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14/02/2017

La déportation universelle

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« Au mystère de la vie, que nous partageons avec toutes les créatures autour de nous, et aux mystères du langage et de l’écriture, qui nous en distinguent, serions-nous devenus si monstrueusement étrangers, que nous en usions sans plus savoir seulement qu’ils existent ? Notre époque est évidemment tombée très bas dans le simulacre, et notre temps se signale entre tous les temps par sa gesticulation insensée, son vacarme et le poids accablant de sa machinerie. Et pourtant, oui, elle se signale aussi par une angoisse sourde, un sang serré, une sève contrite, comme si toute la nature avec nous gémissait silencieusement dans l’ombre d’une certaine joie perdue. Qu’est-ce à dire ? sinon que notre pauvre humanité, pour s’être un peu trop cherchée depuis un siècle ou deux, s’est beaucoup trop trouvée, hélas ! enjambant dans sa hâte les distances et les différences, gagnant furieusement du temps sur le temps qui passe, envahissant d’autres espaces que son espace, et n’ayant en commun, finalement, qu’une épouvante inavouée et féroce, une sorte de halètement d’agonie où l’on peut voir déjà la vie, dans son indifférence, ne plus se modeler que sur les figures pâles de la mort, et la mort ; plus atrocement, singer tout le vocabulaire et les figures de la vie. Le mauvais rêve se poursuit, dont plus personne n’aura bientôt la force même de vouloir sortir, tant la tristesse et la lassitude, qui sont toujours le fruit des mauvais calculs qu’on ne peut pas reprendre, trahissent la déspiritualisation des corps : des corps qui s’ennuient dans toutes les langues du monde, et qui s’en vont de moins en moins à la recherche de quelque chose, n’importe quoi, qui puisse remplacer leurs âmes si terriblement absentes. Bientôt, c’est aujourd’hui déjà, les hommes ne sauront même plus que leurs âmes leur manquent. Robots : voilà le confort, que d’aucuns, déjà, préconisent ; n’être plus qu’une viande forte, c’est l’idéal des grandes nations.

L’esprit, néanmoins, ne meurt pas aussi vite et ne se résigne pas, pour autant, à la déportation universelle. On a beau le chasser : il revient. C’est là le propre des esprits. Sous forme d’inquiétude dans l’abêtissement, sous forme d’angoisse dans le confort, sous forme de silence, tragique tout à voup dans le fracas, car il ouvre sur l’immensité, sur l’antérieur et le futur, alors que le présent, pour vivre seul ainsi qu’il le prétend, doit se serrer sur soi, se concentrer sur son actualité la plus infime, et surtout ne jamais ouvrir les yeux sur rien de tout ce qui l’entoure. Entre un passé qui s’allonge sans cesse, et s’alourdit, devant un avenir qui s’écourte sans cesse, et s’amincit, ce rien qui court, cette bulle d’air chassée, où les hommes sont pris, voici qu’elle se retourne contre l’un et l’autre pour s’affirmer, hurler et se prouver que l’existence est là. »

Armel Guerne, Le verbe nu

 

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05/02/2017

Théorie du Genre, la Papesse déboulonnée

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 Publié dans Le Point n°: 2315, du 12 Janvier 2017

 


Sabine Prokhoris

Pilori. Un Livre démonte l'oeuvre de la philosophe américaine Judith Butler, pourtant célébrée pour ses travaux sur les minorités.

Avec son ouvrage phare, Trouble dans le genre, publié en 1990 aux Etats-Unis et traduit pour la première fois en France en 2005, la philosophe américaine Judith Butler est devenue la représentante la plus connue et la plus subversive des gender studies, ce courant des sciences humaines qui vise à distinguer le sexe physiologique de l’identité sociale et psychique. Elle-même lesbienne militante, la chercheuse récuse la norme biologique et invite à s’interroger sur les comportements sexuels marginaux — transgenre, transsexualisme, bisexualité, travestisme — pour mieux bousculer l’ordre hétérosexuel supposé culturellement établi. Epouvantail de La Manif pour tous, mais largement célébrée par une certaine gauche non seulement pour son travail sur le genre mais aussi pour sa défense résolument antiuniversaliste de toutes les minorités, Butler est, en France, une figure incontournable dont on débat des options de fond mais rarement de la légitimité intellectuelle. Or la psychanalyste et philosophe Sabine Prokhoris, qui a lu attentivement la prolifique œuvre butlérienne, ose aujourd’hui dénoncer une imposture. Dans un ouvrage extrêmement critique, Au bon plaisir des « docteurs graves » (PUF), elle relève les approximations, raisonnements tautologiques, contresens et fausses citations qui jalonnent, selon elle, les ouvrages de Judith Butler et s’interroge sur leur réception fascinée en France. Les défenseurs enamourés de la philosophe américaine l’ont-ils vraiment lue ? Interview.

Le Point : Comment vous-êtes-vous intéressée à Judith Butler ?

Sabine Prokhoris : Ayant travaillé sur les mêmes questions et connaissant ses positions sur les droits LGBT, j’avais un a priori plutôt favorable. J’avais déjà lu, plus ou moins attentivement, la plupart de ses ouvrages, mais je dois dire qu’ils ne m’avaient guère convaincue. Et puis j’ai découvert sa tribune publiée dans Libération au lendemain des attentats du 13 novembre (« Une liberté attaquée par l’ennemi et restreinte par l’État » - Libération, 19 novembre 2015), et j’ai senti monter alors une forte colère, mêlée de consternation intellectuelle. Traiter du deuil collectif que nous étions en train de vivre comme elle le faisait — en le soupçonnant d’exprimer un partage entre les vies « dignes d’être pleurées » (les nôtres, ici, en Occident) et celles qui ne les seraient pas, en assénant des absurdités sur les bénéfices que les Parisiens auraient tirés ce soir-là de leur soumission supposée à l’état d’urgence —, j’ai trouvé cela obscène et stupide. Or j’ai eu le sentiment que ce qu’elle disait là n’était pas un accident, mais résonnait au contraire avec l’ensemble de ses travaux. Il m’a donc semblé nécessaire d’aller y voir de plus près. D’où ce travail, qui fut très ingrat à mener.

Le Point : Pourquoi ?

Sabine Prokhoris : Parce qu’elle est le plus souvent illisible, qu’elle jargonne en permanence, et je pense que beaucoup de gens, lisant Judit Butler, en concluent qu’ils sont trop bêtes pour comprendre, alors que sa prose est réellement absconse. Cela fait partie du tour de passe-passe : vous ne saisissez pas, c’est donc que tout cela est très intelligent. Et surtout parce que ses raisonnements théoriques sont précieux, donc compliqués à suivre. Mais elle est le chevalier blanc des « minorités » la cible de la droite conservatrice. La Manif pour tous en tête, et cela semble lui conférer une légitimité intellectuelle et politique automatique.

Le Point : Vous parlez d’imposture, c’est fort…

Sabine Prokhoris :Oui, mais les falsifications qu’elle inflige aux textes qu’elle utilise pour ses démonstrations — la plus flagrante étant celle qu’elle fait subir au philosophe Emmanuel Levinas, à qui elle attribue d’ignobles propos — sont un signe. Il y a des règles au débat intellectuel, et elle ne les respecte pas.

Le Point : Freud, avec sa théorie du complexe d’Œdipe, serait d’après Judith Butler l’un des grands artisans de la domination hétérosexuelle.

Sabine Prokhoris : Que la vulgate psychanalytique, qui véhicule une version figée et simpliste de ce fameux complexe d’Œdipe, soit au service d’un discours normalisateur, c’est un fait indéniable, et je n’ai cessé de le critiquer moi-même. Mais, malgré le conservatisme bien réel de la corporation, je crois, au contraire de ce qu’affirme Butler, que la psychanalyse freudienne a beaucoup contribué à dissoudre les supposées « évidences » sur la question sexuelle.

Le Point : Pourquoi le féminisme de Judit Butler vous semble-t-il problématique ?

Sabine Prokhoris : Pour répondre de façon très sommaire, parce qu’une Afghane qui prétendrait, dans le contexte de l’après-11 Septembre, jeter aux orties sa burqa (une tenue traditionnelle issue d’une culture patriarcale rigoriste et qui fut imposée par le régime taliban), sera considérée, dans le « féminisme » butlérien qui est antiuniversaliste, comme une complice de l’impérialisme « occidental »…

Le Point : Si sa pensée est aussi faible que vous le dénoncez, comment expliquer l’estime dont elle jouit, aux Etats-Unis et aujourd’hui en France ?

Sabine Prokhoris : L’adhésion à un discours, fût-elle parée du plus chatoyant plumage académique, ne constitue pas à mes yeux une preuve de validité. Et ce succès planétaire demeure pour moi une énigme. Mais il est vrai qu’en philosophie une ère « post-vérité » prospère depuis plusieurs décennies, notamment outre-Atlantique. On y postule, à la suite de Roland Barthes et des quelques autres, que le réel est tout entier réductible à des discours et à des constructions rhétoriques. La critique « radicale » que met en œuvre la pensée de Butler, qui consiste juste à « déconstruire » ce qui n’est qu’un « récit », au moyen d’une rhétorique concurrente plus puissante, plus autoritaire, plus habile, plus intimidante en somme, se suffirait en quelque sorte à elle-même. Dès lors, peu importe la vérité, la force du discours butlérien tient à sa réception fascinée. Moins vulgaire que Trump, certes. Mais pas moins inquiétant dans la production de maîtres à ne pas penser.

EXTRAIT

« Vous n’y comprenez goutte ? Cela vous paraît quelque peu embrouillé ? Vous saisisssez mal comment la sexualité (celle qui est minoritaire) et la religion (celle supposée des "dominés") se trouvent mises sur le même plan ? Vous ne saisissez pas vraiment non plus en quoi la laïcité en France et la condamnation par le pape de l’homosexualité vont de pair (d’autant que, soit dit en passant, le pape considère, tout comme J. Butler, que "la France exagère la laïcité") ? Vous avez même peut-être l’impression que l’auteure a sélectionné quelques notions en débat aujourd’hui, les a fourrées pêle-mêle dans un chapeau, a vigoureusement secoué le tout, pour ensuite piocher là-dedans et les assembler ensuite au petit bonheur ? Vous n’y êtes pas. Le rouleau compresseur idéologique de l’amalgame est ici un outil nécessaire, et tant pis si la mixture est indigeste. L’idée générale de ces lignes, qui viennent conclure un texte extraordinairement confus — une confusion qui n’est pas imputable à une mauvaise traduction —, est somme toute assez simple, sinon simpliste : que les "minorités", qu’une seule et unilatérale entreprise d’assujettissement discriminent, s’allient au lieu de se laisser dresser les unes contre les autres par le pouvoir qui les constitue comme telles (c’est bien toujours la même histoire). »


Judith Butler (Cliquez sur la photo)

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SOURCE : par Violaine de Montclos pour LE POINT

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16/01/2017

La conquête du nord

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« Ceux qui avaient grimpé jusqu’au sommet des immeubles découvrirent autour d’eux l’étendue de leur conquête. A perte de vue s’offrait un pays qui leur parut le plus beau, le plus riche, le plus accueillant du monde.

La densité des habitations ne nuisait pas à la nature, elle en était même enveloppée et la multiplicité des toits donnait confiance : autre chose qu’un désert ! Plus loin, au pied des collines boisées, les guetteurs émerveillés découvraient d’immenses champs plantés d’arbres fleuris, d’autres qui verdissaient sous d’épaisses moissons.

Ils le firent savoir, chantant la bonne nouvelle comme des muezzins ou des crieurs publics. De bouche en bouche, elle parcourut la foule.

Cette foule épuisée avait retrouvé tout bonnement le moral. Un moral de fer. De conquérant. Si bien que plus des trois quarts, les plus valides, les plus entreprenants, décidèrent de poursuivre leur route. Plus tard, les historiens firent de cette migration spontanée une épopée qu’ils baptisèrent : "La conquête du nord."

On n’a pas oublié le premier volet du diptyque : la fuite vers le nord, l’exode lamentable des vrais propriétaires du pays, leur déchéance avouée, leur répugnant renoncement, l’anti-épopée. »

Jean Raspail, Le Camp des Saints

 

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15/01/2017

Destin hideux...

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« Avec la rupture du système médiéval, les Dieux du Chaos, de la Démence et du Mauvais Goût prirent le dessus. La roue de la Fortune avait tourné, écrasant la nuque de l'humanité, lui fracassant le crâne, tordant son torse, crevant son bassin et endommageant son âme. Tout ce qui avait été dédié à l'âme se consacrait désormais au commerce.
Marchands et charlatans prirent le contrôle de l'Europe, baptisant "Les Lumières" leur insidieux Evangile.
Le nouveau destin de Pierre serait désormais tissé de mort, de destruction, d'anarchie, de progrès, d'ambition et d'amélioration personnelle.
Destin hideux s'il en fut, il devait désormais affronter l'ultime perversion : ALLER AU TRAVAIL. »

John Kennedy Toole, La conjuration des imbéciles

 

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Des névrosés et des psychopates en quantité

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« Il est des journalistes qui tonnent, sur le papier, contre le matriarcat américain — ce qui est bien — ce qui l'est moins c'est qu'ils le font en compensation d'une humiliation matrimoniale personnelle. D'autres font du virilisme spartiate, mais ont peur d'un coup de poing dans une bagarre politique. Certains font même du racisme à base sexuelle en souvenir d'une infortune conjugale. Lorsqu'on a déblayé tous ces gens complexés, il ne reste que peu d'éléments susceptibles de former une classe dirigeante politique. Aux extrêmes, à gauche et à droite, on trouve des névrosés et des psychopates en quantité et au centre quelque chose de plus équilibré mais aussi de plus sordide, l'homme du petit profit: l'épicier politique. »

Jean Thiriart, Europe Communautaire

 

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13/01/2017

Une espèce de poésie que j’ai peur d’abîmer

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« Mais elle est si jeune, si pauvre, tellement sans défense, que j’éprouve avant tout, auprès d’elle, une grande douceur. Je la berce, je la pelote, c’est plus sensuel que tout. Mais en même temps, ça m’attendrit, j’ai scrupule d’aller plus loin. Ce n’est qu’une petite sauvageonne, qui ne sait que lire et que j’emmène voir des films imbéciles. Pourtant, je savoure auprès d’elle une espèce de poésie que j’ai peur d’abîmer en la carambolant. »

Lucien Rebatet, Les Deux Etendards

 

 

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Je t’ai mal payé de retour…

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Un jour, avec ses mots à elle, elle avait eu le culot de me dire quelque chose de cet ordre...

 

 

« C’est toi qui m’a fait connaître la véritable intelligence, celle de la beauté, comme celle des esprits. Ma foi même t’est redevable. Tu as été plus qu’aucun autre mon "éveilleur". C’est toi qui a imprimé son style à ma jeunesse, cette impétuosité, cette accoutumance aux grandes tempêtes, ce cravachage. Tout ce que je pourrai mettre de grandeur esthétique dans ma vie aura eu en toi son origine. Je t’ai mal payé de retour… »

Lucien Rebatet, Les Deux Etendards

 

 

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01/01/2017

Paix sur Terre !

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« Paix sur Terre ! Paix sur Terre !
Peace on Earth ! Mir na Zemliou !
Oui reviens-nous métal russe
des rêves orbitaux soviétiques
reviens-nous ardent météore
dans l’aurore boréale
des orgues balistiques
reviens-nous matériau aux mystères
capsules de vent solaire
dans le chant magnétique
des particules élémentaires
reviens-nous dans le silence radio
de ta dernière orbite
Paix sur Terre
Paix sur Terre
Une étincelle dans le ciel
aux débris métaphores
sodium éphémère
en éclats de phosphore
bruit blanc

Sur nos pensées en ruine
flottent les chevaux épars
du carnage
La chimie des mots est divine
elle divise les icônes
en autant de langages
Nous disons croire en l’homme
et nous marchons nus
avec son fantôme
Mais avec toi je m’abîme
dans les maux d’un amour
si sublime
que si la folie nous guette
alors qu’en atomes
pour de bon le monde
disparaisse !

Sous nos pieds
les gouffres
sous nos cœurs
le souffle
sous nos bouches
la bouche
sous nos têtes
le crime
sous nos masques
une armure
sous nos yeux
les tortures
sous nous fesses
un abîme
sous la main
un mensonge
sous la vérité
un secret
sous un homme
un autre homme. »

Maurice G. Dantec, Le théâtre des opérations - Manuel de survie en territoire zéro

 

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Vous n’osez pas trancher le nœud

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« Vous dites que "ça ne peut pas continuer" et c’est votre manière piteuse et un peu enfantine d’être prophètes. Pourtant vous n’osez pas trancher le nœud. Vous n’osez pas avouer - et vous avouer - que vous pourrissez en même temps que les systèmes sociaux qui sont les vôtres. Vous ne supportez ni les maux ni les remèdes. Vous regardez votre jambe noircir et se gangrener mais repoussez la scie du chirurgien. Pour ne pas voir votre cuisse se gainer de noir chaque jour un peu plus, vous la fardez. »

Jean Cau, Les écuries de l’Occident

 

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29/12/2016

Quiconque n’a pas été tenté...

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« Abba Antoine a dit : Quiconque n’a pas été tenté ne pourra entrer dans le royaume des cieux. Il est dit en effet : " Supprime les tentations, et pas un n’est sauvé. " (Abba 227) »

Dom Lucien Regnault, Abba, dis-moi une parole

 

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Les grandes foules agitées par le travail, le plaisir ou par la révolte

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« Nous chanterons les grandes foules agitées par le travail, le plaisir ou par la révolte ; les ressacs multicolores et polyphoniques des révolutions dans les capitales modernes ; la vibration nocturne des arsenaux et des chantiers sous leurs violentes lunes électriques ; les gares gloutonnes avaleuses de serpents qui fument ; les ponts aux bonds de gymnastes lancés sur la coutellerie diabolique des fleuves ensoleillés ; les usines suspendues aux nuages par des fils tordus de fumée, les paquebots aventureux flairant l’horizon ; les locomotives au grand poitrail, qui piaffent sur les rails tels d’énormes chevaux d’acier bridés de long tuyaux et le vol glissant des aéroplanes dont l’hélice a des claquements de drapeaux et des applaudissements de foule enthousiaste. »

Filippo Tommaso Marinetti, Manifeste du futurisme

 

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28/12/2016

Une nouvelle ère de violence et d'oppression

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« Nous entrions dans une nouvelle ère de violence et d'oppression. Il fallait être imbécile ou fou pour ne pas le pressentir, pour ne pas en avoir le cœur serré d'angoisse ? Nous devions dire adieu à notre avant-guerre. Commençait une révolution qui pourrait bien être fatale au goût que ma génération avait eu pour le bonheur. À vingt-six ans, nous n'étions plus la jeunesse. On nous avait volé notre temps de joie, tué nos amis, ruiné nos enthousiasmes. Nous ne pourrions plus jamais croire à la Justice, à la Vérité, à l'Honneur. »

Michel Déon, Les poneys sauvages

 

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26/12/2016

Le tocsin de la ruine prochaine

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« La guerre est la plus forte rencontre des peuples. Alors que commerce et circulation, compétitions et congrès ne font se joindre que les pointes avancées, la guerre engage l'équipe au complet, avec un objectif seul et unique : l'ennemi. Quels que soient les problèmes et les idées qui agitent le monde, toujours leur sort se décida par la confrontation dans le sang. Certes toute liberté, toute grandeur et toute culture sont issues du silence de l'idée, mais seules les guerres ont pu les maintenir, les propager ou les perdre. La guerre seule a fait des grandes religions l'apanage de la terre entière, a fait surgir au jour, depuis leurs racines obscures, les races les plus capables, a fait d'innombrables esclaves des hommes libres. La guerre n'est pas instituée par l'homme, pas plus que l'instinct sexuel ; elle est loi de nature, c'est pourquoi nous ne pourrons jamais nous soustraire à son empire. Nous ne saurions la nier, sous peine d'être engloutis par elle.

Notre époque montre une forte tendance au pacifisme. Ce courant émane de deux sources, l'idéalisme et la peur du sang. L'un refuse la guerre par amour des hommes, et l'autre parce qu'il a peur.

Le premier est de la trempe des martyrs. C'est un soldat de l'idée ; il est courageux : on ne peut lui refuser l'estime. Pour lui, l'humanité vaut plus que la nation. Il croit que les peuples, dans leur furie, ne font que frapper l'ennemi de plaies sanglantes. Et que lorsque les armes ferraillent, on cesse d'oeuvrer à la tour que nous voulons pousser jusqu'au ciel. Alors il s'arc-boute entre les vagues sanglantes et se fait fracasser par elles.

Pour l'autre, sa personne est le bien le plus sacré ; par conséquent il fuit le combat, ou le redoute. C'est le pacifiste qui fréquente les matchs de boxe. il s'entend revêtir sa faiblesse de mille manteaux chatoyants - celui du martyr de préférence -, et bon nombre d'entre eux ne sont que trop séduisants. Si l'esprit d'un peuple entier pousse dans ce sens, c'est le tocsin de la ruine prochaine. Une civilisation peut être aussi supérieure qu'elle veut - si le nerf viril se détend, ce n'est plus qu'un colosse aux pieds d'argile. Plus imposant l'édifice, plus effroyable sera le chute. »

Ernst Jünger, La guerre comme expérience intérieure

 

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Leur accomplissement dans la lutte...

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« Comme d'autres dans l'art ou dans la vérité, ils cherchaient leur accomplissement dans la lutte. Nos voies sont diverses, chacun porte en son coeur une autre boussole. Pour chacun, vivre veut dire autre chose, pour l'un le chant du coq au matin clair, pour l'autre l'étendue qui dort au midi, pour un troisième les lueurs qui passent dans les brumes du soir. Pour le lansquenet, c'était le nuage orageux qui couvre au loin la nuit, la tension qui règne au-dessus des abîmes. »

Ernst Jünger, La guerre comme expérience intérieure

 

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19/12/2016

Un autre sexe

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« Rien ne prouve mieux le défaut de besoins esthétiques de notre époque, que le fait qu'Alger ne soit pas plus renommée, pour la beauté de ses filles, que Madrid ou Rome, par exemple, ne le sont pour la joliesse des leurs. À Alger, j'en ai vu de divines, et les hommes, à la même table qu'elles, ne posaient jamais leurs yeux sur elles, quand moi j'aurais frappé mon front contre terre si elles m'avaient seulement regardé une fois.

Alger, c'est la France sans doute, à quelques heures de la France. Et cependant, de ce point de vue là comme de tant d'autres, c'est une autre planète.

À Alger, on reconnaît les Françaises de France :

À leurs talons hauts ;
À leur façon de s'habiller mal ;
À la médiocrité de leurs visages et surtout de leurs corps ;

Chez les Algéroises, au contraire, une race jeune, pleine de vitalité et de vigueur. La puissance de leurs épaules, cette sorte de beauté si rare en France. Leurs cheveux de nuit et de tempête. Leurs genoux pareils au soleil levant. Et "faites au tour". Une autre race que les Parisiennes. J'allais écrire : un autre sexe.

Les Arabes, et, à leur suite, les Algériens, classent les représentants du sexe fort en deux catégories : ceux qui sont, à leurs yeux, "des hommes", et ceux qui ne sont "pas des hommes".

Ce jugement simple et tranchant est le premier qui leur vienne à la bouche, quand on leur parle de quelqu'un. "Celui-là, c'est un homme. Celui-là, c'est pas un homme". Eh bien, les femmes [françaises] d'Alger peuvent être définies en deux syllabes : ce sont "des femmes".

Il y a deux étés, les jeunes filles d'Alger allaient les jambes nues, la chaussette roulée sur la cheville. Cet été, elles ont les pieds nus dans des sandalettes en cuir clair, sans talon, qui leur donne la marche des primitifs. Parfois à la cheville est enroulé un bandage, protégeant une blessure fictive : il s'agit de faire croire qu'elles ont été happées par des poulpes.

Leurs dents blanches, quand elles rient, leurs remplissent la bouche. Les petits poils blonds de leurs bras et de leurs mollets scintillent, clairs sur la peau sombre, comme les friselis d'écume sur la surface calme de la Méditerranée. Mais elles n'oçnt pas compris ce qu'il y a de sublime, pour une jolie fille, à avoir les bras, les poignets, les mains nus, – nus comme le sable adolescent, nus comme une plante marine : elles portent aux poignets toute une ferblanterie croassante, dont rient les délicats Gros-Becs [N.d.A : En langage algérois, les Gros-Becs sont les Parisiens. Il paraît que nous avons de grands pifs]. Enfin il sort d'elles je ne sais quelle chaleur, qui me rappelle une coutume familière aux Romains : ils mettaient un corps de femme pour dix corps d'hommes, dans leurs fosses communes, afin d'attiser la combustion, parce que le corps de la femme est plus chaud que celui de l'homme. Certaines jeunes filles, si je les suis un peu, j'avance sans plus toucher terre, d'émotion ; combien de fois, ainsi pareil à une bulle d'air, ai-je ballonné le long de la rue d'Isly ! D'autres me donnent un tel enthousiasme que je saute sur place, et au sommet du saut fais un piaffement, en criant d'une voix forte : "Je la mange !..." Maintenant vous savez ce que c'est qu'un poète lyrique.

Tout ce qui précède est la "vérité vraie", comme on dit ici (ou encore : la "franche vérité"). Expression profonde, qui si gentiment, sans y toucher, mange le morceau ! C'est, je crois, l'unique contribution de l'esprit algérien à une philosophie de grande allure, mais il faut reconnaître qu'elle est considérable.

En face les Facultés, et le Lycée de jeunes filles, on a placé un arrêt de tram, afin que les gens qui attendent une jeune fille puissent avoir l'air d'attendre le tram. Et un banc, pour qu'il vous donne, lui aussi, une contenance. Et un fleuriste, destiné à vous mettre au ton convenable, qui doit être un ton résolument poétique, tel, par exemple, que celui que nous employons ici. Alentour, les arbres, brûlés par le rayonnement des jeunes filles, sont roussis en toute saison. Un photographe, qui voulait photographier pour ce livre la sortie des jeunes filles, eut plaque sur plaque voilée par ce rayonnement ; il fallut renoncer. Les jeunes filles du Lycée à onze heures. À onze et quart tout est fini. Les portes ferment leurs deux battants, et c'est un instant pathétique : on dirait qu'il y a quelque chose qui meurt, et que ces portes se sont refermées pour l'éternité sur la grâce et la jeunesse du monde. C'est là un désespoir que nous pouvons savourer avec d'autant de finesse, que nous savons que ces portae aeternales, qui se sont fermées pour l'éternité à onze heures et quart, seront rouvertes à deux heures moins vingt. »

Henry de Montherlant, Jeunes filles d'Alger, in "Il y a encore des paradis"

 

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17/12/2016

Cela se paie le bonheur de ne pas aimer les médiocres...

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« Sentez-vous ce qu’il y a de dramatique à être une femme seulement un tout petit peu supérieure ? C’est tout mon drame. Cela se paie le bonheur de ne pas aimer les médiocres. Et aimer les médiocres se paie par la médiocrité du bonheur qu’on y goutte. Ah ! Comme j’aurais bien fait l’épouse d’un artiste ! Car pour être la femme d’un artiste, il faut aimer l’artiste encore beaucoup plus que l’homme, faire que le premier soit plus grand et le second soit heureux. Et puis entre soi se comprendre à demi mot. »

Henry de Montherlant, Les Jeunes filles

 

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La liberté...

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« La liberté à laquelle aspire l'homme moderne n'est pas celle de l'homme libre, mais celle de l'esclave un jour de fête. »

Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique

 

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10/12/2016

Dans une France anonyme

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« – Tu crois vraiment que la France va mourir ? s’écria Gilles.
– Mais oui, la France meurt. Viens au village, à côté, je vais te montrer maison par maison, famille par famille, la mort de la France, viens. […]
C’était une charmante chapelle du XVe siècle, d’un jet sûr. À l’intérieur, il y avait quelques bons vieux bancs de chêne et toute l’ignoble pacotille du catholicisme décadent, Vierge fabriquée à la grosse, Saint-Joseph, Sacré-Cœur de Jésus, Jeanne d’Arc de patronage, drapeau français.
Sur un mur, la longue liste des morts de la guerre, plus grande que le village.
– Voilà tous ceux que les gens de Paris ont tués avec leur sale politique. Le député d’ici, c’est le comte de Falcourt, il pense exactement comme un radical-socialiste. La cervelle aussi vidée.
Ils étaient seuls dans l’église. Le vieux s’était incliné devant l’autel, faisait un grand signe de croix. Gilles se dit : “De ma part, ce serait une simagrée.”
Le vieux l’amena sur le côté de l’autel. Il lui montra une dalle funéraire. Deux géants, homme et femme, les seigneurs de Hoqueville. Deux longues silhouettes incisées dans la pierre.
– La vieille race noroise, noyée aujourd’hui dans une France anonyme.
– Mais après que ceux-ci étaient tombés en décadence, dès le XIIIe siècle, il y a eu des renaissances magnifiques.
– Oui, mais tant va la cruche à l’eau… C’est la source même de la vie qui est atteinte. Plus de foutre, ou il va au bidet. Les Français n’ont plus qu’une passion, de crever… Une jeune fermière me disait, l’autre jour : “Pensez-vous que je ferai des enfants ? Pour quoi faire ?” Si tu avais vu son regard. Une opacité, la taie du néant. Ils ont tout oublié, ils ne savent plus rien. Ils sont entièrement sortis du monde animal et du monde humain.
– Ils sont comme les Parisiens.
– La terre ne leur dit plus rien. Ils ne sentent plus la terre, ils ne l’aiment plus. Ils ont honte d’être restés ici. La seule excuse à leurs yeux, c’est qu’ils gagnent pas mal d’argent.
– Jusqu’où ça ira-t-il ?
– Ils seront envahis. Ils sont déjà envahis. Des Polonais, des Tchécoslovaques, des bicots. Mais leur vice dévore tout de suite l’envahisseur.
– Il y a une puissance de syphilis dans la France. »

Pierre Drieu la Rochelle, Gilles

 

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09/12/2016

Une cuisine bourgeoise

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« Tu avais en toi une image de la vie, une croyance, une exigence, tu étais prêt à des exploits, des souffrances, des sacrifices ; et puis, peu à peu, tu remarquas que le monde n'exigeait de toi aucun exploit et aucun sacrifice, que la vie n'est pas une épopée héroïque avec des rôles en vedette, mais une cuisine bourgeoise, où l'on se contente de boire et de manger, de prendre un café, de tricoter des bas, de jouer aux cartes et d'écouter la T.S.F. Et celui qui veut et qui a en lui autre chose : l'héroïque, le beau, l'adoration des grands poètes, la piété pour les saints, n'est qu'un imbécile et un don Quichotte. »

Herman Hesse, Le loup des Steppes

 

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20/11/2016

Cet empire macaronique et burlesque

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« Or donc, le pouvoir s’est transporté, comme tu sais, des Tuileries chez les journalistes, de même que le budget a changé de quartier, en passant du faubourg Saint-Germain à la Chaussée-d’Antin. Mais voici ce que tu ne sais peut-être pas ! Le gouvernement, c’est-à-dire l’aristocratie de banquiers et d’avocats, qui font aujourd’hui de la patrie comme les prêtres faisaient jadis de la monarchie, a senti la nécessité de mystifier le bon peuple de France avec des mots nouveaux et de vieilles idées, à l’instar des philosophes de toutes les écoles et des hommes forts de tous les temps. Il s’agit donc de nous inculquer une opinion royalement nationale, en nous prouvant qu’il est bien plus heureux de payer douze cents millions trente-trois centimes à la patrie représentée par messieurs tels et tels, que onze cents millions neuf centimes à un roi qui disait "moi" au lieu de dire "nous". En un mot, un journal armé de deux ou trois cent bons mille francs vient d’être fondé dans le but de faire une opposition qui contente les mécontents, sans nuire au gouvernement national du roi-citoyen. Or, comme nous nous moquons de la liberté autant que du despotisme, de la religion aussi bien que de l’incrédulité ; que pour nous la patrie est une capitale où toutes les idées s’échangent, où tous les jours amènent de succulents dîners, de nombreux spectacles ; où fourmillent de licencieuses prostituées, des soupers qui ne finissent que le lendemain, des amours qui vont à l’heure comme les citadines ; que Paris sera toujours la plus adorable de toutes les patries ! la patrie de la joie, de la liberté, de l’esprit, des jolies femmes, des mauvais sujets, du bon vin, et où le bâton du pouvoir ne se fera jamais trop sentir, puisque l’on est près de ceux qui le tiennent.

Nous, véritables sectateurs du dieu Méphistophélès ! avons entrepris de badigeonner l’esprit public, de rhabiller les acteurs, de clouer de nouvelles planches à la baraque gouvernementale, de médicamenter les doctrinaires, de recuire les vieux républicains, de réchampir les bonapartistes et de ravitailler les centres, pourvu qu’il nous soit permis de rire "in petto" des rois et des peuples, de ne pas être le soir de notre opinion du matin, et de passer une joyeuse vie à la Panurge ou "more orientali", couchés sur de moelleux coussins. Nous te destinions les rênes de cet empire macaronique et burlesque ; ainsi nous t’emmenons de ce pas au dîner donné par le fondateur dudit journal, un banquier retiré qui, ne sachant que faire de son or, veut le changer en esprit. »

Honoré de Balzac, La Peau de chagrin

 

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11/11/2016

Je refuse la guerre et tout ce qu'il y a dedans

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« Je refuse la guerre et tout ce qu'il y a dedans. Je ne la déplore pas moi... Je ne me résigne pas moi... Je la refuse tout net avec tous les hommes qu'elle contient, je ne veux rien avoir à faire avec eux, avec elle. Seraient ils 995 même et moi tout seul, c'est eux qui ont tort et c'est moi qui ai raison car je suis le seul à savoir ce que je veux : je ne veux plus mourir. »

Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit

 

 

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06/11/2016

L'inutilité de l'héroïsme

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« Pour être un héros, il faut avoir au moins une fois en sa vie senti l'inutilité de l'héroïsme et de quel poids infime pèse l'acte héroïque dans l'immense déroulement des effets et des causes, réconcilié son âme avec l'idée de la lâcheté, bravé par avance la faible, l'impuissante, l'oublieuse réprobation des gens de bien, senti monter jusqu'à son front la chaleur du plus sûr et du plus profond repaire, l'universelle complicité des lâches, toujours béante, avec l'odeur des troupeaux d'hommes. Qui n'a pas une fois désespéré de l'honneur ne sera jamais un héros. »

Georges Bernanos, Scandale de la vérité

 

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Plus chers que l'or

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« Le froid, le silence et la solitude sont des états qui se négocieront demain plus chers que l'or. Sur une terre surpeuplée, surchauffée, bruyante. »

Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie

 

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26/10/2016

La refonte générale de nos modes de gouvernement politique et de nos métaphysiques

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« Le nouveau slogan de cet attroupement de la vieille droite et de la nouvelle gauche "nationales-socialistes" est on ne peut plus clair : No Free trade. Stop Globalization.

C’est au moment où l’économie marchande de troisième type accouche enfin de sa production terminale, qui ne peut nous entraîner que dans la refonte générale de nos modes de gouvernement politique et surtout de nos métaphysiques, que l’on se dresse avec le plus de fougue contre le mouvement de cette révolution.

Plus grave encore, on veut désormais nous faire revenir à la situation d’avant Bretton Woods, on essaie de nous faire croire que le monde va pouvoir repartir en arrière, comme une vulgaire bobine vidéo, on veut rétablir des contrôle frontaliers, des contrôles nationaux, ces fameux contrôles "démocratiques", dont on invoque la préséance maintenant qu’ils sont dans l’impossibilité même d’exister.

Plutôt que d’aller faire le singe sur la façade du Palais des congrès où les grands banquiers du monde tiendront conseils, ne vaudrait-il pas mieux proclamer que le temps est venu de mettre en faillite le système onucratique et national qui nous "gouverne" depuis l’Apocalypse ? Plutôt que d’accuser la grande bourgeoisie transnationale de ne faire que ce pour quoi elle est faite, pourquoi ne pas créer ce gouvernement de la Terre que Nietzsche appelait de ses voeux il y a déjà plus d’un siècle, et pour commencer instituer cette Fédération européenne qui seule pourra montrer le chemin, oui, pourquoi ne pas vouloir entreprendre le nécessaire surpassement de nos minables institutions démocratiques et nationales, incapables d’inventer un cadre politique et philosophique à la hauteur des colossales baronnies financières qui s’édifient sans attendre sur le nouveau paradigme du monde ?

Oui, en effet, pourquoi ?

Mais parce que personne ne tient vraiment à ce que le système onucratique (Tiers État-nations impuissants et désormais virtuels + monopole stratégique des USA + explosion des microcommunautés socioculturelles + bureaucratie onuzie et bourgeoisie planétaire omnipotentes) s’effondre, ni même se réforme, cette fiction contente tout le monde, des patrons de l’OMC à ses plus féroces contempteurs de l’extrême-gauche ou de l’extrême-droite radicale. Comme à l’époque des papes et des antipapes, chacun y puise suivant ses aspirations et ses penchants, et il y en a vraiment pour tous les goûts ! Le différencialisme communautariste qui n’a eu de cesse depuis deux ou trois générations que de vouloir détruire toute idée d’État, en invoquant frauduleusement la liberté, toute idée de loi, en la minant de droits, qui a tué Dieu avec le positivisme, le néopaganisme, voire avec la Bible elle-même, qui a dégradé le concept de nation en l’égalisant à celui de simple tribu, inventé l’affirmative action, les gender studies et les micro-identités, tout autant que le suprématisme, l’afrocentrisme, l’écoterrorisme et une bonne centaine d’illuminismes concurrents, ce même différencialisme communautariste qui place le lapin ou le poulet sur la même échelle de valeurs que l’homme, lâche toutes les larmes de son pauvre corps, à l’unisson avec les dames-pleureuses de "la-République-à-la-Nation", maintenant qu’une nouvelle élite corporative et métanationale se constitue par-dessus leurs minuscules horizons, forclos dans le quadrillage sémantique du néopositivisme.

Qui, honnêtement, pourrait s’en plaindre ?

Pas moi en tout cas, car à choisir entre les jésuites et les Borgia, ma décision est prise depuis longtemps, vous l’aurez compris. »

Maurice G. Dantec, Manuel de survie en territoire zéro. Le Théâtre des opérations 1 : journal métaphysique et polémique, 1999

 

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Des puissances prophétiques sont proches

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« Chaque automne ramène l'ange de la Mélancolie. (...). Les fruits mûrissent et sont cueillis ; les feuilles se colorent et tombent. Les corneilles s'attroupent et tournoient en essaims au dessus des champs dégarnis. Les jours deviennent plus courts, la nuit survient de bonne heure ; on redécouvre le feu et les lumières. Voici que s'approche le temps des fêtes des Morts, des visites au cimetière, mais aussi des visitations nocturnes de divinités aux mains pleines de dons. Les rêves commencent à changer de teinte ; des traits prophétiques s'y entrelacent.

Nous allons vers le temps le plus mystérieux de l'année, celui des Douze nuits, et aussi des fêtes de la Lumière. On la protège, elle devient lumière des cavernes, lumière cachée, source de promesses. Au jardin, la première nuit de gel a ravagé les fleurs : la capucine, les dahlias, les derniers lys, les asters, les fritillaires impériales et les volubilis multicolores le long de la clôture. Seuls les chrysanthèmes persistent à fleurir, simples et multiples, en teintes diverses, et aussi des roses attardées, souvent jusqu'en décembre. Le pas froisse les feuilles jaunes des noisetiers, les feuilles de cuivre des hêtres, les feuilles lie-de-vin de la vigne vierge.

Les grives s'abattent sur le jardin, en quête des baies rouges, s'étant déjà gavées des baies noires du sureau. Elles s'élancent par vagues sur les pelouses et y traquent les vers. Les geais, eux-aussi, et les pics quittent les orées de forêts pour les jardins. Les verdiers s'agitent ; ils épluchent les petits cônes des thuyas. Le premier bouvreuil se pavane sur la barrière. Bientôt, le rouge de son vêtement brillera d'une vive lumière sur la neige.

Ce qui vient encore des fleurs a un double sens : l'adieu et le retour. (...). Le printemps place aussi ses avants-postes. Dans la forêt, la rose de Noël se somme de houppes vertes. Dans un angle de son jardin, le jardinier retourne le fumier, cependant que le brouillard dégoutte des branches. (...). Mais le lilas qui, en été, ombrageait cette place, a déjà gonflé ses bourgeons ; c'est justement ces derniers jours qu'ils ont grossi, rougeâtres. Ces runes annoncent ce qui va revenir, prophétisent les merveilles de mai. (...).

Voici les provisions engrangées ; les greniers et les caves s'emplissent des dons des champs et des jardins (...). Dans leurs trous dorment les musaraignes et les muscardins, le blaireau, le hamster ; ils ont bouché l'issue de leurs galeries et vivent sur ce qu'ils avaient emmagasiné durant l'été. La charpente de la grange abrite le sommeil du loir, et dans les hautes montagnes, la marmotte est entrée dans son long hivernage. (...).

Le mois des grisailles amène les adieux à la Nature. Dans sa suite, surviennent la tristesse, les fêtes des morts, la mélancolie. Pourtant, des puissances prophétiques sont proches, et germe une gaieté plus silencieuse et plus secrète que celle des fêtes de la moisson et de la vendange. »

Ernst Jünger, Graffiti/Frontalières

 

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