22/03/2011
Cosmopolites
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« Défiez-vous de ces cosmopolites qui vont chercher loin dans leurs livres, des devoirs qu'ils dédaignent de remplir autour d'eux. Tel philosophe aime les Tartares, pour être dispensé d'aimer ses voisins. »
Jean-Jacques Rousseau, L'Emile
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13/03/2011
"L’islam face à la mort de Dieu"
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Schizophrénie des intellectuels musulmans.
Abdennour Bidar, dans son livre "L’islam face à la mort de Dieu", cite Jean Jaurès : « Cette joie sublime d’amener tous les hommes à la plénitude de l’humanité. » Ce fut précisément l’argument principal du socialiste Jean Jaurès pour justifier la colonisation de la République Française sensée apporter les Lumières et l’émancipation aux peuples inférieurs.
Dans le même livre, Abdennour Bidar cite le philosophe musulman Mohamed Iqbal, fin connaisseur de la philosophie occidentale, poète important et initiateur de la partition pakistanaise qui allait donner naissance à ce pays, qui confessait : « Ma vie a été principalement consacrée à l’étude de la philosophie occidentale, et cette manière de penser est presque devenue chez moi une seconde nature. Je ne parviens pas à exprimer en ourdou ce qui est dans mon cœur. »
Je me demande ce qu’il penserait aujourd’hui, Mohamed Iqbal, de ce Pakistan en proie aux pires fléaux archaïques, avec ses zones tribales au sein desquels les seigneurs de guerre font la loi, appliquent la Sharia et vomissent, eux, tout ce que l’Occident a pu accoucher de lumineux. Il a rêvé, comme tout homme éclairé, d’une "individuation" possible du musulman, mais c’était sans compter sur le poids culturel et cultuel considérable qu’impose le monde islamique à sa Oumma. Car il y a une antinomie réelle entre la voie occidentale et la voie islamique quelle que soit la forme que prend cette dernière et cette antinomie est de taille. Abdennour Bidar cite d’ailleurs Carl Gustav Jung à ce sujet : « J’emploie l’expression d’individuation pour désigner le processus par lequel un individu devient un individu psychologique, c’est-à-dire une unité autonome et indivisible, une totalité. La voie de l’individuation signifie : tendre à devenir un être réellement individuel et dans la mesure où nous entendons par individualité la forme de notre unicité la plus intime, notre unicité dernière et irrévocable, il s’agit de la réalisation de son Soi dans ce qu’il a de plus personnel et de plus rebelle à toute comparaison. On pourrait donc traduire le mot d’ "individuation" par "réalisation de soi-même" ou "réalisation de son Soi". » (L’énergique psychique, in Ma vie)
La tentative de tous ces intellectuels étrangers à l’univers mental occidental et qui ont goûté à ses saveurs particulières est un essai intéressant, mais au final maladroit, de dépasser leur métaphysique traditionnelle et menacée par l’entropie. Ils sont parvenus à atteindre un niveau d’abstraction essentiel pour comprendre et saisir les postulats des penseurs qui ont éclairé l’Occident puis ont essayé de se servir des outils acquis dans leur confrontation à ce monde contraire pour repenser la Voie qui était la leur. Seulement à part y insuffler des constructions nouvelles, souvent poétiques et charmeuses, je n’ai pas le sentiment qu’ils soient arrivés à leurs inavouables fins : helléniser leur psychisme et faire accéder les personnes de leurs communautés à l’individuation dont parle Jung. C’est une différence fondamentale entre l’islam et l’Occident qui n’a pas fini de provoquer les controverses que vous devinez. Je puis certes me tromper dans la mesure où je ne suis aucunement un spécialiste en un domaine qui nécessiterait un travail méticuleux de comparaison, mais avec le peu de connaissances acquises en la matière je peux arguer qu’il y a là de quoi comprendre l’écart considérable qui existe entre le monde occidental et le monde musulman, et ce malgré l’existence d’hommes d’esprit comme Abdennour Bidar ou Mohamed Iqbal, sans parler des Rûmî, Hallaj ou Khayyam qui ont illuminé un passé islamique de leur intelligence en recueillant les foudres des muftis, imams et mollahs de leurs temps.
Le simple fait qu’à l’origine de notre Culture se trouve ce postulat théologique qui stipule que l’Homme serait fait à l’image de Dieu fonde, même aujourd’hui pour les non-croyants, ce fameux principe d’individuation évoqué par Jung comme base de notre développement individuel et commun. C’est l’irruption civilisationnelle qui est la nôtre et qui invite à la Singularité, à la distinction pas seulement dans le cadre des hiérarchies sociales, mais aussi des chemins spirituels et intellectuels qui ont porté l’Occident à la place qui est la sienne dans l’Histoire de l’humanité. Ainsi lorsque Iqbal postule que l’ego humain ne serait pas parvenu au faîte de lui-même, il cherche par le biais du Soufisme à atteindre à la même conception de l’Être Humain qu’au sein de notre Civilisation qui l’a fécondé pour lui faire tirer du Coran une herméneutique dont les tenants de l’islam conventionnel ne veulent pas entendre parler. Abdennour Bidar précise : « Hallaj a été supplicié à Bagdad en 922 pour s’être écrié "Je suis la Vérité créatrice". L’interprétation d’Iqbal manifeste toute la portée de ce qui fut considéré alors comme un attentat blasphématoire contre la transcendance de Dieu. Il montre que cette parole signifie non seulement que l’homme est devenu "partie de Dieu" ou "égal de Dieu" (ce qui est déjà insupportable pour l’orthodoxie religieuse), mais que la totalité du divin s’est trouvée littéralement aspirée et infusée en l’homme. Il y a là un résultat que même les maîtres soufis de Hallaj ne pouvaient accepter, et ce sont eux d’ailleurs qui le livrèrent au châtiment des autorités… Dans sa filiation, la conception iqbalienne de l’Ego ultime représente un renversement complet de la conception soufie classique, selon laquelle le saint accompli s’est "éteint" en Dieu et agit ensuite "par Dieu" en toutes choses. Ils nomment cela fana (extinction) et baqa (subsistance en Dieu et par Dieu). Le commentateur Javed Majeed a pu écrire à cet égard qu’Iqbal "bouleverse considérablement la notion soufi de fana ("extinction de l’homme en Dieu’’) puisqu’il la renverse en extinction de Dieu en l’homme". Tandis que le soufisme considère que l’individualité de l’homme devenu saint s’éteint dans la personnalité suprême de Dieu, Iqbal ose concevoir l’inverse : c’est dieu qui disparaît en l’homme, la personnalité divine qui passe toute entière dans l’individualité de l’homme. Le saint n’a donc pas perdu son Ego, mais il en jouit désormais comme plénitude absolue d’un Soi (Khûdî) qui est la totalité de ce que la religion populaire comme la métaphysique soufie classique appellent "l’être en Dieu".
(…)
La vie spirituelle chemine ainsi dans le sens de la découverte et de l’appropriation d’un degré suprême d’individuation. »
Si demain les choses venaient à se gâter davantage dans ce pays, d’une manière ou d’une autre, et je dis dans ce pays mais, au train où vont les choses ces derniers temps je pourrais dire au sein de l’Europe, il est évident que les grands perdants du clash qui s’en viendrait seraient, à n’en pas douter, ces quelques explorateurs musulmans qui osent défricher leur culture et leur tradition avec un esprit curieux et audacieux car il y a un réveil identitaire en ce moment sur ce continent, en Grande-Bretagne, en Italie, en Suisse, en Belgique, en Allemagne et même en France, ce pays qui a accouché avec la Révolution Française du prêt-à-penser délivré en kit dès 1789 et la terreur qui s’en est suivie. Un consensus perce tout juste la couche opaque des clivages politiques qui ont fait oublier un peu trop facilement et pendant trop longtemps aux divers militants de gauche comme de droite, et d’un extrême à l’autre, que bien qu’opposés sur la question de la manière à mettre en œuvre pour gérer les affaires de la Cité, ils étaient avant tout les habitants d’un même pays liés de façon organique pour les ressortissants de souche par des valeurs, une langue et un art de vivre et pour les immigrés, comme moi, ayant réussi leur « intégration » voire leur « assimilation » en s’enracinant respectueusement dans cette terre d’accueil et en en épousant l’Histoire, le sens et la vision. Ce consensus qui perce dit : « Ya basta ». Ça suffit. Les histoires de Bisounours nous racontant que tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, on en a jusqu’à la nausée. Nous voulons que la France reste le pays de Montaigne et de Rimbaud, des moralistes au grand style et des bals populaires, des sacrifiés de la Commune et des cathédrales lumineuses, des libertins licencieux et des surréalistes sublimes. Et non pas Dar al islam, Frankistan balkanisé et libanisé, cohortes de « dhimmis » rasant toute leur vie des murs. Je dis que ces musulmans vraiment modérés, trop rares (car je ne souscris pas à l’idée faussement répandue que « la grande majorité des musulmans en France » serait modérée), seraient les grands perdants car je ne pense pas que la tourmente prenne des gants quand il s’agit d’agir et il n’y a rien de pire en sanglante tripaille que les troubles sociaux quand, poussés à leur paroxysme (comme c’est de plus en plus le cas aujourd’hui), ils basculent dans la guerre civile. Chaque fois que les musulmans de France ont eu l’occasion de fermement montrer leur attachement à ce pays contre leurs co-religionaires dangereux et archaïques ils se sont faits discrets voire inexistants. Ce qui, par une vue d’ensemble, me semble être plutôt un assentiment aux vociférations hystériques et névrosées des imams et muftis agitant leurs menaces et dégueulant leurs fatwas contre tout ce que l’occident a de lumineux en comparaison à leur monde qui, politiquement, culturellement et socialement, est un désert.
Abdennour Bidar fait partie de ces hommes cherchant à faire accéder sa communauté à la modernité critique tout comme Senghor rêvait, secrètement, que l’Afrique noire tout en conservant son identité s’hellénise. Paradoxe des paradoxes, le concept de « négritude » doit beaucoup à Barrès et à la Grèce antique.
Abdennour Bidar dans "L’Islam face à la mort de Dieu", par son analyse de la pensée de Mohammed Iqbal fait référence à une conception de la foi musulmane qui n’a jamais existé que dans les cœurs des esprits libres qui ont tenté, tant bien que mal, de changer radicalement la conception étriquée et sclérosée de la réception littérale du Coran. Après la lecture du Coran, on est en droit de se demander comment les soufis ont pu s’y prendre, mais lorsque l’on sait, par exemple, que le soufisme indien a été fortement influencé par d’anciens Brahmanes convertis à l’islam et qui ont su utiliser les outils acquis par la pratique de leur religion initiale pour penser leur religion nouvelle, on comprend aussitôt pourquoi les tenants du salafisme, du wahabisme et autres saloperies totalitaires estiment que ce sont là des éléments étrangers à la Sharia et que, de ce fait, le soufisme ne peut être perçu que comme une hérésie sectaire et dangereuse pour l’établissement d’un éventuel Califat sensé apporter la Paix de Dieu par la soumission aux cinq piliers révélés par le prophète Mohammed. Mais Iqbal, dit Bidar, fait référence à Rûmi en personne :
« "Comme Roumi j’ai fait l’appel à la prière dans la Ka’aba/Et j’ai appris de lui les secrets de l’âme/Il était fait pour relever le défi du temps passé/Je suis fait pour relever le défi du temps présent."
Restons quelques instants sur cette vision d’Iqbal en muezzin de La Mecque.
Cette fonction de muezzin dans le lieu le plus saint de l’islam est une allusion symbolique à celui que le soufisme désigne comme le Qouth, le sage suprême d’une époque, "Chef" ou "Pôle spirituel de son temps". Qui est-il ? Quelle sagesse détient-il ? Selon les soufis, chaque époque a sa sagesse. Il faudrait même dire que pour eux chaque instant a sa sagesse. Ils se nomment d’ailleurs eux-mêmes les "fils de l’instant". Autrement dit, la sagesse n’est pas un savoir établi, un secret déposé quelque part et qui traverserait les âges sans varier. Pourquoi n’en est-il pas ainsi ? Parce que la sagesse est la connaissance de la façon dont l’absolu se manifeste dans le relatif, dont l’infini entre dans le fini, dont l’éternité entre dans le temps. Chaque époque, chaque culture, chaque individualité, chaque instant de chaque individualité, sont l’expression d’un nouveau visage de l’absolu — qui est donc à la fois toujours lui-même, et toujours autre que lui-même. Or c’est exactement de cela que le Qouth d’un temps est suprêmement conscient. Il voit l’absolu dans la moindre bribe de son existence et du monde. Il reconnaît l’intention du Soi créateur dans l’esprit et les formes de son temps. Les soufis disent qu’il est détenteur du Sirr (secret) de son époque et du Idhn (autorisation) de communiquer aux autres hommes ce qu’ils peuvent en recevoir. »
Et quel est le penseur qui a permis à Mohammed Iqbal de repenser sa religion ? La réponse est dans le titre du livre que Bidar a consacré à Iqbal : "L’Islam face à la mort de Dieu" : Friedrich Nietzsche.
A lire impérativement : MOHAMMAD IQBAL, A PROPOS DE NIETZSCHE
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03/03/2011
Peuple mou
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« Peuple mou, peuple de suicidés, à l'art triste, aux plaisirs noirs, malgré tant de dons du ciel et de la terre ; triomphe de la canaille, démagogie, "droit des poux de manger les lions", grèves, sociétés secrètes, élections truquées, déficits budgétaires, et ce palais : un claque-dent. »
Paul Morand, Lorenzaccio ou le retour du proscrit, in L'Europe galante, 1925
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23/02/2011
Robespierre, Hitler, Lénine
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I. La révolution.
Marquant la naissance officielle de la modernité, c’est précisément la Révolution française qui a la première fait du massacre la conséquence rationnelle de l’énoncé d’un principe politique. La première tentative de génocide de l’histoire moderne eut la Vendée pour théâtre : 180 000 hommes, femmes, et enfants tués au seul motif d’être nés. Parlant des Vendéens, Couthon déclarait le 10 juin 1794 : « Il s’agit moins de punir que de les anéantir ». Vis-à-vis de leurs ennemis respectifs, réels ou supposés, les totalitarismes du XXè siècle ont réagi comme les révolutionnaire français : par la volonté d’extermination, avec toujours cette même idée que l’anéantissement de l’ennemi conditionne le salut du monde. Mais la Révolution française fut aussi la première à mobiliser les masses et à imposer à ses partisans politiques la rupture de tous leurs autres liens. La première également à parfaire le processus de destruction des corps intermédiaires, dans l’intention d’éliminer tout ce qui pouvait faire obstacle entre le pouvoir central et des individus atomisés.
II. Le totalitarisme.
Le fanatisme totalitaire, en même temps qu’il prolonge une intolérance de type proprement religieux, apparaît aussi comme profondément modelé par la modernité. Ce caractère moderne est visible d’emblée dans le communisme soviétique. Porté par l’optimisme radical de la théorie du progrès et par l’idée qu’il est possible de créer un homme nouveau qui règnera sur un monde transformé tel qu’il doit l’être, celui-ci adhère en effet pleinement au rationalisme et au scientisme des Lumières. On y retrouve l’affirmation prométhéenne qu’il n’y a pas de nature humaine, que le monde n’est qu’un objet de l’homme et que la terre entière peut être soumise au règne de la raison. La collectivisation, avec son corollaire obligé d’industrialisation, est elle-même éminemment moderne : la dékoulakisation vise avant tout à contraindre une classe paysanne « archaïque »à accepter les principes de la modernité.
Mais cette modernité est également présente dans le nazisme […]. Derrière un archaïsme de façade et une idéologie officielle qui n’a d’ailleurs jamais été véritablement unifiée, le régime hitlérien s’est largement employé à parfaire la modernisation de l’Allemagne. Il a, comme le communisme, importé massivement les méthodes du taylorisme et du fordisme – la différence étant que l’URSS n’est jamais sortie de la pénurie, tandis que la société allemande a déjà connu sous le IIIè Reich un début de consommation de masse –, rationalisé la production, donné à la technique une place de premier rang, favorisé le développement des grandes villes. Il se réclamait d’une mystique de « la terre et du sang », mais il a largement contribué à liquider la paysannerie allemande. Il chantait les vertus de la femme au foyer, mais il l’a mise massivement au travail.
L’Ecole de Francfort n’avait pas tort, de ce point de vue, de considérer que le nazisme n’aurait pas été possible sans le rationalisme des Lumières, qu’il prétendait pourtant combattre. La prééminence de la technique, la domination toujours plus grande du monde par l’homme et le règne de la subjectivité bourgeoise constituent selon T. Adorno et M. Horkheimer, un ensemble indissociable de la compréhension du système concentrationnaire. Le totalitarisme ne peut en effet apparaître que lorsque la connaissance a été identifiée à la « calculabilité du monde » et qu’on été supprimées toutes les structures « opaques » qui faisaient auparavant obstacle à la marche irrésistible vers la maîtrise totale. Dès 1939, Horkheimer écrivait que « l’ordre né en 1789 comme une route vers le progrès portait avec lui la tendance au nazisme ». Il ajoutait que le nazisme « est la vérité de la société moderne » et que le combattre « en référence à la pensée libérale revient à s’appuyer sur ce qui lui a permis de l’emporter ».
III. Aujourd'hui.
Le marché, la technique et la communication affirment aujourd’hui, avec d’autres méthodes, ce que les Etats, les idéologies et les armées affirmaient hier : la légitimité de la domination complète du monde. La fantasme de transparence et la maîtrise totale à l’œuvre dans les systèmes totalitaires est lui aussi toujours là. La société libérale continue à réduire l’homme à l’état d’objet en réifiant les rapports sociaux, en transformant les citoyens-consommateurs en esclaves de la marchandise, en ramenant toute valeur aux critères de l’utilité marchande. L’économique a repris aujourd’hui la prétention du politique à détenir la vérité ultime sur les affaires humaines.
On constate aussi que, dans les sociétés libérales, la normalisation n’a pas disparu, mais changé de forme. La censure par le marché a remplacé la censure politique. Les dissidents ne sont plus déportés ni fusillés, mais marginalisés, maintenus à l’écart ou réduits au silence. La publicité a relayé la propagande, et le conformisme prend la forme de la pensée unique. « L’égalisation des conditions » dont Tocqueville craignait qu’elle ne fasse surgir un nouveau despotisme, engendre mécaniquement la standardisation des goûts, des sentiments, des mœurs. Les habitudes de consommation façonnent de manière de plus en plus uniforme les comportements sociaux. Les modes de vies singuliers disparaissent peu à peu.
A. de Benoist, Communisme et nazisme. 25 réflexions sur le totalitarisme, Paris, Le Labyrinthe, 1998, pp. 117-122 et 139.
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16/02/2011
Les 14 commandements de Charles J. Sykes à l'attention des jeunes branleurs...
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Trouvé chez la charmante Crevette. D'après mon ex-camarade vénitien, Eric qui vit aux USA, les élèves de France devraient apprendre ce qui suit par coeur. Mouaiff ! Leurs parents devraient peut-être le faire avant eux... tout cela me semble bien difficile. Au début je me suis dit : "on voit l'écart monumental qui existe entre la Gauche américaine et la Gôche française". Ben oui, sur la toile ces "commandements" sont attribués à Bill Gates... Bill Gates a soutenu Obama lors des dernières élections américaines. Il a certes déjà donné du pognon aussi bien aux démocrates qu'aux républicains, mais sans doute est-ce par esprit démocratique. En tout cas, en créateur et entrepreneur, il sait ce qu'est la réalité et c'est bien à celle-ci que nous sommes sensés préparer nos jolies têtes blondes au lieu de leur parler des "35h00", de bosser moins et de réclamer plus, de la retraite à 60 ans, et toutes ces conneries sociétales qui nous pétrifient sur place, nous interdisent d'avancer. Bonne bourre les malandrins. Bon... je ne sais pas d'où provient ce "Hoax", car c'en est un... mais ça n'est pas très grave car cela ne change rien aux propos qui sont tenus. Ces "11 commandements" qui circulent sur la toile sont, en fait, tirés des "50 règles" de Charles J. Sykes qui a écrit, entre autre, des articles pour "American Thinker". Merci à Scalp de me l'avoir signalé. Après une courte recherche (je ne me suis pas encore transformé en "spécialiste de Charles J. Sykes), il s'avère que ces "11 commandements" sont tirés d'un livre intitulé : "50 Rules kids won't learn in school", au sein duquel Charles J. Sykes nous apprend que l'enseignement politiquement correct de l'école n'est pas assez formateur. Autrement dit, nos jolies petites têtes blondes (ou rousses ou brunes, je suis pas raciste) ne sont pas prêtes à affronter la réalité comme il se doit. Déjà des esclaves avant que d'être adultes. Life is sweet.
Qu'importe, je reproduis ici les "commandements" en question, car ils valent la peine d'être lus et j'y ajoute 3 autres "commandements" qui ne figuraient pas dans la liste chopée chez la Crevette qu'après enquête j'ai trouvé sur la toile. Enjoy !
Règlement 1 : La vie est injuste, habituez vous !
Règlement 2 : Le monde se fout de votre amour-propre. Le monde s'attendra à ce que vous accomplissiez quelque chose AVANT que vous ne vous félicitiez vous-même.
Règlement 3 : Vous ne gagnerez pas $60,000 l'an en sortant de l'école. Vous ne serez pas vice-président avec cellulaire fourni avant d'avoir gagné ces deux privilèges.
Règlement 4 : Si vous croyez que votre professeur est dur avec vous, attendez d'avoir un patron.
Règlement 5 : Travailler dans une friterie n'est pas s'abaisser, vos grands-parents avaient un mot différent pour ça : ils appelaient ça une opportunité.
Règlement 6 : Si vous gaffez, CE N'EST PAS LA FAUTE DE VOS PARENTS, arrêtez de chialer et apprenez de vos erreurs.
Règlement 7 : Avant que vous naissiez, vos parents n'étaient pas aussi ennuyeux qu'ils le sont maintenant, ils sont devenus comme ça en payant vos factures, en nettoyant vos vêtements et à vous entendre raconter combien bons et cools vous vous croyez. Ainsi, avant de sauver les forêts tropicales des parasites de la génération de vos parents, commencez donc par faire le ménage dans la garde-robe de votre propre chambre.
Règlement 8 : Votre école s'est peut-être débarrassée du système gagnant-perdant, mais PAS LA VIE. Dans certaines écoles, on a aboli les notes de passage et on vous donne autant de chances que vous voulez d'obtenir la bonne réponse. Ceci ne ressemble d'aucune façon à la vraie vie.
Règlement 9 : La vie n'est pas divisée en semestres. L'été n'est pas une période de congé et très peu d'employeurs sont disposés à vous aider à VOUS TROUVER, faites ça sur votre propre temps.
Règlement 10 : La télévision n'est pas la vraie vie. Dans la vraie vie, les gens quittent le café et vont travailler.
Règlement 11 : Soyez gentils avec les 'nerds', il y a de bonnes chances que vous en ayez un pour patron.
Règlement 12 : Fumer ne vous donnera pas l'air "cool". Il vous donnera l'air con. La prochaine fois que vous êtes de sortie, regardez un gamin de 11 ans avec un mégot dans la bouche. C'est ce à quoi vous ressemblez devant n'importe quelle personne de plus de vingt ans. Et c'est du pareil au même lorsqu'il s'agit de vous "exprimer" avec des cheveux violets et/ou des piercings.
Règle n ° 13 : Vous n'êtes pas immortels. (Voir l'article n ° 12.) Si vous avez l'impression que vivre vite, mourir jeune et laisser un beau cadavre est romantique, vous n'avez manifestement pas vu récemment un de vos semblables refroidi.
Règle n ° 14 : Profitez de tout ça tant que vous pouvez. Bien sûr, les parents sont une douleur, l'école est ennuyeuse, et la vie est déprimante. Mais un jour, vous vous rendrez compte combien c'était merveilleux d'être un enfant. Peut-être devriez-vous commencer dès maintenant. Vous êtes les bienvenus.
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13/02/2011
Les cieux nous vomissent
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Céline, au milieu de ses vociférations à l'égard des juifs et des francs-maçons, dans son dernier pamphlet mis à l'index, "Les beaux draps", soudain vous fait tomber de ces phrases qui sauvent un peu son âme de sa dérive hasardeuse, perles précieuses dans un égout puant :
"Une telle connerie dépasse l'homme. Une hébétude si fantastique démasque un instinct de mort, une pesanteur au charnier, une perversion mutilante que rien ne saurait expliquer, sinon que les temps sont venus, que le Diable nous appréhende, que le Destin s'accomplit.
Nous crevons d'être sans légende, sans mystère, sans grandeur. Les cieux nous vomissent."
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10/02/2011
Luther antisémite
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Bon, pendant qu'on y est, interdisons le Protestantisme !
« Le diable avec son groin angélique, dévore ce qui est secrété des ouvertures orales et anales des Juifs ; ceci est en effet son plat favori, dont il se gave comme une truie derrière la haie. »
Martin Luther, Vom Schem Hamphoras und das Geschlecht Christi, 1543
« Tout d'abord, mettre le feu à leurs synagogues ou écoles et enterrer ou couvrir de saleté tout ce qui ne brûlera pas, de façon que personne ne puisse jamais revoir une de leurs pierres ou leur cendre.
En second, je conseille que leurs maisons soient rasées et détruites. En trois, je conseille que tous leurs livres de prières et écrits talmudiques, qui servent à apprendre une telle idolâtrie, leurs mensonges, leurs malédictions et leurs blasphèmes, leur soient retirés. En quatre, je conseille que leurs rabbins aient l'interdiction d'enseigner sous peine de perdre la vie. En cinq, je conseille que les sauf-conduits sur les grands chemins soient abolis complètement pour les Juifs. En six, je conseille que l'usure leur soit interdite, et que toutes les liquidités et trésors d'or et d'argent leur soient confisqués…de tel argent ne doit pas être utilisé…de la [manière] suivante… Si un Juif se convertit sincèrement, on doit lui remettre. En sept, je recommande que l'on mette un fléau, une hache, une houe, une pelle, une quenouille ou un fuseau entre les mains des jeunes et forts Juifs ou Juives et qu'on les laisse gagner leur pain à la sueur de leur front. Car ce n'est pas juste qu'ils doivent nous laisser trimer à la sueur de nos faces, nous les damnés Goyim, tandis qu'eux, le peuple élu, passent leur temps à fainéanter devant leur poêle, faisant bombance et pétant, et en plus de tout cela, faisant des fanfaronnades blasphématoires de leur seigneurie contre les Chrétiens, à l'aide de notre sueur. Non, nous devons expulser ces fripons paresseux par le fond de leur pantalon. Si nous voulons laver nos mains du blasphème des Juifs et ne pas partager leur culpabilité, nous devons nous séparer d'eux. Ils doivent être conduits hors de notre pays" et "nous devons les conduire comme des chiens enragés. »
Martin Luther, Von den Jüden und iren Lügen, 1543
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03/02/2011
Action par la Mort...
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« Par destruction de ces rêves ultimes, j'entends la perception de deux vérités cachées: à savoir que la fleur de mensonge dont rêve l'homme d'action n'est autre qu'une fleur artificielle; et, d'autre part, que la mort étayée par le mensonge dont rêve l'art ne confère d'aucune manière de faveurs spéciales. En bref, le double cheminement vous coupe d'un quelconque salut par le rêve: les deux secrets qui n'avaient aucune vocation à être ainsi confrontés se connaissent l'un l'autre. Unis dans un seul corps, il faut accepter sans faillir.L'effondrement des principes ultimes de la vie et de la mort.
Peut-être voudra-t-on s'enquérir s'il est possible à chacun de vivre cette dualité en pratique. Heureusement, il est extrêmement rare que la dualité revête sa forme absolue; c'est l'espèce d'idéal dont la réalisation signifierait sa fin immédiate. Car le secret de cette dualité ultime, intimement discordante, est, bien qu'elle puisse sans cesse hypothéquer l'avenir sous forme d'une vague appréhension, qu'elle ne sera jamais mise à l'épreuve qu'à l'instant de la mort. Alors, juste au moment où le double idéal sans salut est sur le point de se réaliser, celui dont l'esprit est préoccupé de cette dualité devra trahir l'idéal de part ou d'autre. Puisque c'était la vie qui le tenait lié à l'impitoyable perception de cet idéal, il va trahir cette perception une fois parvenu face à la mort. Sinon, la mort lui serait insupportable. »
Yukio Mishima, Le Soleil et l'Acier
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30/01/2011
L'extase brève et fugitive
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« L'extase brève et fugitive de l'acte amoureux, sa flambée passagère dans l'ardeur du désir, son extinction rapide, c'était pour lui le fond de toute expérience humaine, c'était devenu le symbole de toutes les joies et de toutes les souffrances de la vie. Il pouvait s'abandonner à cette détresse, à ce frisson en présence des choses qui passent avec la même passion qu'à l'amour ; et cette mélancolie, elle aussi, était de l'amour, elle aussi était de la volupté. Tout comme la jouissance d'amour, à l'instant le plus délicieux de son épanouissement suprême, est sûre de décroître l'instant d'après et de disparaître dans la mort, de même la solitude de l'âme et l'abandon à la mélancolie sont sûrs de faire place soudain au désir, à une nouvelle adhésion à la vie et à sa face lumineuse. La mort et la volupté ne font qu'un. La Mère de la vie ; on pouvait dire aussi que c'était la tombe, la putréfaction. »
Herman Hesse, Narcisse et Goldmund
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29/01/2011
Le Bourgeoisisme
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« Le bourgeoisisme lui-même, en tant qu'état humain qui subsiste à perpétuité, n'est pas autre chose qu'une aspiration à la moyenne entre les innombrables extrêmes et antipodes de l'humanité. Prenons pour exemple une de ces paires de contrastes telle que le saint et le débauché, et notre comparaison deviendra immédiatement intelligible. L'homme a la possibilité de s'abandonner entièrement à l'esprit, à la tentative de pénétration du divin, à l'idéal de la sainteté. Il a également la possibilité inverse de s'abandonner entièrement à la vie de l'instinct, aux convoitises de ses sens, et de concentrer tout son désir sur le gain de la jouissance immédiate. La première voie mène à la sainteté, au martyre de l'esprit, à l'absorption en Dieu. La seconde mène à la débauche, au martyre des sens, à l'absorption en la putrescence. Le bourgeois, lui, cherche à garder le milieu modéré entre ces deux extrêmes. Jamais il ne s'absorbera, de s'abandonnera ni à la luxure ni à l'ascétisme ; jamais il de sera un martyr, jamais il ne consentira à son abolition : son idéal, tout opposé, est la conservation du moi ; il n'aspire ni à la sainteté, ni à son contraire, il ne supporte pas l'absolu, il veut bien servir Dieu, mais aussi le plaisir ; il tient à être vertueux, mais en même temps à avoir ses aises. Bref, il cherche à s'installer entre les extrêmes, dans la zone tempérée, sans orage ni tempêtes violentes, et il y réussit, mais au dépens de cette intensité de vie et de sentiment que donne une existence orientée vers l'extrême et l'absolu. On ne peut vivre intensément qu'aux dépens du moi. Le bourgeois, précisément, n'apprécie rien autant que le moi (un moi qui n'existe, il est vrai, qu'à l'état rudimentaire). Ainsi, au détriment de l'intensité, il obtient la conservation et la sécurité ; au lieu de la folie en Dieu, il récolte la tranquillité de la conscience ; au lieu de la volupté, le confort ; au lieu de la liberté, l'aisance ; au lieu de l'ardeur mortelle, une température agréable. Le bourgeois, de par sa nature, est un être doué d'une faible vitalité, craintif, effrayé de tout abandon, facile à gouverner. C'est pourquoi, à la place de la puissance, il a mis la majorité ; à la place de la force, la loi ; à la place de la responsabilité, le droit de vote. »
Herman Hesse, Le Loup des Steppes
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24/01/2011
Merline
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Il est une anecdote qui raconte comment Ernst Jünger, officier en poste à Paris durant l'occupation de la seconde guerre mondiale, alors qu'il est dans une librairie voit entrer un juif, l'étoile jaune sur le coeur. Il s'avance vers lui, se découvre la tête, se met presque au garde à vous et, s'inclinant, présente ses excuses à l'homme en question pour le mal que son pays a fait au peuple mosaïque.
Grâce à Hoplite je découvre ce texte de Jünger, tiré de son "Premier Journal Parisien", et il me faut vous le communiquer d'urgence pour faire résonance avec mon billet d'hier à propos du génial et maudit écrivain. Je savais déjà, via Philippe Sollers, que Jünger n'avait pas aimé sa rencontre avec Louis-Ferdinand Céline, mais ici nous avons accès directement à sa réflexion première concernant le personnage.
« L'après midi à l'Institut Allemand, rue Saint Dominique. Là, entre autres personnes, Merline [Céline], grand, osseux, robuste, un peu lourdaud, mais alerte dans la discussion ou plutôt dans le monologue ; Il y a, chez lui, ce regard des maniaques, tourné en dedans qui brille comme au fond d'un trou. Pour ce regard, aussi, plus rien n'existe ni à droite ni à gauche ; on a l'impression que l'homme fonce vers un but inconnu. "J'ai constamment la mort à mes côtés" - et, disant cela, il semble montrer du doigt, à côté de son fauteuil, un petit chien qui serait couché là.
Il dit combien il est surpris, stupéfait, que nous, soldats, nous ne fusillions pas, ne pendions pas, n'exterminions pas les Juifs- il est stupéfait que quelqu'un disposant d'une baïonnette n'en fasse pas un usage illimité ; « Si les bolcheviques étaient à Paris, ils vous feraient voir comment on s'y prend ; ils vous montreraient comment on épure la population, quartier par quartier, maison par maison. Si je portais la baïonnette, je saurais ce que j'ai à faire. » J'ai appris quelque chose, à l'écouter parler ainsi deux heures durant, car il exprimait de toutes évidences la monstrueuse puissance du nihilisme. Ces hommes là n'entendent qu'une mélodie, mais singulièrement insistante ; Ils sont comme des machines de fer qui continuent leur chemin jusqu'à ce qu'on les brise. Il est curieux d'entendre de tels esprits parler de la science, par exemple de la biologie. Ils utilisent tout cela comme auraient fait les hommes de l'âge de pierre ; c'est pour eux uniquement un moyen de tuer les autres. La joie de ces gens-là, aujourd'hui ne tient pas au fait qu'ils ont une idée. Des idées ils en avaient déjà beaucoup ; ce qu'ils désirent ardemment, c'est occuper des bastions d'où pouvoir ouvrir le feu sur de grandes masses d'hommes, et répandre la terreur. Qu'ils y parviennent et ils suspendent tout travail cérébral, qu'elles qu'aient été leurs théories au cours de leur ascension. Ils s'abandonnent alors au plaisir de tuer ; et c'était cela, cet instinct du massacre en masse qui, dés le début, les poussait en avant, de façon ténébreuse et confuse. Aux époques ou l'on pouvait encore mettre la croyance à l'épreuve, de telles natures étaient plus vite identifiées. De nos jours, elles vont de l'avant sous le capuchon des idées. Quant à celles-ci, elles sont ce qu'on voudra ; il suffit, pour s'en rendre compte, de voir comme on rejette ces guenilles, une fois le but atteint.
On a annoncé aujourd'hui l'entrée en guerre du Japon. Peut-être l'année 1942 verra-t-elle un nombre d'hommes plus élevé que jamais passer ensemble les portes de l'Hadès. »
Ernst Jünger, Premier journal parisien
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16/01/2011
Morte époque
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« Trois éléments partageaient donc la vie qui s'offrait alors aux jeunes gens : derrière eux un passé à jamais détruit, s'agitant encore sur ses ruines, avec tous les fossiles des siècles de l'absolutisme ; devant eux l'aurore d'un immense horizon, les premières clartés de l'avenir ; et entre ces deux mondes ... quelque chose de semblable à l'Océan qui sépare le vieux continent de la jeune Amérique, je ne sais quoi de vague et flottant, une mer houleuse et pleine de naufrages, traversée de temps en temps par quelque blanche voile lointaine ou par quelque navire soufflant une lourde vapeur ; le siècle présent, en un mot, qui sépare le passé de l'avenir, qui n'est ni l'un ni l'autre et qui ressemble à tous deux à la fois, et où l'on ne sait, à chaque pas qu'on fait, si l'on marche sur une semence ou sur un débris.
Voilà dans quel chaos il fallut choisir alors ; voilà ce qui se présentait à des enfants pleins de force et d'audace, fils de l'Empire et petits-fils de la Révolution.
Or, du passé ils n'en voulaient plus, car la foi en rien ne se donne ; l'avenir, ils l'aimaient, mais quoi ! comme Pygmalion Galatée : c'était pour eux comme une amante de marbre, et ils attendaient qu'elle s'animât, que le sang colorât ses veines.
Il leur restait donc le présent, l'esprit du siècle, ange du crépuscule qui n'est ni la nuit ni le jour ; ils le trouvèrent assis sur un sac de chaux plein d'ossements, serré dans le manteau des égoïstes, et grelottant d'un froid terrible. L'angoisse de la mort leur entra dans l'âme à la vue de ce spectre moitié momie et moitié foetus ; ils s'en approchèrent comme le voyageur à qui l'on montre à Strasbourg la fille d'un vieux comte de Sarverden, embaumée dans sa parure de fiancée : ce squelette enfantin fait frémir, car ses mains fluettes et livides portent l'anneau des épousées, et sa tête tombe en poussière au milieu des fleurs d'oranger. »
Alfred de Musset, La confession d'un enfant du siècle, 1836
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Prostitution au Veau d'Or
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« Je l’ai dit depuis longtemps. Il y a le monde moderne. Ce monde moderne a fait à l’humanité des conditions telles, si entièrement et si absolument nouvelles, que tout ce que nous savons par l’histoire, tout ce que nous avons appris des humanités précédentes ne peut aucunement nous servir, ne peut pas nous faire avancer dans la connaissance du monde où nous vivons. Il n’y a pas de précédents. Pour la première fois dans l’histoire du monde les puissances spirituelles ont été toutes ensemble refoulées non point par les puissances matérielles mais par une seule puissance matérielle qui est la puissance de l’argent. Et pour être juste il faut même dire : Pour la première fois dans l’histoire du monde toutes les puissances spirituelles ensemble et du même mouvement et toutes les autres puissances matérielles ensemble et d’un même mouvement qui est le même ont été refoulées par une seule puissance matérielle qui est la puissance de l’argent. Pour la première fois dans l’histoire du monde toutes les puissances spirituelles ensemble et toutes les autres puissances matérielles ensemble et d’un seul mouvement et d’un même mouvement ont reculé sur la face de la terre. Et comme une immense ligne elles ont reculé sur toute la ligne. Pour la première fois dans l’histoire du monde l’argent est maître sans limitation et sans mesure.
Pour la première fois dans l’histoire du monde l’argent est seul en face de l’esprit. (Et même il est seul en face des autres matières.) Pour la première fois dans l’histoire du monde l’argent est seul devant Dieu. Il a ramassé en lui tout ce qu’il y avait de vénéneux dans le temporel, et à présent c’est fait. Par on ne sait quelle effrayante aventure, par on ne sait quelle aberration de mécanisme, par un décalage, par un dérèglement, par un monstrueux affolement de la mécanique ce qui ne devait servir qu’à l’échange a complètement envahi la valeur à échanger. Il ne faut donc pas dire seulement que dans le monde moderne l’échelle des valeurs a été bouleversé. Il faut dire qu’elle a été anéantie, puisque l’appareil de mesure et d’échange et d’évaluation a envahi toute la valeur qu’il devait servir à mesurer, échanger, évaluer. L’instrument est devenu la matière et l’objet et le monde. C’est un cataclysme aussi nouveau, c’est un évènement aussi monstrueux, c’est un phénomène aussi frauduleux que si le calendrier se mettait à être l’année elle-même, l’année réelle, ( et c’est bien un peu ce qui arrive dans l’histoire) ; et si l’horloge se mettait à être le temps ; et si le mètre et ses centimètres se mettait à être le monde mesuré ; et si le nombre avec son arithmétique se mettait à être le monde compté. De là est venue cette immense prostitution du monde moderne. Elle ne vient pas de la luxure. Elle n’en est pas digne. Elle vient de l’argent. Elle vient de cette universelle interchangeabilité. Et notamment de cette avarice et de cette vénalité que nous avons vu qui étaient deux cas particuliers, (et peut-être et souvent le même), de cette universelle interchangeabilité. Le monde moderne n’est pas universellement prostitutionnel par luxure. Il en est bien incapable. Il est universellement prostitutionnel parce qu’il est universellement interchangeable.
Il ne s’est pas procuré de la bassesse et de la turpitude avec son argent. Mais parce qu’il avait tout réduit en argent, il s’est trouvé que tout était bassesse et turpitude. »
Charles Péguy, "Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne", Œuvres en prose complètes, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade
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09/01/2011
Les arabes selon Ibn Khaldoun
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Ibn Khaldoun (1332-1406), déjà, avait très bien perçu le fond mental et psychologique du peuple dont il était issu. Il n'est pas inintéressant de découvrir, pour ceux qui ne les connaissent pas, ces passages tirés de son livre majeur, "Les Prolégomènes - Première partie", ici dans la traduction de W. Mac Guckin de Slane (1801-1878). L'avantage est que ces propos proviennent d'un philosophe musulman dont l'origine familiale provient du Yémen, ce qui m'évitera les accusations faciles de "racisme", etc... dont les tenants de la non pensée se sont fait les spécialistes.
« Nous avons déjà dit que les nations à demi sauvages ont tout ce qu’il faut pour conquérir et pour dominer. Ces peuples parviennent à soumettre les autres, parce qu’ils sont assez forts pour leur faire la guerre et que le reste des hommes les regarde comme des bêtes féroces. Tels sont les Arabes, les Zénata et les gens qui mènent le même genre de vie, savoir, les Kurdes, les Turcomans et les tribus voilées (les Almoravides) de la grande famille sanhadjienne. Ces races peu civilisées, ne possédant pas un territoire où elles puissent vivre dans l’abondance, n’ont rien qui les attache à leur pays natal ; aussi toutes les contrées, toutes les régions leur paraissent également bonnes. Ne se contentant pas de commander chez elles et de dominer sur les peuples voisins, elles franchissent les limites de leur territoire, afin d’envahir les pays lointains et d’en subjuguer les habitants. Que le lecteur se rappelle l’anecdote du khalife Omar. Aussitôt qu’il fut proclamé chef des musulmans, il se leva pour haranguer l’assemblée et pousser les vrais croyants à entreprendre la conquête de l’Irac. « Le Hidjaz, leur disait-il, n’est pas un lieu d’habitation ; il ne convient qu’à la nourriture des troupeaux ; sans eux, on ne saurait y vivre. Allons, vous autres qui, les derniers, avez émigré de la Mecque, pourquoi restez-vous si loin de ce que Dieu vous a promis ? Parcourez donc la terre ; Dieu a déclaré, dans son livre, qu’elle serait votre héritage. Il a dit : « Je le ferai afin d’élever votre religion au-dessus de toutes les autres, et cela malgré les infidèles. » (Coran, sour. IX, vers. 33.) Voyez encore les anciens Arabes, tels que les Tobba (du Yémen) et les Himyérites ; une fois, dit-on, ils passèrent du Yémen en Mauritanie et, une autre fois, en Irac et dans l’Inde. Hors de la race arabe, on ne trouve aucun peuple qui ait jamais fait de pareilles courses. Remarquez encore les peuples voilés (les Almoravides) ; voulant fonder un grand empire, ils envahirent la Mauritanie et étendirent leur domination depuis le premier climat jusqu’au cinquième ; d’un côté, ils voyaient leurs lieux de parcours toucher au pays des Noirs ; de l’autre, ils tenaient sous leurs ordres les royaumes (musulmans) de l’Espagne. Entre ces deux limites tout leur obéissait. Voilà ce dont les peuples à demi sauvages sont capables ; ils fondent des royaumes qui ont une étendue énorme, et ils font sentir leur autorité jusqu’à une grande distance du pays qui était le berceau de leur puissance.
(...)
Le naturel farouche des Arabes en a fait une race de pillards et de brigands. Toutes les fois qu’ils peuvent enlever un butin sans courir un danger ou soutenir une lutte, ils n’hésitent pas à s’en emparer et à rentrer au plus vite dans la partie du désert où ils font paître leurs troupeaux. Jamais ils ne marchent contre un ennemi pour le combattre ouvertement, à moins que le soin de leur propre défense ne les y oblige.
(...)
Ces nomades y renouvellent leurs incursions, et, comme ils peuvent en parcourir toute l’étendue très facilement, ils s’y livrent au pillage et aux actes de dévastation, jusqu’à ce que les habitants se résignent à les accepter pour maîtres.
(...)
Les habitudes et les usages de la vie nomade ont fait des Arabes un peuple rude et farouche. La grossièreté des moeurs est devenue pour eux une seconde nature, un état dans lequel ils se complaisent, parce qu’il leur assure la liberté et l’indépendance. Une telle disposition s’oppose au progrès de la civilisation.
(...)
Si les Arabes ont besoin de pierres pour servir d’appuis à leurs marmites, ils dégradent les bâtiments afin de se les procurer ; s’il leur faut du bois pour en faire des piquets ou des soutiens de tente, ils détruisent les toits des maisons pour en avoir. Par la nature même de leur vie, ils sont hostiles à tout ce qui est édifice ; or, construire des édifices, c’est faire le premier pas dans la civilisation.
(...)
... par leur disposition naturelle, ils sont toujours prêts à enlever de force le bien d’autrui, à chercher les richesses les armes à la main et à piller sans mesure et sans retenue. Toutes les fois qu’ils jettent leurs regards sur un beau troupeau, sur un objet d’ameublement, sur un ustensile quelconque, ils l’enlèvent de force.Si, par la conquête d’une province par la fondation d’une dynastie, ils se sont mis en état d’assouvir leur rapacité, ils méprisent tous les règlements qui servent à protéger les propriétés et les richesses des habitants. Sous leur domination, la ruine envahit tout. Ils imposent aux gens de métier et aux artisans des corvées pour lesquelles ils ne jugent pas convenable d’offrir une rétribution. Or l’exercice des arts et des métiers est la véritable source de richesses, ainsi que nous le démontrerons plus tard. Si les professions manuelles rencontrent des entraves et cessent d’être profitables, on perd l’espoir du gain et l’on renonce au travail ; l’ordre établi se dérange et la civilisation recule. Ajoutons que les Arabes négligent tous les soins du gouvernement ; ils ne cherchent pas à empêcher les crimes ; ils ne veillent pas à la sûreté publique ; leur unique souci c’est de tirer de leurs sujets de l’argent, soit par la violence, soit par des avanies. Pourvu qu’ils parviennent à ce but, nul autre souci ne les occupe. Régulariser l’administration de l’État, pourvoir au bien-être du peuple soumis, et contenir les malfaiteurs sont des occupations auxquelles ils ne pensent même pas. Se conformant à l’usage qui a toujours existé chez eux, ils remplacent les peines corporelles par des amendes, afin d’en tirer profit et d’accroître leurs revenus. Or de simples amendes ne suffisent pas pour empêcher les crimes et pour réprimer les tentatives des malfaiteurs ; au contraire, elles encouragent les gens mal intentionnés, qui regardent une peine pécuniaire comme peu de chose, pourvu qu’ils accomplissent leurs projets criminels ; aussi les sujets d’une tribu arabe restent a peu près sans gouvernement, et un tel état de choses détruit également la population d’un pays et sa prospérité.
(...)
un Arabe, exerçant un commandement ne le céderait ni à son père, ni à son frère, ni au chef de sa famille. S’il y consentait, ce serait à contre-coeur et par égard pour les convenances ; aussi trouve-t-on chez les Arabes beaucoup de chefs et de gens revêtus d’une certaine autorité. Tous ces personnages s’occupent, les uns après les autres, à pressurer la race conquise et à la tyranniser. Cela suffit pour ruiner la civilisation.
(...)
Voyez tous les pays que les Arabes ont conquis depuis les siècles les plus reculés : la civilisation en a disparu, ainsi que la population ; le sol même paraît avoir changé de nature. Dans le Yémen, tous les centres de la population sont abandonnés, à l’exception de quelques grandes villes ; dans l’Irac arabe, il en est de même ; toutes les belles cultures dont les Perses l’avaient couvert ont cessé d’exister. De nos jours, la Syrie est ruinée ; l’Ifrîkiya et le Maghreb souffrent encore des dévastations commises par les Arabes. Au cinquième siècle de l’hégire, les Beni-Hilal et les Soleïm y firent irruption, et, pendant trois siècles et demi, ils ont continué à s’acharner sur ces pays ; aussi la dévastation et la solitude y règnent encore. Avant cette invasion, toute la région qui s’étend depuis le pays des Noirs jusqu’à la Méditerranée était bien habitée : les traces d’une ancienne civilisation, les débris de monuments et d’édifices, les ruines de villes et de villages sont là pour l’attester.
(...)
les Arabes, ainsi que nous l’avons dit, sont naturellement portés à dépouiller les autres hommes : voilà leur grand souci. Quant aux soins qu’il faut donner au maintien du gouvernement et au bon ordre, ils ne s’en occupent pas. Quand ils subjuguent un peuple, ils ne pensent qu’à s’enrichir en dépouillant les vaincus ; jamais ils n’essayent de leur donner une bonne administration. Pour augmenter le revenu qu’ils tirent du pays conquis, ils remplacent ordinairement les peines corporelles par des amendes. Cette mesure ne saurait empêcher les délits ; bien au contraire, si un homme a des motifs assez forts pour se porter au crime, il ne se laissera pas arrêter par la crainte d’une amende, qui serait pour lui peu de chose en comparaison des avantages que l’accomplissement de son projet pourra lui procurer. Aussi, sous la domination des Arabes, les délits ne cessent d’augmenter ; la dévastation se propage partout ; les habitants, abandonnés, pour ainsi dire, à eux-mêmes, s’attaquent entre-eux et se pillent les uns les autres ; la prospérité du pays, ne pouvant plus se soutenir, ne tarde pas à tomber et à s’anéantir. Cela arrive toujours chez les peuples abandonnés à eux-mêmes. Toutes les causes que nous venons d’indiquer éloignent l’esprit arabe des soins qu’exige l’administration d’un État. Pour les décider à s’en occuper, il faut que l’influence de la religion change leur caractère et fasse disparaître leur insouciance. Ayant alors dans leurs coeurs un sentiment qui les contrôle, ils travaillent à maintenir leurs sujets dans l’ordre, en les contenant les uns par les autres. Voyez-les à l’époque où ils fondèrent un empire sous l’influence de l’islamisme : se conformant aux prescriptions de la loi divine, ils s’adonnèrent aux soins du gouvernement et mirent en oeuvre tous les moyens physiques et moraux qui pouvaient aider au progrès de la civilisation. Comme les (premiers) khalifes suivirent le même système, l’empire des Arabes acquit une puissance immense. Rostem, ayant vu les soldats musulmans se rassembler pour faire la prière, s’écria : "Voilà Omar qui me met au désespoir ; il enseigne aux chiens la civilisation !" »
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08/01/2011
Conserver
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« Le véritable esprit conservateur est autre chose. Il ne consiste pas à retourner en arrière, mais à remonter jusqu'à la source. Nous ne voulons pas répéter, mais renouveler. Et pour cela nous devons nous placer au centre même du jaillissement de l'histoire, c'est-à-dire au cœur de cette nature humaine et politique qui varie à l'infini dans ses manifestations, mais dont l'essence reste à jamais identique parce qu'elle se situe au-delà du temps. L'accident passe et se démode, l'être subsiste. Et si nous nous tournons souvent vers le passé, ce n'est pas par nostalgie de ce qui n'est plus, mais pour y découvrir, sous le flux des contingences, les linéaments d'une nécessité qui demeure. »
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Soleil Couchant
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« Le dandysme apparaît surtout aux époques transitoires où la démocratie n'est pas encore toute-puissante, où l'aristocratie n'est que partiellement chancelante et avilie. Dans le trouble de ces époques quelques hommes déclassés, dégoûtés, désoeuvrés, mais tous riches de force native, peuvent concevoir le projet de fonder une espèce nouvelle d'aristocratie, d'autant plus difficile à rompre qu'elle sera basée sur les facultés les plus précieuses, les plus indestructibles, et sur les dons célestes que le travail et l'argent ne peuvent conférer. Le dandysme est le dernier éclat d'héroïsme dans les décadences; et le type du dandy retrouvé par le voyageur dans l'Amérique du Nord n'infirme en aucune façon cette idée: car rien n'empêche de supposer que les tribus que nous nommons sauvages soient les débris de grandes civilisations disparues. Le dandysme est un soleil couchant; comme l'astre qui décline, il est superbe, sans chaleur et plein de mélancolie. Mais, hélas! la marée montante de la démocratie, qui envahit tout et qui nivelle tout, noie jour à jour ces derniers représentants de l'orgueil humain et verse des flots d'oubli sur les traces de ces prodigieux mirmidons. »
Charles Baudelaire , "IX. Le Dandy", in Le peintre de la vie moderne
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06/01/2011
Engraissement
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« Je ne me lasserai pas de répéter qu’il y a des hommes qui se vantent d’aimer la liberté parce qu’ils en jouissent. Loin de vouloir lui sacrifier quoi que ce soit, ils entendent bien qu’elle leur épargne tout sacrifice, qu’elle leur permette de s’engraisser en paix, et même qu’elle facilite leur engraissement. »
Georges Bernanos, Le lendemain c’est vous
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04/01/2011
Stig Dagerman : Notre besoin de consolation est impossible à rassasier
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Grâce à l'excellent Richard Pinhas, j'ai découvert ce texte habité par une profonde mélancolie, de Stig Dagerman, que je vous invite à découvrir à votre tour si vous le souhaitez.
Notre besoin de consolation est impossible à rassasier (1952) en fichier PDF...
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01/01/2011
Paul Verlaine : Femme et Chatte
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Elle jouait avec sa chatte,
Et c'était merveille de voir
La main blanche et la blanche patte
S'ébattre dans l'ombre du soir.
Elle cachait - la scélérate ! -
Sous ces mitaines de fil noir
Ses meurtriers ongles d'agate,
Coupants et clairs comme un rasoir.
L'autre aussi faisait la sucrée
Et rentrait sa griffe acérée,
Mais le diable n'y perdait rien...
Et dans le boudoir où, sonore,
Tintait son rire aérien,
Brillaient quatre points de phosphore.
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28/12/2010
Hélie de Saint Marc : L'Honneur de Vivre
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A mon jeune Cousin NIKOLA...
« QUE DIRE A UN JEUNE DE 20 ANS »
« Quand on a connu tout et le contraire de tout,
quand on a beaucoup vécu et qu’on est au soir de sa vie,
on est tenté de ne rien lui dire,
sachant qu’à chaque génération suffit sa peine,
sachant aussi que la recherche, le doute, les remises en cause
font partie de la noblesse de l’existence.
Pourtant, je ne veux pas me dérober,
et à ce jeune interlocuteur, je répondrai ceci,
en me souvenant de ce qu’écrivait un auteur contemporain :
"Il ne faut pas s’installer dans sa vérité
et vouloir l’asséner comme une certitude,
mais savoir l’offrir en tremblant comme un mystère".
A mon jeune interlocuteur,
je dirai donc que nous vivons une période difficile
où les bases de ce qu’on appelait la Morale
et qu’on appelle aujourd’hui l’Ethique,
sont remises constamment en cause,
en particulier dans les domaines du don de la vie,
de la manipulation de la vie,
de l’interruption de la vie.
Dans ces domaines,
de terribles questions nous attendent dans les décennies à venir.
Oui, nous vivons une période difficile
où l’individualisme systématique,
le profit à n’importe quel prix,
le matérialisme,
l’emportent sur les forces de l’esprit.
Oui, nous vivons une période difficile
où il est toujours question de droit et jamais de devoir
et où la responsabilité qui est l’once de tout destin,
tend à être occultée.
Mais je dirai à mon jeune interlocuteur que malgré tout cela,
il faut croire à la grandeur de l’aventure humaine.
Il faut savoir,
jusqu’au dernier jour,
jusqu’à la dernière heure,
rouler son propre rocher.
La vie est un combat
le métier d’homme est un rude métier.
Ceux qui vivent sont ceux qui se battent.
Il faut savoir
que rien n’est sûr,
que rien n’est facile,
que rien n’est donné,
que rien n’est gratuit.
Tout se conquiert, tout se mérite.
Si rien n’est sacrifié, rien n’est obtenu.
Je dirai à mon jeune interlocuteur
que pour ma très modeste part,
je crois que la vie est un don de Dieu
et qu’il faut savoir découvrir au-delà de ce qui apparaît
comme l’absurdité du monde,
une signification à notre existence.
Je lui dirai
qu’il faut savoir trouver à travers les difficultés et les épreuves,
cette générosité,
cette noblesse,
cette miraculeuse et mystérieuse beauté éparse à travers le monde,
qu’il faut savoir découvrir ces étoiles,
qui nous guident où nous sommes plongés
au plus profond de la nuit
et le tremblement sacré des choses invisibles.
Je lui dirai
que tout homme est une exception,
qu’il a sa propre dignité
et qu’il faut savoir respecter cette dignité.
Je lui dirai
qu’envers et contre tous
il faut croire à son pays et en son avenir.
Enfin, je lui dirai
que de toutes les vertus,
la plus importante, parce qu’elle est la motrice de toutes les autres
et qu’elle est nécessaire à l’exercice des autres,
de toutes les vertus,
la plus importante me paraît être le courage, les courages,
et surtout celui dont on ne parle pas
et qui consiste à être fidèle à ses rêves de jeunesse.
Et pratiquer ce courage, ces courages,
c’est peut-être cela
"L’Honneur de Vivre" »
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« Les adolescents d’aujourd’hui ont peur d’employer des mots comme la fidélité, l’honneur, l’idéal ou le courage. Sans doute ont-ils l’impression que l’on joue avec ces valeurs – et que l’on joue avec eux. Ils savent que leurs aînés se sont abîmé les ailes. Je voudrais leur expliquer comment les valeurs de l’engagement ont été la clef de voûte de mon existence, comment je me suis brûlé à elles, et comment elles m’ont porté. Il serait criminel de dérouler devant eux un tapis rouge et de leur faire croire qu’il est facile d’agir. La noblesse du destin. humain, c’est aussi l’inquiétude, l’interrogation, les choix douloureux qui ne font ni vainqueur ni vaincu.
Que dire à un cadet ? Peut-être, avec pudeur, lui glisser dans la paume de la main deux ou trois conseils : mettre en accord ses actes et ses convictions ; pouvoir se regarder dans la glace sans avoir à rougir de lui-même ; ne pas tricher, sans doute la plus difficile, pratiquer et tâcher de concilier le courage et la générosité ; rester un homme libre.
J’ai toujours essayé de récupérer les débris de mon existence pour faire tenir debout mon être intérieur. Même en prison et réprouvé, j’ai cherché à être heureux.
Un ami m’a dit un jour : "tu as fait de mauvais choix, puisque tu as échoué". Je connais des réussites qui me font vomir. J’ai échoué, mais l’homme au fond de moi a été vivifié.
Je tiens le courage en haute estime car il me semble contenir toutes les autres vertus.
Je crains les êtres gonflés de certitudes. Ils me semblent tellement inconscients de la complexité des choses … Pour ma part, j’avance au milieu d’incertitudes. J’ai vécu trop d’épreuves pour me laisser prendre au miroir aux alouettes.
Ai-je toujours été fidèle ? Ai-je toujours agi selon l’honneur ? J’ai essayé, sans jamais y parvenir entièrement, d’être digne des autres et de la vie. Je ne connais pas de vérité tranquille. Je veux ajouter de la vie aux années qui me restent, témoigner de tout ce qui dure, retrouver la vérité de l’enfant que j’ai été. Simplement essayer d’être un homme. »
Toute une vie
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« Il y a eu un avant : ce jeune homme bravache et courageux à sa manière, policé et ironique, tellement inconscient et adolescent que j’étais en ce matin de septembre où j’ai franchi les trois porches successifs du camp de Buchenwald. Il y a eu un après : ces peaux rasées, ces mains fouillant dans les poches à la recherche de miettes de pain absentes, ces petits pas hésitants, ces visages prématurément ridés, les regards de bêtes affolées… j’ai eu un moment de recul et d’effroi. »
« Avant mon séjour dans les camps de concentration, je pensais que le pire venait d’ailleurs. J’ai trouvé le pire chez les autres, mais aussi en moi. Ce n’est pas l’abandon des siens qui est le plus dure à vivre, mais la déchéance de l’homme en soi. C’est la tristesse des déportés.
Nous n’avions plus de larmes. Les appels au secours dans la nuit restaient sans réponse. L’agonie et les cauchemars, le sifflement des poumons à bout de course, les excréments vidés dans les gamelles ou à même les châlits, tant certains étaient exténués, les corps purulents sans le moindre pansement faisaient partie de notre quotidien. Nous étions des sacs d’os prononçant à peine dix mots par jour.
La pendaison, dans l’imagerie SS, représentait l’exemplarité, l’ordre implacable. La sentence était toujours exécutée avec solennité, devant tous les pyjamas rayés. Plus les SS étaient démonstratifs et moins nous étions impressionnés. Cela ne me faisait même plus d’effet. Arrivé à un tel stade, on ne pense plus. "Je vis encore cet instant", me disais-je, et puis cet autre. Ne pas avoir peur de la mort était le premier commandement du déporté. Sinon, il trébuchait aussitôt tant elle planait autour de nous."Un pendu, me disais-je, et puis cet autre".
Un homme nu, battu, humilié, reste un homme s’il garde sa propre dignité. Vivre, ce n’est pas exister à n’importe quel prix. Personne ne peut voler l’âme d’autrui si la victime n’y consent pas. La déportation m’a appris ce que pouvait être le sens d’une vie humaine : combattre pour sauvegarder ce filet d’esprit que nous recevons en naissant et que nous rendons en mourant.
Toute une vie
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« L’Histoire est un orage de fer, qui hache les hommes comme du bois sec. Après, il faut recueillir les cendres, comprendre, raconter. Les hommes croient trop souvent qu’ils peuvent s’affranchir de ce devoir - oublier serait si facile ! -, mais le passé finit tôt ou tard par revenir à la surface. C’est un poids dans la conscience, un fantôme insaisissable, qui empêche de vivre : il étend, jour après jour, une ombre sur l’avenir. Chaque fois que j’ai dû rencontrer les enfants de mes camarades morts en terre lointaine, j’ai pu sentir leur désarroi. J’ai correspondu avec nombre d’entre eux. J’essaie de retrouver dans ma mémoire des traces de présence, des gestes, des attitudes, un regard. Mais je me sens impuissant et démuni. Les mots sont pauvres quand il faut combler l’absence. Lorsqu’un ami mourait à nos côtés, nous pensions que la vie s’arrêtait net, comme un moteur d’avion qui cale en plein vol ou une plante qu’on arrache de la terre. En fait, une cruche se brisait : des larmes et des parfums se répandaient sur le sol, dont je sais aujourd’hui qu’ils coulent longtemps encore à l’intérieur des enfants. »
« Je me souviens d’une nuit en pays thaï, après un parachutage. L’ennemi avait décroché au bout d’une journée de combat. Nous étions éreintés. Je n’avais pas dormi plus de quatre heures en trois jours. Je suis tombé dans un sommeil sans rêve ni réveil. Quand je suis revenu à moi, le matin s’était levé. Une légère brume tapissait le sol, à la hauteur du mauvais bat-flanc sur lequel j’avais dormi. Immobile, j’ai ouvert les yeux. Des enfants, à demi nus, se sont approchés de moi. Ils m’ont dévisagé, avec de grands yeux étonnés, qui ne cillaient pas en rencontrant les miens. Ils m’apportaient un bol de soupe. Derrière eux, un énorme buffle, sorti tout droit de la préhistoire, avançait lentement, dodelinant de la tête, dédaigneux, comme s’il inspectait son domaine personnel. La joie déferlait en moi, en ondes puissantes. Je ne pouvais pas la contrôler. J’avais l’impression de naître à nouveau. C’était une joie d’une force animale - et pourtant tellement humaine. Un nouveau jour se levait. J’avais failli ne jamais le connaître. On avait voulu me tuer. J’avais sans doute tué d’autres hommes. De l’autre côté de la montagne, des soldats pleuraient leurs camarades, tués par ma faute. Des vies, peut-être admirables, s’étaient arrêtées. Des familles étaient endeuillées pour toujours. L’horreur de la guerre était passée, à laquelle ni moi ni eux ne pouvions rien. La vie suivait son cours éternel, sans se soucier de nous. »
Les sentinelles du Soir
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02/11/2010
De l'origine et de la déviance idéologique du syndicalisme français
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Bénie soit La Crevette qui me remémore ce texte de Jean-François Revel que je connaissais déjà et que je reprends ici avec plaisir...
"On reconnaît ici la théorie selon laquelle seules les « luttes », les grèves, les occupations d’usines, voire les émeutes auraient permis le progrès social, qui n’aurait été obtenu que lorsqu’il était arraché aux propriétaires des moyens de production. Or il s’agit là d’une reconstruction de l’histoire par l’imagination marxiste. Des dizaines d’années avant l’apparition des premiers partis communistes et même des premiers théoriciens socialistes, ce sont les libéraux du dix-neuvième siècle qui ont posé, avant tout le monde, ce que l’on appelait alors la « question sociale » et qui y ont répondu en élaborant plusieurs des lois fondatrices du droit social moderne. C’est le libéral François Guizot, ministre du roi Louis-Philippe qui, en 1841, fit voter la première loi destinée à limiter le travail des enfants dans les usines. C’est Frédéric Bastiat, cet économiste de génie que l’on qualifierait aujourd’hui d’ultralibéral forcené ou effréné, c’est lui qui, en 1849, député à l’Assemblée législative intervint, le premier dans notre histoire, pour énoncer et demander que l’on reconnaisse le principe du droit de grève. C’est le libéral Émile Ollivier qui, en 1864, convainquit l’empereur Napoléon III d’abolir le délit de coalition (c'est-à-dire l’interdiction de faite aux ouvriers de se regrouper pour défendre leurs intérêts), ouvrant ainsi la voie au syndicalisme futur. C’est le libéral Pierre Waldeck-Rousseau qui, en 1884, au début de la Troisième République, fit voter la loi attribuant aux syndicats la personnalité civile. Est-il permis de souligner, tout en le rappelant, que les socialistes de l’époque, de par leur logique révolutionnaire (bien antérieure à l’apparition du moindre parti communiste) manifestaient une violente hostilité à l’égard de cette loi Waldeck-Rousseau ? Car, dissertait Jules Guesde, « sous couleur d’autoriser l’organisation professionnelle de notre classe ouvrière, la nouvelle loi n’a qu’un but : empêcher son organisation politique ». La suite, démentant ce perspicace pronostic, montrera, tout au contraire, que l’une devait favoriser l’autre. Ce sont les grands syndicats ouvriers qui servirent de socle et même de source de financement pendant longtemps au parti travailliste britannique, au parti démocrate américain, au parti socialiste allemand ainsi qu’aux divers partis socialistes réformistes de l’Europe scandinave. C’est aussi dans ces pays, en l’absence presque complète de tout aiguillon communiste, que surgirent et se perpétuèrent les syndicats ouvriers les plus puissants. C’est au contraire dans les pays, et notamment en France, où les partis communistes acquirent un poids politique important qu’ils affaiblirent le syndicalisme à force de l’idéologiser. On le sait, les adhérents syndicaux représentent en France un pourcentage infime de la population active. D’autre part, le syndicalisme français, quelle que soit l’idéologie de ses diverses centrales, en vint rapidement à ne plus défendre que des intérêts catégoriels, essentiellement ceux des agents de la fonction publique et des services publics, travailleurs déjà privilégiés par rapport aux salariés du secteur marchand. Il y a plusieurs décennies que les syndicats français ne remplissent plus les critères de la représentativité définis par la loi au début des années cinquante et en particulier le critère selon lequel un syndicat n’est légitime que s’il peut vivre des cotisations de ses adhérents. Les syndicats français, depuis belle lurette, ne subsistent que grâce aux subventions, directes ou indirectes, de l’Etat, c'est-à-dire grâce à de l’argent soustrait à des contribuables dont l’immense majorité n’est pas syndiquée. Le rôle d’aiguillon du progrès qu’auraient joué les partis communistes ne semblent pas démontrable. On peut même dire que dans bien des cas la présence dans le jeu politique d’un fort parti communiste a ralenti le progrès social au lieu de l’accélérer. Par exemple, à la fin des années cinquante et au début des années soixante, le PCF se mit en tête de défendre avec acharnement la théorie stupide de la « paupérisation absolue » de la classe ouvrière. Et cela au moment même où un décollage économique sans précédent dans l’histoire de France était en train, au contraire, de permettre à la classe ouvrière d’accéder à un niveau d’aisance auquel elle n’aurait même pas osé songer au moment du Front populaire, vingt ans auparavant. En fait, la seule paupérisation absolue de la classe ouvrière que le vingtième siècle nous ait donné l’occasion de contempler, s’est produite dans les pays communistes et seulement dans ces pays."
La grande parade, Jean-François Revel, p 51-52 éditions Plon-pocket , 2000
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12/10/2010
« Mon Rire est une Pensée »
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La Parole est à ma douce Irina...
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Les Belles Lettres ont fait paraître le 16 septembre dernier un volume de plus de 1800 pages, Essais, de Philippe Muray qui regroupe L’Empire du bien, Après l’histoire (tomes 1 et 2) et les quatre tomes des Exorcismes spirituels, le tout enrichi de trois précieux index (index des noms, index des œuvres et index hyperfestif).
Philippe Muray est un auteur que les Belles Lettres affectionnent tout particulièrement depuis 1990, date de parution de l’ouvrage La guerre contre les vandales.
Michel Desgranges, alors éditeur de Philippe Muray aux Belles Lettres, avait connu celui-ci en 1969 et tous deux devinrent rapidement amis.
Mais je laisse parler Michel Desgranges qui lui avait rendu un très bel hommage dans sa chronique du 10 mars 2006 :
« Lorsque je le connus, il avait déjà publié, chez Flammarion, à vingt ans, un premier roman, un roman d'adolescent qu'il expulsa de sa bibliographie et je l'en taquinais, lui disant que ce livre que je désignais sous le titre moqueur de "l'arrière de Suzon" existait malgré son déni, et qu'un jour quelque pensum de thésard l'écraserait de sémiologie. Dans les années soixante-dix, Philippe devint, un temps, sérieux comme le voulait l'époque, un sérieux qui le fit dériver dans la mouvance de Sollers et Tel quel; il publia Chant Plurielet Au coeur des Hachloums chez Gallimard, Jubila, au Seuil, que je n'ai jamais relus depuis qu'il me les offrit mais, que l'on gratte les scories de ce temps, et déjà se dévoile un écrivain majeur. Puis il y eut son Céline et, surtout, Le XIXe siècle à travers les âges, qui connut un véritable succès public ; le temps des errances et expérimentations était fini, et Muray était désormais seulement Muray.
Même si, adolescent, il envisagea d'être peintre, et renonça, il ne voulut jamais être qu'écrivain, non littérateur ou gendelettres – écrivain : un individu qui, chaque jour, reste enfermé chez lui durant un certain nombre d'heures pour exprimer par des mots appropriés ce qu'il a de meilleur à exprimer. Et qui, s'il parle des hommes et de ce qu'ils font, consacre aussi un certain nombre d'heures à s'informer sur cette activité humaine présente, et sur ce qu'elle fut jadis et naguère, et ce qu'il en fut dit. Cela s'appelle aussi un travail. Si ce travail a quelque qualité et quelque hauteur, il trouve des lecteurs, dont le nombre suffit pour encourager l'écrivain à le poursuivre. Mais non, sauf accident, à le faire vivre car l'écrivain, même aux goûts modestes, est un homme qui a besoin de nourriture, d'habits, de toit. Pour qui a de la fortune, ou un emploi qui lui laisse des loisirs, le souci ne se pose pas ; qui en est dépourvu se cherche alors une situation dans le domaine qu'il croit être le sien : la presse littéraire ou l'édition – il devient un professionnel des lettres, et consacre l'essentiel de son énergie à une stratégie d'entr'aide cauteleuse avec ses confrères du même trottoir : "j'écris un bon article sur ton livre et tu en feras écrire un ejusdem farinae sur le mien par un tel dont je sais qu'il te doit un service" ou "je publie avec une grosse avance ton roman (in petto : un roman de merde) et n'oublie pas que tu es juré d'un prix auquel je présente ma dernière œuvre" – rien de tout cela ne se dit à haute voix : cela va de soi. (Quoique... Un jour, Yves Berger, alors grand manitou littéraire de Grasset, m'invita à déjeuner pour me livrer cette confidence : "c'est désolant, Michel, mais nous ne pouvons plus publier que des auteurs qui peuvent nous rendre des services").
Philippe n'avait ni fortune ni emploi à loisirs rétribués et, même si son œuvre lui ouvrait déjà les portes du milieu (au sens d'Albert Simonin) intello-littéraire, sa simple honnêteté, et un élémentaire respect de soi, lui interdisaient d'être un atome, ou une étoile, d'un univers de compromissions constantes, de trahisons et de jalousies, de mensonges et de flatteries hypocrites... Ce qu'il décida fut digne : il fit le choix d'écrire discrètement plus de cent romans policiers populaires assez bêtas et plutôt rigolos (nous nous en amusions souvent) vendus à plusieurs dizaines de millions d'exemplaires (et je pense que tout Français a lu Philippe sans le savoir...) ; cela ne fut pas sans lui coûter de peine, cela lui permit d'être ce qu'il voulait être : un écrivain authentiquement libre. C'est sans hésiter que je révèle ainsi non pas tout, mais l'essentiel, du secret du discret Muray avare de détails, car pour moi qui sais combien il lui eût été, socialement, facile d'être l'une des vedettes médiatiques de la France des lettres, ce choix montre l'honneur de l'homme ; si lui n'en parlait pas, ce n'est pas par quelque honte, mais parce qu'il avait la conviction, fortement exprimée dans son œuvre, que tout individu a le droit fondamental de ne dire sur lui-même que ce qu'il estime pertinent de dire.
Ces dernières années, ce monde que Philippe exécrait finit par le reconnaître, pour les raisons mêmes et de la manière même qu'il a si finement disséquées : il devint de plus en plus régulièrement cité, commenté, exploité par ceux qu'il crucifiait, en partie parce que son talent s'imposait, surtout parce qu'il est dans la nature de ce misérable univers (le vide est un avaleur ...) de s'approprier un opposant – cela lui valut une sorte de reconnaissance qui ne le souilla pas ni ne le fléchit, et il ne se soucia guère que lui fut accolé le cliché de misanthrope réactionnaire. D'autant qu'il n'était ni l'un ni l'autre. Détester une société – la nôtre en l'occurrence – n'est pas exclure d'aimer les hommes ni d'en rencontrer ; Philippe refusait les pitreries et exhibitions médiatiques, mais il avait une vie sociale tout à fait normale — j'entends : dans la norme de tout être humain qu'il soit plombier ou universitaire — et pour de banales raisons d'affinités ou de circonstances, ses relations se trouvaient surtout dans les milieux dits littéraires. C'est à ce misanthrope qui savait fréquenter du monde sans en être prisonnier que je dois d'avoir connu Jean-Edern Hallier (et je vécus avec ce dernier une étonnante et longue comédie picaresque qu'il faudra bien que je conte un jour ), Milan Kundera (et ce fut l'aventure de L'atelier du Roman) et bien d'autres rencontres précieuses. (Sur les rapports de Philippe avec Hallier, cf. son texte sur L'idiot international dans Moderne contre moderne. Quant à réactionnaire... Admirateur inconditionnel de Balzac (à ce propos : il faudra bien voir que la série des Exorcismes spirituelssont la Comédie humaine de la fin et du début de deux millénaires), Philippe ne militait pourtant pas pour le trône et l'autel ; il ne militait d'ailleurs pour rien : il montrait ce qu'était le monde devenu, mais ne demandait pas le retour à un fantasmé ordre aboli ; je n'en dirai pas plus : toute son œuvre est là pour nier l'absurde étiquette.
Retour à la fin des années 80. Après Sollers, Philippe se laissa enjôler par un autre paon, celui-ci alliant miraculeusement l'absence de tout don pour l'écriture à une ignorance encyclopédique, Bernard-Henri Lévy. Et donc furent édités par la bouffonne maison Grasset deux livres de Philippe, Postérité, son premier grand roman (où ses biographes comprendront son refus d'avoir des enfants), et cet essai qui est une merveille d'intelligence, de style, et de compréhension du génie, La gloire de Rubens. Il reçut pour cela d'appréciables à-valoir, et comprit trop tard qu'ils signifiaient qu'on l'achetait, non qu'on voulût vendre ses œuvres. Ainsi sommes-nous faits : la sûreté de nos jugements sur l'humanité guide peu notre conduite avec les hommes que nous côtoyons, mais Philippe finit par admettre ce qu'il savait et, — sans éclats, trop bien élevé, je l'ai dit, pour les criailleries rancunières — il se sépara des pipole germanopratins, qui le haïssaient et le craignaient pour être l'écrivain qu'ils ne pouvaient être.
En 1991, je publiai son Empire du Bien où il ridiculisait la domination étouffante des cordicoles. Puis j'ai publié huit autres livres de Philippe, dont On ferme, son roman le plus puissant et le plus maîtrisé. Que fut, pour son éditeur, l'auteur ? Un auteur parfait. Jamais entre nous ne se tint une discussion sur ce qui pollue usuellement les relations auteur/éditeur , les questions d'argent — nous avions une fois conclu un contrat, identiquement renouvelé durant quatorze ans de titre en titre, et cela suffisait pour que le sujet fût clos ; jamais non plus il ne se plaignît, comme tant d'autres, que son nouveau livre ne fût pas en pile dans telle librairie, où ne fît pas le titre de Une des media ni ne téléphonait quotidiennement pour connaître ses ventes du jour ; il écrivait, me remettait un manuscrit typographiquement irréprochable, demandait qu'il fût édité sans fautes et sous la présentation qu'il avait conçue ; ses seuls reproches vinrent de l'étrange incapacité de nos fournisseurs à imprimer ses couvertures de la couleur exacte qu'il avait choisie et indiquée sur le nuancier Pentone — c'étaient des reproches justes.
À la fin du siècle dernier, je l'ai dit, il fut peu à peu intégré à la catégorie socio-culturelle des penseurs-qui-comptent, et son nom était mécaniquement cité dans des listes de bons ou de méchants salués ou conspués par l'intelligentsia, sans la moindre relation de sens avec ses écrits ; heureusement, il se trouva aussi des romanciers et des essayistes, de la génération suivant celle des incultes histrions soixante-huitards terrifiés par la concurrence du talent, qui surent le lire vraiment, comprendre que sa dénonciation de l'envie du pénal et des malfaisantes lubies d'homo festivus décrivent mieux notre société que tout opus de sociologue mondain, et qui, ni jaloux ni envieux, lui accordèrent sans crainte sa place – la première, pour la lucidité, le style, la verve. Il y eut pourtant un rejet. À la place d'un essai, dont nous avions décidé ensemble du thème, et qui devait être une charge contre une grotesque et éphémère fureur médiatique, Philippe me demanda de publier un recueil de poèmes, que lui-même appelait vers de mirliton, précédés d'une préface dans laquelle il règle férocement son compte à la poésie. Cette préface, pourtant substantielle en pages, en savoir intelligent et en densité critique, fut ignorée ; libraires et critiques virent seulement que des lignes n'atteignaient pas la marge – c'était donc de la poésie, qui ne se vend pas (certains commerçants nous retournèrent même le livre, refusant de l'exposer) et dont on ne parle pas (et les media n'en parlèrent pas). Le recueil est Minimum respect— et je remercie François Taillandier de lui avoir rendu justice dans son article sur Philippe ; je n'écrirai pas que c'est mon livre préféré (j'aime également toutes les pages et toutes les phrases de Philippe), même si j'ai pour lui la coutumière tendresse éprouvée pour tout être disgracié/négligé, je dirai seulement que sous cette forme parodique se trouve ce que Philippe a écrit de plus radicalement violent, et, peut-être, de plus réjouissant.
À la mi-février, Philippe m'envoya un disque ; il y récite – chante ? – sur une entraînante et adéquate musique d'Alexandre Josso, treize poèmes de Minimum respect ; il aimait ce projet, il l'a accompli avec sérieux, et en même temps une distance amusée, c'est donc un disque gai – mais en ce jour, à l'écouter, ce n'est pas de la gaieté que je ressens (et, "gaieté", c'est le nom de la rue parisienne où il écrivait...).
Philippe n'était ni un pamphlétaire ni un polémiste ; il était, dans le sens jadis appliqué à Diderot ou Voltaire, un philosophe, projetant la lumière du sens sur un monde d'imposture ; il avait choisi de le faire en provoquant le rire plutôt que l'ennui et de ce choix, qui n'obérait en rien la cohérence et la profondeur de sa pensée, est née une œuvre majeure et unique. Et ce contempteur de la société était un amoureux de la vie et des hommes. »
"Message bien reçu
Et bienvenu
Je ne suis pas déçu
D'être venu"
(Minimum respect)
Michel Desgranges
Je remercie quant à moi les Belles Lettres de m’avoir fait connaître Philippe Muray un peu avant tout le monde. Muray qui, dans les années 90 passait quasiment inaperçu, fait aujourd’hui la « une » des journaux, ironique quand on sait que certains journalistes ne le portaient pas vraiment dans leur cœur…
Sébastien Lapaque, dans Le Figaro littéraire :
« On s’étonne évidemment de ce triomphe posthume. Tour à tour et à jets continus, Philippe Muray s’est moqué des féministes, des homosexuels, des avant-gardes, des antiracistes, des jeunes, des antifascistes, de la techno, de Halloween, de la Coupe du monde de football, de l’an 2000 et de tout ce qui pouvait se dire subversif, dérangeant, iconoclaste ou provocateur. Dans la guimauve où nous nous dépêtrons, ce mauvais esprit est un peu « segmentant ». De son vivant, l’écrivain a d’ailleurs souvent eu affaire aux agents de la circulation idéologique. Depuis l’époque glorieuse de L’Idiot international jusqu’à la campagne de Daniel Lindenberg contre les « nouveaux révolutionnaires », il a régulièrement été victime de la loi des suspects. Maintenant qu’il est mort, ses ennemis ont rangé leur fusil, persuadés que le fait de lui survivre leur donnait raison.
Lisez, diffusez l’œuvre de Philippe Muray. »
Merci également à Fabrice Luchini qui lit Muray sans relâche au Théatre de l’Atelier depuis mai 2010 et qui diffuse avec talent la verve et le style de celui qui disait : « Mon rire est une pensée. »
Essais de Philippe Muray figure dans les 10 meilleures ventes d’essais en France.
Chaque soir au théâtre de l’Atelier, se vend une trentaine d’exemplaires des Essais.
Et pour finir, une émouvante anecdote : Anne Sefrioui (la compagne de Philippe Muray) a retrouvé sur la tombe de son compagnon un billet de spectacle qui avait été déposé sous une pierre. Muray fait donc des adeptes et même des apôtres.
« Lisez, diffusez l’œuvre de Philippe Muray ».
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02/09/2010
Free United States Of America
=--=Publié dans la Catégorie "PARENTHÈSE"=--=
Pendant que la rentrée sociale s'annonce déjà difficile, ce 2 septembre, pendant que l'islamisation rampante de ce pays nous conduit vers des soubresauts que nos bobos bienveillants se refusent à considérer, et bien entendu, pendant que tout le monde crache sur les USA, ce Grand Satan qui n'est qu'un lieu de perdition consumériste, d'écrasement du faible par le fort (à croire que ni en France ni en Arabie Saoudite le faible ne se fait écraser par aucun puissant... puisque, comme vous le savez, la Justice Divine règne chez nous comme chez les Saoud et que seuls les américains, ces salauds, sont des brutes épaisses et égoïstes), aux USA justement, lentement mais sûrement, s'organise la seule résistance qui vaille et qui est celle du bon sens, de la volonté saine et du conservatisme, vous savez cette notion face à laquelle nos chers déconstructionnistes Gôchistes ne savent sortir que des points godwin.
Comme j'ai repris le travail et que j'ai eu une semaine difficile, je viens juste de découvrir ce fabuleux texte sur le site de Nicomaque, l'époux de LA Crevette. L'ami XP l'a repris sur ILYS et je me suis dit, y'a pas de raison que je ne le reprenne pas non plus ne serait-ce que pour que le texte tourne sur la toile, que la particule circule et que quelques stupides a priori qui ont la peau dure et subsistent avec une rare détermination soient secoués dans leurs stupides fondations.
L'époux de LA Crevette est professeur de Philosophie et voici ce qu'il a à nous dire au retour de sa dernière excursion américaine. Au terme de la lecture de ce texte on a envie de dire à l'anti-américain primaire de base, fut-il Gôchiste Lambda ou souverainiste poussiéreux : "Non mais tu t'es vu ?" Un peu comme notre bon Seigneur Jésus qui conseillait à chacun de s'occuper de la poutre qu'il avait dans l'oeil avant que de rouspéter à propos de la brindille qu'il y avait dans l'oeil du voisin.
Je vous conseille une lecture complète et non pas en diagonale...
Be seeing you...
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Du libre marché en Amérique
Echanges entre Daniel Rabourdin* et Damien Theillier*.
Birmingham, Alabama, juillet 2010
* Daniel Rabourdin a fait des études de philosophie à Paris puis des études de journalisme à San Francisco avant de devenir producteur pour la chaîne de télévision catholique internationale EWTN. Il vit en Alabama depuis 15 ans.
* Damien Theillier est professeur de philosophie à Paris et voyage régulièrement aux Etats-Unis.
Tous deux s’intéressent aux transformations de la société américaine.
Sommaire
1. La catastrophe sociale d'un siècle d'étatisme américain.
2. « Do it yourself »
3. Un libéralisme matérialiste et mercantile ?
4. Une société violente ?
5. Les caractéristiques de l’American Way of Life
6. Se libérer du carcan de l’État social
7. Les cobayes de l’Affirmative Action
8. Le homeschooling : un refuge de civilisation
9. Le retour de la Culture avec un grand "C"
1° La catastrophe sociale d'un siècle d'étatisme américain.
Daniel Rabourdin : Depuis 1980, l’Amérique s’est réveillée d’un siècle d’étatisme continu. Depuis 30 ans un retour de balancier s'opère. Pour la première fois quelque chose de décisif s’est passé en Occident : on a fait reculer l'État. Il faut dire que les américains sont allés bien avant nous et bien plus loin que nous dans l'expérimentation des thèses socialistes et soixante-huitardes. Depuis 30 ans, on a sonné la fin de la récréation c’est-à-dire la fin des immunités politiciennes, la fin de l'immunité morale des intellectuels, la fin de l'immunité financière des budgets publics, l'exigence d'efficacité des services publics, la remise à l'économie libre de nombreux secteurs. Dans cette progressive remise sur pieds, l'establishment a été profondément affecté. Les hauts fonctionnaires, les journalistes, les enseignants, les producteurs et les politiciens, comme tout le monde, ont du répondre de leurs actes.
Damien Theillier : Dans les années 60, la gauche entendait amener le paradis sur terre en prenant l'argent des uns pour le donner aux autres. Elle a en fait dégoûté les Américains sur trois points : 1° ils en ont eu assez d'être taxés, 2° ils ont rejeté les orientations que les fonctionnaires avaient décidées sans eux, 3° ils en ont eu assez de voir l'inefficacité des projets entrepris avec leur argent. La prise de conscience a commencé avec la faillite partielle de la ville de New York en 1975 qui a eu l’effet d’une bombe. Par suite, la victoire de la « Proposition 13 » en 1978, adoptée par référendum en Californie, a mis fin à l'augmentation des impôts par le gouvernement sans autorisation populaire. C’est le début de la « révolution conservatrice ».
D. R. : A mesure que les observations des historiens et sociologues du XXème siècle prennent forme, nous savons désormais, de manière empirique, qu’il existe une corrélation entre le « Tout-État » et la misère humaine. Alors qu'en 1960 la majeure partie de l'assistance publique n'existait pas, seulement 2% des enfants blancs et 22% des enfants noirs naissaient hors mariage. En 1991, après les millions de dollars consacrés par les gouvernements, les chiffres des enfants sans foyer unis ont enflé pour atteindre dans chaque communauté 22% et 68%. D'un côté des interventions de l'État, sans cesse en augmentation, de l'autre des maux sociaux en hausse. Accroissement des rouages sociaux étatiques, effacement des réflexes sociaux naturels (parents, amis, famille). La conclusion des sociologues est claire : plus l'État s'insinue dans la vie des gens, plus les mécanismes naturels se grippent et plus leurs difficultés s’aggravent.
D.T. : Pendant toutes ces années, les Américains ont déversé 300 milliards de dollars par an dans l'aide sociale de l'État, sans aucun résultat probant. Comme la sagesse populaire le pressentait, à mesure que les punitions se sont réduites, les crimes se sont accrus. C'est à peu près la même logique qui régit le déclin des connaissances à l’école : plus l'État s'y investi, plus les résultats chutent. Il y a désormais 90 millions d'illettrés aux États-Unis dont la plupart sont pourtant passés par l'école. Mais il sont passés par l’école publique, une école « sympa » mise en place par la gauche dans les années 60 : notes généreuses, égalitarisme des résultats, méthodes globales, mathématiques dites modernes.
2° « Do it yourself »
D. R. : La rébellion est venue d'Américains qui ont voulu remplacer ce « Tout-État » par un « plus de citoyens ». C’est un nouvel état d’esprit qui s’est diffusé. Dans l'aide aux plus démunis, pour prendre un exemple, ces hommes et ces femmes ont voulu enlever le fonctionnaire qui faisait du social, pour y remettre l'ami ou le grand-père qui sont le social. Dans les secteurs où le gouvernement centralisé avait tout normalisé, des Américains se sont aperçus qu’ils pouvaient faire bien mieux, notamment dans les domaines de l'emploi, de l'éducation et de l'aide aux pauvres. Une nouvelle évidence politique a pu se dégager : le gouvernement doit céder de son pouvoir. De plus en plus d'initiatives sociales et politiques ont été prises par des associations de familles, des associations d'entreprises, des syndicats spontanés ou des églises. Ce sont des institutions d'autorité naturelle, des institutions plus proches de l'homme, celles qui sont les plus compétentes à leur niveau.
D. T. : Le revirement de civilisation en Amérique a été surtout visible dans un ras le bol vis à vis de ce « Tout-État ». C’est encore ce ras le bol qui s’exprime aujourd’hui avec le Tea Party, ce mouvement spontané de révolte contre la hausse généralisée des impôts ou la sécurité sociale obligatoire décidée par Obama. Aux Etats-Unis il existe une culture des lobbies, ces groupes de pression par lesquels les citoyens, pour se faire respecter, font entendre constamment et bruyamment leur voix. Un mouvement comme le Tea Party, permet au citoyen de retrouver une plus grande autonomie par rapport à l’establishment. Les grands partis s'en mordent les doigts. Ils aiment « gérer » les masses. C’est pourquoi ce mouvement est systématiquement accusé de populisme, voire de racisme par les partis au pouvoir et par les médias, en France, comme en Amérique d’ailleurs.
D. R. : Les gens n'attendent plus qu'on décide pour eux de ce qu'ils doivent apprendre, de l'information qu'ils doivent recevoir et des films qu'ils doivent aimer. Après la pensée unique, ils ont élaboré une information alternative. EWTN en 1982, puis Fox News en 1996, font partie de ces nouveaux médias qui ont révolutionné le paysage culturel et politique. Après la violence scolaire, ils ont mis sur pied une école à la maison. Désormais, des parents veulent savoir « comment » faire la classe à leurs enfants, des citoyens veulent savoir « comment » faire avancer un projet de loi, des adolescents veulent savoir « comment » être émotionnellement équilibrés. La même tendance à la personnalisation se retrouve dans l'industrie du livre. Les rayons appelés « self improvement » (« s'aider soi-même ») prolifèrent. Chaque semaine en Amérique, des milliers de livres du genre sont vendus.
3° Un libéralisme matérialiste et mercantile ?
D.T. : En Europe, on désigne souvent l'économie libérale comme la cause de tout mal. Le dollar engendre tous les vices. D'innombrables théories sont mises au point pour détourner les Français de ce capitalisme qualifié de « matérialiste », « hédoniste » et « mercantile ». L'intellectuel Européen, qu’il soit conservateur ou progressiste, n’est pas seulement irrité par l’ « american way of life », il la rejette en bloc. Et pourtant, nos ancêtres ont fait eux aussi du commerce. C'est peut-être même lorsque leur commerce marchait le mieux que notre culture était la plus brillante.
D. R. : Aujourd’hui en France, on va jusqu'à diaboliser les professionnels indépendants : ces docteurs, ces pharmaciens, ces cordonniers même, ou ces boulangers. Trop indépendants, trop passionnés par leurs affaires, trop heureux peut-être. On décide donc de les taxer. Pas trop cependant pour qu'ils continuent à aimer leur métier et à verser les impôts qui entretiennent le reste de la société. Les travailleurs « indépendants » et les entreprises sont les vaches à lait méprisées de nos sociétés.
D.T. : Parce que le libre marché fournit des richesses, il permet aussi à la bonté de s'exprimer à travers les œuvres de charité. Parce que le libre marché pousse les individus à se prendre en main, il permet un grand courage de vie et une grande religiosité face au destin.
4° Une société violente ?
D. R. : En France la violence du Tout-État est une forme d’oppression pour les plus modestes. Il y a la police de la pensée : la Halde. Il y a la police du travail : l’Urssaf. Le petit commerçant, n’a pas le droit d’embaucher ou de licencier comme il veut et qui il veut. Il y a la violence syndicale, il y a la violence fiscale, celle qui spolie les riches et qui les désigne à la vindicte publique (pensez à ce qui est arrivé à Madame Bettencourt, première fortune de France, au mois de juillet 2010). Simplement cette oppression est plus ou moins masquée par le fait que la plupart des français aiment ce carcan du « Tout-État » et ne se rendent pas compte que c’est un carcan. Ils y sont habitués, comme un troupeau de moutons suit son berger.
D. T. : Le libre marché est un système social qui encourage d’abord ceux qui vivent vertueusement à continuer à vivre de la sorte. Dans ce système ils auront de fortes chances d'être récompensés. Mais dans ce système, le crime y est aussi fortement découragé par la punition, y compris par la peine de mort. Certes, le taux d’emprisonnement est très élevé aux USA. Huit fois plus élevé qu’en France. Beaucoup dénoncent la cruauté de ce régime, notamment pour les plus pauvres. Mais il faut bien souligner que le crime en Amérique recule depuis les années 90, c’est-à-dire depuis que le laxisme pénal des années 60-70 a pris fin. Il y a un mythe qui est soigneusement entretenu par la gauche autour de cette question de la violence aux USA. La grande majorité des violences commises par armes à feu concerne les règlements de compte entre gangs rivaux et ce sont les pauvres, les familles noires elles-mêmes, qui sont les premières victimes de la criminalité.
D. R. : En Amérique dans la plupart des villes, les fenêtres n’ont pas de barreaux, les portes ne sont pas blindées. Les assureurs ne l’exigent pas, comme en France. Pourquoi ? D’abord parce que les voleurs et les criminels sont en prison aux USA et qu’ils paient le prix pour leurs fautes.
D.T. : Alors qu’en France, avec le jeu des libérations anticipées, des programmes de réinsertion et l’indulgence des juges, il y a peu de chance de se retrouver en prison. Quand elles ne sont pas prononcées avec sursis, les peines sont divisées par deux. Le plus souvent elles ne sont pas exécutées. Résultat ? Tout le monde a peur et se barricade. Les maisons deviennent des prisons. On sait que les voleurs et les criminels sont en liberté dans la nature.
5° Les caractéristiques de l’American Way of Life
D. R. : Il y a dans ce milieu américain, si empreint de liberté, des attributs que l'homme juste peut relever : la courtoisie dans le service, une propension au contact humain et à la vie, une joie partagée et un bonheur sans complexe. Le dynamisme, le sourire et l’entrain des américains contrastent avec l’ennui, la grisaille et le « je-m'enfoutisme » de beaucoup de Français. Il y a aussi l'inventivité continuelle des hommes et des femmes de cette société. Pour celui qui n'y est pas accoutumé, c'est même une anomalie. Comment se fait-il qu'avec si peu de culture (d'après ce qu'on dit !), la population de ce pays fournit au monde tant de nouveaux produits et de nouvelles techniques mais aussi tant de nouvelles vertus ?
D.T. : C'est aussi un état d'esprit qui n'a rien à voir avec le mode de vie étatisé des Français. En Amérique, les hommes et les femmes ont l'initiative de leur vie. Ils sont libres de mener leur vie comme ils l'entendent, dans la mesure où ils ne commettent pas de crimes. Là-bas, il y a beaucoup moins d’obstacles à l’action individuelle que partout ailleurs. Il y a des balises, des zones rouges certes, mais pas de rail pour dire comment on doit faire les choses. Chacun peut faire son chemin en sachant qu’il doit rendre des comptes s’il franchit la zone rouge du respect d’autrui.
D. R. : Le libre marché n’est pas un système théorique, ni une idéologie, c’est la vie. Et la vie est imprévisible mais c’est ce qui fait qu’elle est belle. Vouloir tout planifier à l’avance, c’est tuer le mystère, la surprise. Les sociétés qui laissent s’épanouir cette vie, qui laissent l’intelligence développer sa créativité, sont des sociétés qui avancent. Le progrès vient de ces sociétés. Si une société veut planifier l’innovation elle ne réussit qu’à la stériliser. Planifier l’innovation est une contradiction. L’innovation c’est ce qui est imprévisible, ce qui surgit de la recherche, de l’observation, des besoins. Quel fonctionnaire aurait été capable d’inventer l’Internet ?
6° Se libérer du carcan de l’État social
D. T. : L’État fournit un cadre juridique qui permet d’arbitrer les conflits. Mais il ne doit pas décider de la taille des prises de courant. L’État qui prétend faire le bonheur des gens à leur place avec leur argent, l'État qui prétend éduquer les enfants à la place des parents, qui prétend connaître quels légumes on doit manger et quels films on doit voir est un carcan dont il faut se libérer.
D. R. : L’Etat social est censé protéger les gens mais il les emprisonne en anéantissant toute forme de responsabilité et d’initiative individuelle. On ne se sent pas concerné par les besoins d'autrui. On s'attend à ce que l'État s'occupe des sans-emploi, à ce qu'il loge nos grands-parents et offre l'argent pour payer les cartables de la rentrée. On ne le fait plus de soi-même. Un vrai retour à nos responsabilités passe par la possibilité de reprendre à l'État l'initiative dans nombre d'activités humaines. Et cela passe nécessairement par la possibilité des citoyens de placer leur argent dans les œuvres qu'ils veulent. C'est la solution, non seulement en matière de prévention du crime mais aussi en matière d'éducation, de politique des naissances et de chômage. Dans tous ces domaines, la situation demande que l'État recule et que l'homme avance.
D.T. : Laisser plus de liberté aux gens, c’est d’abord leur laisser une plus grande partie du fruit de leur travail et réduire ainsi les taxes énormes qui amputent leurs salaires. Mais réduire les impôts, c'est nécessairement aussi réduire les activités du gouvernement. Car si l'on veut réduire ses rentrées d'argent, il faut réduire ses sorties, ses dépenses. Cela veut dire réduire les programmes gouvernementaux, laisser à la nation réelle l'occasion de reprendre l'initiative qui lui avait été confisquée.
D. R : L'énergie d'une nation peut être absorbée par l'État... ou par la population. Si elle reste dans la population, elle est en général plus efficace, mieux répartie et plus productive. Une fois l'État ramené à ses fonctions de base, une fois débouté des autres secteurs de la vie, il devient possible de redonner aux mécanismes naturels de solidarité toute leur place. La question n'est donc plus de savoir comment l'État peut remplir ses tâches mais plutôt si ces tâches doivent bien être remplies par lui.
7° Les cobayes de l’Affirmative Action
D. T. : Le discours dominant de « l'industrie sociale » pendant un siècle a été premièrement que le pauvre était une victime et deuxièmement que celui qui devait le secourir était l'État. Premiers bénéficiaires, de la politique sociale étatique, les noirs en ont été aussi les premières victimes. En Amérique les noirs sont parmi les plus pauvres mais paradoxalement beaucoup de leurs intellectuels sont les plus ardents accusateurs de ce Tout-État. C’est le cas par exemple de Thomas Sowell. Selon Sowell, après avoir souffert de l'esclavage, les noirs ont été, en Amérique, les principaux cobayes des expérimentations sociologiques du XXème siècle : emplois assurés, santé surveillée, hébergement bon marché, intelligences prises en charge par l'école publique et les programmes sociaux pour jeunesse à risque. Aujourd'hui, les noirs réalisent que cette pitance bureaucratique est peut-être ce qui leur a fait le plus de mal : 70% des prisonniers en Amérique sont noirs, 68% des enfants naissant hors du mariage le sont aussi. (Voir aussi ici)
D. R. : Veut-on tuer un peuple ? Tuons son âme ! Pour cela épargnons-lui la peine de mettre en œuvre ses forces intérieures (dans le labeur, dans la création d'entreprises, dans la responsabilité parentale, dans la solidarité). Épargnons-lui, en somme, la peine de se prendre en charge, donnons-lui gratuitement ce dont il a besoin : logement ou allocations. Bientôt nous aurons éteint ce qu'il y a de plus vital en lui, non pas le corps mais la flamme intérieure. On a vu cela dans les pays de l'Est, on retrouve ce même regard éteint chez les noirs des ghettos, dans les réserves indiennes d'Amérique et, plus près de nous, chez les chômeurs à long terme. La vraie prise en charge des plus défavorisés passe nécessairement par l'effacement de l'État car l'État déséquilibre l'écologie de l'entraide. Il n'a aucune exigence à l'égard des bénéficiaires, il coûte plus cher et absorbe les revenus des citoyens qui auraient autrement donné de leur attention, une attention plus efficace.
8° Le homeschooling : un refuge de civilisation
D. T : Initialement d'origine protestante et religieuse, le mouvement du homeschooling gagne des familles de tous les milieux, y compris parmi les immigrants. Aujourd’hui on estime à deux millions le nombre d’enfants scolarisés à la maison. Un sondage réalisé par le Département de l'Éducation en Floride a montré que les 3/4 des parents enseignants à la maison le font à cause des niveaux scolaires désastreux de l’école publique et d'une ambiance malsaine. C’est aussi une alternative pratique au coût parfois prohibitif des écoles privées.
D. R. : Dans une société où les structures étatiques ne défendent plus de valeurs culturelles traditionnelles, les familles font un effort personnel pour retrouver leurs racines. Une fois qu'elles ont repris le contact, elles ne veulent plus voir leurs enfants retourner au « grand vide ». Par la force des choses, elles sont incitées à éduquer leurs enfants chez elles. Cela semble un mouvement de fond, inévitable pour les années qui viennent. Après tout, là encore, pourquoi donc serait-ce au gouvernement de décider ce que doivent savoir les enfants ?
D. T. : Les écoles à la maison protègent les enfants de professeurs qui œuvrent délibérément contre les valeurs de leurs parents. Face aux éducateurs sociaux, face aux instituteurs, parfois même face aux clercs, les écoles à la maison remettent à jour une priorité : les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Cette mise à l’écart des enfants au sein du foyer est indispensable pour leur permettre de cultiver leur propre identité. Naturellement cet isolement ne doit durer qu’un temps.
D. R. : Le père Joseph Fessio, théologien de réputation mondiale, a jeté sur le sujet un éclairage historique : « L'école à la maison est un signe d'espoir. En Europe, au temps des invasions, les moines abritèrent la civilisation pour un temps. Lorsque le calme fut revenu, la société médiévale put s'épanouir, en ressortant des bibliothèques de ces moines toutes les connaissances préservées. Pour moi, à l'aube du troisième millénaire, ces milliers d'écoles à la maison sont les monastères d'un monde troublé. Elles vont abriter les prochaines générations et des êtres formés ressortiront quand le calme sera revenu. Les maisons-écoles sont les graines de tout possible renouveau ».
9° Le retour de la Culture avec un grand "C"
D. R. : Ces dernières années aux Etats-Unis, ont vu se dérouler trois grandes révolutions culturelles : 1° le homeshooling qui a permis de briser le monopole de la caste enseignante,
2° Les talk-show hosts (Rush Limbaug, Glenn Beck) qui ont bousculé l'hégémonie des journaux de 20 heures, avec leur style direct, sans langue de bois, 3° l'Internet, enfin, qui a permis aux individus d'échanger l'information sans passer par les agences de presse. L'information numérique a notamment permis à la nation réelle (syndicats professionnels, entreprises, associations de familles ou œuvres de charité) de se passer de la nation artificielle (médias, partis idéologisés, entreprises publiques).
Ces trois éléments qui vont puiser dans la population, et non dans l'establishment, la matière des idées nouvelles, ont réussi à provoquer un appel d'air favorable à une nouvelle culture, pluraliste et populaire. La population étant plus variée que les quelques centaines de créateurs "accrédités", une réelle diversité a pu en effet émerger aux Etats-Unis.
D. T. : En regardant ce qui s’est passé aux Etats-Unis et ce qui continue de se passer avec le Tea Party, je me dis qu’il reste heureusement en France quelques raisons d’espérer. Jusqu’à aujourd’hui, l’opinion publique était façonnée par la classe médiatique et culturelle, opposée aux valeurs de la société civile. Aujourd'hui, les règles du jeu commencent à changer. Les élites au pouvoir sont discréditées, les intellectuels ont perdu leurs privilèges, la presse est en faillite. Le moment est venu pour la société civile de s'engager sans complexe dans la formation de l’opinion publique pour influencer le pouvoir. Elle peut le faire à travers des référendums spontanés, des pétitions, des boycotts, des blogs, des manifestations actives, des créations artistiques, des think tanks…
D. R. : Un retour de la population dans la maîtrise de l'économique et du social, ainsi qu’un renvoi de l'Etat à son rôle d'arbitre, constituent en effet le seul terrain favorable à l’émergence d’une culture populaire et d’une vraie liberté.
D. T. : On retrouve ainsi un principe évident : plus le gouvernement laisse les citoyens se gouverner eux-mêmes, mieux il gouverne. C’était l’idée de Jefferson : « Gouverner mieux c’est gouverner moins ». Et le pouvoir ne peut le faire qu’en rendant au peuple l'initiative de la vie économique, de la vie culturelle et de la vie sociale. Il le fait quand il se cantonne à ses vraies responsabilités : celles de l'arbitrage à l'intérieur du territoire et de la paix à l'extérieur.
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"Southern Pacific"
Down the mountainside
To the coastline
Past the angry tide
The mighty diesel whines.
And the tunnel comes
And the tunnel goes
Round another bend
The giant drivers roll.
I rode the Highball
I fired the Daylight
When I turned sixty-five
I couldn't see right.
It was Mr. Jones,
We've got to let you go
It's company policy
You've got a pension though.
Roll on, Southern Pacific
On your silver rails
On your silver rails
Roll on, Southern Pacific
On your silver rails
Through the moonlight.
I put in my time
I put in my time
Now I'm left to roll
Down the long decline.
I ain't no brake man
Ain't no conductor
But I would be though
If I was younger.
Roll on, Southern Pacific
On your silver rails
On your silver rails
Roll on, Southern Pacific
Roll on, on your silver rails.
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17/08/2010
L'héritage de l'Islam... par Maurice G. Dantec
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
Tiré du troisième pavé du Journal de Maurice G. Dantec, Le Théâtre des Opérations, 2002-2006, American Black Box, le long texte que je vous donne ici est à lire de bout en bout. Les notes données en fin de texte sont celles-là mêmes que Dantec attribue au site internet "Réfractaires" qui malheureusement n'existe plus, et la note n°: 2 renvoie à un lien internet qui ne fonctionne plus non plus. Pour le reste, ce sont des références tirées de livres. Je vous donne néanmoins ces notes telles quelles. Afin de permettre au lecteur d'approfondir par lui-même ce qu'il lit, j'ai mis des liens sur les noms propres essentiels ou sur les notions importantes chaque fois que cela m'a été possible. C'est moi qui ai souligné certaines parties du texte quand j'ai estimé qu'il était bon d'appuyer ce qui y était dit. Bonne lecture.
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"Retrouvé sur le site Réfractaires :
L’islam a permis de développer une civilisation riche, basée sur la spiritualité.
Les Arabes et les musulmans sont apparus sur la scène du monde en 630 P.C. Quand les armées de Muhammad ont commencé leur conquête du Moyen-Orient il s’agissait d’une conquête militaire, utilisant la force, et non d’une entreprise de missionnaires. Elle avait été autorisée par une déclaration de Jihad contre les « Infidèles » que les musulmans pouvaient convertir et assimiler de force.
Très peu de communautés indigènes du Moyen-Orient ont survécu à ces invasions, comme cela a été le cas des Assyriens [1], des Juifs, des Arméniens et des Coptes d’Égypte.
Par la conquête du Moyen-Orient, les Arabes ont placé ces communautés sous un système de dhimmitude (voir Islam and Dhimmitude, de Bat Ye’Or), où les communautés ont été considérées en tant que minorités religieuses (chrétiens juifs et zoroastriens). Ces communautés ont dû payer un impôt (appelé un Jizzya en arabe) qui était, en fait, une pénalité pour être non musulman, et qui se montait, en général, à 80% en période de tolérance et jusqu’à 150% en période d’oppression. Cet impôt avait été conçu pour forcer ces communautés à se convertir à l’islam.
Les architectes arabes ont conçu des bâtiments défiant les lois de la pesanteur.
Les lignes de l’architecture arabe comprennent de nombreux dômes et voûtes.
Les progrès scientifiques nécessaires à ces réalisations sont fréquemment attribués aux Arabes. Pourtant, cette percée architecturale, fondamentale pour employer une forme parabolique au lieu d’une forme sphérique dans ces structures, a été faite par les Assyriens, plus de mille trois cents ans plus tôt, comme démontré par les sources archéologiques.
Un exemple frappant : Sainte-Sophie de Constantinople a été inaugurée en 537. Elle se caractérise par une gigantesque coupole haute de 56 mètres et de 32 mètres de diamètre. Elle fut transformée en mosquée en 1453. Elle représentait un défi architectural pour les musulmans. Plusieurs architectes turcs furent exécutés pour n’avoir pas réussi à égaler Sainte-Sophie.
Le plus grand architecte ottoman, Koca Mimar Sinan (1491-1588), un janissaire (chrétien d’origine, converti de force à l’islam pour devenir soldat d’élite), écrit dans ses mémoires : « Les architectes de quelque importance en pays chrétiens se prétendent bien supérieurs aux musulmans, parce que ceux-ci n’ont jamais rien réalisé qui puisse se comparer à la coupole de Sainte-Sophie. Grâce à l’aide tu Tout-Puissant et à la faveur du Sultan, j’ai néanmoins réussi à bâtir, pour la mosquée du sultan Selim, une coupole dépassant celle de Sainte-Sophie de quatre aunes pour le diamètre et de six pour la hauteur. » En réalité, il se trompait (volontairement ?) dans ses dimensions. De plus, il avait atteint ce résultat en insérant d’inesthétiques barres de fer horizontales dans le creux des arcades des demi-coupoles latérales, afin de neutraliser les poussées latérales provoquées par la grande coupole. La mosquée de Selim à Edirne, jamais surpassée ultérieurement par un architecte musulman, fut terminée en 1575, plus d’un millénaire après Sainte-Sophie ! Il fallut deux fois plus de temps pour la construire que pour terminer son modèle.
Sainte Sophie, Constantinople
Les mathématiciens arabes ont créé l’algèbre et les algorithmes qui ont permis l’avènement de l’informatique.
Les bases fondamentales des mathématiques modernes ont été établies, non pas des centaines mais des milliers d’années avant l’islam, par les Assyriens et les Babyloniens qui connaissaient déjà le concept de zéro, le théorème de Pythagore, ainsi que de nombreux autres développements.
D’autre part, la mathématique indienne se manifeste brillamment dès le ve siècle avec Aryabhata, premier grand mathématicien et astronome indien, et apparaît indépendante de celle des Grecs. Un autre mathématicien indien, Brahmagupta, est sans doute le premier, dans des calculs commerciaux, à user des nombres négatifs pour signifier les pertes et les profits et à les utiliser en algèbre en énonçant la règle des signes [2]. Il emploie dans ses calculs les chiffres décimaux (graphisme très proche de nos chiffres actuels dits « arabes ») et principalement le zéro dont l’apparition en Inde, tout particulièrement dans l’œuvre de Brahmagupta, est un pas de géant en algèbre [3].
L’Inde subira les invasions musulmanes et les Arabes adopteront les travaux des mathématiciens indiens. C’est ainsi que ces importants travaux indiens en mathématique, que les musulmans se sont appropriés [4], seront transmis par les Arabes (Maures) lors de leurs invasions en Andalousie (sud de l’Espagne). Les chiffres de notre système décimal (1 à 9) dits « arabes » ne furent introduits en Europe que vers l’an 1000.
Les savants arabes ont étudié le corps humain et ont découvert de nouveaux traitements.
Une écrasante majorité de ces médecins (99%) étaient des Assyriens. Aux ive, ve et vie siècles, les Assyriens ont commencé une traduction systématique des connaissances grecques en assyrien. D’abord, ils se sont concentrés sur les travaux religieux, mais ensuite la philosophie et la médecine. Socrate, Platon, Aristote, Galien et beaucoup d’autres ont été traduits en assyrien, et de l’assyrien en arabe. Ce sont ces traductions arabes que les Maures ont apportées avec eux en Espagne, que les Espagnols ont traduites en latin et ont diffusé dans l’ensemble de l’Europe, induisant la période de la Renaissance.
Dès le vie siècle, les Assyriens avaient commencé à exporter de nouveau à Byzance leurs propres travaux sur la science, la philosophie et la médecine. Dans le domaine de la médecine, la famille assyrienne de Bakhteesho a produit neuf générations de médecins et a fondé la grande école médicale de Gundeshapur (Iran). En outre, dans le secteur de la médecine, le manuel de l’Assyrien Hunayn-Ibn-Ishaq sur l’ophtalmologie, écrit en 950, est resté le manuel de référence sur le sujet jusqu’en 1800.
Dans le domaine de la philosophie, le travail assyrien du philosophe Edessa a développé une théorie de physique qui a rivalisé avec la théorie d’Aristote et qui a cherché à remplacer la matière par des forces (mécanique quantique).
Un des plus grands accomplissements assyriens du ive siècle a été la fondation de la première université au monde, l’école de Nisibis, qui a eu trois départements : théologie, philosophie et médecine. Elle est devenue un aimant et un centre du développement intellectuel dans le Moyen-Orient. Les statuts de l’école de Nisibis, qui ont été préservés, sont devenus le modèle sur lequel la première université italienne a été établie [5]. Quand les Arabes et l’islam ont envahi le Moyen-Orient en 630, ils ont rencontré six cents ans de civilisation chrétienne assyrienne, avec un héritage riche, une culture fortement développée, et des établissements d’études avancés. C’est cette civilisation qui est devenue la base de la civilisation arabe.
Les astronomes arabes ont étudié le ciel, nommé les étoiles, et préparé le terrain à l’exploration de l’espace.
En fait, ces astronomes n’étaient pas des Arabes mais des Chaldéens et des Babyloniens (sud de l’Irak actuel) qui, pendant des millénaires, ont été des savants réputés. Ces peuples ont été arabisés et islamisés de force, tellement rapidement que, dès le viiie siècle, ils avaient disparu complètement.
Autre exemple :
« En l’année 156 (722 apr. J.-C.) le calife Al-Mânsûr reçut en audience un homme originaire de l’Inde, qui connaissait à fond le calcul appelé "Sindhind", relatif aux mouvements des étoiles. Cet homme avait, de plus, avec lui, dans un livre comprenant douze chapitres, des équations astronomiques faites au moyen de sinus droits calculés à un quart de degré près, des procédés divers pour prédire l’avenir d’après les éclipses solaires et lunaires et les ascensions des signes zodiacaux, etc. Il disait que c’était là le résumé des sinus astronomiques attribués à un monarque indou appelé Kabagar, calculés à une seconde près.
Al-Mânsûr ordonna de traduire ce livre en arabe et d’en tirer un traité que les Arabes prendraient comme ouvrage fondamental dans l’étude des mouvements stellaires. Muhammad al-Fazârî se chargea de ce travail et tira de ce livre l’ouvrage connu chez les astronomes, sous le titre d’As-Sindhind al Kabîr (‘’le Grand Sindhind’’) : ce mot signifie en sanscrit ‘’temps infini’’. Les savants de cette époque se servirent de ce traité jusque sous le règne d’al-Ma’mûn. À ce moment, al-Khwarizmi en fit un abrégé pour ce prince et en tira sa table fameuse dans tout le monde musulman. »
(Source : traduction de Les catégories des nations, de l’écrivain du xie siècle Saïd).
La dette de la civilisation occidentale vis-à-vis de l’islam.
Cette interprétation de l’histoire résulte des recommandations issues en septembre 1968 par « l’Académie de Recherche islamique ». Cette conférence recommande la publication détaillée, en plusieurs langues, de la mise en évidence de la civilisation islamique, en ce qui concerne les Droits de l’Homme, et de la comparer avec la civilisation occidentale. La conférence recommande la préparation d’une études historique et scientifique expliquant l’impact de la civilisation musulmane et son enseignement sur les mouvements politiques, sociaux et religieux en Occident, depuis la Renaissance [6].
Par conséquent, de nombreux travaux ont été publiés, tout au long de ces dernières vingt années, par de distingués spécialistes de la culture arabe, qui magnifient la contribution islamique à la civilisation européenne.
Pour les musulmans, si la culture étrangère ne peut pas être détruite, elle est appropriée, et les historiens révisionnistes prétendent qu’elle est et était arabe, comme c’est le cas de la plupart des « accomplissements » arabes cités ci-dessus. Par exemple, les textes arabes d’histoire au Moyen-Orient enseignent que les Assyriens étaient des Arabes, un fait qu’aucun savant chercheur n’affirmerait, et qu’aucun Assyrien vivant n’accepterait.
Toute contestation du principe de supériorité islamique par les dhimmis, que ce soit par l’émancipation ou par la libération de leur pays, constitue un blasphème et une source amère d’humiliation et de rancœur. Et ce même comportement répétitif a continué d’exister après que l’oumma, avec ses propres philosophes et intellectuels, a développé une brillante civilisation.
L’un des principes de base de l’islam est enraciné dans le dogme de perfection de l’oumma, perfection qui la lie à l’obligation sacrée de diriger le monde entier.
Tout emprunt à une autre civilisation est interdit, puisque la perfection n’emprunte pas de l’imperfection sans s’abîmer elle-même. Les musulmans sont donc engagés dans une campagne de destruction et d’appropriation des cultures et des communautés, des identités et des idées. Partout où cette population rencontre un non-musulman, l’exemple de la destruction des statues bouddhistes en Afghanistan, ou de celle de Persépolis, par l’Ayatollah Khomeyni. C’est un modèle de comportement qui s’est inlassablement reproduit, depuis l’arrivée de l’islam, il y a mille quatre cents ans, et qui est amplement décrit dans les sources historiques.
Il est hors de doute que la civilisation islamique, telle que nous la connaissons, n’aurait tout simplement pas existé sans héritage grec [7].
Les traducteurs étaient principalement des chrétiens [8].
Comme le rappelle Ibn Khaldun, les Arabes n’ont pas joué un rôle important dans le développement des connaissances scientifiques de l’islam : « Il est étrange que, à de très rares exceptions, les musulmans qui ont excellé dans les sciences religieuses et intellectuelles ne sont pas des Arabes… »
La science dans l’islam n’est pas restée exclusivement aux mains des musulmans, même après l’arabisation. La contribution des chrétiens et des juifs était si active que le fons vitae d’Ibn Gabirol (Avicebron) passait pour le travail d’un musulman, jusqu’au xixe siècle, quand Munk découvrit que son auteur était juif [9].
Je suis, pour ma part, en train d’étudier une histoire des sciences arabes en trois volumes et je constate en effet :
1) que les sources indiennes, chaldéo-babyloniennes, assyriennes, grecques, perses, égyptiennes, voire juives, de la science arabe ne peuvent être contestées, même par des historiens arabo-musulmans. Vers l’an 600, les Arabes pré-islamisés n’étaient encore qu’un peuple de Bédouins et de marchands. On ne note la présence d’aucun fait marquant dans le domaine des sciences qui puisse venir d’Arabie avant la grande conquête du viie siècle, et disons même plutôt avant celle des premières dynasties établies, c’est-à-dire aux viiie et ixe siècles. Il n’y a plus rien ou presque après 1300.
2) En revanche, la CONQUÊTE militaire éclair des années 630-680 permet à ce peuple de semi-nomades du désert d’accéder d’un coup aux merveilles du monde antique, devenu chrétien : culture helléno-chrétienne, philosophies platonicienne et pré-socratique, architecture byzantine, astronomie chaldéo-babylonienne, mathématiques indiennes et grecques, chimie venue des Perses et des Égyptiens, etc.
3) Les Arabes islamisés furent donc de grands pillards et de grands synthétiseurs. Leur rôle ne doit pas être amoindri mais ne peut en aucun cas passer pour ce qu’il n’est pas.
Il faut également, en cette même époque de révisionnisme cool, et furieusement tendance, c’est-à-dire masochiste-nihiliste, il faut aussi, alors que les Croisades sont vouées aux gémonies par des armadas de crétins instruits d’articles de journaux, et que tout le monde a oublié la splendeur des deux siècles de prospérité amenés par les États latins d’Orient, oui, il faut donc parler un peu plus précisément de cette « religion de paix et de tolérance ».
Petit rappel du passé :
VIIe siecle
• à partir de 622 : banditisme organisé par Muhammad depuis Médine (Arabie Saoudite), bataille de Badr où Muhammad et ses affidés tuent 70 hommes et ramènent un imposant butin, multiples assassinats politiques contre les adversaires du Prophète, nombreuses attaques de juifs de la région.
• 627 : extermination par l’armée de Muhammad de la tribu juive des Bann Qurayza (600 à 900 personnes).
• 634 : invasion de la Syrie par Abu Bakr, mort de 4 000 habitants défendant leurs terres entre Gaza et Césarée. Campagne de Mésopotamie : 600 monastères détruits, moines tués, Arabes monophysites convertis ou tués, extermination de la population d’Elam et notables exécutés à Susa.
• 634-638 : invasion de Jérusalem avec destruction d’églises, pillages provoquant en 639 une famine qui fait des milliers de morts.
• en Arménie, massacre de la population d’Euchaita.
• Assyrie dévastée, grandes destructions dans la région de Daron, au sud-ouest du lac Van (Turquie), nouvelles exactions en 642 avec massacres et esclavage.
• de 639 à 642 le général musulman Amr Ibn Al’As envahit l’Égypte. L’Égypte ne lui suffit pas et pour cela il tenta de coloniser la Makuria, un royaume chrétien indépendant.
• 643 : conquête de Tripoli par Amr, pillage, esclavage des femmes et des enfants au profit de l’armée arabe.
• 652 à 1276 : envoi annuel d’esclaves de la Nubie vers Le Caire.
• Carthage rasée et habitants exécutés, de même en Anatolie (Turquie), Mésopotamie, Syrie, Iran et Irak.
• fin VIIe siècle : conquête de l’Égypte par Amr b. al As, massacre de tous les habitants de Behnesa près de Rayum ainsi qu’à Fayoum, Aboit, Nikin.
VIIIe siecle
• 704-705 : des nobles arméniens sont rassemblés dans les églises de Saint-Grégory à Naxcawan et Xram sur l’Azaxis et brûlés vifs.
• 712 : conquête de Sind en Inde par Muhammad b. Qasim, massacres au port de Debal (embouchure de l’Indus) pendant trois jours, entre 6 000 et 16 000 personnes tuées à Brahminabad.
• 722 : destruction de couvents et d’églises en Égypte.
• 745 : le général Omar, le nouveau gouverneur d’Égypte, intensifie la persécution des chrétiens, mais le roi Cyriacus de la Makuria réussit à stopper cette nouvelle attaque.
• 781 : sac d’Éphèse (Turquie), 7 000 Grecs déportés.
• VIIIe siècle : monastères hindous de Kizil détruits.
IXe siecle
• 831 : le roi Zakaria, le nouveau monarque de la Makuria, s’inquiète à cause des chasseurs musulmans d’esclaves qui envahissent son pays (l’actuel Soudan).
• 832 : massacre de coptes en basse Égypte suite à leur révolte contre une taxation discriminatoire.
• 838 : prise d’Amorion et esclavage des vaincus.
• 852-855 : persécutions en Arménie.
• 884 : couvent de Kalilshn à Bagdad pillé et détruit.
• IXe siècle : conversions forcées à Harran, massacre de chrétiens à Séville.
Xe siecle
• 903 : 22 000 chrétiens rendus esclaves à Thessalonique.
• 924 : église et couvent de Marie à Damas détruits ainsi que des milliers d’églises en Égypte et en Syrie.
• vers l’an mil : pillages et destruction en Inde par Mahmud de Ghazni, 50 000 hommes tués lors de la bataille de Sommath.
XIe siecle
• 1004 : Mahmud envahit Multan (Pakistan), conversions forcées dans la région de Ghor.
• 1010 : Mahmud envahit le royaume de Dawud de Multan.
• 1010 à 1013 : des centaines de juifs tués dans le sud de l’Espagne.
• 1016 : juifs chassés de Kairouan (Tunisie).
• 1033 : massacre de 6 000 juifs à Fez (Maroc).
• 1064 : conquête de la Géorgie et de l’Arménie par Alp Arslan, massacres et esclavage.
• 1066 : 4 000 juifs tués à Grenade (Espagne).
• 1076 : Kumbi Kumbi, la capitale du Ghana, est détruite par les envahisseurs musulmans, la population réduite en esclavage.
• XIe siècle : massacre de juifs à Fez et Grenade.
XIIe siecle
• 1126 : chrétiens espagnols déportés au Maroc par les Almoravides.
• vers 1150 : persécutions à Tunis.
• 1165 et 1178 : conversions forcées au Yémen pour les juifs.
• 1192 : dans l’État de Bihar (est de l’Inde), Muhammad Khiji massacre des moines bouddhistes et rase une grande bibliothèque, destruction de temples à Sarnath près de Bénarès.
• 1198 : conversions forcées à Aden pour les juifs.
• XIIe siècle : massacres de juifs en Afrique du Nord par les Almohades.
XIIIe siecle
• vers 1200 : persécutions envers les bouddhistes.
• 1232 : massacre de juifs à Marrakech.
• 1268 : massacre lors de la conquête d’Antioche (Turquie) par Baybars.
• 1274 : les musulmans de l’Égypte subjuguée commencent à coloniser et à détruire l’Alwa, la Makuria et la Nobatia, les trois royaumes antiques chrétiens en Afrique. Les peuples de ces nations, autrefois indépendantes et rayonnantes, sont vendus comme esclaves.
• 1291 et 1318 : conversions forcées des juifs à Tabriz (nord-ouest de l’Iran).
• xiiie siècle : près de Damas (Syrie), la population de Safad est décapitée par le sultan Baybars.
XIVe siecle
• 1333 et 1334 : conversions forcées des juifs à Bagdad (Irak).
• 1351 : Firuz Chah dirige le nord de l’Inde : 180 000 esclaves dans la ville, destruction de temples hindous.
• XIVe au XVIIe siècle : prélèvement d’un cinquième des fils des familles de l’aristocratie chrétienne en Grèce, Serbie, Bulgarie, Arménie et Albanie, soit environ entre 8 000 et 12 000 personnes par an.
XVe siecle
• 1400 : Tamerlan dévaste Tbilissi (Géorgie).
• 1403 : nouvelle expédition de Tamerlan en Géorgie, massacres, destruction de villes et villages.
• début XVe siècle : en Mésopotamie, massacre de 4 000 personnes à Sivas (Turquie), 10 000 à Tus, 100 000 à Saray (Turquie), 90 000 à Bagdad (Irak) et 70 000 à Ispahan (Iran).
XVIIe siecle
• 1622 : persécutions contre les juifs en Perse.
• moitié xviie siècle : conversions forcées des juifs en Perse.
• 1679-1680 : destruction de temples à Udaipur, Chitor, Jaipur par Aurangzeb (nord de l’Inde).
• XVIIe siècle : conversions forcées en Anatolie (Turquie).
XVIIIe siecle
• 1770 à 1786 : les juifs expulsés de Djeddah (Arabie Saoudite) se réfugient au Yémen.
• 1790 : massacre de juifs à Tétouan (Maroc).
XIXe siecle
• 1828 : massacre de juifs à Bagdad.
• 1834 : pillage à Safed.
• 1839 : conversions forcées et massacre de juifs à Meshed (Iran).
• 1840 : massacre de juifs à Damas.
• 1867 : massacre de juifs à Barfurush.
• 1894, 1895 et 1896 : massacre de 250 000 Arméniens par les Turcs.
XXe siecle
• 1904 et 1909 : 30 000 Arméniens tués à Adana.
• 1915 : fin du génocide des Arméniens par les Turcs, plus d’un million de morts.
Entre 650 et 1905, des rapports évaluent que plus de vingt millions d’Africains ont été vendus en tant qu’esclaves par les musulmans. Il est intéressant de remarquer que la majorité de ces vingt millions d’esclaves n’était pas constituée par des hommes, mais par des femmes et des enfants qui sont plus vulnérables.
À ces chiffres, on peut rajouter maintenant le conflit israélo-palestinien depuis la seconde intifada : trois fois plus de civils juifs tués que de civils arabes, la guerre du Liban (massacres de chrétiens équivalant à des dizaines de Sabra et Chatila), l’Afghanistan des talibans, l’Irak de Saddam Hussein, l’Algérie des GIA ou de la Sécurité militaire (deux vent mille morts en douze ans), le Nigeria et ses exactions continuelles depuis sa « décolonisation », je passe sur le Soudan, l’Indonésie, le Pakistan, la Malaysia…
Il est à peu près aussi concevable aujourd’hui de critiquer l’Islam qu’il l’était de critiquer le communisme dans les années 1960 et 70.
Le seul changement, mais il est notable, c’est qu’il est désormais interdit par la loi republicaine de critiquer une religion qui s’est donné pour but l’asservissement général de l’humanité.
De plus en plus les points de jonction « théologiques » entre le gnosticisme islamique, l’universalisme socialiste et l’occultisme nazi s’éclairent : communisme du désert, gangstérisme clanique usurpant la charge des prophètes, la religion de Mahomet est aussi le premier programme de nationalisation de Dieu.
L’Islam n’est en fait rien d’autre que l’invention de la modernite. Un protonazisme qui devait influencer pernicieusement toute la pensée mécaniste postchrétienne, jusqu’à ce qu’elle parvienne à sa perfection moderne, au xxe siècle, avec Hitler, ce Mahomet du Tyrol.
Tout illuminisme est un mécanisme accompli.
Il n’y a aucun moderne (post-quelque chose aujourd’hui) qui ne soit au fond de lui déjà prêt à la conversion plus ou moins forcée, ou dans le meilleur des cas à s’acquitter de la Jyzzia, pour conserver son statut de dhimmi, de « protégé ».
Les conquérants islamiques furent les premiers à institutionnaliser la discrimination religieuse : ils furent les inventeurs du concept de l’ « étoile jaune ». Chrétiens et juifs étaient considérés comme citoyens de seconde zone, leur vie ne tenait jamais qu’à un fil. Lors de la christianisation de l’Europe, aucun païen n’eut à souffrir de persécution — ce fut plutôt l’inverse — et lorsque après 313 (édits de Milan par Constantin) l’Empire devient chrétien, les païens ne furent aucunement rejetés hors de la société et moins encore exécutés, ou asservis en dhimmis. Ils furent convertis, par la grâce des saints missionnaires qui sillonnèrent le continent en tous sens, de l’Irlande à la Volga, de la Méditerranée à la Baltique, et dont le Verbe était si plein de la Lumière même du Logos qu’ils convertissaient sur leur passage des peuplades entières, leurs noblesses, leurs rois, sans jamais, jamais, tirer le sabre, mais au contraire en préférant se faire couper la tête plutôt que de renier leur foi.
C’est cela un martyr, par un teen-ager qu’on fait passer de la console Nintendo au pilotage-suicide d’avions de ligne, via les sourates du Coran.
Notes
[1] Les Assyriens se sont installés la première fois à Nineveh, une des villes assyriennes principales, en 5000 A.C.N., ce qyu est 5 630 ans avant que les Arabes ne soient venus dans ce secteur. Même le mot « Arabe » est un mot assyrien, signifiant « Occidental ».
[2] http://chronomath.irem.univ-mrs.fr
[3] Victor J. Katz, A History of Mathematics, an Introduction, Addison-Wesley Educational Publishers, 1999.
[4] Neugebauer, L’Histoire des mathématiques babyloniennes.
[5] Arthur Voobus, Les Statuts de l’École de Nisibis.
[6] Islam et Dhimmitude, Bat Ye’or, Madison — Teaneck, Fairleigh Dickinson University Press, Lancaster, UK : Gazelle Book Services Ltd., 2002.
[7] Rosenthal, The Classical Age of Islam, Londres, 1975, p.13.
[8] Ibn Warracq, Pourquoi je ne suis pas musulman, p. 317.
[9] Ibn Warracq, ibid., p. 329.
Von Grunebaum, Islam. Essays in the Nature and Growth of a Cultural Tradition, Chicago, 1955, p. 114.
Renan, L’Islamisme et la science, conférence donnée à la Sorbonne le 29 mars 1883, Bâle, Bernheim, 1883."
@réfractaires.org
Maurice G. Dantec – Le théâtre des opérations, 2002-2006 – American Black Box
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En guise de Complément :
Fichier PDF : L'APPORT DE L'INDE AUX MATHÉMATIQUES ARABES
Lien en "Cache" : TRADUCTION ET TRANSMISSION SCIENTIFIQUES AUX VIIIe-Xe SIÈCLES
...et puis voici un petit film qui ne dure que 7 minutes 16 secondes...
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10/07/2010
J’aime l’Occident. Malgré ses vices et ses crimes.
=--=Publié dans la Catégorie "Lectures"=--=
« J’aime l’Occident. Malgré ses vices et ses crimes. J’aime la vision des prophètes et la grâce du Parthénon, j’aime l’ordre romain et les cathédrales, j’aime la raison et la passion de la liberté, j’aime la perfection de ses campagnes, la mesure de ses produits et la grandeur de son projet, j’aime l’Occident… Je sais, je sais, les mines du Laurion et les crucifixion d’esclaves, je sais les massacres des Aztèques et les bûchers de l’Inquisition, mais malgré tout, le crime n’est pas l’histoire de l’Occident, et ce qu’il a porté dans le monde dépasse infiniment ce qu’il a fait contre des sociétés ou des individus.
Mais il est vain de parler. Et ce livre une fois de plus me donne le sentiment de l’acte parfaitement inutile, car personne ne pourra l’accueillir, personne ne peut plus dans ce monde occidental croire à cette vocation ni à cette grandeur. Nous sommes pris dans une sorte de fatalité que rien, semble-t-il, ne peut plus dénouer, puisque les adeptes du Christ eux-mêmes se ruent dans la fatalité de cette destruction. Seule la négation de tout ce qui est occidental, de tout ce que l’Occident a produit peut aujourd’hui satisfaire les hommes de ce même Occident. Nous assistons dans toute l’Europe et l’Amérique à une sorte de mystère, nous sommes pris dans une procession gigantesque de flagellants qui se déchirent mutuellement, et eux-mêmes, avec les pires fouets.
Nous nous sommes déguisés, pour que personne ne puisse reconnaître ce que furent les vertus des hommes de notre monde, nous nous sommes barbouillés de peinture et de sang pour manifester notre mépris envers tout ce qui a fait la grandeur qui nous a faits. Nous assistons avec joie, enthousiasme uniquement à ce qui nie, détruit, dénature, ce qui fut l’œuvre de l’Occident. Nous trépignons sur son corps et crachons à son visage. Si le XIXe siècle a trahi par la conne conscience (ce qui ne fut jamais la vérité de l’Occident), nous, nous trahissons par la mauvaise conscience, qui devient à la limite pur délire. Quand on voit le cinéma des vingt dernières années, on est confondu de se rendre compte que seuls les films qui ont diffusé le mépris, l’ordure, la flagellation ont réussi. Et nul argument ne peut servir en face de ces évidences, de ces lieux communs totalement acceptés (...)
Je vois l’Europe marcher à grands pas vers sa fin. Non pour des raisons économiques ni techniques ni politiques, non qu’elle soit submergée par un tiers monde, en réalité impuissant, non qu’elle soit aussi mise en question par la Chine, mais parce qu’elle est partie pour son suicide. Toutes les conduites (je dis bien toutes) des Techniciens, des Bureaucrates, des Politiciens, et en plein accord fondamental, malgré la contradiction apparente, les discours des philosophes, des cinéastes, des scientifiques sont toutes des conduites suicidaires. Tout facteur positif qui peut apparaître est aussitôt retourné, déformé, inverti, pour devenir un nouveau chef d’accusation ou un moyen de destruction. La Gauche a triomphalement rejoint la Droite dans cette course à la mort, et le christianisme célèbre ses noces avec le marxisme pour procéder à la mise à mort de la vieille carne impuissante qui fut la gloire du monde. » Jacques Ellul, Trahison de l’Occident, 1975
« C’est du rêve éveillé que de présenter un programme de fédération islamique en France, pour mieux intégrer les musulmans. Ce sera au contraire le début de l’intégration des Français dans l’islam. » Jacques Ellul, article paru dans l’hebdomadaire Réforme le 15 juillet 1989
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