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24/03/2013

La Lumière Incréée...

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« - Quand même, répondis-je, je ne comprends pas encore comment je puis être vraiment sûr d'être dans l'Esprit Saint ! Comment puis-je en moi-même reconnaître Sa véritable présence ? Petit Père Séraphim répondit : J'ai déjà dit, votre Théophilie, que c'était fort simple et vous ai raconté d'une façon détaillée comment les hommes peuvent être en la plénitude de l'Esprit Saint et comment il faut reconnaître Son apparition en nous. Alors, petit père, que voulez-vous de plus ?

- Il me faut, dis-je, pouvoir le comprendre mieux encore !

Alors Père Séraphim me serra fortement les épaules et dit :

- Nous sommes tous les deux en la plénitude de l'Esprit Saint ! Pourquoi ne me regardes-tu pas ?
- Je ne le puis, dis-je, petit Père car des foudres jaillissent de vos yeux. Votre face est devenue plus lumineuse que le soleil et mes yeux sont broyés de douleur !
- N'ayez pas peur, dit saint Séraphim. Vous êtes devenu aussi lumineux que moi ; vous êtes aussi, à présent, en la plénitude de l'Esprit Saint, autrement vous n'auriez pu me voir ainsi.
Et inclinant la tête vers moi, il me dit doucement à l'oreille : Remerciez le Seigneur de nous avoir donné Sa Grâce ineffable. Vous avez vu que je n'ai même pas fait un signe de croix ; seulement, dans mon coeur, en pensée, j'ai prié le Seigneur Dieu et j'ai dit : "Seigneur, rends-le digne de voir clairement avec ses yeux de chair la descente de l'Esprit Saint, comme Tu l'as fait voir à Tes serviteurs élus quand Tu daignas apparaître dans la magnificence de Ta Gloire !" Et voilà, petit père, Dieu exauça immédiatement l'humble prière de l'humble Séraphim ! Comment pourrions-nous ne pas Le remercier pour ce don inexprimable accordé à nous deux ?
Réalisez, petit père, que ce n'est pas toujours aux grands ermites que Dieu manifeste ainsi Sa Grâce. Telle une mère compatissante, cette Grâce de Dieu a daigné panser votre coeur douloureux par l'intercession de la Mère de Dieu elle-même.
Alors, pourquoi ne me regardez-vous pas dans les yeux ? Osez me regarder simplement et sans crainte ! DIEU EST AVEC NOUS !

Après ces mots, je regardai sa face et une peur surnaturelle encore plus grande m'envahit.
Représentez-vous la face d'un homme qui vous parle au milieu d'un soleil de midi. Vous voyez les mouvements de ses lèvres, l'expression changeante de ses yeux, vous entendez sa voix, Vous sentez que quelqu'un vous serre les épaules de ses mains, mais vous n'apercevez ni ses mains, ni son corps, ni le vôtre, mais seulement cette éclatante lumière qui se propage à plusieurs mètres de distance tout autour, éclairant la surface de neige recouvrant la prairie, et la neige qui continue à nous saupoudrer, le grand Staretz et moi-même. Qui pourrait imaginer mon état d'alors ?

- Que sentez-vous à présent ? demanda saint Séraphim.
- Je me sens extraordinairement bien !
- Mais... Comment cela, "bien" ? En quoi consiste ce "bien" ?
- Je ressens en mon âme un silence, une paix, tels que je ne puis l'exprimer par des paroles...
- C'est là, votre Théophilie, dit le petit Père Séraphim, cette paix même que le Seigneur désignait à Ses disciples lorsqu'Il leur disait: "Je vous donne Ma paix, non comme le monde la donne. C'est Moi Qui vous la donne. Si vous étiez de ce monde, le monde aurait aimé les siens. Je vous ai élus et le monde vous hait. Soyez donc téméraires, car J'ai vaincu le monde !"
C'est à ces hommes, que le monde hait, élus de Dieu, que le Seigneur donne la paix que vous ressentez à présent, "cette paix", dit l'Apôtre, "qui dépasse tout entendement."

L'Apôtre désigne ainsi cette paix parce qu'on ne peut exprimer par aucune parole le bien-être que ressent l'âme des hommes dans le coeur desquels le Seigneur Dieu l'enracine. Le Christ Sauveur l'appelle "Sa paix", venant de Sa propre générosité et non de ce monde, parce qu'aucun bonheur terrestre provisoire ne peut donner cette paix.
Elle est donnée d'En Haut par le Seigneur Dieu Lui-même, c'est pourquoi elle se nomme: "LA PAIX DU SEIGNEUR".

- Mais que ressentez-vous en plus de la paix ? demanda saint Séraphim.
- ...une douceur extraordinaire...
- C'est cette douceur dont parlent les Saintes Écritures : "Ils boiront le breuvage de Ta maison et Tu les désaltéreras par le torrent de Ta douceur". C'est cette douceur qui déborde dans nos coeurs et s'écoule dans toutes nos veines en un inexprimable délice. On dirait qu'elle fait fondre nos coeurs, les emplissant d'une telle béatitude qu'aucune parole ne saurait la décrire. Et que sentez-vous encore ?
- Tout mon coeur déborde d'une joie indicible.
- Quand le Saint Esprit, continua saint Séraphim, descend vers l'homme et le couvre de la plénitude de Ses dons, l'âme de l'homme se remplit d'une inexprimable joie, parce que le Saint Esprit recrée en joie tout ce qu'Il a effleuré 1 C'est de cette même joie dont parle le Seigneur dans l'Évangile : "Quand la femme enfante, elle est dans la douleur, car son heure est arrivée. Mais, ayant mis au monde un enfant, elle ne se souvient plus de la douleur. tant la joie d'avoir enfanté est grande.. Vous aurez de la douleur dans le monde, mais quand Je vous visiterai, vos coeurs se réjouiront et votre joie ne vous sera point ravie".
Pour autant qu'elle soit consolation, cette joie que vous ressentez à présent dans votre coeur, votre Théophilie, n'est rien en comparaison,de celle dont le Seigneur Lui-même a dit par le voix de Son Apôtre : "La joie que Dieu réserve à ceux qui l'aiment ne peut être vue, ni entendue, ni ressentie par le coeur de l'homme dans ce monde".
Ce ne sont que des "acomptes" de cette joie qui nous sont à présent accordés, et si déjà nous ressentons en nos coeurs douceur, jubilation et bien-être, que dire alors de cette autre joie qui nous est réservée dans le ciel à nous qui pleurons ici-bas.
Ainsi, votre Théophilie, vous aussi avez assez pleuré dans votre vie sur cette terre, et voyez par quelle joie vous console dès ici-bas le Seigneur. Maintenant, petit père, c'est à nous d'oeuvrer en accumulant les efforts, croissant de force en force pour atteindre la mesure de l'âge (maturité) dans l'accomplissement de l'oeuvre du Christ et pour que les paroles du Seigneur s'accomplissent en nous : "Ceux qui patienteront au nom du Seigneur changeront de force, obtiendront des ailes, tels des aigles, s'épancheront sans fatigue, partiront sans connaître jamais la faim, croissant de force en force, et le Dieu des dieux leur apparaîtra dans la Sion de sagesse et de visions célestes".
C'est alors que notre joie actuelle, trop petite et éphémère, nous sera donnée en sa plénitude sans que personne puisse nous la ravir et nous remplira de jouissances célestes inexprimables.
Que sentez-vous en plus de cela, votre Théophilie ?
- Une chaleur extraordinaire, répondis-je.
- Comment cela, chaleur ? Ne sommes-nous pas en pleine forêt, l'hiver, la neige sous nos pieds, qui nous recouvre d'une couche épaisse et continue à nous saupoudrer ? Quelle chaleur pouvez-vous ressentir ici ?
- Mais une chaleur comparable à celle d'un bain de vapeur à l'instant où son tourbillon vous enveloppe.
- Et l'odeur que vous sentez, est-elle aussi comme aux bains ? - Oh ! que non, dis-je. Rien sur la terre ne peut se comparer à cet aromate. Quand autrefois j'aimais danser, aux réunions et aux bals, feu ma petite mère me parfumait parfois avec des parfums qu'elle achetait dans les meilleurs magasins de Kazan. Mais ces parfums ne sont rien en comparaison de ces "aromates".

Petit Père Séraphim, alors, sourit agréablement en disant :

- Je sais, en vérité, que c'est bien ainsi et c'est exprès que je vous questionne sur ce que vous ressentez ! C'est bien vrai, votre Théophilie, rien ne peut se comparer avec le parfum que nous humons actuellement, car c'est l'aromate de l'Esprit Saint qui nous enveloppe. Quelle chose terrestre peut lui être comparée ?
Notez bien, votre Théophilie, que vous m'avez dit tout à l'heure, qu'il faisait chaud comme aux bains. Pourtant regardez, la neige qui nous recouvre ne fond point, non plus que celle qui est sous nos pieds : cette chaleur n'est donc pas dans l'air, mais à l'intérieur de nous-mêmes. C'est cette chaleur que l'Esprit Saint nous fait demander dans la prière, quand nous clamons vers Dieu: « Que Ton Saint Esprit me réchauffe !

Réchauffés par cette chaleur, les ermites ne craignaient plus le froid de l'hiver, habillés comme par des pelisses chaudes dans un vêtement tissé par la Grâce de l'Esprit Saint.

Et c'est ainsi que les choses doivent être en réalité, puisque la Grâce divine doit habiter au plus profond de nous, dans notre coeur, comme l'a dit le Seigneur : "LE ROYAUME DES CIEUX EST EN VOUS".

Et, par le "Royaume des Cieux", le Seigneur entendait la Grâce de l'Esprit Saint. C'est ce "Royaume des Cieux" qui se trouve à présent en nous, et la Grâce de l'Esprit Saint nous éclaire et nous réchauffe aussi de l'extérieur, et embaume l'air environnant de divers parfums et réjouit nos sens de célestes délices, désaltérant nos coeurs d'une inexprimable joie. Notre état actuel est celui-là même dont l'Apôtre Paul disait : "LE ROYAUME DES CIEUX N'EST POINT NOURRITURE OU BREUVAGE, MAIS LA VÉRITÉ ET LA JOIE EN L'ESPRIT SAINT". Notre foi consiste non pas en "des paroles de la sagesse terrestre mais dans la manifestation de la Force et de l'Esprit". Nous sommes actuellement avec vous dans cet état.

C'est de cet état précis que le Seigneur Dieu dit : "Certains ici présents ne goûteront point la mort avant d'avoir vu le Royaume des Cieux venir en Force".

Voilà, votre Théophilie, quelle joie incomparable le Seigneur Dieu nous accorde ! Voilà ce que signifie "être en la plénitude de l'Esprit Saint", et c'est cela qu'entend saint Macaire d'Égypte quand il écrit : "Je fus moi-même en la plénitude de l'Esprit Saint".

Maintenant le Seigneur nous a, nous aussi, humbles que nous sommes, remplis de cette plénitude de Son Saint Esprit.

Eh bien, votre Théophilie, il me semble à présent que vous n'allez plus m'interroger sur la façon dont se manifeste dans les hommes la présence de la Grâce de l'Esprit Saint... »

Entretien de St Séraphim de Sarov avec Motovilov, in Irina Goraïnoff, "Séraphim de Sarov", (Éditions Abbaye de Bellefontaine et Desclée de Brouwer)

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23/03/2013

Lorsqu'un homme juste se tient en sa petitesse

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« Comprenez bien ceci lorsque le soleil envoie ses rayons et sa clarté jusque dans une profonde vallée, située entre deux montagnes, tandis qu'il est au sommet du firmament, de façon à pouvoir éclairer le sol même et le fond de cette vallée, il se produit trois choses : la vallée s'éclaire de la lumière que lui renvoient les montagnes, elle s'échauffe ainsi davantage et devient plus fertile qu'une plaine. De la même façon, lorsqu'un homme juste se tient en sa petitesse, au plus bas de soi-même, et qu'il reconnaît n'avoir rien de soi, n'être rien et ne pouvoir rien, ni persévérer, ni progresser, et que souvent même il manque de vertus et de bonnes œuvres, alors il prend conscience de sa pauvreté et de sa détresse, et il creuse ainsi une vallée d'humilité. Et parce qu'il est humble et indigent, et qu'il connaît sa misère, il l'expose et en gémit devant la bonté et la miséricorde de Dieu. Ainsi peut-il reconnaître et la hauteur de Dieu et sa propre bassesse, et il devient une vallée profonde. Or, le Christ est un soleil de justice et aussi de miséricorde, qui se tient au plus haut du firmament, c'est-à-dire à la droite de son Père, et il brille jusqu'au fond des cours humbles ; car le Christ est toujours touché de la misère de l'homme qui en gémit et la découvre humblement. Alors s'élèvent là aussi deux montagnes formées d'un double désir, l'un de servir Dieu et de le louer dignement l'autre de pratiquer la vertu d'une façon excellente. Ces deux montagnes sont plus hautes que le ciel, car les désirs dont elles sont formées atteignent Dieu sans intermédiaire et attirent sa large libéralité. Dès lors cette libéralité ne peut plus se contenir, il faut qu'elle se répande ; car l'âme est devenue apte à recevoir des dons plus nombreux. »

Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles

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Ce monde ne vaut rien, qu’il en vienne un autre

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« Ce monde ne vaut rien, qu’il en vienne un autre.
Ça fait déjà trop longtemps que nous y sommes
À feindre des raisons suffisantes.
Soyons plus chiens que les chiens : nous savons l’art
De mordre les plus faibles, si nous commandons,
Et de lécher les mains, si nous sommes soumis. »

José Saramago, "Démission", in "Les Poèmes possibles"

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22/03/2013

Les hommes éclairés, d’un libre esprit, sont ravis plus haut que la raison

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« Les hommes éclairés, d’un libre esprit, sont ravis plus haut que la raison, jusqu’à la vision nue et sans images. C’est là que l’unité divine appelle éternellement et avec une intelligence nue et vide d’images, elles dépassent toutes les œuvres, toutes les pratiques, toutes les choses enfin, et atteignent au sommet de l’esprit. Là, leur intelligence nue est entièrement pénétrée d’éternelle lumière comme l’air est pénétré par la lumière du soleil. La volonté nue et ravie est transformée et pénétrée par l’amour sans fond comme le fer par le feu. Et la mémoire nue et ravie se sent enclose et établie dans un abîme sans formes. »

Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles

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L'impossible qui persuade

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« Pour ce qui est de la poésie, l'impossible qui persuade est préférable au possible qui ne persuade pas. »

Aristote, Poétique

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21/03/2013

De deux sortes d'humilité dans le Christ

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« Il y eut dans le Christ, envisagé comme Dieu, une double humilité.

De la première il donna la preuve en se faisant homme, et en prenant personnellement la nature humaine afin de se l'unir, malgré qu'elle fût bannie et engloutie jusqu'au fond de l'enfer ; de sorte que tout homme bon ou mauvais pût dire : le Christ, Fils de Dieu, est mon frère.

La seconde sorte d'humilité chez le Christ fut de prendre pour sa mère, non une fille de roi, mais une pauvre vierge qui devint ainsi mère de Dieu et de celui qui est Seigneur du ciel, de la terre et de toute créature. On peut ajouter que toutes les œuvres d'humilité accomplies par le Christ l'ont été par Dieu même.

Considérant ensuite l'humilité qui régnait dans le Christ, selon son humanité, sous l'influence de la grâce et des dons divins, nous voyons que son âme, avec toutes ses puissances, s'inclinait avec respect et vénération devant la haute puissance de son Père ; et un cœur qui s'incline de cette sorte est un cœur humble. Aussi le Christ accomplissait-il toutes ses œuvres en l'honneur et à la louange de son Père, ne cherchant en rien sa propre gloire humaine.

Il obéit humblement à l'ancienne loi et à ses prescriptions, parfois même à de simples coutumes, quand cela était utile. Il fut circoncis, présenté au Temple, racheté selon l'usage, et il paya l'impôt à César comme les autres juifs. Il se soumit en toute humilité à sa mère et à saint Joseph, les servant avec une sincère déférence en tous leurs besoins. Il choisit pour compagnons de ses courses apostoliques des pauvres et des méprisés, afin de convertir le monde, et il en fit ses Apôtres. Au milieu d'eux il garda son attitude d'humble abaissement comme avec tous les hommes. Aussi était-il prêt à secourir quiconque était dans la détresse intérieure ou extérieure, se montrant le serviteur de tous.

Voilà ce qui nous apparaît tout d'abord dans le Christ, notre Époux. »

Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles

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20/03/2013

Le ténébreux silence

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« Dans cet abîme insondable de la Simplicité, toutes choses sont embrassées dans la béatitude. Mais l’abîme lui-même ne peut être embrassé par rien si ce n’est par l’unité essentielle.

C’est en lui que doivent se résorber tout ce qui vit, car il n’y a ici que repos dans l’embrassement du flot de l’amour... C’est là le ténébreux silence… »

Jean de Ruisbroek, Les Noces spirituelles

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Le jeûne est un bon maître

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« Il est nécessaire pour le chrétien de jeûner afin d'éclairer son intellect, d'élever et de développer ses sentiments et de stimuler sa volonté pour avoir une activité utile. Il est aussi nécessaire pour un chrétien de jeûner parce que le Fils de Dieu prit sur Lui notre humaine nature, afin que la nature humaine soit élevée au plan divin, et à présent, nous nous hâtons vers le Royaume de Dieu qui n'est ni nourriture ni boisson, mais justice et paix, et joie dans le Saint Esprit.
Le jeûne est un bon maître : il fait vite comprendre à tous ceux qui jeûnent que l'homme a besoin de peu de nourriture et de boisson, et qu'en général, nous sommes gourmands et que nous mangeons beaucoup plus qu'il n'est nécessaire.
Le jeûne expose clairement tous les péchés et les défauts, toutes les faiblesses et les maladies de notre âme, de même que lorsque l'on remue un eau boueuse et stagnante, les reptiles et la terre qui s'y trouvent sont révélés.
Cela nous montre la nécessité de nous tourner vers Dieu de tout notre cœur, de rechercher Sa miséricorde, Son aide et Sa grâce salvatrice.
Le jeûne nous montre toute l'habileté, la ruse et la malice des esprits incorporels que nous avons involontairement servis. »

Jean de Cronstadt, Ma Vie en Christ

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La multiplication des patries

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«  Le dernier et le plus fatal des excès du nationalisme, c’est la multiplication des patries. Il y a maintenant une démocratie des patries, comme il y a une démocratie des individus. Le traité de Versailles a fait de l’Europe une mosaïque d’Etats moyens ou petits, une Suisse nombreuse. (…) D’ailleurs cet excès finit même par se retourner contre le nationalisme et le menacer : le provincialisme tuera peut-être le nationalisme. (…) Chaque grande patrie, déchirée intérieurement par dix petites patries, acceptera plus facilement de s’humilier et de céder une part de son autorité à une patrie supérieure, européenne. »

Pierre Drieu La Rochelle, Genève ou Moscou

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19/03/2013

Dieu peut tout, sauf contraindre l’homme à l’aimer

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« Si Dieu se cache, s’il refuse d’être évident, c’est pour que nous soyons libres. On parle souvent de la puissance de Dieu, et de sa force. Il serait plus fécond de mettre l’accent sur sa vulnérabilité. Avoir créé l’homme et l’avoir créé libre est un risque extraordinaire. Si l’homme n’était pas libre, tout irait comme sur des roulettes au paradis des esclaves béats, au royaume du Grand Inquisiteur ; mais l’homme a été créé libre, et cette liberté est un terrible soleil. Dieu peut tout, sauf contraindre l’homme à l’aimer. »

Gabriel Matzneff, Journal "Le Monde, 14 avril 1979"

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18/03/2013

Pour s’encrapuler et souffrir

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« Les hommes qui étaient restés intactes dans la paix de l’ignorance, on les a arrachés de force à leurs friches pastorales et entassés dans la mélée rageuse des villes, pour s’encrapuler et souffrir. »

Giovanni Papini, Histoire du Christ

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Nous vivons dans l’ère chrétienne. Et elle n’est pas finie.

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« Pourtant, après tout ce gâchis de temps et d’esprit et de talent, le Christ n’a toujours pas été expulsé de la terre. Sa mémoire est partout. Sur les murs des églises et des écoles, au sommet des clochers, des tabernacles et des montagnes, à la tête des lits et des tombeaux, des millions de croix rappellent la mort du Crucifié. Décollez les fresques des églises, enlevez les tableaux des autels et des maisons, et la vie du Christ remplira les musées et les galeries d’art. jetez au feu les missels, les bréviaires et les eucologes et vous retrouverez son nom et ses paroles dans tous les livres de toutes les littératures. Les blasphèmes eux-mêmes sont un souvenir involontaire de sa présence. Quoi que l’on fasse, le Christ est une fin et un début, un abîme de mystères divins au milieu de deux tronçons d’histoire humaine. La Gentilité et la Chrétienté ne pourront plus jamais se souder l’une à l’autre. Avant le Christ et après le Christ. Notre ère, notre civilisation, notre vie commencent avec la naissance du Christ. Ce qui a été avant lui, nous pouvons le rechercher et le connaître, mais il ne nous appartient plus, il est marqué par d’autres chiffres, circonscrit dans d’autres systèmes, il ne remue plus nos passions : c’est peut-être beau, mais c’est mort. César a fait, en son temps, plus de bruit que Jésus, et Platon enseignait plus de sciences que le Christ. On dispute encore de l’un et de l’autre, mais qui s’échauffe pour ou contre César ? Et où sont, aujourd’hui, les platonistes et les antiplatonistes ? Le Christ, en revanche, est toujours vivant en nous. Il y en a encore qui l’aiment, et d’autres qui le haïssent. Il y a une passion pour la passion du Christ et une passion pour le détruire. Et l’acharnement de beaucoup contre lui dit clairement qu’il n’est pas encore mort. Ceux-là mêmes qui se damnent pour nier sa doctrine et son existence passent leur vie à rappeler son nom. Nous vivons dans l’ère chrétienne. Et elle n’est pas finie. Pour comprendre notre monde, notre vie, pour nous comprendre nous-mêmes, il faut se reporter à lui. »

Giovanni Papini, Histoire du Christ

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17/03/2013

Nous découvrons que la race – ou ce que l’on entend généralement par ce terme - est une fonction parmi d’autres de la culture

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« Ce sont les formes de culture qu’adoptent ici ou là les hommes, leurs façons de vivre telles qu’elles ont prévalu dans le passé ou prévalent encore dans le présent, qui déterminent dans une très large mesure, le rythme de leur évolution biologique et son orientation. Loin qu’il faille se demander si la culture est ou non fonction de la race, nous découvrons que la race – ou ce que l’on entend généralement par ce terme - est une fonction parmi d’autres de la culture. »

Claude Lévi-Strauss, Race et culture

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Pâles...

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« Les Blancs méritent de plus en plus le nom de pâles que leur donnaient les indiens d’Amériques. »

Emil Michel Cioran, De l’inconvénient d’être né

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Je n'étais qu'un pauvre clown au coeur ébouriffé

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« Je vous ai vus enlacés dans le vent
Mouillés par la langue rugueuse du désir,
Vos seins lactés unis
Sans haleine
Comme des roseaux enivrés par la délicatesse de l'eau,
Comme des jumeaux.
Je vous ai vus couchés dans l'or fielleux des ajoncs
Déchirant vos peaux aux ombres furtives,
Écrémant vos passions
Endormies.
Et moi comme un arbre douloureux de sa nudité
Seul, aplati contre un ciel méchant
Je n'étais qu'un pauvre clown au coeur ébouriffé. »

Joyce Mansour, Déchirures

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16/03/2013

La vie est la vie, c’est-à-dire un combat, pour une nation comme pour un homme

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« J’appelle ici "de droite", par pure "convention", l’attitude consistant à considérer la "diversité" du monde et, par suite, les inégalités "relatives" qui en sont nécessairement le produit, comme un bien, et l’homogénéisation progressive du monde, prônée et réalisée par le discours bimillénaire de l’idéologie égalitaire, comme un mal. J’appelle de droite, les doctrines qui considèrent que les inégalités relatives de l’existence induisent des rapports de force dont le devenir historique est le produit – et qui estiment que "l’histoire doit continuer" – bref, que "la vie est la vie, c’est-à-dire un combat, pour une nation comme pour un homme" (Charles de Gaulle). C’est-à-dire qu’à mes yeux, l’ennemi n’est pas "la gauche" ou "le communisme" ou bien encore "la subversion", mais bel et bien cette idéologie égalitaire dont les formulations, religieuses ou laïques, métaphysiques ou prétendument "scientifiques", n’ont cessé de fleurir depuis deux mille ans, dont "les idées de 1789" n’ont été qu’une étape, dont la subversion actuelle et le communisme sont le véritable aboutissement. On peut, bien entendu, discuter sur le détail. Je pense néanmoins qu’il n’y a pas de critère plus fondamental. Soit l’on se situe dans une perspective anti égalitaire, qui implique de juger des hommes, non sur le simple fait de leur "présence" au monde (politique ontologique), mais sur leur "valeur", appréciée en fonction des critères propres à leur activité personnelle et des caractères spécifiques des communautés dans lesquelles ils s’inscrivent. Soit l’on se situe dans une perspective égalitaire, qui voit dans toute inégalité une manière d’ "injustice", qui prétend que la morale est l’essence de la politique, et qui implique le cosmopolitisme politique et l’universalisme philosophique.

Cela ne signifie pas, bien entendu, que toute inégalité soit, à mes yeux, nécessairement juste. Il y a, au contraire, de nombreuses inégalités parfaitement injustes ; ce sont souvent celles – généralement économiques – que notre société égalitaire laisse subsister. Je ne suis pas de ceux qui confortent le désordre établi. Je n’approuve aucun privilège de caste. Je fais de l’égalité des chances un réquisit de toute politique sociale. Aussi bien, professer une conception anti égalitaire de la vie, ce n’est pas vouloir accentuer les inégalités souvent détestables que nous voyons s’instituer autour de nous. Mais c’est estimer que la diversité est "le fait-du-monde" par excellence ; que cette diversité induit inéluctablement des inégalités de fait "relatives" ; que la société doit prendre en compte ces inégalités et admettre que la valeur des personnes diffère selon les multiples critères auxquels nous nous référons dans la vie quotidienne. C’est estimer que dans les rapports sociaux, cette valeur est essentiellement mesurée par les responsabilités que chacun assume, rapportées à ses aptitudes concrètes ; que la liberté réside dans la possibilité effective d’exercer ces responsabilités ; qu’à ces responsabilités correspondent des droits proportionnées, et qu’il en résulte une hiérarchie, basée sur le "principe unicuique suum" [à chacun son dû]. »

Alain de Benoist, Droite, l’ancienne et la nouvelle

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La paresse intellectuelle de la vieille droite

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«  Il va sans dire que la vieille droite qui, dans son ensemble n’a lu ni Marx ni Lénine, n’est pas près de lire Gramsci. On se demande d’ailleurs ce qu’elle peut lire en dehors de journaux satyriques et des magazines littéraires quand on s’aperçoit qu’au cours de ces dernières années, aucuns des ouvrages fondamentaux dont elle aurait pu tirer argument, dans un sens ou dans l’autre, ne semble avoir retenu son attention.

La paresse intellectuelle de la vieille droite ne s’explique pas seulement par sa méfiance instinctive vis-à-vis des idées pures. Pendant longtemps, les Saintes Ecritures lui ont servi de doctrine. Tout étant censé avoir été dit, il apparaissait inutile de vouloir constituer une autre Summa autre que celle de Thomas d’Aquin. Cette conviction prévaut encore aujourd’hui dans un certain nombre de cénacles. Mais pour combien de temps ? Après avoir été, nolens volens, la religion de l’Occident, après avoir été portée par un esprit, une culture, un dynamisme européens, qui l’avaient précédé de quelques millénaires, le christianisme, opérant un retour aux sources, redécouvre aujourd’hui ses origines. Pour assumer sa vocation universaliste et devenir la religion du monde entier, il entend se "désoccidentaliser".

Dans l’immédiat, il développe une stratégie qui revient à se demander si elle ne revient pas à lâcher la proie pour l’ombre. Le christianisme sociologique est entrain de disparaître, laissant la place au militantisme évangélico-politique. L’impulsion vient de la tête. La hiérarchie accélère le mouvement. Les traditionalistes, attachés dans leur Eglise à tout ce dont celle-ci ne veut plus entendre parler, auront du mal à faire croire que le meilleur moyen d’endiguer la "subversion" est de batailler dans une croyance qui les a déjà abandonnés pour passer à l’ennemi. »

Alain de Benoist, Droite, l’ancienne et la nouvelle

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15/03/2013

Toujours il est en lui beaucoup de la bête...

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« Toujours il est en lui beaucoup de la bête, sommeillante sur les tapis confortables et bien tissés d'une civilisation lisse, dégrossie, dont les rouages s'engrènent sans heurts, drapée dans l'habitude et les formes plaisantes; mais la sinusoïde de la vie fait-elle brusquement retour à la ligne rouge du primitif, alors les masques tombent : nu comme il l'a toujours été, le voilà qui surgit, l'homme premier, l'homme des cavernes, totalement effréné dans le déchaînement des instincts.  »

« L’essentiel n’est pas ce pour quoi nous nous battons, c’est la façon dont nous nous battons. »

Ernst Jünger, La guerre comme expérience intérieure

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14/03/2013

Aucun encouragement

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« La génération de Péguy et de Psichari, mais aussi, et je cite pêle-mêle, celle d’André Gide, de Francis Jammes, d’André Suarès, de Bourget, de Barrès, de Huysmans, de Brunetière, de Melchior de Vogüe, de Jaurès, de Lucien Herr, de combien encore qui, sous une forme ou sous une autre, furent touchés, ensemble, comme par un ordre de convocation individuelle. Un seul trait de commun entre eux : c’est qu’aucun d’eux ne devait rien à l’église de leur nativité et que ceux d’entre eux qui tardivement s’en rapprochèrent, ne trouvèrent, chez elle, intérieur ou extérieur, aucun encouragement. »

Paul Claudel, « Préface », Correspondance entre Louis Gillet et Romain Rolland (Cahier Romain Rolland, 2), Paris, 1949

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Longtemps la France a été orthodoxe

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« Longtemps la France a été orthodoxe ; sainte Geneviève et saint Denis de Paris, saint Irénée de Lyon, saint Martin de Tours, saint Cassien de Marseille sont des saints orthodoxes ; de nos jours, des savants orthodoxes se sont attachés à redonner vie à l’ancien rite gallican qui est, selon eux, plus conforme au génie français que la messe latine et la liturgie byzantine. Canoniquement, la France cesse d’être orthodoxe avec le grand schisme de 1054 où, comme toute l’Europe occidentale, elle bascule du côté de Rome ; mais, nonobstant les canons, l’Église de France demeure orthodoxe de cœur et d’esprit jusqu’à la fin de l’ancien régime.

Ce n’est qu’au XIXe siècle, avec la promulgation par Rome des dogmes de l’immaculée conception et de l’infaillibilité pontificale, que la rupture entre l’orthodoxie et la chrétienté occidentale est véritablement consommée. De même que Bernanos a montré que le nationalisme de Maurras a sa source dans la révolution jacobine de 1793, de même il me serait aisé de montrer que c’est l’anticléricalisme "républicain" qui a jeté les catholiques français dans les bras des prélats romains : l’ultramontanisme exacerbé d’un Joseph de Maistre est né de l’abaissement de l’Église de France ; au grand siècle, jamais les meilleurs des catholiques français n’auraient accepté ce dogme de l’infaillibilité pontificale, si contraire à la tradition gallicane, à la discipline de l’Eglise indivise des dix premiers siècles, à l’enseignement des Pères.

L’orthodoxie n’est donc pas en France une étrangère : elle y est chez elle ; elle y a ses racines profondes. Et cela est naturel, puisque l’orthodoxie n’est rien que le christianisme, dans sa plénitude lumineuse. Identifier, comme on le fait parfois, l’orthodoxie et le christianisme oriental est une absurdité. De même qu’en Christ il n’y a "ni Juif ni Grec" (saint Paul), de même dans l’Église, qui est le corps du Christ, il n’y a ni Orient ni Occident : n’en déplaise à ceux qui s’extasient à la vue d’évêques chinois ou africains, le concept d’"Eglise universelle" n’est pas géographique ; il n’est pas non plus quantitatif : si la chrétienté entière tombait dans l’hérésie, fors un seul croyant demeuré dans la vraie foi, ce serait en cet unique juste que, fût-il le plus humble des laïcs, se resserrerait l’Eglise universelle. »

Gabriel Matzneff, Le sabre de Didi

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13/03/2013

Une nuit, j’allais m’étendre dans un champ de tournesols

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« Une nuit, j’allais m’étendre dans un champ de tournesols. C’était réellement une forêt de tournesols, une vraie forêt. Courbés sur leur haute tige velue, leur grand œil noir tout rond, aux longs cils jaunes, voilé par le sommeil, les tournesols dormaient, tête basse. C’était une nuit sereine, le ciel plein d’étoiles brillait de reflets verts et bleus comme le creux d’une immense coquille marine. Je dormis d’un sommeil profond et, à l’aube, je fus réveillé par un crépitement étouffé et sourd. On eut dit le bruissement de gens marchant pieds nus dans l’herbe. Je tendis l’oreille en retenant mon souffle. Du bivouac voisin, venaient de faibles éternuements de moteurs, et des voix rauques qui s’appellaient dans le bois prés du ruisseau. Un chien aboyait au loin. Au bout de l’horizon, le soleil faisait craquer la noire coquille de la nuit, s’élevait, rouge et chaud, sur la plaine brillante de rosée. Ce froissement devenait immense, grandissait de minute en minute ; c’était un crépitement de buissons en flammes, c’était le craquement en sourdine d’une interminable armée marchant précautionneusement sur des chaumes. Etendu à terre je retenais mon souffle et regardais les tournesols soulever lentement leurs paupières jaunes, ouvrir petit à petit leurs yeux. Tout à coup, je m'aperçus que les tournesols levaient la tête et, virant lentement sur leur haute tige, tournaient leur grand oeil noir vers le soleil naissant. C'était un mouvement lent, égal, immense. Toute la forêt de tournesols se tournait afin de regarder la jeune gloire du soleil. Et moi aussi je levais la tête vers l'Orient, en regardant le soleil monter peu à peu parmi les rouges vapeurs de l'aube, sur les nuages de fumée bleue des incendies, dans la plaine lointaine. »

Curzio Malaparte, Kaputt

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On eut dit les chevaux de bois d’un carrousel

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« Le lac était comme une immense plaque de marbre blanc sur laquelle étaient posées des centaines et des centaines de têtes de chevaux. Les têtes semblaient coupées net au couperet. Seules, elles émergeaient de la croûte de glace. Toutes les têtes étaient tournées vers le rivage. Dans les yeux dilatés, on voyait encore briller la terreur comme une flamme blanche. Prés du rivage, un enchevêtrement de chevaux férocement cabrés émergeait de la prison de glace… Les soldats du colonel Merikallio descendaient au lac et s’asseyaient sur la tête des chevaux. On eut dit les chevaux de bois d’un carrousel. »

Curzio Malaparte, Kaputt

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12/03/2013

Un peuple entier esquisse une vague aspiration, dirigée vers son vide spirituel

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« Un peuple entier devant des catégories vides-et qui, des mains, esquisse une vague aspiration, dirigée vers son vide spirituel. Il lui reste l'intelligence, non greffée sur le coeur. Donc stérile. Quant à l'ironie, dépourvue du soutien de l'orgueil, elle n'a plus de sens qu'en tant qu'auto-ironie. Dans sa forme extrême, ce processus est caractéristique des intellectuels. Rien, cependant, n'est plus faux que de croire qu'eux seuls ont été atteints. Tout le peuple l'est, à des degrés variés. La crise est structurelle et mortelle. »

Emil Michel Cioran, De la France (1941)

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11/03/2013

Réaffirmons donc le droit des peuples à être eux-mêmes

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« Les mêmes qui nous expliquent, non sans raison, qu’en brisant les habitudes mentales, les structures sociales et traditionnelles des pays du Tiers-monde, la colonisation les a souvent stérilisés, se font, en Europe, les adeptes de la pire néophilie, sacrifient tous les jours au mythe du "Progrès" et invitent nos contemporains à rompre avec les "vieilleries" du passé. D’un côté on nous dit que les Indiens et les Esquimaux ne peuvent pas résister à l’agression que représente le contact avec la civilisation Occidentale. De l’autre on affirme que le mélange des peuples et des cultures est, pour les Européens, chose excellente et facteur de progrès. Il faudrait donc savoir s’il y a deux poids et deux mesures – ou si, pour citer Orwell, tous les peuples sont égaux… sauf ceux qui sont plus égaux que les autres ! Pour ma part, je ne vois pas pourquoi ce qui est excellent pour les Bororos ou les Guayaquis, ne se révèlerait pas au moins aussi bon pour nous. Ou bien alors, il faudrait admettre que certaines races sont plus douées que d’autres du point de vue des capacités d’adaptation. Mais ce serait alors de la "discrimination". "Si l’on dénonce à bon droit les ethnocides des primitifs par les Européens, écrit Raymond Ruyer, il ne faut pas interdire aux Européens de préserver leurs propres ethnies". De leur côté, les dirigeants des communautés Juives ne cessent de répéter que deux périls les ont toujours guettés au cours de l’histoire : les pogroms et l’assimilation. Leur mise en garde vaut la peine d’être écoutée. Réaffirmons donc le droit des peuples à être eux-mêmes, le droit qu’ont tous les peuples à tenter d’atteindre leur plénitude, contre tout universalisme et contre tous les racismes. »

Alain de Benoist, Les idées à l’endroit

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10/03/2013

La bourgeoisie pour tout le monde...

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« En fait, Marx n’explicite pas vraiment ce qu’il appelle "la classe bourgeoise", sinon pour dire qu’elle est la classe détentrice du capital. Sur ses origines historiques et sociologique, il est pratiquement muet. C’est qu’il ne voit pas que le bourgeois est d’abord l’homme économique. Or dans la mesure ou il accorde lui-même à l’économie une importance déterminante, il ne peut critiquer la bourgeoisie que sous un horizon qui ne cesse jamais d’être le sien. Son économisme, en d’autres termes, l’empêche de faire une critique radicale des valeurs bourgeoises. On voit bien, d’ailleurs, que celles-ci le fascinent. La bourgeoisie après tout n’a-t-elle pas été la première à vouloir changer le monde, au lieu de se borner à le comprendre ? Tout en appellant à mettre fin à l’exploitation dont la bourgeoisie est responsable, il reste donc très en retrait par rapport aux valeurs bourgeoises : la société sans classes, à bien des égards, c’est la bourgeoisie pour tout le monde. »

Alain de Benoist, Critiques théoriques

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