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20/08/2018

De la liberté à la sécurité

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« Depuis la fin de la guerre froide, le mot liberté a subitement disparu du discours politique au profit du vocable sécurité. Or les philosophes savent bien que ces deux termes ne sont pas compatibles, qu’ils ont plutôt tendance à s’exclure l’un l’autre : "N’y a-t-il liberté politique que famélique, errante et proscrite ? Et n’y a-t-il de sécurité que dans la servitude, sinon dans la servilité… ? Doit-on tout attendre de l’État ou ne rien attendre de lui ? Ces questions sont au centre de toutes les théories politiques qui opposent la liberté de l’individu à la sécurité de l’Etat ou la ‘raison d’État’ à la sécurité des individus." Nous aurions donc quitté un âge de liberté pour entrer dans une ère sécuritaire avec l’asservissement que cela implique. Signalons d’ores et déjà que pour les sociologues, c’est un fait acquis. Ceux-ci ont explicité cette transition de la liberté à la sécurité en développant, précisément dans les années 90, le concept de société du risque pour tenter de traduire ce repli et le désenchantement qui l’accompagnait : pêle-mêle ainsi, le tabagisme, les catastrophes nucléaires, la disparition de la couche d’ozone ou les armes à feu seraient ressentis comme les nouvelles "menaces" – les risques – pesant dorénavant sur les individus et les collectivités, c’est-à-dire des dangers sans cause ou des accidents dont il faut se préserver par tous les moyens y compris la restriction draconienne des libertés. A la doctrine militaire "zéro mort" correspond donc celle plus sociopolitique du "risque zéro".

Ce glissement de paradigme – de la liberté à la sécurité – est passé relativement inaperçu, pourtant son impact est immense pour la conception de la citoyenneté : dès lors que l’État n’est plus le garant des libertés de chacun mais (au contraire) de la sécurité de tous, le citoyen en armes n’est plus considéré comme une protection contre la tyrannie mais comme un criminel en puissance, comme une menace potentielle, comme un "sauvage" qui risquerait de retourner à l’état de nature. Car, en plaçant la sécurité au centre, en priorité absolue, non seulement on évacue la liberté mais on la recale à l’état de nature, de licence folle, sans règles. Ceci souligne encore la nécessité de re-penser la liberté aujourd’hui, de ré-interpréter en fonction de l’environnement actuel les oppositions paradigmatiques sur lesquelles se fonde la liberté positive : res publica/tyrannie ; armée de citoyens/armée prétorienne ; bien commun/corruption. Or en fonction de cet environnement, ces couples paradigmatiques récupèrent toute leur pertinence et permettent de mettre en évidence combien il est nécessaire pour un groupe de maintenir ou de retrouver sa capacité de décision collective et autonome, combien il est important pour lui de ne pas dépendre totalement d’autrui pour défendre cette capacité. En effet, si l’image du tyran est devenue caricaturale de nos jours, si elle se résume de plus en plus à celle du "méchant" dans les filmographies hollywoodiennes, la tyrannie demeure en revanche une réalité dans les sociétés contemporaines, que ce soit sous la forme du racket mafieux, de la prise en main de certaines populations par les gangs ou d’un pouvoir étatique excessif ayant perdu de vue le bien commun. Les oppositions paradigmatiques précitées servent ainsi de repères et de guide dans cet effort de redéfinition de la liberté. Dans cette recherche de nouveaux espaces de liberté, d’espaces civiques de décision autonome, susceptibles de structurer un sujet autonome en vue de l’action, il convient en outre de garder à l’esprit que l’ère des révolutions, des nationalismes et des idéologies est désormais close. Les fondamentalismes et les fanatismes religieux représenteraient-ils l’étape actuelle ? Certainement pas pour les vieilles sociétés occidentales profondément marquées par les tragédies à répétition du terrible XXe siècle. En revanche, les mécanismes premiers des collectivités humaines demeurent sans doute valables et constituent de ce fait un ressort de fonctionnement premier sur lequel il est possible de re-construire. Dans ce sens, l’adage on ne possède que ce qu’on peut défendre reste un principe de base de toute démarche en la matière. Défendre sa terre et ses biens a été en effet de tout temps, et dans toute société, une motivation essentielle des individus ainsi que le relève notamment Carl Schmitt dans sa théorie du partisan, le combattant tellurique qui se bat pour ses foyers (pro aris et facis) alors que l’État a abandonné la lutte : "Le partisan représente encore une parcelle de vrai sol ; il est l’un des derniers à monter la garde sur la terre ferme, cet élément de l’histoire universelle dont la destruction n’est pas encore parachevée." Plus loin, c’est Hobbes dans son Léviathan qui rappelle que le droit à l’auto-défense est un droit naturel et que, comme tel, il ne peut être cédé par aucune convention : "L’obligation des sujets envers le souterrain s’entend aussi longtemps, et pas plus, que dure la puissance grâce à laquelle il a la capacité de les protéger. En effet, le droit que, par nature, les humains ont de se protéger eux-mêmes, quand personne d’autre ne peut le faire, ne peut être abandonné par aucune convention." Dans le même sens, dans son deuxième Traité du gouvernement civil, Locke explique que la première loi de la nature est celle de la conservation de soi-même : "Celui qui tâche d’avoir un autre en son pouvoir absolu, se met dans l’état de guerre avec lui… Car j’ai sujet de conclure qu’un homme qui veut me soumettre à son pouvoir sans mon consentement, en usera envers moi, si je tombe entre ses mains, de la manière qui lui plaira, et me perdra, sans doute, si la fantaisie lui en vient. En effet, personne ne peut désirer de m’avoir en son pouvoir absolu, que dans la vue de me contraindre par la force à ce qui est contraire au droit de ma liberté, c’est-à-dire, de me rendre esclave… et la raison m’ordonne de regarder comme l’ennemi de ma conversation, celui qui est dans la résolution de me ravir la liberté, laquelle en est, pour ainsi dire, le rempart."

En la considérant ainsi brièvement sous cet angle, la philosophie occidentale semble contenir toute une culture de la légitime défense formant le socle des libertés politiques. Sur cette première base, on peut ensuite tenter d’ébaucher la configuration de ces nouveaux espaces autonomes de décision et d’action en se demandant comment réoccuper cette coquille vide qu’est devenu l’État postmoderne, cet espace post-étatique livré à la foule et aux réseaux de tous ordres sous la surveillance de milliers de caméras. »

Bernard Wicht, Europe, Mad Max demain ? Retour à la défense citoyenne

 

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19/08/2018

Comme un poids bien trop lourd pour lui

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« Et puis il parvenait tout de même à la porter sa peine un peu plus loin comme un poids bien trop lourd pour lui, infiniment inutile, peine sur une route où il ne trouvait personne à qui en parler, tellement qu’elle était énorme et multiple. Il n’aurait pas su l’expliquer, c’était une peine qui dépassait son instruction. »

Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit

 

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Satisfaits dans cet enfer incroyable

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« Tous se promènent satisfaits dans cet enfer incroyable, cette illusion énorme, cet univers de camelote qui est le monde moderne où bientôt plus une lueur spirituelle ne pénétrera. »

Pierre Drieu la Rochelle, Mesure de la France

 

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18/08/2018

Il est sans doute nécessaire de recourir à la violence physique

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« Daniel Odier — Les hommes vautrés dans ce que vous appelez leur "poubelle à mots” sont-ils encore capables de ressentir la violence de vos mots, ou est-il nécessaire de recourir à la violence physique pour qu'ils sortent de leur poubelle ?

William S. Burroughs — Je dirais, en généralisant, qu'une personne vraiment empêtrée dans les mots ne trouvera rien du tout dans mes livres, si ce n'est un désaccord automatique. Il est sans doute nécessaire de recourir à la violence physique, ce qui d'ailleurs arrive partout.
Il ne me semble pas y avoir d'autres possibilités, puisque les institutions ne changeront pas leurs axiomes fondamentaux. »

William S. Burroughs, Le Job — Entretiens avec Daniel Odier

 

 

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Il n’est pas de capacité plus noble et joyeuse que d’inventer

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« De tout temps, poursuivit John Galt, l’esprit a été associé au mal. Ceux qui ont pris la responsabilité de porter sur le monde le regard lucide d’une conscience en éveil, ceux qui ont accompli cet acte fondamental d’établir un lien rationnel entre les choses, sont devenus la cible de toutes les insultes, d’hérétique à matérialiste, en passant par exploiteur ; de toutes les iniquités, de l’expropriation à l’exil, en passant par la privation des droits civiques ; de tous les tourments, des moqueries au peloton d’exécution, en passant par le chevalet… Et pourtant, l’humanité a survécu parce que ces hommes ont continué de penser – enchaînés, emprisonnés, cachés, retirés dans une cellule de philosophe ou au travail chez un commerçant. Pendant tous ces siècles où l’on a célébré la bêtise, entre stagnation acceptée et violence exercée, ces hommes ont compris que le blé a besoin d’eau pour pousser, que des pierres peuvent former des arches, que deux et deux font quatre, que le chemin de l’amour ne passe pas par la souffrance, que la vie ne peut pas se nourrir de destruction ; et, grâce à eux, leurs semblables ont entrevu par moments ce que signifiait être un homme. Ces moments, mis bout à bout, leur ont permis de tenir. L’homme doué de raison leur a appris à faire cuire le pain, à cicatriser leurs plaies, à forger des armes et même à bâtir les geôles où ils l’ont jeté. Doté d’une formidable énergie – et d’une bien imprudente générosité –, il savait que le destin de l’homme n’était pas de stagner. Rester sans rien faire n’est pas dans sa nature car il n’est pas de capacité plus noble et joyeuse que d’inventer. Et cet homme a continué de travailler au service de l’amour de la vie qu’il était le seul à éprouver, quoi qu’il lui en coûte ; travailler pour ses spoliateurs, ses geôliers, ses bourreaux, payant de sa vie le privilège de sauver la leur. Ce fut à la fois sa grandeur et sa faute de les laisser lui apprendre à se sentir coupable de sa grandeur, d’accepter le rôle d’animal sacrificiel et de périr sur l’autel des brutes épaisses pour avoir commis le péché d’intelligence… Le plus drôle, si ce n’était aussi tragique, c’est que dans toute l’histoire humaine, sur tous les autels érigés par l’homme, c’est l’homme qu’on a immolé sur ces autels et l’animal qu’on a idolâtré. C’est aux attributs de l’animal et non à ceux de l’homme, qu’on a voué un culte, à l’instinct et à la force respectivement personnifiés par les mystiques et les rois. Les mystiques rêvaient d’une conscience irresponsable, asseyaient leur autorité sur l’idée que leurs croyances étaient supérieures à la raison, que la connaissance procède d’un mouvement aveugle et inexplicable qu’il faut suivre aveuglément, sans se poser de question. Et les rois, qui régnaient par la force pour s’emparer de tout ce qu’ils pouvaient, avaient la conquête pour méthode et le pillage pour objectif, sans oublier le gourdin ou l’arme à feu pour affermir leur pouvoir. Les défenseurs de l’âme humaine s’occupaient des sentiments, les défenseurs du corps, de l’estomac, mais les uns et les autres s’étaient ligués contre l’esprit. Et pourtant, même le plus fruste des êtres humains n’est pas prêt à renoncer à son esprit. Personne n’a jamais cru à l’irrationnel. On croit à l’injustice, oui. Chaque fois qu’un homme incrimine l’esprit, il poursuit un but inavouable pour l’esprit. Lorsqu’il prône la contradiction, il sait que quelqu’un prendra sur lui le fardeau qui l’accompagne, quelqu’un qui s’arrangera pour que ça marche, quitte à en souffrir et fût-ce au prix de sa vie ; la destruction est le prix de toute contradiction. Il n’y a d’injustice que si les hommes acceptent de la subir. Ce sont les hommes de raison qui ont permis aux brutes d’asseoir leur pouvoir. À la base de toute doctrine contre la raison, existe une volonté de disqualifier la raison elle-même. À la base de toute doctrine prêchant le sacrifice de soi, existe une volonté de disqualifier la compétence. Les doctrinaires l’ont toujours su. Nous, non. Le temps est venu pour nous d’ouvrir les yeux. On nous demande aujourd’hui de vénérer ce qui nous était autrefois présenté sous la forme d’un dieu ou d’un roi, autrement dit la manifestation la plus imbécile, la plus tordue de l’incompétence humaine érigée en modèle. »

Ayn Rand, "La Grêve

 

 

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17/08/2018

Que sont les mousquetaires devenus ?

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« Il y a de grands écrivains, il y en a de moins grands, mais certains écrivains, en dehors de leur qualité, ont la capacité de créer des mythes. Je ne sais plus le nom de l'auteur d'Arsène Lupin, ni de celui de Fantômas, mais Fantômas et Arsène Lupin sont des mythes, Alexandre Dumas aussi, qu'il soit très grand ou moyen, a crée un mythe : l'esprit mousquetaire.

Qu'est ce que l'esprit mousquetaire ?

C'est, me disait-on récemment, "un esprit de service et d'insolence". La définition me semble bonne, au-delà de ce que le vocable même de mousquetaire, qui vient de mousquet mais a aussi des affinités avec moustache, peut avoir avoir de sonore et de provocant. Service, oui : les mousquetaires d'Alexandre Dumas sont au service du roi et, très précisément, de la reine, et, pour ce service, ils sont prêts à donner leur vie non seulement sans hésiter mais gaiement. Insolence, aussi, bien sûr : le cardinal est là pour qu'il y ait quelqu'un à défier, mais on ne le défie pas gratuitement, on le défie pour servir d'autant mieux celui qui doit être servi. Dans la trinité roi-reine-cardinal, la reine sert à être servi et le cardinal à être desservi, tandis que le roi assure la stabilité de l'ensemble.

Dans cette perspective, qu'est-ce qui compte pour un mousquetaire ? La vie ? Sûrement pas. La morale ? Encore moins. L'amour ? Peu… Mais l’amitié, oui. Le courage physique bien sûr. L'honneur (ou plutôt une certaine idée de l'honneur), plus que tout.

Et dans ces conditions, est ce que l'esprit mousquetaire peut signifier quelque chose aujourd'hui ou est-il à ranger définitivement au placard paléontologique ?

Lorsque j'écrivais — il y a quarante ans environ — un roman intitulé Les mousquetaires de la République, je voulais montrer que les sociétés ont les mousquetaires qu'elles méritent, et que, si la royauté était favorable à l'éclosion de cet "esprit de service et d'insolence", la république avec sa préférence délibérément accordée à la quantité plutôt qu'à la qualité, son civisme égalitaire débilitant, la mollesse invétérée de ces mœurs urbaines, ne pouvait produire que des mousquetaires idéalistes mais inefficaces, rebelles éphémères bientot domptés. Je pensais alors, je le pense toujours, que ni la gauche, pour qui le gouvernement des hommes est un paternalisme, ni la droite, pour qui c'est une gestion, ne sont équipées pour dispenser une denrée sociale pourtant élémentaire : j'entends l'inspiration. Oh ! il fut un temps, au tout début, où la Première République sut brièvement le faire : les volontaires de l'an II qui allaient se faire tuer en chantant la Marseillaise étaient surement inspirés-mal, mais ils l'étaient. Cela n'a pas duré. Rapidement, la République a retrouvé sa vocation qui est fondamentalement bourgeoise, et on ne sache pas que la bourgeoisie ait jamais été riche d'inspiration.

À notre époque, toute sorte de circonstances empêchent la renaissance de l'esprit mousquetaire, et avant tout le petit nombre d'hommes et de cause qui méritent d’être servis ; pour l'insolence, au contraire, les cibles foisonnent, mais quel intérêt y a t-il à cracher au nez de qui ne fera que s'essuyer avec un kleenex, à provoquer un quidam qui, tout au plus, vous enverra un papier bleu ?

Ces mots qui engagent

La disparition du duel, qui permettait à tout moment de "mettre sa peau au bout de ses idées" (selon une métaphore anatomiquement audacieuse), est en soi une catastrophe, autant pour l'esprit mousquetaire que pour la virilité, le respect des usages, l'honnêteté, le savoir-vivre et ce que les romains appelaient la dignitas : ne plus avoir l'occasion et l'obligation d'engager sa vie derrière chacune de ses paroles permet de dire et de faire n'importe quoi à n'importe qui, et comment réagir là-contre si on est un mousquetaire qui se respecte ? La gifle ou le coup de pied, même bien placé, n'ont pas les vertus curatives de l'épée choquée contre une autre épée.

Mais, il n'y a pas que le duel. Il y a à notre époque, toute une weltanschauung-guimauve, qui fait du mousquetaire un personnage odieux pour les uns, ridicule pour les autres. Le mousquetaire, par définition, n'est pas "politiquement correct" ; quant aux "Droits de l'Homme", pardonnez-moi, mais il s'en tamponne le coquillard. Il n'y a pas d'homme pour lui qui ne sache tenir une épée, et aux droits il préfère insolemment les passe-droits. Imaginez-vous un mousquetaire ne mettant pas flamberge au vent devant un défilé de grévistes ou une parade de Gay pride ?

Et pourtant ?

Et pourtant il ne se peut pas que ce mélange de panache et d'inconscience, de respect et de mépris, de dérision et de vénération, ait complètement disparu de l'âme humaine pour être plus précis. Qui sont les mousquetaires d'aujourd'hui ? Oh ! il y a toujours les hommes courageux, depuis les médecins sans frontières jusqu'aux chuteurs opérationnels ou aux nageurs de combat, mais ont-ils la légèreté de leurs ancêtres, leur élégance méprisante, leur dédain de toutes les conventions, y compris la mort ? Ont-ils cette qualité suprême que Hémingway appelait — expression à peu près intraduisible — grace under stress ? il n'est pas interdit d'en douter.

Non, si l'esprit mousquetaire peut encore servir de notre temps, c'est sans doute de façon plus intériorisée. Il consiste essentiellement, me semble t-il, à conserver son indépendance d'esprit dans l'univers de la pensée unique. À choisir les causes que l'on sert sans accorder de considération à leur popularité. À dire ce que l'on pense sans égard pour les idées reçues et les opinions à la mode. À faire un usage judicieux — et au besoin excessif — de l'esprit de contradiction. À ne céder aucune forme de vénalité. À savoir se montrer guelfe parmi les gibelins et gibelins parmi les guelfes. À appeler un chat un chat et un fripon, si haut placé qu'il soit, un fripon. À ne se laisser impressionner par rien ni personne. À avoir sa propre hiérarchie des valeurs sans se soucier de celle des autres. À répartir le service et l'insolence selon le mérite des uns et des autres. À savoir se choisir une reine qui soit assez noble et belle et un cardinal qui soit assez ignoble et puant.

Les ferrets de diamant sont à ce prix là. »

Vladimir Volkoff, in Le Journal "Les Epées" n°5, juin 2002

 

 

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16/08/2018

Sous les cris et les rires

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« Quelques jours plus tard, des voitures de résistants emplirent la cour de la ferme. Pour la première fois je les voyais en plein jour. Pas rasés, les visages fatigués faisaient peur à voir. Des femmes au crâne rasé étaient debout au milieu de tous ces hommes qui les insultaient. Moi, je ne comprenais pas. J’étais malheureux devant ces femmes en larmes. Les hommes leur vidaient du vin sur la tête en les traitant de putes à boches, de charognes, de chiennes. L’une d’elles avait le visage marqué par les coups et portait une croix gammée peinte sur le front. Elle ne disait rien, mais elle pleurait. L’un des résistants s’aperçut que mon regard la fixait. Il était déjà venu à la ferme, mais j’eus du mal à le reconnaître, il était terrifiant, il dégueulait de haine. Il s’adressa à moi : "Hé l’Parigot, tu veux la voir à poil, cette salope ?"… Sa main se posa sur l’encolure de la robe et il tira brutalement déchirant l’étoffe pour laisser apparaître les seins. Encouragé par les rires de ses compagnons, il s’acharna sur les lambeaux de tissu et se mit à caresser la fille, qui se débattait en l’insultant. "Si c’était bon pour les boches, c’est bien bon pour nous, maudite vache ! Pas vrai, les gars ?". Tous se ruèrent sur elle. Elle s’écroula au fond du camion. L’un des hommes leva la crosse de son fusil et lui frappa le corps en hurlant des injures. Elle ne se releva pas. (…) Les camions quittèrent la cour sous les cris et les rires. Je me mis à la fenêtre pour apercevoir la femme en espérant qu’elle se serait relevée. Non, rien ! Peut-être l’avaient-ils tuée. Je n’en sus jamais rien. »

Jacques Mesrine, L'Instinct de mort

 

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Homogénéisation et atomisation...

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« Si la naissance n’est pas un hasard, le fait – tout particulièrement – qu’on s’éveille à soi-même dans un corps masculin ou dans un corps féminin ne sera pas non plus le fruit du hasard. Ici aussi, la différence physique doit être conçue comme le pendant d’une différence spirituelle ; il suit de là qu’on est physiquement homme ou femme que parce qu’on l’est transcendantalement, et que l’appartenance à tel ou tel sexe, loin d’être chose insignifiante dans l’ordre de l’esprit, est le signe révélateur d’une voie, d’un dharma distinct. On sait que la volonté d’ordre et de "forme" constitue la base de toute civilisation traditionnelle ; que la loi traditionnelle ne pousse pas vers l’in-qualifié, l’égal, l’indéfini – vers ce qui rendrait les différentes parties du tout semblables, sous l’effet de l’homogénéisation ou de l’atomisation –, mais veut que ces parties soient elles-même expriment de plus en plus parfaitement leur nature propre. Aussi, dans le domaine spécifique des sexes, homme et femme se présentent-ils comme deux types. Celui qui naît homme doit s’accomplir en tant que tel, celle qui nait femme doit se réaliser comme telle, en tout et pour tout, dépassant toute promiscuité et tout mélange. Quant à l’orientation surnaturelle, homme et femme doivent avoir, chacun, leur voie propre, qui ne peut pas être modifiée, sauf à tomber dans un mode d’être contradictoire et inorganique. »

Julius Evola, Révolte contre le monde moderne

 

 

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15/08/2018

On pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition

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« On a mis dans la tête des gens que la société relevait de la pensée abstraite alors qu'elle est faite d'habitudes, d'usages, et qu'en broyant ceux-ci sous les meules de la raison, on pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition, on réduit les individus à l'état d'atomes interchangeables et anonymes. La liberté véritable ne peut avoir qu'un contenu concret : elle est faite d'équilibres entre de petites appartenances, de menues solidarités : ce contre quoi les idées théoriques qu'on proclame rationnelles s'acharnent ; quand elles sont parvenues à leurs fins, il ne reste plus qu'à s'entre-détruire. »

Claude Levi-Strauss, De près et de loin

 

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13/08/2018

"Il est plus tard que tu ne crois…"

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« Aujourd’hui que le rapport de force s’est diamétralement inversé et que notre vieil Occident, tragiquement minoritaire sur cette terre, reflue derrière ses murailles démantelées en perdant déjà des batailles sur son propre territoire et commence à percevoir, étonné, le vacarme sourd de la formidable marée qui menace de la submerger, il faut se souvenir de ce qu’annonçaient les anciens cadrans solaires : "Il est plus tard que tu ne crois…" »

Jean Raspail, Préface du "Camp des Saints"

 

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Quand tu ne rencontreras plus en toi aucun obstacle qui t’empêche d’être un

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« Rentre en toi-même et examine-toi. Si tu n’y trouves pas encore la beauté, fais comme l’artiste qui retranche, enlève, polit, épure, jusqu’à ce qu’il ait orné sa statue de tous les traits de la beauté. Retranche ainsi de ton âme tout ce qui est superflu, redresse ce qui n’est point droit, purifie et illumine ce qui est ténébreux, et ne cesse pas de perfectionner ta statue jusqu’à ce que la vertu brille à tes yeux de sa divine lumière, jusqu’à ce que tu voies la tempérance assise en ton sein dans sa sainte pureté. Quand tu auras acquis cette perfection, que tu la verras en toi, que tu habiteras pur avec toi-même, que tu ne rencontreras plus en toi aucun obstacle qui t’empêche d’être un, que rien d’étranger n’altérera plus par son mélange la simplicité de ton essence intime, que tu ne seras plus dans ton être tout entier qu’une lumière véritable, qui ne peut être mesurée par une grandeur, ni circonscrite par une figure dans d’étroites limites, ni s’accroître en étendue à l’infini, mais qui est tout à fait incommensurable parce qu’elle échappe à toute mesure et est au-dessus de toute quantité ; quand tu seras devenu tel, alors, puisque tu es la vue même, aie confiance en toi, parce que tu n’as plus besoin de guide ; regarde attentivement : car ce n’est que par l’œil qui s’ouvre alors en toi que tu peux apercevoir la Beauté suprême. Mais si tu essaies d’attacher sur elle un œil souillé par le vice, impur, et dépourvu d’énergie, ne pouvant supporter l’éclat d’un objet aussi brillant, cet œil ne verra rien, quand même on lui montrerait un spectacle naturellement facile à contempler. Il faut d’abord rendre l’organe de la vision analogue et semblable à l’objet qu’il doit contempler. Jamais l’œil n’eût aperçu le soleil, s’il n’en avait d’abord pris la forme : de même, l’âme ne saurait voir la Beauté si d’abord elle ne devenait belle elle-même. Tout homme doit commencer par se rendre beau et divin pour obtenir la vue du Beau et de la Divinité. »

Plotin, Ennéades, I, 6

 

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12/08/2018

Une immense machinerie

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« Le monde moderne est là devant nous comme une immense machinerie, et, sachant ce que celle-ci a gaspillé d'argent et de travail, nous calculons ce qu'il en coûte maintenant pour la démolir… Mais les civilisations ne sont nullement des machineries, elles ne se démontent pas comme des hangars de poutres d'acier, elles sont vivantes, elles obéissent aux lois de la vie ; pourquoi ne se résorberaient-elles pas ? Peut-être la liberté sera-t-elle sauvée par un très petit nombre d'hommes - petit au regard de la foule innombrable des lâches et des imbéciles ? »

Georges Bernanos, Lettre aux anglais

 

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11/08/2018

Au frigo...

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« Cette époque va mettre son âme au frigo. Moi, je crois aux héros et aux saints. Les autres m'emmerdent. Entre le monde du fric et celui de Mao, il doit bien y avoir un peu de place pour des hommes pauvres mais libres. »

Xavier Grall, Solo

 

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10/08/2018

Se tenir debout quoi qu'il arrive

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« La seule vérité est de se tenir debout quoi qu’il arrive, de faire face à l’absurdité du monde pour lui donner une forme et un sens, de travailler et de se battre si l’on est un homme, d’aimer si l’on est une femme. »

Dominique Venner, Le cœur rebelle

 

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Un murmure des temps anciens et du futur

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« La tradition est un choix, un murmure des temps anciens et du futur. Elle me dit qui je suis. Elle me dit que je suis de quelque part. Je suis du pays de l'arbre et de la forêt, du chêne et du sanglier, de la vigne et des toits pentus, des chansons de geste et des contes de fées, du solstice d'hiver et de la Saint-Jean d'été, des enfants blonds et des regards clairs, de l'action opiniâtre et des rêves fous, des conquêtes et de la sagesse. Je suis du pays où l'on fait ce que l'on doit parce qu'on se doit d'abord à soi-même. Voilà pourquoi je suis un cœur rebelle. Rebelle par fidélité. »

Dominique Venner, Le Coeur Rebelle

 

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09/08/2018

Faire revivre, en cette époque mécan­iste, la fac­ulté de l’âme de se détacher de tout

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« Ce qu’il nous faut faire revivre, en cette époque mécan­iste, c’est la fac­ulté de l’âme de se détacher de tout, et de jouir de la vie en dépit de tout. Sur les cir­con­stances extérieures, il est rare que nous puis­sions quelque chose. Les soucis d’argent, les soucis amoureux, les soucis que nous cause de l’ambition, les soucis de santé, les soucis dus au chô­mage, aucun ne nous n’y échappe. Ils sont là, et nous aussi, nous sommes là ! Sup­porter la douleur physique, gaspiller nos journées à des corvées absur­des, devoir pren­dre des déci­sions, cajoler, men­acer, duper autrui ou en être dupe à son tour, avoir de pénibles et stériles entre­vues avec des gens plus éloignés de nous que des archanges ou des gyrins – tout cela, c’est la vie, tout sim­ple­ment. Seul un nom­bre infinitési­mal de créa­tures réus­sis­sent, grâce à la faveur divine, à échap­per à tout cela. Subir telle ou telle douleur, avoir à affron­ter telle ou telle dif­fi­culté, c’est cela, vivre. La vie, ce n’est pas autre chose. Si vous déclarez for­fait devant tout cela, déclarer for­fait devant la vie. Si vous êtes inca­pable de ressen­tir une jubi­la­tion intime et secrète lorsque vous ten­tez de vous sous­traire à tout cela, aussi bien que mal­gré tout cela, mieux vaudrait vous sui­cider. Mieux vaut cent fois être mort, plutôt que de mener une vie de souffrances. »

John Cowper Powys, Apologie des sens

 

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Quelques efforts spasmodiques et dérisoires

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« Il est grand temps main­tenant de nous poser la ques­tion cap­i­tale et de chercher la cause de cette expres­sion morne et ten­due, cette expres­sion de hâte et de fièvre – cette expres­sion à la fois si apathique et si anx­ieuse, d’où sont absentes la joie de vivre et la paix – qui se lit sur le vis­age des pas­sants que nous croi­sons dans les grandes métrop­o­les occi­den­tales. C’est une expres­sion exacte­ment sem­blable, en fait, à celle que l’on pour­rait observer sur les traits des four­mis, les plus mis­érables des insectes asservis à la cou­tume. Si un film nous mon­trait des images de four­mis en gros plans géants, nous auri­ons à coup sûr l’impression de nous voir dans un miroir !

Et cette apathie per­pétuelle, ce mélange de gri­saille et de ten­sion – quelle en est la cause psy­chique ? Tout sim­ple­ment le manque d’intelligence, l’incapacité de recon­naître où il faut chercher le bon­heur ! Car enfin on ne peut sup­poser que tous les indi­vidus désirent être ainsi mornes et mis­érables. Ils font, de fait, quelques efforts spasmod­iques et dérisoires pour s’arracher à cette effroy­able indif­férence, à cette futil­ité pous­siéreuse. Ils vont au “ciné” ; ils s’invitent les uns chez les autres ; ils boivent ; ils forniquent ; ils lisent les faits divers. Mais tous ces remèdes restent man­i­feste­ment inef­fi­caces – ou sont suivis d’effets si éphémères qu’ils ne valent pas la peine d’être mentionnés.

Certes, les plantes, les arbres, les ani­maux, les rep­tiles, les oiseaux et les pois­sons sont mor­tels, et con­nais­sent, qui plus est, une mort trag­ique; mais tant qu’ils sont vivants – il suf­fit de les regarder pour en être cer­tain ! – ils jouis­sent de longues péri­odes d’extase de vivre, alter­nant avec des péri­odes de paix pro­fonde et de sat­is­fac­tion indépen­dante. Ils sont la proie de mille ter­reurs, en butte à mille périls. Leur vie, tout comme la nôtre, n’est qu’un inter­minable com­bat pour se pro­curer de la nour­ri­t­ure. Mais par­al­lèle­ment à ces dan­gers et souf­frances trag­iques dont leur vie abonde, ils con­nais­sent – de façon répétée, bien qu’intermittente – la jouis­sance intense et mag­ique que leur cause ce sim­ple fait pri­mor­dial qu’ils sont en vie, qu’ils ne sont pas encore morts ! Alors que tant d’habitants de nos grandes villes, quant à eux, pour­raient tout aussi bien être morts, étant donné le peu de plaisir qu’ils tirent de ce fait essen­tiel qu’ils sont encore en vie. »

John Cowper Powys, Apologie des sens

 

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08/08/2018

Je suis le prince débile issu d’une lignée de colosses

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« Je suis le prince débile issu d’une lignée de colosses et qui va peut-être clore une race. Je mourrai sans postérité, stérilisé par l’atome ou égorgé par un fanatique. Et mes frères auront le même sort. Des géants nous précèdent, des héros et des savants, des explorateurs de la terre et des explorateurs de l’âme, des César et des Antoine, des monarques et des capitaines, des silhouettes sévères en robe de bure, de belles courtisanes ou des brutes implacables. Tout un cortège de grandes figures, resplendissantes de splendeur et de puissance, se déroule à nos yeux, immense fardeau pour nos contemporains dérisoires. Voici que s’amassent à l’Orient les nuages sinistres de la ruée païenne et barbare. »

Jean de Brem, Le Testament d'un Européen

 

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Taxez-moi de romantisme, qu’importe !

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« Chaque geste que vous ferez vers une Europe unifiée protègera un peu plus le trésor du monde. Taxez-moi de romantisme, qu’importe ! Pour moi, le trésor du monde, c’est une infante de Vélasquez, un opéra de Wagner ou une cathédrale gothique. C’est un calvaire breton ou une nécropole de Champagne. C’est le Romancero du Cid ou le visage hugolien de "l’enfant grec". C’est un tombeau des Invalides ou le Grand Aigle de Schönbrunn, l’Alcazar de Tolède ou le colisée de Rome, la Tour de Londres ou celle de Galata, le sang de Budapest ou le quadrige orgueilleux de la Porte de Brandebourg devenue le poste frontière de l’Europe mutilée. Pour toutes ces pierres, pour tous ces aigles et pour toutes ces croix, pour la mémoire de l’héroïsme et du génie de nos pères, pour notre terre menacée d’esclavage et le souvenir d’un grand passé, la lutte ne sera jamais vaine. Frêle Geneviève de Paris, patronne de l’Europe, seule contre les hordes mongoles, tu symbolises notre esprit de résistance. Et toi, vainqueur blond au visage de dieu, macédonien aux dix milles fidèles, Alexandre, toi qui conquis le monde oriental avec ta foi et ton épée, dressé contre le destin et le sens de l’Histoire, tu symboliseras peut-être un jour le triomphe de l’Europe impériale. »

Jean de Brem, Le Testament d'un Européen

 

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07/08/2018

Je sens peser sur mes épaules misérables le poids démesuré du plus glorieux des héritages...

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« Je sens peser sur mes épaules misérables le poids démesuré du plus glorieux des héritages. A moi, qui ne suis rien et qui n’apporte rien, la civilisation fait un cadeau gigantesque : le patrimoine de l’Europe. Il est fait de trésors et de souvenirs. Chacun de nous, je crois, à Londres et à Vienne, à Berlin et à Madrid, à Athènes et à Varsovie, à Rome et à Paris, à Sofia et à Belgrade, doit ressentir le même drame. Chacun de nous est le dernier des Européens. Je suis le prince débile issu d’une lignée de colosses et qui va peut-être clore une race. Je mourrai sans postérité, stérilisé par l’atome ou égorgé par un fanatique. Et mes frères auront le même sort. Des géants nous précèdent, des héros et des savants, des explorateurs de la terre et des explorateurs de l’âme, des César et des Antoine, des monarques et des capitaines, des silhouettes sévères en robe de bure, de belles courtisanes ou des brutes implacables. Tout un cortège de grandes figures, resplendissantes de splendeur et de puissance, se déroule à nos yeux, immense fardeau pour nos contemporains dérisoires. Voici que s’amassent à l’Orient les nuages sinistres de la ruée païenne et barbare. Je vais mourir. Je meurs. Et la race Europe avec moi. Avec nous. Je ne laisserai rien. Depuis cinquante ans j’ai dispersé l’héritage. Et laissé le royaume du ciel en friche. Je n’aurais pas d’héritiers dans ce monde hostile et chaotique. Je ne puis laisser qu’un message : l’histoire, la très belle histoire d’une civilisation mortelle, qui se croyait invincible. Une civilisation pour laquelle des milliards d’hommes ont lutté et vaincu pendant trente siècles. Personne ne sera là pour me lire. Qu’importe. Voici comme un dernier cri de rage et d’amertume. »

Jean de Brem, Testament d'un Européen

 

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31/07/2018

Se noyer dans une terne uniformité

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« Je suis convaincu, en effet, que les Nations ne doivent jamais accepter de voir disparaître ce qui fait leur identité propre. Dans une famille, les différents membres ont beau avoir le même père et la même mère, ils ne sont pas des individus indifférenciés, mais bien des personnes avec leur propre singularité. Il en va de même pour les pays, qui doivent veiller à préserver et développer leur culture propre, sans jamais la laisser absorber par d'autres ou se noyer dans une terne uniformité. "La Nation est en effet, pour reprendre les termes du Pape Jean-Paul II, la grande communauté des hommes qui sont unis par des liens divers, mais surtout, précisément, par la culture. La Nation existe 'par' la culture et 'pour' la culture, et elle est donc la grande éducatrice des hommes pour qu'ils puissent 'être davantage' dans la communauté" (Discours à l'UNESCO, 2 juin 1980, n. 14). Dans cette perspective, la mise en évidence des racines chrétiennes de la France permettra à chacun des habitants de ce Pays de mieux comprendre d'où il vient et où il va. »

Benoît XVI, Discours à la conférence des évêques de France, 14 septembre 2008

 

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Fascisme

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« Tenez, encore un qui, tout sincèrement démocrate qu'il est, a été remué par certains accents du fascisme, ceux qui correspondent d'ailleurs à une vérité humaine : fatigue du bavardage, de la discorde professionnelle, besoin de créer, de construire, désir d'être un chef, petit ou grand, mais qui a une tâche devant lui, et derrière lui une équipe solide. Vous savez, Jerphanion, le vieux syndicaliste que je suis, tout en condamnant le fascisme comme un énorme péril international, n'a jamais pu s'empêcher de reconnaître que certaines réactions fascistes sont normales et salubres. Le fascisme isolé est sûrement un poison. Mais une certaine dose de fascisme circule dans toute société qui se porte bien… Oui, mais essayez de dire cela à la tribune, ou même dans un journal de gauche ! On croira que vous êtes passé à l'ennemi, ce qui est exactement le contraire de la vérité. Ce n'est pas passer à l'ennemi que de lui chiper ce qu'il peut avoir de bien pour en faire profiter la bonne cause… Mais je m'égare. »

Jules Romains, Les hommes de bonne volonté, T25 : Le tapis magique

 

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26/07/2018

Le Sud Confédéré

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« Le Sud est un vaste domaine dont on pourrait parler indéfiniment. Je n’en ai pas dit grand-chose et pourtant le Sud — et le Sud-ouest qui est un monde totalement différent — sont deux régions de l’Amérique qui me touchent profondément. Le vieux Sud est plein de champs de batailles, c’est une des premières choses qui vous y frappent. Le Sud ne s’est jamais remis de sa défaite. C’était une défaite purement militaire, les plus dures à supporter. L’homme du Sud a un rythme à lui, une attitude à lui devant la vie. Rien ne le convaincra qu’il avait tort ; au fond, il a un souverain mépris pour l’homme du Nord. Il a son propre panthéon d’idoles, guerriers, hommes d’Etat, écrivains, dont nulle défaite n’a affaiblit la gloire ni la renommée. Sur tous les plans, le Sud demeure solidement hostile au Nord. Il mène un combat sans espoir, très semblable à celui que l’Irlandais mène contre l’Angleterre.

Si vous êtes du Nord, cette atmosphère vous affecte étrangement. Vous ne pourrez vivre longtemps dans le Sud sans finir par être miné. Le climat, les paysages, les mœurs, les coutumes, le doux parler dégagent un charme auquel il est difficile de résister. Ce monde du Sud est plus proche que tout le reste des Etats-Unis de la vie de rêve dont parlent les poêtes. Peu à peu ce monde de rêve est envahi et contaminé par l’esprit du Nord. Le Sud croule sous les pas du conquérant. De Rome à Savannah, au long des vieilles pistes, on peut retracer la marche de Sherman vers la mer. C’est la route du vandale, la route du soldat qui a dit que la guerre était un enfer et qui l’a démontré par le fer et par le feu. Le Sud ne pardonnera jamais à Sherman, jamais.

(...)

Dans le Mississipi, prés des rives du grand fleuve, j’ai vu les ruines de Windsor. Il ne reste plus rien maintenant de cette grande demeure que les hautes colonnes grecques couvertes de vigne vierge. On voit tant de ruines élégantes et mystérieuses dans le Sud, tant d’images de mort et de désolation, tant de spectacles fantomatiques. Et toujours dans les coins les plus beaux, comme si l’envahisseur, visant les centres vitaux, avait voulu frapper aussi l’orgueil et l’espoir de sa victime. On ne peut s’empêcher de rêver à ce qu’aurait pu être cette terre bénie si les ravages de la guerre lui avaient été épargnés, car dans nos Etats du Sud, ce qu’on appelle la "culture esclavagiste" n’avait donné encore que ses toutes premières fleurs. Nous savons ce que les cultures esclavagistes de l’Inde, de Rome, de l’Egypte et de la Grèce ont légué au monde. Nous leurs sommes reconnaissants de cet héritage ; nous ne le repoussons pas sous prétexte qu’il a été bâti sur l’injustice. Qui donc a le courage devant ces merveilles du passé, de s’écrier : "Il aurait mieux valu que rien de tout cela n’eut été si pour créer ces chefs-d’œuvre il a fallu priver un seul être humain de sa liberté !" Qui sait quelles splendeurs auraient pu s’épanouir dans des foyers de culture comme Charleston, Savannah, New Orléans !

(...)

Il est des milliers de lieux de rêve dans le vieux Sud. On peut s’asseoir sur un banc dans un minuscule jardin confédéré, ou s’allonger sur les rives d’un canal ou se poster sur un remblai dominant une réserve Indienne : l’air est doux, lourd encore de parfums, le monde semble endormi, mais l’atmosphère est chargée de noms magiques, d’événements historiques, d’inventions, d’explorations, de découvertes. Riz, tabac, coton : à partir de ces trois éléments, seul le Sud a composé une grande symphonie d’activité humaine.

Tout cela est fini maintenant. Un nouveau Sud est né. On a retourné le sol du vieux Sud. Mais les cendres en sont encore tièdes. »

Henry Miller, Le cauchemar climatisé

 

 

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Ceux qui s'aimaient le plus triompheraient

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« L’homme n’a jamais aimé le genre humain en bloc, races, religions et cultures, mais seulement ceux qu’il reconnaît pour siens, ceux de son clan, si vaste soit-il. Pour le reste, il se force et on l'y a forcé et quand le mal est achevé, il ne lui reste qu'à se désagréger. Dans cette guerre étrange qui s'annonçait, ceux qui s'aimaient le plus triompheraient. »

Jean Raspail, Le camp des saints

 

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22/07/2018

L'intervention de l'intellectuel dans les affaires publiques...

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« Or l'intervention de l'intellectuel dans les affaires publiques se déroule sous l'empire de considérations, de pressions, d'intérêts, de passions, de lâchetés, de snobisme, d'arrivismes, de préjugés, d'hypocrisies en tout point semblables à ceux qui meuvent les autres hommes... Si, par exemple, entre les deux guerres, on retranche les intellectuels qui ont cédé ou bien à la tentation fasciste, ou bien à la tentation stalinienne, il ne reste plus grand monde. »

Jean-François Revel, La connaissance inutile

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