesurer avec précision l'immigration.

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Michèle Tribalat a mené des recherches sur les questions de l'immigration en France, entendue au sens large, et aux problèmes liés à l'intégration et à l'assimilation des immigrés et de leurs enfants. Elle est notamment l'auteur de Statistiques ethniques, une querelle bien française (éd. L'Artilleur, 2016).

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FIGAROVOX.- L'immigration sera finalement bel et bien au menu du «grand débat» proposé par Emmanuel Macron. Cette perspective vous réjouit-elle? Qu'attendez-vous d'un débat sur ce sujet ?

Michèle TRIBALAT.- L'appellation «grand débat» me gêne. En fait, il s'agit soit d'une manière pour l'État de faire baisser la température et tenter de changer l'image d'un président jugé arrogant, méprisant et ne s'intéressant guère à ce que pensent, veulent et souhaitent les Français, soit d'une consultation des Français visant à remédier à l'éloignement du pouvoir afin de recueillir leurs propositions et, éventuellement, d'en tenir compte. Mais, le mode de consultation des Français pour le Président en cours de mandat, c'est, normalement, le référendum.

Par principe, ce n'est pas à l'État d'animer la société, de lui dire quand, comment et sur quoi elle est autorisée à débattre. Les palinodies autour de «fallait-il que l'immigration soit au programme?» en disent long sur la conception qu'a l'État du débat et sur la difficulté pour lui de s'affranchir des normes antiracistes qui gendarment la manière dont on peut s'exprimer sur le sujet. Je suis pour ma part assez perplexe sur ce qui pourra en sortir, particulièrement sur la question de l'immigration.

Le Président pose en particulier la question de l'instauration de quotas, fixés par le Parlement. Est-ce souhaitable selon vous? Pourquoi ?

Quotas ou pas, ce qui est souhaitable est que la question migratoire redevienne une question politique, contrairement à ce que veulent faire croire ceux qui la décrivent comme un phénomène naturel, sur lequel nous ne pouvons pas avoir plus de prise que sur le fait de vieillir. Cette naturalisation du phénomène présente l'immigration comme une fatalité démographique qu'il serait vain et moralement condamnable de vouloir maîtriser, contre laquelle, au fond, on ne peut rien. Elle nourrit ce contre quoi elle a l'air de batailler constamment: la théorie du grand remplacement. Elle délégitime profondément le sentiment de perte ressenti à la perspective de changements démographiques présentés comme à la fois irréversibles et bénéfiques.

Nous sommes dans la situation où les politiques, même ceux qui le voudraient, sont incapables de répondre à la demande des citoyens qui veulent que l'immigration ralentisse. Il est donc périlleux de poser une question sur la maîtrise des flux sur lesquels le pouvoir exécutif n'a pratiquement aucun levier pour agir. Que fera Emmanuel Macron si l'idée de fixer un objectif annuel d'entrées recueille un assentiment massif ?

Ce qu'on attend des politiques c'est qu'ils nous expliquent comment et pourquoi ils se sont laissés dépouiller de leurs prérogatives. S'ils s'en contentent, qu'ils se justifient autrement que par des mensonges de circonstance. Ou qu'ils nous expliquent s'ils sont en mesure de recouvrer des marges de manœuvre et comment ils pourraient s'y prendre.

Nicolas Sarkozy l'avait déjà proposé en 2009, mais l'idée avait été jugée inutile et/ou inefficace… est-ce aussi votre avis ?

En 2008, la commission Mazeaud, à laquelle Brice Hortefeux, avait confié, notamment, la mission de réfléchir à la possibilité d'introduire des quotas, avait jugé ceux-ci impossibles à mettre en œuvre et sans intérêt. Mon avis est que, politiquement, il serait normal de répondre à la demande des électeurs de ralentir les flux, mais que l'exécutif, en l'état, n'en a tout simplement pas les moyens, le pouvoir législatif étant considérablement réduit par l'action des juges. La France est liée par ses engagements européens et ligotée par la place démesurée qu'ont pris les juges dans l'interprétation de ces engagements ou du droit interne.

La question se pose aussi de la compatibilité avec nos principes constitutionnels et nos engagements internationaux…

Je ne suis pas juriste, mais il ne me semble pas que les Cours nationales (Conseil constitutionnel, Conseil d'État et Cour de Cassation) soient tellement en retard aujourd'hui sur les Cours internationales auxquelles nos décisions politiques sont soumises, qu'il s'agisse de la Cour de justice européenne chargée d'interpréter la législation européenne et d'en garantir l'application uniforme dans toute l'UE ou de la Cour européenne des droits de l'homme. Michel Bouleau, magistrat administratif, a publié un article dans le recueil Dalloz dont le titre dit à peu près tout: «La loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France ou les illusions du législateur».

Dans sa formulation, Emmanuel Macron laisse entendre que l'octroi d'un droit d'asile est une «obligation»: les citoyens n'ont donc aucun pouvoir de contrôle sur le droit d'asile ? Auriez-vous souhaité que la question du regroupement familial soit également posée ?

Mais les citoyens n'ont aucun pouvoir de contrôle sur la quasi-totalité des flux migratoires, pas seulement l'asile. L'asile a été complètement dévoyé, à la fois par son extension et par le fait qu'il est devenu la filière par excellence d'entrée illégale en Europe. Les déboutés du droit d'asile n'étant que rarement renvoyés dans leur pays, mettre un pied en Europe donne à peu près la garantie de pouvoir y rester. En vertu de l'article 19 de la charte des droits fondamentaux de l'UE, nul ne peut être expulsé ou extradé vers un État où il existe un risque sérieux qu'il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d'autres peines ou traitements dégradants. L'immigration illégale a noyé notre système juridique, dont il serait présomptueux de dire qu'il reflète une politique migratoire. La «baisse de température» qui a suivi l'accord négocié par Merkel est-il durable ? Quelles couleuvres devrons-nous avaler pour que l'autocrate Erdogan retienne les passeurs ? Que valent les accords avec les Libyens ? Quid du ‘front' espagnol ?

Quant aux flux familiaux, qui ne se limitent pas à la procédure de regroupement familial, ils découlent de droits accordés et garantis par le droit français et le droit européen, tels qu'interprétés par les juges français et européens. Il n'est pas nécessaire d'en dire plus !

Débattre de l'immigration suppose aussi d'avoir une connaissance précise du problème: vous dites régulièrement que les flux migratoires sont difficilement prévisibles ? Souhaitez-vous également davantage d'outils pour mesurer l'importance et l'impact de l'immigration en France ?

Difficilement prévisibles, ils le sont certainement. Mais ils ne sont pas facilement mesurables non plus.

Les estimations du nombre de premiers titres de séjour délivrés en 2018 qui viennent d'être mises en ligne par le ministère de l'Intérieur ne disent pas tout. Par exemple, les demandeurs d'asile qui ont obtenu le statut de réfugié ou une protection subsidiaire entrent bien dans les statistiques diffusées, à l'occasion de l'attribution d'un titre de séjour. Mais les demandeurs d'asile déboutés n'y figurent pas. Ils y entreront au fil des ans lorsqu'ils obtiendront un titre de séjour, s'ils en obtiennent un. Les mineurs n'apparaissent pas non plus, sauf lorsqu'ils ont l'âge d'être en possession d'un titre de séjour et ne sont pas devenus Français avant leur majorité. Sans parler des mineurs non accompagnés confiés à l'aide sociale, lorsque leur minorité est confirmée. L'IGAS a dénombré, en 2017, 54 000 évaluations de minorité (dont certaines sont doublonnées) et le nombre de mineurs pris en charge par les services d'aide sociale à l'enfance à la fin 2017 était de 21 000. Les statistiques de délivrance de titres de séjour du ministère de l'Intérieur donnent donc une idée de l'évolution des flux (doublement depuis le milieu des années 1990), mais se trouvent de plus en plus déphasées par rapport à la réalité en raison de l'immigration illégale.

On a cru pouvoir compter sur les estimations faites par l'Insee à partir des enquêtes annuelles de recensement. Mais la réintroduction d'un ajustement pour tenir compte des effets des modifications du questionnaire en 2018, dont on a pris connaissance dans le bilan démographique publié il y a quelques jours, me plonge dans un abîme de perplexité. Le solde migratoire qu'il publie ne correspond pas à la définition qu'en donne l'Insee dans sa publication (entrées moins sorties du territoire). Il n'est que le résidu de l'équation démographique de l'année, une fois décompté le solde naturel. Ce résidu encaisse toutes les variations de la qualité de la collecte. Il aurait été négatif sans l'ajustement introduit par l'Insee.

Une alternative consiste à juger de l'intensité de l'immigration étrangère à partir de l'évolution du nombre d'immigrés recensés. C'est ce que je privilégie. Les données montrent que la France connaît, depuis la fin du siècle, une vague migratoire d'ampleur comparable à celle des Trente Glorieuses.

On aimerait faire aussi bien que les pays du nord de l'Europe qui disposent de registres de population, mais nous en sommes loin. Les imperfections du système statistique français et la faible transparence de l'Insee sur ses pratiques participent à la méfiance qu'ont les Français de la statistique dite «officielle».

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SOURCE : Le Figaro

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04/02/2019

Dites-moi, Père François Brune...

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Le père François Brune, né le 18 août 1931 à Vernon dans l'Eure et mort le 16 janvier 2019, est un ancien prêtre catholique français devenu orthodoxe à la fin de sa vie.

Il est l'auteur de nombreux ouvrages concernant la théologie, la spiritualité, la vie après la mort et le paranormal...

Cet entretien date, ici de l'année 2000...

 

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03/02/2019

Un livre appartenant à Adolf Hitler fait allusion aux projets des nazis pour les Etats-Unis et le Canada

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Un livre de 1944 ayant appartenu à Adolf Hitler permet d'obtenir une nouvelle perspective sur la Seconde guerre mondiale. L'organisme Bibliothèque et Archives Canada a annoncé cette semaine avoir acquis un livre rare issu de la collection personnelle d'Hitler.

Cet ouvrage de 137 pages et rédigé en Allemand fait froid dans le dos. Ce rapport a été écrit par un chercheur nazi, Heinz Kloss, qui avait séjourné aux Etats-Unis avant le début du conflit. Ce chercheur nazi a vécu aux Etats-Unis entre 1936 et 1937. Ses recherches sur les Juifs américains et canadiens ont probablement été aidées par des sympathisants nazis vivant en Amérique du Nord.

Ce livre Statistik, Presse und Organisationen des Judentums in den Vereinigten Staaten und Kanada (Statistiques, médias et organisations juives aux Etats-Unis et au Canada) contient des informations sur la population juive des grandes villes comme New York ou Montréal, ainsi que des petites communautés juives à travers l'Amérique du Nord.

Les données contenues dans ce livre pouvaient faire craindre le pire à la communauté juive en Amérique du Nord. Ce livre faisait partie d'une série confidentielle et était réservé à l'usage officiel.

Dans le cadre d'un entretien avec CBC, Michael Kent, le conservateur de l'institution Bibliothèque et Archives Canada a abordé le dilemme moral de l'achat d'un livre qui appartenait autrefois à Hitler. Il a indiqué que cette acquisition permettait de "préserver la mémoire de l'Holocauste" et était un outil contre le négationnisme.

Le livre a été acquis par la Bibliothèque et les Archives du Canada. Il appartenait autrefois à un survivant de l'Holocauste. Selon les autorités canadiennes, le livre a pu être importé aux Etats-Unis comme souvenir de guerre par un soldat qui aurait fait un raid sur la retraite alpine d'Hitler, à l'extérieur de Berchtesgaden en 1945.

Les autorités candiennes ont précisé que l'ouvrage était authentique. Sur le revers de la couverture figure un aigle, une croix gammée et les mots "Ex Libris Adolf Hitler". Cela démontre bien que le livre provient de la bibliothèque personnelle d'Adolf Hitler. Une dizaine de ce livre existent dans le monde. Celui qui a été acheté par le Canada est unique. Cet exemplaire en question a appartenu à Adolf Hitler, qui disposait d'une bibliothèque de 6.000 à 16.000 livres.

Selon l'historien de l'Université d'Ottawa Pierre Anctil, l'ouvrage démontre que le IIIe Reich était "soucieux d'agir en Amérique du Nord" même si le régime nazi n'avait pas les moyens d'envoyer des troupes.

La bibliothèque fédérale soutient que le livre "laisse imaginer ce qui aurait pu advenir au Canada si les Alliés avaient perdu la Seconde guerre mondiale".

"Sa lecture nous laisse imaginer ce qui aurait pu advenir au Canada si les Alliés avaient perdu la Deuxième Guerre mondiale. Il montre que l'Holocauste n'était pas un phénomène exclusivement européen, mais plutôt une opération interrompue avant qu'elle n'atteigne l'Amérique du Nord".

Les nazis ont tué près de 6 millions de Juifs pendant l'Holocauste dans le cadre de la solution finale.

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SOURCE : ATLANTICO

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BILAL est le ROI (des c***)

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29/01/2019

Que faire des étrangers délinquants ?

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Justice. Les délinquants étrangers contribuent puissamment à la surpopulation carcérale française. La justice traite le problème en empêchant leur expulsion… Car ces étrangers sont moins des délinquants que des “migrants”, sujets humanitaires ressortissant à une autre logique que le bien commun national.

 

Nous savons qu’au 1er février 2017, il y avait presque 15 000 ressortissants étrangers détenus dans les prisons françaises, c’est-à-dire un peu moins du quart des détenus. Parmi eux, quatre pays d’origine rassemblent 42% de l’ensemble des ressortissants étrangers. Il s’agit dans l’ordre de l’Algérie, du Maroc, de la Roumanie et de la Tunisie.

15 000 détenus, c’est aussi pratiquement le nombre de prisonniers actuellement en surnombre dans les établissements pénitentiaires français, comparativement au nombre de places disponibles.

Parmi ces détenus, certains sont d’une grande dangerosité, soit condamnés pour des crimes de droit commun très graves, soit condamnés pour des activités terroristes. Par ailleurs, lorsqu’il est en liberté, le délinquant de carrière commet habituellement plusieurs dizaines de délits par an, de l’ordre de 20 ou 30 en moyenne.

Par conséquent, n’importe qui ayant un tant soit peu de bon sens ne peut manquer de poser la question suivante : « mais pourquoi encombrons-nous nos tribunaux et nos prisons avec ces gens-là ? Le plus simple et le plus efficace ne serait-il pas de les expulser, avant même de les envoyer en prison, ou après qu’ils ont effectué leur peine ? » La question est pertinente, mais la réponse est un peu compliquée, et surtout très décevante. Laissez-moi vous expliquer la chose.

Il est théoriquement tout à fait possible pour la France de se débarrasser des délinquants étrangers présents sur son territoire. Tout d’abord, le juge pénal peut assortir une peine principale d’une interdiction du territoire français. C’est ce que l’on a appelé abusivement « la double peine » et qui, contrairement à une légende tenace, n’a jamais été supprimée. Cette peine complémentaire vient en général sanctionner une infraction grave ou bien une infraction à la législation sur les étrangers. Par ailleurs, l’État peut expulser un étranger lorsque la présence de celui-ci constitue une menace grave à l’ordre public. Cette décision est prise par le préfet sous le contrôle du juge administratif.

La CEDH, maniaque du dégradant

Il y a un peu plus d’un an, Gérard Collomb, l’ancien ministre de l’Intérieur, avait envoyé à ses services une circulaire leur demandant de « mettre résolument en œuvre les expulsions d’étrangers délinquants. L’éloignement des étrangers en fin d’une peine d’emprisonnement doit être une priorité, qu’ils soient en situation irrégulière ou qu’ils représentent une menace pour l’ordre public », écrivait le ministre.

Si Gérard Collomb avait pris la peine de rappeler ce qui pourrait sembler une évidence, c’est tout simplement parce que, année après année, le taux d’exécution des mesures d’éloignement reste dérisoire. Sur les six premiers mois de l’année 2018, par exemple, seulement 12,6% des décisions d’éloignement ont été exécutées. Ce taux n’a rien d’inhabituel.

Comment l’expliquer ?

Tout d’abord, pour chasser de France un étranger, vous devez trouver un pays qui veuille bien l’accueillir. En général le pays dont il a la nationalité, bien sûr. En langage administratif, cela signifie que vous devez obtenir du pays concerné un laissez-passer consulaire (LPC). Mais les demandes françaises tombent en général dans l’oreille d’un sourd. Du 1er janvier au 31 juillet de cette année, l’Intérieur a récupéré seulement 790 LPC pour près de 4000 demandes (19,75%). Un taux ordinaire. Les pays dont sont originaires les délinquants ne sont pas pressés de récupérer ces derniers. On les comprend.

Ensuite il y a les tribunaux. Au premier rang d’entre eux, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). L’effet général de sa jurisprudence a été de complexifier de plus en plus les procédures d’expulsion et de rendre inexpulsables des catégories de plus en plus étendues d’étrangers, même délinquants.

Au nom de l’article 3, qui prohibe les « traitements inhumains et dégradants », la CEDH va interdire l’expulsion de nombre d’étrangers au motif qu’ils risqueraient de tels traitements dans leur pays. Par exemple, la France a récemment été condamnée pour avoir expulsé vers l’Algérie un islamiste notoire, qui avait combattu les autorités algériennes durant la guerre civile et qui avait été condamné en 2006 à sept ans d’emprisonnement en France pour son implication dans le réseau terroriste dit de la « filière tchétchène ».

Les tribunaux, adeptes de la complexité incapacitante

L’article 8 de la CEDH dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ». Au nom de cet article, la CEDH a rendu progressivement inexpulsables de plus en plus d’étrangers, y compris bien sûr des délinquants notoires, au motif que les renvoyer dans leur pays d’origine porterait une atteinte « disproportionnée » à leur « droit à une vie familiale » ou bien à leur « vie privée ».

Peu à peu, les juridictions nationales ont emboîté le pas à la CEDH, en appliquant sa jurisprudence et en rivalisant elles-mêmes d’ingéniosité pour micro-manager les pouvoirs publics dans l’usage de leurs prérogatives régaliennes.

Ce n’est pas tant que les tribunaux interdisent l’expulsion des étrangers délinquants, c’est plutôt qu’ils ralentissent, qu’ils compliquent, qu’ils gênent de tout côté l’action du gouvernement en la soumettant à une jurisprudence fondamentalement arbitraire (et donc imprévisible) mais dont la direction est très nette : du côté des flux entrants les portes doivent être largement ouvertes, mais du côté des flux sortants les portes ne doivent être ouvertes qu’avec mille précautions.

Si nous nous élevons au niveau des principes, nous pouvons dire que la direction générale prise par nos cours de justice est de traiter l’immigration comme un droit naturel. Autrement dit, nos gouvernants en robe d’hermine paraissent considérer qu’un individu a un droit naturel à être admis dans le pays de son choix, et qu’il n’est possible de le priver de l’exercice de ce droit que pour des motifs très graves et au terme d’un procès équitable. De la même manière que, par exemple, un gouvernement respectueux des droits de l’homme ne pourra, théoriquement, porter atteinte à nos droits naturels à la vie, à la liberté et à la propriété que pour protéger ces droits chez autrui ou pour préserver l’ordre social lui-même ; et ceci seulement après nous avoir mis en état de nous défendre effectivement, au terme donc d’une procédure judiciaire complexe comprenant certains éléments invariables, tels que la présomption d’innocence, la possibilité de recourir à un avocat, l’accès aux preuves et aux témoins, etc.

Du côté des flux sortants, les portes ne doivent être ouvertes qu’avec mille précautions.

C’est ainsi que, de plus en plus, pour refuser d’accorder à un immigré qui se présente à nos frontières un titre de séjour ou pour expulser un étranger qui s’y trouve, nos pouvoirs publics sont obligés de passer par des procédures qui s’apparentent à un procès fait à l’étranger : procédures très lourdes et qui laissent aux avocats dudit étranger quantité d’occasions de gripper la machine et d’obliger l’administration à lui accorder finalement le titre de séjour convoité.

Face à ce constat, que pouvons-nous faire ? Nous avons deux grandes possibilités.

Nous pouvons soit rester dans le cadre conceptuel existant tout en essayant d’augmenter l’efficacité des procédures permises par ce cadre. C’est à peu près ce qu’on fait depuis plus de trente ans tous les gouvernements qui ont prétendu « réguler les flux migratoires ». Avec les résultats que l’on sait.

Ou bien nous pouvons sortir du cadre. Sortir du cadre cela veut dire, d’une part, quitter la CEDH et, d’autre part, réviser de fond en comble notre législation relative au séjour des étrangers sur la base d’un principe simple : il n’existe aucun droit naturel à séjourner dans un pays dont vous n’êtes pas le national (et il n’existe aucun droit naturel à acquérir la nationalité d’un pays). Un peuple qui accueille un étranger en son sein fait toujours à ce dernier une faveur, faveur qui peut lui être retirée à la convenance du pays hôte. Toute communauté politique est libre d’accepter qui elle le veut et selon les critères de son choix.

Un étranger condamné à de la prison ferme pour crimes ou délits devrait donc pouvoir passer directement de sa cellule à l’avion qui le reconduira dans son pays d’origine, sans autre forme de procès. Ce qui suppose, bien sûr, que la France ait auparavant actionné les leviers diplomatiques et financiers dont elle dispose pour obtenir des principaux pays d’immigration la conclusion d’accords de réadmission dispensant d’obtenir des LCP au cas par cas.

Par ailleurs, nous devrions faire en sorte de rendre la perspective de vivre en France comme clandestin aussi peu attractive que possible. Aujourd’hui, si vous pouvez échapper suffisamment longtemps à l’expulsion (et la réglementation vous donne plein de possibilités d’y échapper, si vous êtes un peu malin et bien conseillé), vous finirez par être régularisé. Entre-temps, vous aurez bénéficié de l’aide efficace d’associations généreusement financées par le contribuable et de « prestations sociales » proprement délirantes, comme par exemple l’AME, qui a bénéficié en 2017 à plus de 300 000 clandestins et dont le coût annuel avoisine le milliard d’euros.

Tout cela devrait disparaître. Être en infraction à la législation sur le séjour des étrangers devrait rendre strictement impossible toute régularisation tant que vous vous trouvez sur le territoire national et, bien entendu, le séjour irrégulier devrait redevenir un délit, ce qu’il n’est plus depuis la loi Valls du 31 décembre 2012, à cause d’une jurisprudence de la CEDH. Comme l’écrit justement Renaud Camus :

L’immigration, achetée jadis en tant que lézard décoratif, est devenue entre-temps crocodile. Il occupe la moitié du salon, l’œil mi-clos. De temps en temps, quand l’humeur taquine lui en prend, il dévore un bras ou une jambe, pour passer le temps.

Toute la question est de savoir si nous allons continuer à faire comme si de rien n’était ou bien si nous allons au moins essayer de faire en sorte de ne pas être dévorés par le crocodile.

 

Par Aristide Renou

 


La France ne pourra indéfiniment se passer d’une claire volonté politique dans ce domaine ultra-sensible.

 

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Source : Politique Magazine

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27/01/2019

Le Libertarianisme pour les nuls : une approche non-exhaustive d'un drôle d'oiseau politique

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Lorsqu’on arrive dans un Institut d’Etudes Politiques, il est normal de se retrouver confronté aux sciences politiques sous toutes leurs formes. Que ce soit par les cours, des rencontres avec des politiciens, des conférences, ou plus simplement par la culture générale ou un engagement militant très actif, on se doit dans un tel milieu d’acquérir une conscience – ou a minima une connaissance – de la vie politique française.

Or l’on peut observer que pour l’écrasante majorité de la population, la politique se définit presque exclusivement par la sacro-sainte distinction entre la Droite et la Gauche. Même les personnes qui se disent apolitiques se retrouvent forcément projetées dans l’une ou l’autre de ces catégories. Cela entre dans la suite logique du renforcement des gros Partis avec l’avènement de la cinquième République, autour desquels gravitent une multitude de petits partis, plus ou moins à gauche, plus ou moins à droite, aux idéaux écologistes, aux idéaux presque trotskystes, aux velléités indépendantistes ou aux discours eurosceptiques…

Il devient alors difficile de s’y retrouver dans cette jungle politicienne, mais l’aventure peut valoir le coût : non seulement notre culture générale en ressortira forcément enrichie, mais en plus, l’on peut découvrir des pensées très marginales, et pourtant déjà relativement construites, diverses et complexes. On se retrouve intéressé, en proie à la curiosité, et avant d’avoir eu le temps de réaliser, nous voilà à nous renseigner entre deux insomnies à propos du libertarianisme.

Libertarianisme ? Mais quelle est donc cette diablerie ?! Il est très probable que ce concept vous soit inconnu au bataillon, idem pour le mot lui-même. La définir précisément devient alors une tâche des plus ardues. Comme tout bon étudiant qui se respecte, le premier réflexe est de regarder sur le Net (ne mentez pas, c’est ce que nous faisons tous). Mais l’on peut vite déchanter lorsqu’on se retrouve seul face aux milliers d’informations sur lesquelles on tombe. Résumer une pensée construite sur près de deux cents ans, ça fait peur. On craint de laisser des plumes en étudiant ce drôle d’oiseau politique… mais en mettant du cœur à l’ouvrage, il est possible de faire le tri et de réaliser un portrait, qu’on espère le plus fidèle possible, de cette étonnante philosophie du droit.

Quelle définition donner au libertarianisme ?

Tout d’abord, l’on tombe sur des définitions que nous donnent des dictionnaires en ligne ou des sites scolaires. Ainsi, le libertarianisme est « une philosophie pour laquelle une société juste est une société dont les institutions respectent et protègent la liberté de chaque individu d’exercer son plein droit de propriété sur lui-même ainsi que les droits de propriété qu’il a légitimement acquis sur des objets extérieurs » pour Wikipédia, « Une philosophie politique et économique (principalement répandue dans les pays anglo-saxons) qui repose sur la liberté individuelle comme fin et moyen » pour Larousse, ou encore « une philosophie tendant à favoriser au maximum la liberté individuelle, que celle-ci soit conçue comme un droit naturel ou comme le résultat du principe de non-agression. De ce fait, ses partisans, les libertariens, s’opposent à l’étatisme en tant que système fondé sur la coercition, au profit d’une coopération libre et volontaire entre individus » pour le site Wikibéral.

Croiser trois définitions différentes, cela peut suffire pour dégager les grandes lignes d’une idée. On pouvait s’y attendre au vu de son nom, la liberté – individuelle – y prend une place capitale, accompagnée d’une notion particulière de « droit naturel », autrement dit les droits de libertés et de propriétés légitimes. L’Etat apparait alors comme un danger planant au-dessus de ces libertés. Il convient de relever également le fait que les définitions précisent bien qu’il s’agit d’une philosophie, presque une éthique, voire un mode de vie, plutôt qu’un véritable mouvement politique comme on l’entend en France. On pourrait alors résumer tout cela par une phrase : « Fais ce que tu veux, de ce que tu as, avec ceux qui sont d’accord ».

Une fois cette définition simplifiée posée, l’on peut nous intéresser aux sites à tendance libertarienne, mais aussi aux sources journalistiques. On se retrouve alors confronté ou bien à des informations très détaillées (car réservées aux initiés), ou bien à des articles très peu exhaustifs, parfois au point de ne pas fournir le travail d’investigation attendu de la part d’un journaliste formé dans une grande école. Faire un travail de fond devient nécessaire, pour être sûr de saisir tous les tenants et aboutissants de ce drôle d’oiseau idéologique.

Le libertarianisme, une marotte anglo-saxonne ?

Comme nous le précise la définition de Larousse, on remarque que ce schéma de pensée libertarien est particulièrement bien implanté dans les pays du Commonwealth. Et pour cause : l’utilitarisme et le pragmatisme, si chers à nos amis anglo-saxons, se reflètent en partie dans le Libertarianisme. Ethique de la Liberté, rédigée par Murray Rothbard, en est un exemple assez parlant. « Œuvre de toute une vie », ce livre de philosophie politique fut l’un des premiers à proposer une étude purement praxéologique de la liberté, avec une démarche se voulant raisonnée et logique. Les questions du Droit Naturel y sont soulevées, ainsi qu’une théorie de la liberté, et une dénonciation d’une influence trop forte de l’Etat, qui par définition est un obstacle aux libertés individuelles.


Caricature du dessinateur Ben Garrison illustrant ce que représente le « Big Gov » pour les libertariens.

Outre l’influence de grands intellectuels, parmi lesquels, en plus de Rothbard, nous pouvons citer Charles Murray, Robert Nozick ou encore Ayn Rand, le libertarianisme est également porté dans la sphère anglo-saxonne par la pop culture (l’exemple le plus connu étant la série américaine South Park). Ce « Soft Power libertarien » se traduit par une vague de plus en plus forte de phobie de l’Etat global, visible dans la multiplication de fictions dystopiques présentant un gouvernement central comme l’Ennemi Absolu, mais aussi dans l’influence des Anonymous ou de Wikileaks, ou encore dans la méfiance qu’a le citoyen moyen dans les médias (seulement 6% des Américains auraient confiance dans les médias, selon un sondage de 2016). D’un point de vue économique, le libertarianisme privilégie l’approche de l’école autrichienne, avec un rejet de l’Etat-Providence et de l’interventionnisme économique, ce qui une nouvelle fois le rend naturellement compatible avec la mentalité anglo-saxonne. Et pour preuve, un sondage du Cato Institute estime dans une étude de 2017 qu’entre 20 et 22% de la population américaine se considère comme libertarienne.

Existe-t-il un Libertarianisme « made in France » ?

La philosophie libertarienne semble donc particulièrement présente chez l’Oncle Sam. Mais qu’en est-il de son implantation en France ? Force est de constater que les idées libertariennes sont très méconnues dans le Pays des Droits de l’Homme, et pour cause : la mentalité française est plus dans la persuasion que dans la conviction. On accorde plus d’importance aux affects et aux sentiments, que nos amis Yankees relaient plutôt au second plan lorsqu’il s’agit de se lancer dans une démarche intellectuelle.

La factualité et le pragmatisme s’importent mal dans un pays où l’on aime avoir des opinions très tranchées et où on rejette la nuance. L’exemple de La Grève d’Ayn Rand est assez parlant : publié en 1957, ce livre écrit par une Américaine d’origine russe ne fut officiellement traduit en France… qu’en 2011. Et ce alors que, selon une étude de la bibliothèque du Congrès américain et du Book of the month club menée dans les années 1990, il s’agirait, après la Bible, du livre le plus influent aux Etats-Unis.

A cela s’ajoute la très forte conscience politique en France : il y a un grand amour de l’Etat, ainsi que de la législation, découlant directement du Droit Romain dont nous sommes encore aujourd’hui les héritiers. Là où la jurisprudence fait bien plus souvent office de loi dans ces systèmes voisins.

Si le bilan dressé en France apparaît de prime abord négatif, on réalise que certaines fondations majeures du libertarianisme moderne viennent tout droit de notre beau pays : la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 jette les bases de ce que l’on appelle aujourd’hui le droit naturel, et Frédéric Bastiat (1801-1850) bénéficie encore aujourd’hui d’une influence certaine et d’une renommée internationale. Mais ses thèses libérales ont tendances à être mal comprises, et donc rejetées par les économistes français modernes.

La méconnaissance du Libertarianisme en France peut donc s’expliquer par cette véritable fracture de mentalité : elle illustre à quel point la culture intellectuelle saxonne peut être incompatible avec la française. Mais cela n’est pas une surprise. Après tout n’est pas pour rien que nous avons que nous avons passé huit cents ans à faire la guerre à nos voisins anglois.

D’accord, mais concrètement ? Quelles sont les valeurs libertariennes ?

Pour le libertarien, l’individu lambda est comme Mélenchon : même s’il n’est pas parlementaire, sa personne n’en demeure pas moins sacrée. La société n’a en aucun cas à lui imposer quelque chose, surtout de façon coercitive, du moins tant qu’il ne contrevient pas lui-même au Droit Naturel d’autrui. Rappelez-vous : « Fais ce que tu veux de ce que tu as avec ceux qui sont d’accord ».

Ainsi, il est le seul décisionnaire de ses mœurs ou de ses actions, et la société n’a pas à le considérer comme étant un être « à part » pour ça. Il est régi par le principe de non-agression, et n’a le droit de faire preuve de violence que dans le cas de la légitime défense, c’est-à-dire quand ses libertés, ou ses propriétés légitimes, sont menacées par quelqu’un d’autre.

Car oui, le libertarien considère, au même titre que la Liberté, le droit de propriété comme étant sacré : les objets extérieurs, c’est-à-dire autres que son propre corps, (de l’argent, une maison, un vélo, des vêtements…) obtenus de façon juste, notamment par la vente, l’échange, le troc ou la donation, sont une véritable partie de son être, et ne doivent en aucun cas faire l’objet de dégradations gratuites ou de spoliations. Le libertarien va donc sur ce point s’opposer au libertaire, son très lointain cousin anarchiste qui lui prône le partage égalitaire des richesses et des ressources naturelles, tout comme au liberal (terme utilisé en anglais pour désigner un individu aux valeurs socialistes).

Hormis ces constantes qui définissent le libertarianisme, il est particulièrement difficile de dresser un « tableau des valeurs moyennes » des individus libertariens. Tout simplement car leur individualité passe avant le groupe dans lequel on les classe.

Le libertarien apparaît donc dans la majorité des cas un « anti-communautaire », considérant que les particularités d’un individu (sa couleur de peau, son sexe, ses convictions morales et/ou religieuses, etc…) ne doivent en aucun cas ni le priver de ses Droits Naturels, ni servir de prétexte pour le déresponsabiliser de ses actions, ni à obtenir des privilèges par rapport aux autres. En d’autres termes? « Le plus grand bonheur de toute minorité: Être considérée comme tout le monde, par l’absence d’attention particulière et le plein respect de sa normalité » (Stéphane Geyres).

L’épisode L’inqualifiable crime de haine de Cartman de South Park (saison 4 épisode 2), série réalisée par les Libertariens Trey Parker et Matt Stone, démontre dans une séquence l’absurdité des Hate Crime Laws, et en quoi elles limitent la véritable égalité entre les individus.

Certes tout ceci reste encore relativement abstrait, surtout pour quelqu’un de non-initié. Mais heureusement, l’on peut facilement retrouver des documents mis en ligne par les Partis Libertariens américains. Celui de la branche californienne a par exemple rendu disponible un schéma qui illustre les valeurs sociétales qu’ils prônent au quotidien.

On observe alors rapidement que le libertarianisme serait une Fusion (au sens dragonballien du terme) entre des idéaux économiques abusivement classés à « droite » (économie de libre-échange, pas d’interventionnisme économique…) et des idéaux sociétaux abusivement classé à « gauche » (liberté totale d’expression, de culte, liberté sexuelle…).

On peut donc à tort penser qu’il s’agit là d’un « extrême centre », que résume d’ailleurs assez bien le slogan de campagne de Tim Moen (candidat libertarien aux législatives canadiennes 2014) : « Je veux que les couples mariés gays puissent défendre leurs plants de Marijuana avec leurs fusils ». Or, ce serait faire abstraction de la volonté très forte, quasi viscérale, de se débarrasser du Big Gov et de l’Etat. C’est oublier qu’il s’agit, du moins en partie, d’un anarchisme, ayant pour volonté première la liberté individuelle : « Ni Dieu ni Maître, sauf si on veut en choisir un nous-mêmes ».

Une philosophie anti-étatiste ? Mais alors, pourquoi des partis ?

Les velléités anarchistes (ou minarchistes) du mouvement peuvent en effet rendre la simple existence de partis libertariens paradoxale. Cependant, nos anti-étatistes préférés savent la justifier : le but premier n’est pas tant de se réunir en organisation politique pour satisfaire des volontés interventionnistes, mais plutôt de pouvoir se regrouper, obtenir une certaine force du nombre afin de pouvoir revendiquer le respect de ses Droits Naturels.

C’est donc en partie sous le principe de « l’Union fait la force » que l’on a vu dès les années 70 se former des Partis Libertariens aux Etats-Unis, puis en Nouvelle-Zélande et en Pologne dans les années 90. Il faudra attendre les années 2000-2010 pour que le phénomène s’implante en Europe continentale, avec des partis créés en Suède en 2004, en Allemagne en 2009, en Belgique en 2012 et en Suisse en 2014. La France n’est cependant pas en reste, avec la fondation très récente d’un Parti Libertarien Français en avril 2017.

Ces partis singuliers se font principalement connaître sur Internet, par leurs sites officiels, ou encore des sites parallèles dont l’ambition première est de partager le point de vue des libertariens sur l’actualité (comme le Magazine Reason, qui a près de quatre cent-cinquante mille abonnés sur sa page Facebook). Comme ils se plaisent à le dire, leur but est moins de contrôler les gens que de réclamer pour eux-mêmes une plus grande liberté, et donc une réduction de l’Etat centralisé. Il s’agit là de mener un « combat contre l’ennemi », les Étatistes, mais en leur faisant face avec leurs propres armes.

D’ailleurs comme tout mouvement, c’est autour de divers symboles que se réunissent les sympathisants libertariens. L’un des plus célèbres d’entre eux, le Gadsden Flag, présente un serpent à sonnette noir sur un fond jaune, les deux couleurs associées aux mouvements libertariens. Ce drapeau très ancien, qui remonte à Benjamin Franklin, porte la mention « Don’t tread on me », que l’on pourrait traduire par « Ne me marche pas dessus », ou encore « Bas les pattes ». Le choix du serpent à sonnette n’est pas anodin : animal inoffensif pour l’homme, il n’initie jamais le combat et se montre agressif uniquement si on l’attaque. Il semble donc bien représenter les valeurs libertariennes de Droits Naturels et de principe de non-agression.

D’autres animaux ont été choisi à travers le globe pour représenter les mouvements libertariens : si le serpent a été gardé en Belgique, nos amis Yankee lui ont préféré le Hérisson, qui tente comme il peut de faire face à l’Âne Démocrate et l’Eléphant Républicain.

C’est cependant un oiseau qui décore le logo du tout récent Parti Libertarien Français, ou encore le drapeau officiel du Liberland, micronation autoproclamée entre les frontières serbes et croates. Malgré sa non-reconnaissance par l’ONU, le Liberland, « un Etat avec le moins d’Etat possible » fondé le 13 avril 2015, a enregistré plus de 300 000 candidatures à la citoyenneté dès Juin 2015. Ce projet ambitieux et farfelu de créer des nations libertariennes ouvertes à tous, c’est également un symbole qui peut rassembler, parfois avec plus de force que les partis eux-mêmes, des libertariens du monde entier.

Mais s’ils sont déjà aussi nombreux, comment ça se fait qu’on n’en entende pas plus parler ?

Il est vrai que ce que l’on pourrait abusivement appeler un Homo Libertarianicus n’est pas une espèce très répandue, du moins dans la sphère publique française. Plusieurs raisons peuvent être soulevées : Tout d’abord, et vous vous en êtes sûrement rendu compte à la lecture de cet article laborieux, la philosophie libertarienne est d’une complexité singulière, dont les premiers fondements dateraient de la toute fin du XVIIIe et des Lumières. Or, s’il est très difficile d’appréhender une pensée qui s’est continuellement construite depuis plus de deux cents ans, il l’est encore davantage de réussir à bien la vulgariser et à la rendre accessible au citoyen moyen.

De plus, le libertarien, en accord avec sa philosophie, n’est pas du genre à la partager à ceux qui ne le souhaitent pas. Il n’est pas constamment à évangéliser comme le feraient d’autres groupes militants, bien qu’il soit tout à fait disposé à expliquer son opinion lorsque c’est nécessaire ou que ça lui est demandé. Cela est d’autant plus vrai en France où le mouvement reste encore marginal, et où la faible diffusion de cette philosophie rend sa compréhension difficile.

Si l’on veut saisir tous les tenants et les aboutissants de ce schéma de pensée, il devient nécessaire d’entreprendre un travail de recherche et de lecture personnel, puisque les seules « fenêtres » pour les non-initiés sont la plupart du temps des articles non-exhaustifs, partiales. De plus, dans les médias classiques, on observe que très peu de journaux abordant le sujet, voire aucun, n’a donné directement la parole à des libertariens. Curieuse démarche lorsqu’on cherche à les comprendre. Ils prennent alors des phrases sans contexte, n’expliquent pas, et utilisent des termes très forts pour accentuer l’aspect « à charge » de leurs écrits. Mais tout ceci ne témoigne que du manque d’objectivité des journalistes, imputable à leur ligne éditoriale. On a plus l’impression d’être face à un bilan d’une observation quasi animalisante de « l’Homo libertarianicus dans son habitat naturel » qu’à une étude approfondie du sujet.

L’article Les libertariens sont parmi nous, de Fabien Benoît et Guillaume Gendron dans Libération, daté du 17 septembre 2015, illustre ce fait : outre l’abondance de raccourcis intellectuels, témoins d’un manque cruel d’investigation sur le sujet et d’un abandon total de la praxéologie, il regorge d’attaques personnelles indignes de l’intelligence de nos journalistes, qui se décrédibilisent gravement par leur argumentum ad personam (ne donnant comme seul adjectif à Vit Jedlicka, fondateur du Liberland, celui de « Tchèque joufflu »). Mais gardons en tête l’enseignement de Weber dans Les Fourmis (« Regarde où l’ennemi t’attaque : c’est souvent son propre point faible »), et passons outre les camouflets sur le physique d’autrui.

Le fait est qu’une telle virulence soulève une petite question : les Libertariens correspondent-ils vraiment à ce modèle de complotistes illuminés et d’utopistes déconnectés de la réalité, suivant le mouvement par « effet de mode culturelle » que nous vend Libération ? Allons vérifier.

Entretien avec trois Homo Libertarianicus :

En tant qu’aspirants journalistes consciencieux, nous ne souhaitions pas nous contenter d’une étude à dimension zoologique pareille à celle menée par les journalistes de Libération. Réhumaniser les concernés nous a paru primordial, aussi nous avons cherché à leur donner directement la parole.

Nous avons eu la chance de nous entretenir avec trois libertariens français, aux parcours différents, afin qu’ils nous donnent leur avis personnel sur leurs idéaux, ainsi que leur vécu. Il s’agit de Monsieur Olivier Vidal, secrétaire général du Parti Libertarien français, Monsieur David Serra, fondateur et directeur des éditions Ring et Monsieur Gilles Branquart, partisan militant depuis vingt ans. Nous les remercions chaleureusement d’avoir bien voulu prendre de leur temps pour répondre à nos questions.


Olivier Vidal, Secrétaire Général du PL

-- Monsieur Vidal, vous êtes libertarien. Quelle est la définition que vous donneriez au libertarianisme ?

Olivier Vidal : Le libertarianisme est un courant de pensée favorable à la liberté des individus sous toutes ses formes dans le cadre du respect de la propriété. Les libertariens s’opposent fermement à l’infantilisation des masses. Pour les libertariens, la liberté est indissociable de la responsabilité. Cette responsabilité doit s’exercer dans une parfaite égalité de droits, sinon elle n’est pas juste. Les libertariens ne font aucune distinction entre les différentes libertés. La liberté d’entreprendre et la liberté de choix pour son propre corps sont indissociables. Trois mots peuvent résumer la pensée libertarienne : liberté, propriété, responsabilité.

-- Comment avez-vous découvert ce courant de pensée ? Qu’est-ce qui vous a attiré dedans ?

Olivier Vidal : Libéral convaincu depuis mon adolescence, je me suis ensuite intéressé au parti libertarien américain. La construction logique, complète de la pensée libertarienne a fini de me convaincre que j’étais un libertarien.

-- Quelle serait selon vous l’action prioritaire à mettre en place pour faire évoluer les choses dans le bon sens ?

Olivier Vidal : L’action prioritaire est de sortir la population de la matrice socialiste dans laquelle elle est plongée. Il est crucial de libéraliser l’ensemble du monde des médias et de la culture en général. L’ensemble de la presse subventionnée et des médias audiovisuels constitués en oligopole véhicule le fait accompli que l’Etat est compétent pour tout.

-- Ne vous sentez-vous pas trop seul dans votre démarche, ou bien avez-vous peur des réactions des gens quant à vos opinions ?

Olivier Vidal : Je suis loin d’être seul. Le courant libertarien est présent partout dans le monde. En France, nous avons le parti et surtout une population exaspérée de voir ses libertés restreintes de jour en jour.

-- Rencontrez-vous de l’incompréhension lorsque vous expliquez ce qu’est le libertarianisme ?

Olivier Vidal : Les gens qui apprennent mes opinions politiques se trouvent souvent confrontés à la réalité de la situation du pays. Cela suscite chez eux plus d’interrogations qu’autre chose.

Quelle est la chose qui vous agace le plus en France en ce moment (un militantisme, une réforme, une polémique…) ? Olivier Vidal : Il y a trop de choses agaçantes en France pour n’en citer qu’un seule : La volonté des politiques à contrôler toujours plus de chose dans nos vies, le pseudo dégagisme de Macron, la pseudo politique libérale de Macron, l’incapacité des élites à voir le mur de la dette, l’incapacité des journalistes à faire du benchmark, l’état indigne de nos prisons, la lenteur de notre justice…

-- Quel ouvrage (ou autre média) conseilleriez-vous pour s’initier au libertarianisme lorsque l’on est néophyte ?

Olivier Vidal : Vers une société sans état, de David Friedman. (The machinery of Freedom en version originale, ndlr)

-- Avez-vous un mot de la fin ?

Olivier Vidal : « L’échec est le fondement de la réussite. » (Lao-Tseu)

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David Serra, directeur des éditions Ring

-- Monsieur Serra, vous êtes libertarien. Quelle est la définition que vous donneriez au libertarianisme ?

David Serra : Si les origines du libertarianisme remontent en réalité à l’européen Gustave de Molinari, c’est un mouvement surtout popularisé en Amérique du Nord, assez hétérogène aujourd’hui, qui naît et s’incarne politiquement pour la première fois dans la rupture avec les conservateurs et d’une alliance avec la gauche radicale autour la guerre du Viêt-Nam, la conscription, et le refus de l’interventionnisme militaire. Les piliers centraux portent surtout une défense radicale des principes économiques et sociaux de liberté, d’une position non-interventionniste et d’un attachement tout aussi radical aux libertés individuelles. L’éventail idéologique des libertariens est en réalité très vaste mais pourrait atomiquement converger vers une phobie de l’État global, son emprise politico-médiatique, culturelle, quasi-publicitaire, le rejet du jeu gouvernemental, donc des lobbys de toute nature, et autour de l’individualisme naturel, reptilien, ancestral qui est selon moi l’ignition de chaque avancée humaine. Progressons individuellement, et par capillarité, progressons tous.

-- Comment avez-vous découvert ce courant de pensée? Qu’est-ce qui vous a attiré dedans ?

David Serra : Après un an avec un ami de la fac de droit aux jeunesses UDF, à dix-sept ans, j’ai senti que l’immense majorité des politiques croisés ne portaient rien d’autre qu’une volonté d’orgueil pure, névrotique, quasi-phallique, de faire destin propre. Tous parlaient de révolution démocratique en demandant toujours plus d’État. C’est un peu le refuge du pire, ce milieu, à tous les niveaux. Puis j’ai découvert Robert Nozick et la pensée minarchiste (l’Etat minimal), Weber, Bastiat, Franklin et je me suis aussi intéressé, car l’ampleur du phénomène parlera au plus grand nombre, aux messages subliminaux des créateurs libertariens de South Park, Trey Parker et Matt Stone.


Allégorie de la Pilule Rouge de Matrix, souvent utilisée par les Libertariens

 

-- Quelle serait selon vous l’action prioritaire à mettre en place pour faire évoluer les choses dans le bon sens ?

David Serra : Stopper immédiatement les aides publiques aux sociétés médiatiques et culturelles de plus de cinq ans d’existence, qui sont, par leur influence et leur capacité de menace sur les lanceurs d’alerte, le vrai premier pouvoir. C’est un scandale anti-démocratique dénoncé clairement par Michel Houellebecq, dès 2016. Pourquoi le contribuable devrait financer des journaux et des éditeurs culturels appartenant à des milliardaires ? Qu’est-ce qui justifie une telle absurdité économique si ce n’est la crainte de la faillite ? Couper le robinet d’argent public pousserait les éditeurs et les artistes à plus d’audace, à favoriser leur mise en compétition loyale, donc à développer leur capital d’intransigeance artistique, de les priver de l’inversion accusatoire, au lieu de fuir certains sujets cruciaux et de trahir leur réalité. Si le cinéma français est si pauvre et ne s’exporte plus, c’est qu’il est devenu un cinéma politique. Les projets dépendent de leur financement agréé par le CNC, organisme d’État parmi la légion d’autres financements publics, tenanciers culturels d’une Machine dont les vieux rouages soviétiques commencent à fatiguer le tympan collectif. En réalité, les producteurs s’autocensurent préventivement en cochant les bonnes cases scénaristiques, idéologiques et ne prennent plus le moindre risque pour cumuler le plus de subventions possibles, jusqu’à s’interdire les singularités qui font le cinéma indépendant, ultra-vivant, et qui est le nerf électrique de tant de nations. Peur de blesser la société des indignés, d’enrayer l’invasion des bébés frustrés ? En apparence, oui. Au fond, ils veulent surtout garder le contrôle des ressources financières et reconduire leurs crédits CNC. Même paradigme avec le CNL dans le monde du livre qui accorde des aides monumentales à des majors multimillionnaires pour des livres qui, pour rester poli, n’intéressent pas grand monde. Réduire l’impact de l’État aux strictes fonctions régaliennes (santé, maintien de l’ordre, justice, défense du territoire) me semble l’action liminaire vers plus de pluralisme et liberté individuelle, réacteurs vivants d’une société forte et saine.

-- Ne vous sentez-vous pas trop seul dans votre démarche, ou bien avez-vous peur des réactions des gens quant à vos opinions ?

David Serra : J’ai surtout été vu comme éditeur trop arrogant pour ma jeunesse, islamophobe, qu’il a fallu punir en le réduisant parfois à un ou deux livres qui ont soulevé des questions intenables pour une caste stockolmisée alors que de l’autre versant de ce mur artificiel, celui du lecteur, nos parutions génèrent d’immenses succès publics. À titre d’exemple, les éditions de L’Artilleur publient bien davantage d’auteurs de droite que nous, Albin Michel également, je ne parle pas des maisons d’édition d’extrême droite que tout le monde connaît et ne subissent que peu de stigmatisation. J’ai toujours dénoncé l’antisémitisme, l’homophobie, et prôné un antiracisme armé mentalement. Mon combat se concentre sur les idéologies mortifères que sont le communisme et l’islamisme. Rappelons tous que que le peuple arabe ne représente que 20% des musulmans à travers le monde. Il s’agit donc pour moi d’une guerre purement idéologique. Si je mise sur le temps et notre travail, je constate toujours que le procès en racisme reste l’assurance vie de Big Brother, le seul moyen de condamner la démocratie, d’interdire la pensée, de piéger le débat, et c’est à cause de ça que nous en sommes là. Cette accusation fallacieuse est donc le moyen le plus efficace de fuir l’ampleur de l’emprise des idéologies mortifères sur notre pays, des drames actuels et de notre futur proche. Et la pleine souveraineté des Français.

-- Rencontrez-vous de l’incompréhension lorsque vous expliquez ce qu’est le libertarianisme ?

David Serra : L’immense majorité du public le réduit au libéralisme économique et ne mesure pas l’ampleur du contrôle derrière le « Care » de façade de cet État globalitaire infantilisant. Nous devrions moins nous considérer comme des sommes de droits à satisfaire et davantage comme des vies à réaliser, dans un monde qui, effectivement, est devenu un genre nouveau de théâtre des opérations. Arrivera le temps où le peuple déposera ce tas de brique par terre, expulsera de nos vies les fossoyeurs de nos libertés et reprendront le contrôle de leurs destins.

-- Quelle est la chose qui vous agace le plus en France en ce moment (un militantisme, une réforme, une polémique…) ?

David Serra : L’emprise orwellienne sur le pluralisme, la censure active et le poids des menaces qui pèse sur la liberté d’expression, sacrifiée chaque minute sur les médias publics et le fait que ça ne scandalise pas davantage l’opinion, que nos impôts continuent d’alimenter leur propagande hors-sol. Coupons-leur les fonds publics, faute de lecteurs, ils ne pourront plus fuir les réalités sociales et économiques, seront sanctionné par le public ou ils mourront d’une juste mort : que le plus authentique gagne.

-- Quel ouvrage (ou autre média) conseilleriez-vous pour s’initier au libertarianisme lorsque l’on est néophyte ?

David Serra : South Park pour les plus jeunes et le dernier livre fascinant de Julian Assange, Google contre Wikileaks, publié chez Ring, sur la colonisation édifiante de l’entreprise-monde Google sur nos vies. Deux belles fusées sur le cap Canaveral de la liberté. Et pour le voyage, "Anarchie, État et utopie" de Nozick.

-- Avez-vous un mot de la fin ?

David Serra : Deux slogans. Celui, chirurgical, de Wikileaks, « We open governments », et celui de Ring, révélateur : « Dansons vite avant l’Apocalypse ».

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Gilles Branquart, partisan libertarien membre du PL

-- Monsieur Branquart, vous êtes libertarien. Quelle est la définition que vous donneriez au libertarianisme ?

Gilles Branquart : La philosophie libertarienne est un courant de pensée qui, dans les grandes lignes, cherche à ce que les individus retrouvent une place en tant que tels dans la société, et non pas considérer la société comme une masse indistincte comme le fait l’Etat aujourd’hui. La liberté individuelle et l’égalité de droit en sont donc des éléments fondamentaux et capitaux. Cependant, le terme « libertarien » regroupe énormément de sous-catégories, ce qui peut refroidir les non-initiés. Le clivage le plus important du mouvement est sans doute celui entre les minarchistes (ceux qui sont pour un Etat aux fonctions régaliennes) et les anarcaps (ceux qui sont pour un rejet total de l’Etat mais une législation par le « droit naturel »), clivage qui peut donner des affrontements idéologiques assez violents. On ne peut pas définir le libertarianisme honnêtement sans mentionner son extrême division, qui pourtant est une perte de temps et très contre-productif. Il convient de les dépasser pour pouvoir rattraper le retard de marche des libertariens. Personnellement, j’en ai rien à foutre de savoir qui est le plus légitime entre minarchiste et anarcap, il est bien plus urgent de lutter pour réduire l’influence des deux cent mille lois et décrets actuellement en vigueur en France, afin de retrouver une plus grande liberté individuelle, notre but commun.

-- Comment avez-vous découvert ce courant de pensée? Qu’est-ce qui vous a attiré dedans ?

Gilles Branquart : J’ai un passé idéologique au centre, un peu libéral, mais j’ai rapidement perdu la foi face au vote lorsque j’ai vu les ambitions liberticides de tous les candidats politiques. J’ai été initié au libertarianisme de façon « classique », par le biais des réseaux sociaux ou des articles en lignes, puisqu’il n’y a aucune représentation de la philosophie libertarienne dans la presse ou à la télévision. Ça a commencé par des relais, ou des détournements sympathiques d’images par Contrepoints ou encore H16. Mais à ce moment-là, je ne me revendiquais pas d’un mouvement de pensée précis, et je me sentais isolé intellectuellement parlant. J’ai eu par exemple dans un lycée de Bayonne un bac ES avec un coefficient 9 pour l’économie, mais sans jamais entendre parler d’un autre économiste que Keynes. Aucun économiste libéral n’était mentionné, au point où on en ignorait même l’existence. La seule chose que je savais de Bastiat, c’est que c’était le nom de la place où je vomissais pendant les fêtes de Biarritz (Rires). Et pourtant, c’est extraordinaire quand on découvre la pertinence de ses propos, son avant-gardisme, et sa profonde influence dans tout le monde anglo-saxon. Pour moi il s’agit du véritable père des économistes classiques. Il devrait remplacer Smith, qui lui est un vrai homme préhistorique de la discipline tant il est ancien et donc plus applicable à nos sociétés aujourd’hui. D’abord on s’interroge, puis de fil en aiguille on prend la décision d’agir pour partager cette pensée libertarienne. J’ai fait beaucoup « d’actions invisibles » suite à cela, par le biais de nombreuses associations, mais aussi suite à des initiatives personnelles. J’ai pu ainsi rencontrer d’autres libertariens, qui pour la plupart sont des « convaincus politiques repentis », l’inverse étant bien souvent moins vrai (des libertariens devenus étatistes de tout bord, ndlr).

-- Quelle serait selon vous l’action prioritaire à mettre en place pour faire évoluer les choses dans le bon sens ?

Gilles Branquart : En ce qui me concerne, il s’agirait plutôt de deux actions clés : Tout d’abord, une chose qui me tient à cœur autant qu’elle est dure à faire, c’est de structurer la multitude de nos actions individuelles. Ces dernières ne sont pas difficiles à mettre en place en elles-mêmes : on a par exemple beaucoup utilisé par chez moi les poubelles de supermarchés ou les containers de tri sélectif, sur lesquels on a collé des messages anti-étatistes pour dénoncer la TVA et les Taxes. C’est assez efficace, car ces autocollants peuvent être lus par des milliers de personnes. On a également utilisé des stickers pour afficher « Bastiat Président » avec le slogan « même mort, il fera mieux que les vivants ». Le manque d’accès aux médias nous pousse à développer des actions parallèles, voire informelles. Nous avons par exemple inscrit au tampon encreur des messages anti Banque Centrale sur les billets de cinq et dix euros, ce pour dénoncer les manipulations autour de la monnaie, ou encore pour rappeler que le plus gros salaire de la République est celui du gouverneur de la Banque de France, poste obsolète depuis la création de la BCE. Mais notre principal projet est de nous réunir dans des associations confédérales, comme Union des Libéraux, ou encore de créer des « centres culturels ». Par exemple nous avons mis en place avec UDL une bibliothèque commune avec tous les ouvrages libéraux et libertariens, mais aussi fait en sorte que tous les partisans travaillent sur la même thématique pendant une ou deux semaines. Ça a même débouché sur la rédaction d’ouvrages coopératifs comme Libres ! 1 ou Libres ! 2, écrits par les membres du collectif La main invisible. Ça marchait vraiment bien au début… jusqu’au moment où notre site a été piraté et qu’on a reçu la visite impromptue des services généraux. Ça n’est pas la première fois qu’on se fait fliquer, c’était déjà arrivé suite à l’incident entre Olivier Masdrol et LibertarienTV, où un dentiste du Finistère a fini sous la surveillance des services de renseignement. (Un homme avait posté une vidéo avec des sous-titres parodiques d’un discours d’un haut fonctionnaire chinois. Récupérée par un politicien français qui n’a pas pris la peine de vérifier la véracité de la traduction, elle a failli déclencher un incident diplomatique entre la France et la Chine, ndlr).

Vient ensuite le second élément qui selon moi est capital : parvenir à faire entendre notre voix. En France, il existe tellement de petites privations de libertés qu’il est facile de trouver un point d’accroche avec les gens, même non-initiés. Mais il y a aussi une très forte volonté du citoyen moyen de garder l’Etat, ce qui peut influencer les débats. C’est en partie pour cela qu’on n’a aucun accès aux médias, ou qu’on y est diabolisé ou descendu quand on y arrive. Mais c’est un risque à prendre, car il peut permettre d’éveiller certaines consciences. D’autant plus si on nous met face à quelqu’un qui a de la répartie, cela peut déboucher sur des débats très drôles. Seulement, quelqu’un seul face à des étatistes ne doit avoir aucune faille, ce qui demande une immense préparation en amont. Alors en attendant, on cherche comme on peut à « s’infiltrer ». Notre cible principale est actuellement la radio, car la presse écrite est depuis longtemps morte et enterrée et la télévision est la « marche ultime ». Avoir de l’influence dans les radios passe par deux étapes : tout d’abord, on intervient dans les émissions de RTL, Europe 1, Libre Antenne… Mais surtout, ne tentez pas RMC ! L’appel y est très cher, et en plus ils sont désagréables. Bref. En donnant notre avis sur le sujet de l’émission, on peut en profiter pour faire passer des messages subliminaux, illustrés par les petites choses du quotidien. En connaissant les combines, on parvient facilement à passer en dernier et avoir le mot de la fin. Et si tu as de l’humour ou que tu les fais réagir, c’est le gros-lot ! Tu deviens un bon client, et ils te prennent presque systématiquement. Et quand vient le moment où les animateurs te contactent directement pour passer dans leurs émissions, tu peux enclencher la deuxième partie de l’opération, mais qui là encore demande un effort de structuration : voilà plusieurs fois que nous tentons de former des « groupes de libertariens » pour qu’on puisse passer à plusieurs sur les mêmes sujets et partager nos idées de façon plus efficace. Mais ce travail de fond, répétitif, et assez chronophage, nous sommes encore très peu à le faire. Mais attention : quand tu débutes, il ne faut surtout pas clamer que tu es libertarien. Le but du jeu est d’y tenir un discours libéral-mais-pas-trop, au risque de te faire blacklister. Personnellement, je vais bientôt m’identifier officiellement comme libertarien auprès des assistants radiophoniques. C’est à double-tranchant : ou bien je fais sauter mes contacts, ou bien cela ouvre de nouvelles portes. Ce risque d’Omerta médiatique est vraiment dommage… on est des bons clients, pour la plupart nous sommes des gens très sympathiques, avec des discours posés qui peuvent élever les débats (rires). Tout ceci révèle à quel point notre travail relève presque de l’artisanat, en quelques sortes.

-- Ne vous sentez-vous pas trop seul dans votre démarche, ou bien avez-vous peur des réactions des gens quant à vos opinions ?

Gilles Branquart : C’est une question intéressante, et je vais vous donner mon point de vue de partisan de longue date : oui, on se sent très isolés parfois, mais heureusement, les réseaux sociaux nous permettent de correspondre assez facilement. Sans eux, il aurait été impossible que des événements comme Sodaction (envoyer des canettes par millier dans les bâtiments officiels pour lutter contre la taxe sur les soda, ndlr), ou encore la mobilisation contre la saisie des biens de Gérard Depardieu (par l’envoi simultané de mille e-mails et cinq mille faxes à un député pour faire pression) aient lieu. Ce contact par les réseaux sociaux entraîne d’ailleurs des situations plutôt rigolotes : Ils m’ont permis de découvrir les engagements d’un ami de longue date, Patrick de Casanove, président du Cercle Bastiat, alors que ni lui ni moi n’en avions parlé de vive voix. Mais malgré ce genre de bonnes surprises, comme je l’évoquais, il y a un aspect « chacun de son côté » qui est vraiment dommageable en ce qu’il défavorise les actions de grande ampleur.

Essayez donc de structurer des gens qui ont une sainte horreur de la hiérarchie et encore plus des concessions, ça donne une idée de l’ampleur de la tâche !

Caricature de Ben Garrison critiquant les actions liberticides des Partis Américains

 

Par exemple, la simple création officielle d’un Parti Libertarien Français a créé des débats houleux entre les libertariens. Beaucoup de militants actifs et très efficaces n’ont pas suivi le mouvement, voire l’accueillent très mal. Pour eux, il s’agit d’une « trahison » de la philosophie libertarienne, en ce que la prise de pouvoir est à l’inverse des valeurs que nous prônons. Ils nous accusent de faire entrer le ver dans le fruit, voire même d’être pires que les étatistes convaincus ! (Rires). Le souci c’est qu’en France, s’il n’y a pas écrit « Parti » sur votre logo, votre parole n’a aucune chance de se faire entendre. J’admets que les puristes ou les anarcaps n’ont pas tort, mais pour les actifs du PL cela nous apparaît comme une étape, une transition nécessaire, au moins pour faire comprendre aux gens qui nous sommes et ce que nous voulons. Il est nécessaire de faire du marketing et de la pédagogie si on veut espérer un jour pouvoir partager nos idées et surtout les faire comprendre. Il existe un vrai lien entre l’accueil des idées et les moyens utilisés pour les transmettre, là où les plus puristes d’entre nous voudraient que tout le monde se contente de lire Rothbard et hop ! Mais ça ne risque pas de prendre comme ça, on a besoin de clairement définir des étapes avant de parler clairement de nos idées.

Mais en plus de nos problèmes de cohésion interne, on a été confronté à de grandes difficultés pour simplement réussir à trouver une banque pour nos associations : on a mis entre six et sept mois avant pouvoir se faire ouvrir un compte pour l’UDL (Union des Libéraux) ou le MDL (Mouvement des Libertariens). On a dû l’ouvrir en Alsace, dans la commune du trésorier, afin de bénéficier du droit appliqué en Alsace-Moselle. Pour le PL, on a mis cinq mois, et c’est grâce à un sympathisant travaillant dans une banque privée patrimoniale que nous avons enfin réussi à avoir un compte. Pour un Parti dont les membres sont censés diriger le monde en manipulant tout le système capitaliste et les banques, c’est assez paradoxal, hein ? Paradoxe d’autant plus extraordinaire quand on voit que des partis d’ultragauche comme ceux de Mélenchon, ou d’autres associations clairement anticapitalistes parviennent à se faire ouvrir des comptes comme ils le veulent (rires) ! Tout ceci peut paraître insoluble, voire désespérant… mais si on y est toujours après vingt ans, c’est qu’on y croit encore !

-- Rencontrez-vous de l’incompréhension lorsque vous expliquez ce qu’est le libertarianisme ?

Gilles Branquart : Souvent, l’ignorance des gens à notre sujet s’accompagne de clichés. Aux Etats-Unis, le mouvement est bien plus implanté – notamment dans la pop culture – mais en France, pour ceux qui connaissent notre existence, on a une image qui est bien souvent désastreuse. On passe plus de temps à expliquer ce qu’on n’est pas plutôt que ce qu’on est : pour les conservateurs, on est des gros hippies utopistes, et pour les Bobos, on est tous des travailleurs du CAC 40 qui mangeons des bébés communistes au petit déj. Deux images des plus opposées, qui illustrent bien en quoi la méconnaissance de notre philosophie entraine des raccourcis assez impressionnants. Les gens retiennent l’élément qui diverge avec leur pensée pour nous coller une étiquette de redneck, avec un Pick-up et des M16 dans le dos, ou à l’opposé celle de fumeurs de joints qui se la jouent ados rebelles contre papa-Etat… C’est là que le problème d’accès aux médias devient le plus contraignant : on présente comme libertariens des gens qui ne le sont absolument pas, et qui vont encore plus cadenasser le discours et nous empêcher de rétablir la vérité, tant sur nos personnes que sur nos intentions. Or ces gens-là sont aussi libertariens que je suis blond aux yeux bleus ! Non, nous ne sommes pas tous des patrons de FTN, on est aussi bien fonctionnaires que salariés, patrons de PME ou de TPE, on est jeunes, on est vieux… Certes, nos militants les plus actifs sont bien souvent des autoentrepreneurs, qui ne cherchent qu’une chose ; être indépendants. Mais ils peuvent aussi se trouver parmi les enseignants, des expatriés qui cherchent tout de même à faire évoluer les choses dans leur pays d’origine… Nous sommes des individus, chercher à nous regrouper en une masse unique ne mènera à rien.

-- Quelle est la chose qui vous agace le plus en France en ce moment (un militantisme, une réforme, une polémique…) ?

Gilles Branquart : Si on ne parle pas de la situation politique en général et de ses milliers de problèmes, je dirais la distorsion entre la réalité et les faits. On subit une véritable « prise d’otage sémantique » ; on nous accuse des dégâts de la mondialisation libérale et on n’arrive pas à faire porter notre voix par le manque de coordination pour le réfuter. Le discours a été biaisé et cadenassé comme jamais. La France est, avec les pays nordiques, le pays le plus étatisé d’Europe. Mais on est les champions incontestés des dépenses publiques – qui sont l’illustration parfaite du capitalisme de connivence que nous dénonçons tous au sein du mouvement – et du pays avec le plus de lois. Notre discours est rendu inaudible par les jeux de magouilles, détourné pour qu’on soit accusés d’être responsables de la plupart des maux actuels. A chaque fois c’est le même refrain : les seules solutions proposées sont « plus de lois et plus de régulations ». C’est un sujet brûlant chez moi à Biarritz depuis l’arrivée d’Air BnB : c’est un arbre qui cache la forêt, mais l’Etat va imposer de nouvelles régulations, avec surtout de nouvelles taxes. Or, qui dit hausse des taxes dit hausse des prix, qu’on va chercher à contrer par l’argent public financé par plus de taxes… C’est un vrai cercle vicieux, dont le côté absurde est illustré par l’épisode de la Pétition des fabricants de Chandelle d’ailleurs (dans Sophismes économiques de Bastiat, ndlr).

En plus de cela, notre image est dégradée par des raccourcis graves, par exemple comme quoi les libertariens sont forcément des gens climato-sceptiques. Mais c’est faux ! Nous sommes une écrasante majorité à admettre volontiers que l’activité humaine a un impact sur l’environnement et le climat. En revanche, ce qu’on refuse, ce sont les acteurs macro-économiques et étatiques qui vont à des conférences sur le sujet en jet privé ou en Yacht, afin de décider de nouvelles réglementations liberticides qu’eux-mêmes ne suivront pas. Nous sommes pour les initiatives individuelles à ce sujet, mais elles sont tuées dans l’œuf par l’Etat. Il est par exemple interdit pour un particulier de construire une éolienne, cette initiative ne dépendant que du marché public. Ou encore, il est interdit pour un motard de modifier son moteur, même si c’est pour le rendre moins énergivore ou moins polluant. Par exemple, des moteurs non-polluants à l’hydrogène ont déjà été mis au point, mais il est illégal d’en équiper sa moto. Simplement car le motard ne consommerait plus d’essence et donc ne paierait plus de taxes sur ce produit. Car il faut savoir que les normes actuelles ont été écrites par de grosses boîtes de concert avec l’Etat, dans le cadre du même capitalisme de connivence que nous avons déjà évoqué, et qui nie complétement les libertés individuelles ainsi que l’égalité de droit. Comment voulez-vous que les initiatives individuelles se développent dans de telles conditions ? Quand on observe attentivement les avancées récentes en terme environnemental, on remarque une constante : prenons le cas de la dépollution des océans, les initiatives sont presque toutes privées, issues d’étudiants en ingénierie et financées par des crowdfundings. C’est normal, après tout. La lutte contre les continents de plastiques, quoi de moins rentable pour le G8 ? Non seulement nous proposons à ce sujet une solution de traitement de la pollution par l’encouragement des initiatives personnelles, mais nous mettons au centre de notre ambition une notion de responsabilité individuelle. Ce n’est pas le fabriquant de la bouteille en plastique qui va faire le geste de la jeter dans l’eau : Responsabiliser les individus au lieu de faire subir à toute la société une punition collective est un enjeu massif des libertariens. Malgré notre démarche factuelle, on a du mal à se faire entendre sur ces idées-là et on a tendance à laisser d’autres nous décrédibiliser. Non, nous ne sommes pas une armée de Charles Gave (financier conservateur à Hong Kong, ndlr), bien que les médias nous le vendent comme le porte étendard du libertarianisme. Toutes ces petites frustrations s’ajoutent à la plus grande d’entre toutes, celle de ne pas pouvoir porter notre parole dans la sphère publique. C’est un vrai serpent qui se mord la queue, et c’est je pense ce qui m’énerve le plus aujourd’hui.

-- Quel ouvrage (ou autre média) conseilleriez-vous pour s’initier au libertarianisme lorsque l’on est néophyte ?

Gilles Branquart :Tout d’abord, les fondamentaux : c’est-à-dire les œuvres de Bastiat, pour vulgariser le point de vue économique du mouvement, et Tocqueville, pour le côté plus « politique ». Pour les plus jeunes, je peux vous prescrire Les aventures de Jonathan Gullible : Une Odyssée de la Liberté par Ken Schoolland, sorte de voyage initiatique d’un gamin, où il découvre ce qu’est la liberté comme on la conçoit dans le mouvement. Ce dernier est très bien pour vulgariser. Une fois bien initié, vous pouvez vous tourner vers des sites libertariens comme Contrepoints ou encore h16, parfois trash dans leurs propos et donc à prendre avec des pincettes. Enfin, vous pouvez vous tourner en dernier lieu vers La Grève d’Ayn Rand, même s’il est objectiviste.

-- Avez-vous un mot de la fin ?

Gilles Branquart : Nous existons, même si notre défi principal est de partir à la conquête de l’écoute et de l’attention. On doit faire découvrir notre vrai visage aux gens malgré le contexte médiatique très défavorable et notre manque de moyen. Nous ne sommes ni des Rednecks ni de méchants individualistes. A dire vrai, nous sommes les vrais Humanistes. On ne nie pas, contrairement à d’autres, la nature animale de l’Homme, ni son côté social. Nous ne mettrons jamais quelqu’un en prison ou ruinerons sa vie pour ses idées, même dans les cas où ça nous dessert. On croit plus en l’Homme que ceux qui cherchent sans cesse à le contrôler ou le changer. Réguler tout ne permettra jamais de faire disparaître le mauvais en lui. Mais croyez-moi, avec une telle démarche, vous arriverez sûrement à en supprimer tout le bon.

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Source : IE Press.net

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20/01/2019

Masquarade démocrassouillarde...

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Le témoignage de René Revol, maire invité du "Grand débat" à Souillac le 18 janvier...

 

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19/01/2019

Radioscopie : Jacques Chancel reçoit Gustave Thibon

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14/01/2019

Philippe Sollers, l’éclaireur : cinq entretiens avec Martin Quenehen (France Culture)

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0:00 - 1er entretien : Tout ce que j’écris est vrai
Premier entretien, entre promesse et mensonge… Où Philippe Sollers nous entraîne dans l’exploration de son bureau des éditions Gallimard, un bureau “unique au monde”, dans la compagnie de Montaigne et Voltaire, mais aussi d’un empereur de Chine, de Pablo Picasso et de quelques autres doubles de Philippe Joyaux… Dans ce premier entretien, on parle latin, mais aussi de musique, d’histoire et d’“augmenter” la vie.

27:54 - 2ème entretien : Les femmes existent
« Le monde appartient aux femmes. C'est-à-dire à la mort. Là-dessus tout le monde ment. » Voici comment débute le fameux roman “Femmes”… Où Philippe Sollers nous chante sa “Curieuse solitude” avec une ravissante femme d’âge mûr, mais aussi la beauté et les dangers du mariage, et les délices de la guerre des sexes…

55:18 - 3ème entretien : La poésie, c’est la guerre
Des énigmes poétiques de Radio Londres, qu’il écoutait enfant dans le grenier de la maison familiale à Bordeaux, jusqu’à “La Guerre du goût”, Philippe Sollers fait la guerre… et l’amour. Où Philippe Sollers bataille en compagnie de Clausewitz et Sun-Tzu, mais aussi de Guy Debord et Monteverdi, pour mieux dire sa Guerre d’Algérie, ses souvenirs de Mai 68 et la violence de notre époque, éblouie par l’argent et la vulgarité…

1:21:37 - 4ème entretien : Folie française
“La France moisie” : il y a dix-huit ans, Philippe Sollers écrivait une tribune “violemment patriotique” qui reste d’une inquiétante actualité… Où Philippe Sollers, écrivain fou de Le Nôtre, Molière… et Céline, nous invite à comploter voluptueusement avec lui, pour la plus grande gloire de la France et de la langue française.

1:48:46 - 5ème entretien : L’infini
« Je ne vois pas l’apocalypse, je vois l’aurore… » écrit Philippe Sollers, fondateur de la revue L’Infini et de la collection du même nom… Où Philippe Sollers répond à l’appel de l’infini, et pour ce faire se shoote aux amphétamines et au haschisch afghan, pratique le Yi King, fréquente assidûment Homère et Pindare…

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08/01/2019

Kamel Daoud : "Le monde arabe a un problème avec le sexe"...

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Sexe, jeunes et politique en Algérie

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L'article date d'Août 2014... mais il est, bien entendu, encore éclairant...

 

Tabous et transgressions

Sexe, jeunes et politique en Algérie, par Pierre Daum, Journaliste. Illustrations d’Aurel.

 

De nombreuses sociétés traditionnelles et religieuses proscrivent les rapports sexuels avant le mariage. Cet interdit est en général transgressé, avec plus ou moins d’hypocrisie. En Algérie, la tension est d’autant plus vive, parfois douloureuse, que l’immigration et Internet ont généralisé la connaissance de pratiques amoureuses jugées répréhensibles.

Originaire de Tifelfel, au cœur du massif des Aurès, Rabah vient d’achever un master 2 de mathématiques à l’université de Batna. Il a 23 ans et, comme la plupart des jeunes de son âge que nous avons rencontrés et interrogés sur la sexualité, il parle de religion dès les cinq premières minutes d’entretien. Ce qui le préoccupe tout particulièrement, c’est le calcul entre hassanate (les bons points récoltés au cours de la vie grâce aux bonnes actions effectuées) et syiate (les mauvais points). De la différence entre les deux chiffres dépendra son accès au paradis. « Je prie à la mosquée cinq fois par jour. Parce qu’à la mosquée, ça te rapporte vingt-sept fois plus de hassanate qu’à la maison. »

Rabah a déjà eu trois copines. La dernière s’appelait Dhikra. « Je suis sortie avec elle un an et demi. Elle était très jolie, et son père était riche. Mais je ne l’ai jamais embrassée sur la bouche ! Que sur la main ou sur la joue. Ça fait un an qu’on n’est plus ensemble. J’ai appris qu’elle avait un nouveau copain, et qu’elle l’avait embrassé sur la bouche. Pour moi, maintenant, c’est une pute ! » Coucher avec une femme avant de se marier est pour lui « complètement impensable », car criminel aux yeux de Dieu. Par contre, il se masturbe « tous les jours ». « Je sais que c’est haram [interdit], mais c’est la pression. Et au moins, avec la masturbation, tu reçois moins de syiate que si tu te fais caresser par une fille. »

Bien sûr, rien ne nous assure que Rabah dise toute la vérité. Cependant, non seulement parler à un journaliste étranger permet de se confier sans risquer le jugement de ses concitoyens (tous les prénoms ont été changés), mais les propos du jeune Chaoui (Berbère des Aurès) correspondent en tout point à la cinquantaine de témoignages recueillis à travers le pays. Avec certes quelques variantes. Noureddine, 26 ans, étudiant en cinquième année à Ouargla, vit une relation très sérieuse avec Sarah, étudiante en deuxième année. « Ça fait six ans que nous sommes ensemble, nos pères se connaissent, nous allons nous marier, inch’Allah [si Dieu le veut] ! » Contrairement à la plupart de ses copains, le jeune homme dispose d’une voiture, ce qui permet au couple quelques escapades solitaires. « On fait l’amour bouche à bouche. Je la caresse, elle me caresse, mais il y a une ligne rouge qu’il ne faut pas dépasser. Coucher avec elle ? Jamais ! C’est contraire à l’islam. Et en plus, je la respecte. En fait, la plupart du temps, on reste des heures à marcher et à discuter. On joue au parc, on va voir les animaux, et, à 18 heures, je la ramène à la cité [universitaire]. Après, on continue au mobile.

Comme ses copains, Noureddine possède plusieurs numéros de téléphone portable. Un pour ses parents, un pour son amoureuse, avec forfait illimité de minuit à 6 heures du matin, et un dernier... pour ses copines. « C’est vrai que je pratique le dribblage, avoue-t-il en riant. Mais avec les autres, je joue, ce n’est pas sérieux ! » Le « dribblage », c’est jongler avec plusieurs filles rencontrées sur le Net (Facebook, Skype, etc.) ou grâce à des numéros de téléphone fournis par des amis, voire attrapés dans la rue à la sauvette, en quelques minutes d’une tchatche convaincante. « Là, au moins, c’est clair : c’est juste pour faire du sexe. » « Faire du sexe », c’est trouver un coin tranquille pour s’embrasser, caresser la peau de l’autre, « et, si vraiment c’est possible, aller jusqu’à la pénétration par-derrière — enfin... la sodomie, quoi ». Mais jamais de pénétration vaginale. « Ça, c’est haram ! Et puis je veux garder mon sexe pur pour ma nuit de noces avec Sarah. »

Les deux tiers de la population ont moins de 35 ans

Amira, elle, est algéroise, porte le voile, et habite seule un petit appartement en centre-ville, loin du quartier de ses parents. A 30 ans, étudiante en doctorat d’archéologie, elle est « évidemment » encore vierge. Comme une majorité de filles de son âge, elle n’est pas mariée. « Mais c’est vrai que j’ai des pulsions sexuelles. Alors je regarde des films pornos, et je me masturbe. » La jeune femme n’a pas encore trouvé un véritable amoureux, mais elle a un bon copain prêt à venir chez elle, « sans [la] juger ». « Je l’ai appelé deux fois. On s’est caressés, ça fait du bien. Mais, évidemment, sans aller plus loin. » Tout cela, personne ne le sait. « En Algérie, si tu veux survivre, tu dois mentir à tout le monde : à ta famille, à tes amis, à ton copain, même à toi-même, parfois. »

Il n’existe aucune étude sur les pratiques sexuelles et amoureuses de la jeunesse algérienne avant le mariage. A partir d’un fait divers rapporté en 2006 par la presse algérienne, l’anthropologue Abderrahmane Moussaoui s’est interrogé sur un éventuel nouveau recours aux mariages coutumiers (urfi et misyar), qui permettent de s’affranchir rapidement de l’interdit sexuel musulman, mais sans donner aucun indice de l’ampleur réelle du phénomène (1). Cependant, les témoignages recueillis dans une quinzaine de villes (Alger, Oran, Annaba, Béjaïa, Tizi Ouzou, Ouargla, Chlef, etc.) vont dans le même sens, sans aucune différence régionale notable, et correspondent à la perception des chercheurs et professionnels interrogés. « Pour la plupart des jeunes Algériens, la virginité de la fille reste une frontière infranchissable, confirme Djelloul Hammouda, médecin à Oran. En dehors de cela, les jeunes non mariés pratiquent toutes les autres formes de sexualité. » Or, en une vingtaine d’années, l’âge moyen du mariage a considérablement reculé, essentiellement à cause de la difficulté de trouver un travail et un logement. Il atteint aujourd’hui 30 ans pour les femmes, et 34 ans pour les hommes. Chez les étudiants — dont le nombre, en progression exponentielle, atteint aujourd’hui un million et demi —, l’âge recule encore.

En Algérie, on est encore « jeune » dans la trentaine (66 % de la population a moins de 35 ans), et il n’est pas rare de rencontrer des femmes encore vierges à 40 ans. C’est le cas notamment des plus instruites d’entre elles, professionnellement très accomplies, dans l’impossibilité de trouver un homme qui accepte leur indépendance intellectuelle et financière. « J’ai un appartement à moi, mais je ne peux pas y habiter, explique Khadija, journaliste de 43 ans issue d’une « bonne famille » d’Annaba. Comme je ne suis pas mariée, tout le monde penserait automatiquement que je reçois plein d’hommes chez moi, et la honte rejaillirait sur ma famille.

Comment gérer sa sexualité pendant ces longues années, entre les premières pulsions et le moment si lointain du mariage ? Cette question constitue un immense tabou : on ne parle de sexualité ni avec ses parents, ni avec ses frères et sœurs, ni même avec ses meilleurs amis. Comme le dit en rigolant Idir, un jeune rencontré à Tizi Ouzou, « la première fois que t’es avec une fille, tout ce que tu connais, c’est les films pornos ! ». C’est aussi la préoccupation majeure de la jeunesse — en lien étroit et obsessionnel avec l’islam. « Car à part ça, ils ont tout, estime Kamel Daoud, éditorialiste vedette au Quotidien d’Oran. Un toit chez les parents, un repas trois fois par jour et de l’argent distribué par l’Etat grâce au pétrole. Par contre, les jeunes s’ennuient. Les loisirs n’existent pas en Algérie. Il faudrait dans chaque ville une piscine, une bibliothèque, un terrain de sport, un cinéma, un théâtre, etc. Or il n’y a strictement rien ! »

En travaillant sur un sujet périphérique, la prostitution, Keltouma Aguis s’est intéressée à la vie sexuelle des jeunes de son pays. Doctorante au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc) à Oran, elle s’excuse de ne pas citer le nom de sa directrice de thèse, « parce que ça pourrait lui porter préjudice ». « Pour vivre leur sexualité, les jeunes Algériens doivent faire face à trois sortes d’interdits, parfaitement harmonisés entre eux : la religion, les coutumes et le code pénal. » L’article 333 du code pénal algérien dispose en effet que « toute personne qui a commis un outrage public à la pudeur est punie d’un emprisonnement de deux mois à deux ans et d’une amende de 500 à 2 000 dinars [5 à 20 euros] ». Cet article est régulièrement utilisé par les juges algériens contre des jeunes non mariés surpris en train de s’embrasser ou de se caresser.

Poids des coutumes et permanence du contrôle social

Un étranger qui débarque en Algérie le remarque immédiatement : l’islam, visible dans l’espace public sans être ostentatoire, envahit en revanche les discussions, en particulier dès que l’on parle de sexualité. Un islam qui interdit rigoureusement toute pratique sexuelle avant le mariage. Khaled Aït Sidhoum, psychanalyste à Alger (le seul en Algérie à être membre de l’Association psychanalytique internationale), propose une explication : « Le jeune Algérien, homme ou femme, se trouve dans un immense désarroi, incapable de satisfaire réellement ses désirs sexuels, et écrasé de culpabilité à la suite des quelques expériences sexuelles qu’il s’autorise. L’islam lui offre à la fois une explication socialement valorisée aux interdits qu’il s’impose et un cadre collectif qui lui permet de réguler ses tensions. Un peu comme les boy-scouts ou les supporteurs d’une équipe de football. »

Une anecdote a marqué les esprits : en septembre 2013, un petit groupe d’activistes algérois a proposé aux couples de venir accrocher, sur le modèle des cadenas fixés par des couples sur les ponts de Paris, un « cadenas de l’amour » sur les grilles du pont du Télemly, au centre d’Alger — un lieu jusqu’alors connu pour être le « pont des suicidés ». Le soir même, des jeunes islamistes du quartier, vêtus du qamis musulman, ont arraché les cadenas « impies, symboles de la décadence occidentale ». Puis tout le monde s’est déchaîné sur Internet et dans les espaces infinis de défoulement offerts par les réseaux sociaux. « Chez nous en Kabylie, un proverbe dit : “Celui qui a du foin dans le ventre a peur du feu”, s’amuse Aït Sidhoum. Lorsque vous titillez quelqu’un sur ce qu’il a le plus de mal à gérer, il démarre au quart de tour. Cela dit, les deux clans sont mus par les mêmes pulsions sexuelles et agressives. Sauf que les mouvements islamistes disposent de sommes d’argent considérables : ce sont eux qui gagnent toujours.

Autre obstacle écrasant qui pèse sur les épaules de la jeunesse algérienne : les coutumes, et le poids permanent du contrôle social. « En Algérie, explique Saïd, 24 ans, rencontré dans un café de Béjaïa, tu ne peux pas transgresser les interdits, comme coucher en vrai avec une fille, ou même dire “merde” à tes parents, parce que tu n’as pas les moyens de cette transgression. C’est la porte immédiatement ! Tu te retrouves à la rue, sans famille, sans rien, et tu fais quoi ? C’est impossible ! » Dans chaque village, dans chaque quartier, dans chaque immeuble, chacun surveille l’autre. Dès lors, les lieux dans lesquels peuvent se rencontrer les couples d’amoureux sont rigoureusement circonscrits.

Impossible dans les campagnes et les villages, trouver un lieu offrant un peu d’intimité reste un casse-tête même dans les grandes villes. Les salons de thé demeurent les endroits privilégiés pour se rencontrer, se regarder dans les yeux pendant des heures, et éventuellement se toucher la main. Pour faire un peu plus (se prendre tendrement par les épaules, échanger quelques baisers), chaque ville a ses lieux attitrés : parc de Galland ou Jardin d’essai au centre d’Alger, site de la Brise de mer à Béjaïa, front de mer à Oran, etc. Pour les habitants de la région d’Alger, le summum du romantisme consiste en une virée dans les ruines romaines de Tipaza. Mais attention ! dans ces lieux fréquentés par parents et enfants, de nombreux gardiens mènent une chasse sévère aux couples d’amoureux, dont le moindre baiser constitue un outrage aux « familles ».

Le problème devient encore plus compliqué lorsqu’on cherche un lieu pour aller plus loin dans les caresses. Il est impensable de ramener sa copine chez soi (il y a toujours quelqu’un à la maison ; sinon, les voisins surveillent), et il est rarissime d’avoir un ami qui possède un appartement qu’il pourrait prêter quelques heures. Impossible, aussi, de « faire ça » dans sa chambre d’étudiant. Les cités universitaires, entourées de murs d’enceinte infranchissables, ne sont pas mixtes. Une seule exception : la « cité » de Béjaïa, dite « mixte » parce que les immeubles des filles se trouvent à l’intérieur de la même enceinte que les immeubles des garçons. Mais le problème reste entier, puisque chaque bâtiment est interdit à l’autre sexe. Le soir, lorsque la nuit tombe, les amoureux se retrouvent à la « love street » : une allée lugubre derrière le petit gymnase, où l’on voit des jeunes debout au milieu de détritus échanger de brûlants baisers, les mains cherchant avidement la peau de l’autre sous des vêtements jamais retirés. En décembre 2013, un documentaire diffusé sur la chaîne Ennahar TV a montré en caméra cachée quelques étudiantes buvant de la bière, ou sortant après le couvre-feu (rigoureusement appliqué dans toutes les cités U du pays) pour aller rejoindre des hommes. Déjà stigmatisées par les auteures du documentaire, ces jeunes femmes ont été réprouvées par la plupart des Algériens.

Pas de chambre double à l’hôtel sans livret de famille

En définitive, pour « faire du sexe », comme le dit Noureddine, il vaut mieux disposer d’une voiture : on va alors dans certains endroits que l’on connaît, et on reste dans le véhicule. Pour les plus pauvres, un bus vous emmène dans d’immenses parcs connus pour leurs buissons discrets. Dans les faubourgs d’Alger, celui de Ben Aknoun nourrit tous les fantasmes. On y trouve en effet de nombreux couples sortant inopinément de quelques chemins de sous-bois, la femme toujours vêtue de façon très stricte : hidjab, long manteau ou djellaba — une façon de s’habiller dominante en Algérie, apparue surtout depuis le terrorisme islamiste des années 1990. « Mais dans ces lieux, voitures et parcs, tu es sous la terreur de deux ennemis permanents, explique Mourad, rencontré dans une allée du parc de Ben Aknoun : la police et les voyous. Si les premiers te chopent, tu risques la prison ou, ce qui est pire pour la fille, que le flic appelle son père pour venir la chercher. Quant aux voyous, ils sont partout, ils te mettent un couteau sous la gorge, ils te dépouillent, ils touchent ta copine, et ils savent que tu ne vas jamais porter plainte. »

Ceux qui en ont les moyens s’offrent parfois une chambre d’hôtel. Ou plutôt deux, puisque, pour une chambre double, l’hôtelier exige systématiquement le livret de famille. Quant à la prostitution, bien trop chère pour les plus jeunes, qui la considèrent en outre comme le pire des péchés, elle est utilisée surtout par des hommes mariés, et de façon très ponctuelle par des garçons des campagnes de passage à la ville. Il semble qu’elle fasse rarement partie de l’apprentissage sexuel du jeune Algérien. Il n’existe d’ailleurs que trois maisons closes officielles dans le pays : à Oran, Skikda et Tindouf. Sinon, la prostitution est essentiellement pratiquée dans les merkez (sortes de villas transformées en bordels plus ou moins tolérés en fonction des relations que le propriétaire entretient avec les responsables locaux), dans les cabarets de la côte à Oran, Alger et Béjaïa, et dans certains hôtels.

« Les jeunes Algériens vivent avec un sentiment de frustration sexuelle très élevé, affirme le Dr Hammouda. Même s’ils ont une vraie vie sexuelle hors vaginale, elle reste très contrainte, et le niveau de frustration est assurément beaucoup plus élevé qu’en Europe. » Les désirs ont pu être soulagés un temps par la révolution d’Internet et de la téléphonie mobile (« le paradis pour faire des rencontres ! », s’enthousiasme Dihya, jeune fille voilée et charmeuse de Béjaïa), mais l’outil magique s’est révélé à double tranchant. « Contrairement à ce qu’on peut croire, l’accès massif à Internet ces dernières années n’a pas diminué les frustrations des jeunes, mais les a considérablement accrues en leur ouvrant une fenêtre sur des possibles qu’ils ignoraient jusque-là, sans offrir pour autant de moyens pour satisfaire ces nouveaux désirs », souligne le psychanalyste Aït Sidhoum.

Dans l’Algérie de 2014, le principal lieu de loisir du jeune Algérien est le « cyber ». Dans chaque ville et dans chaque village, des salles sont sommairement aménagées, alignant une vingtaine d’ordinateurs, écrans tournés vers le mur. L’ambiance est triste, personne ne parle à personne, et chacun passe des heures à « converser » avec des « amis » souvent inconnus, rencontrés ici ou là au hasard de Facebook, Skype et autres rooms de tchat. Ou à télécharger discrètement quelques nouveaux courts-métrages pornographiques. En parallèle, de plus en plus de foyers disposent de connexions individuelles, permettant aux jeunes de passer des heures, la nuit ou dans la journée, à s’évader de chez eux.

Une des conséquences les plus immédiatement perceptibles de cette frustration est l’agressivité avec laquelle les jeunes hommes regardent les jeunes filles et leur parlent dans les rues très passantes des grandes villes. Nordine et Bachir, 22 et 23 ans, apprentis plombiers sans travail, arpentent les arcades de Larbi Ben M’Hidi, la grande rue commerçante d’Oran. Deux jeunes filles passent, en tenue « normale », tête couverte du hidjab, les formes du corps rendues invisibles par plusieurs couches de robes et de pulls couverts d’une djellaba. Elles sont aussitôt harcelées en termes extrêmement crus par les deux hommes, qui, parce qu’elles refusent de répondre à leurs avances, les traitent immédiatement de « putes », un mot qui revient en permanence en Algérie, non pas d’ailleurs dans le sens de « prostituée », mais plutôt de « fille facile ». Explication de Keltouma Aguis : « Le mot “pute” [qahba en arabe] est utilisé pour désigner toute femme qui aspire à une indépendance, fût-elle très modeste, par rapport à la norme sociale imposée. Cette marque d’indépendance peut concerner l’espace domestique (refus de faire le ménage ou la cuisine) ou l’espace public : le vêtement, la cigarette, la façon de marcher, le simple fait de se trouver à certains endroits à certaines heures, etc. Du moment qu’une femme transgresse une de ces nombreuses normes non sexuelles, elle est immédiatement considérée comme prédisposée à transgresser la norme sexuelle si une situation se présente. » Les jeunes hommes interrogés considèrent ainsi les filles des travailleurs algériens immigrés en France comme des « putes ». « C’est clair, affirme Mokhtar, un Oranais prêt à dénoncer l’« obscurantisme » de la société algérienne. Elles sortent quand elles veulent, elles ne mettent pas le foulard, elles fument, elles embrassent leur copain dans la rue, ce sont des putes ! »

Matchs de football et émeutes de quartier comme dérivatifs

« Cette frustration sexuelle se combine avec une très forte agressivité latente, confirme Nalia Hamiche, psychologue clinicienne à l’hôpital de Bab El-Oued, à Alger. L’histoire de l’Algérie est faite de traumatismes de violence qui n’ont jamais été travaillés : l’oppression coloniale, la guerre de libération, puis la guerre contre les civils dans les années 1990. Ces traumatismes de violence, ajoutés aux frustrations sexuelles, font que les Algériens vivent régis par leurs pulsions. Et dans la rue, en effet, les mecs sont à l’affût, prêts à attaquer. » Dans chaque ville, des règles non dites interdisent aux femmes de se trouver à certains endroits — les plus nombreux — à certaines heures, le plus souvent après la nuit tombée. « Et gare à celles qui transgressent : elles risquent fortement de se faire agresser sexuellement ! » Beaucoup de femmes rencontrées ont subi des attouchements sexuels, certaines ont été violées. « Dans mes consultations à l’hôpital, je rencontre de nombreux cas d’inceste et de pédophilie, raconte Nalia Hamiche. Au sein des familles, à l’école, dans les mosquées, etc. Et les victimes se taisent, car personne ne veut les entendre. »

Cette situation sexuelle de la jeunesse algérienne est une des clés qui permettent de comprendre certains phénomènes sociaux et politiques. « Immaturité sexuelle et dépendance financière, tout s’emboîte, estime la psychologue Hamiche. La rente pétrolière met la jeunesse dans une situation de totale dépendance vis-à-vis de l’Etat : les jeunes n’ont pas besoin de travailler, le gouvernement leur propose des dispositifs qui leur permettent de recevoir un minimum d’argent sans effort et sans mérite. Cette situation de dépendance se retrouve au sein du cercle primaire que représente la famille. Les enfants, jusqu’à 30 ans, 35 ans, voire 40 ans, ne sont pas reconnus comme ayant droit à la maturité sexuelle ou politique. »

La plupart des jeunes rencontrés ne sont jamais allés voter, « dégoûtés » par l’absence de toute possibilité d’activité politique, sociale ou associative. Que leur reste-t-il alors ? Les soirées de matchs et les émeutes urbaines sporadiques. Chaque jour, sauf le vendredi, à plusieurs endroits du pays, pour une coupure d’eau dans un quartier, un raccordement au gaz qui tarde à venir, une promesse de relogement non tenue, des poubelles non ramassées, etc., les hommes descendent dans la rue, crient, ameutent les voisins, brûlent des pneus et des poubelles, puis finissent par rentrer chez eux. Pour Aït Sidhoum, « les émeutes de quartier constituent un dérivatif pour faire tomber la tension. Mais cela reste dérisoire par rapport au niveau terrifiant de tension actuel. Et nos gouvernants ne comprennent pas que ces tensions accumulées constituent aujourd’hui une très dangereuse bombe à retardement ! ». Même chose pour le football et les scènes de liesse délirantes, avec des morts et des blessés, qui ont accompagné chaque victoire de l’équipe nationale lors de la Coupe du monde. Pour Hamiche, « le stade de foot ou la rue les soirs de victoire deviennent un espace d’agitation pour lutter contre la mélancolie. En s’agitant, on se donne l’illusion d’être encore vivant ». Mais ces occasions « d’agitation » sont très rares. Alors il reste le rêve de se rendre en France (le consulat français a enregistré un demi-million de demandes de visa en 2013, pour une population de trente-huit millions de personnes), risquer sa vie en mer (phénomène des harraga) ou partir faire le djihad en Syrie. Le taux de suicides serait en hausse, mais, là comme ailleurs, l’Etat ne fournit aucun chiffre.

Les blocages sexuels vont aussi se nicher aux endroits où on les attend le moins. Mohand, 34 ans, journaliste et activiste, est membre de Barakat, cette récente plate-forme dans laquelle se retrouvent les militants les plus engagés d’Algérie. Il explique avec candeur : « Lorsque des militants viennent à la maison, j’envoie ma femme chez sa famille en Kabylie. » Pourquoi ? « Vous comprenez, on boit, on fume, elle se sentirait mal à l’aise. » Et la politologue Naoual Belakhdar, universitaire berlinoise qui travaille sur les mouvements sociaux en Algérie, de conclure : « Un vrai signe de changement politique en Algérie apparaîtra lorsqu’on verra les manifestants descendre dans la rue avec leur copine, leur femme et leur sœur. »

 

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SOURCE : Le Monde Diplomatique

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13/12/2018

Gilets Jaunes : Vers une Guerre Civile ?

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Une brillante analyse de Charles Gave... 

 

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28/11/2018

Alimentation et jeûne dans l’Église Orthodoxe

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Aujourd'hui débute le Carême Orthodoxe avant Noël qui s'achèvera le 7 Janvier prochain après la Liturgie... selon le Calendrier Julien nous sommes le 15 Novembre aujourd'hui et le 7 Janvier 2019 correspondra au 25 Décembre 2018... 

Quelques éclaircissement sur la nourriture et l'ascèse... 

 

 

 

 

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19/11/2018

De Gaulle, Pétain, la France : Finkielkraut reçoit Eric Zemmour et Paul Thibaud

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31/10/2018

Bolsonaro

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23/10/2018

Eric Zemmour : La France (Sud Radio)

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22/10/2018

Stéphane Zagdanski sur l'antisémitisme de Louis-Ferdinand Céline

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20/10/2018

La Théologie des Energies Divines dans l'Église Orthodoxe, par Jean Claude Larchet

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19/10/2018

André Bercoff reçoit Michel Onfray

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