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08/02/2021

Des cadavres d'humanité

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« La plupart des vies, malheureusement sont des cadavres d'humanité... la plupart des hommes sont portés par leur biologie au lieu de la porter. Ils meurent avant de vivre... C'est pourquoi le vrai problème n'est pas de savoir si nous serons vivants après la mort, mais bien si nous serons vivants avant la mort. »

Maurice Zundel, À l'écoute du silence

 

 

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07/02/2021

Maurice Zundel (La Foi prise au mot - KTOTV)

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06/02/2021

Appel à la transformation créatrice

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« L'immortalité n'est pas une rallonge mise à notre vie biologique dans la crainte de crever. Ce n'est pas du tout cela... Elle est, en nous, d'abord appel à la transformation créatrice où l'homme atteint à une sorte d'aséité en devenant vraiment la source de sa vie : dans le dialogue silencieux où sa personnalité se réalise, dans l'échange avec la Présence infinie qui est, comme disait Augustin, la Vie de notre vie. »

Maurice Zundel, À l'écoute du silence

 

 

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05/02/2021

Libres de nous-mêmes

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« Nous avons besoin, assurément, un besoin physique, biologique, de présence humaine, mais il est très rare que ce besoin de présence aille jusqu'à l'intimité, jusqu'au mystère de la personne, jusqu'à son secret éternel qui ne peut se faire jour que dans des conditions privilégiées.
Et toutes les relations humaines, la plupart du temps, sont tissées de banalités et s'accomplissent dans le conventionnel. Chacun, gardant son quand-à-soi, cache la privauté de son âme, avoue à peine ses convictions véritables, en sorte qu'on a affaire, finalement, à une humanité passe-partout qui n'a d'autre enracinement dans l'univers que ses besoins physiques.

Il y a des moments privilégiés où, tout de même, la rencontre humaine se fait, où le visage de l'autre apparaît sans masque, dans son authenticité, ce qui est très rare, parce que, justement, pour qu'un homme puisse révéler son vrai visage, il faut qu'il atteigne au niveau de l'existence le plus profond, là où sa vie s'enracine dans l'éternel.
Et quand sommes-nous à ce niveau le plus profond où notre vie s'enracine dans l'éternel et où nous sommes sûrs d'atteindre à la réalité de l'être humain ? Eh bien, c'est quand nous sommes complètement libres de nous-mêmes. Nous devenons une présence quand tout est situé à l'intérieur de notre pensée et de notre amour comme en sa source, c'est-à-dire quand nous sommes devenus nous-mêmes une offrande, un don, un présent. »

Maurice Zundel, À l'écoute du silence

 

 

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04/02/2021

Plénitude de la vie, joie infinie...

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« Il ne s'agit pas de se défendre contre des forces hostiles que l'on n'arrive pas à apprivoiser, il ne s'agit pas d'impuissance et d'ignorance, il s'agit de plénitude de la vie ; il s'agit de la joie infinie, il s'agit d'une liberté enfin reconnue, celle qui fait justement de notre puissance de choisir le pouvoir de nous donner, de tout donner en nous donnant. Combien de philosophes ont peiné pour définir la liberté, pour la concilier avec déterminisme, et il n'y en a peut-être pas un qui ait compris que le sens de la liberté, c'était justement de faire de nous-même un don. Mais un don à qui, sinon à une générosité qui s'annonce comme telle au plus profond de nous ? »

Maurice Zundel, À l'écoute du silence

 

 

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03/02/2021

Le don nuptial de sa présence en moi

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« Qu'est-ce que je fais de la vie de Dieu qui m'est confiée ?
À travers moi, comment les autres peuvent-ils le recevoir de moi ? Pour vivre cet ordre de l'amour, il faut être continuellement en contact avec Dieu. Dès que l'on perd le contact, le monde se décolore à l'instant même et perd sa dimension infinie. Il faut donc que j'espère pour lui plutôt que pour moi. Que va-t-il arriver au cours de cette histoire humaine que j'ai à faire en me faisant ? S'il est vrai qu'il est concerné par chacune de mes décisions, si bien que ce qui consacre ma dignité est sa vie confiée à la mienne, je ne puis remettre à demain une fidélité indispensable à son incarnation en moi aujourd'hui.

Ce qui nous aidera le mieux à garder cette fidélité, qui conditionne notre libération, c'est la certitude, fondée sur l'expérience la plus quotidienne, que la présence de Dieu ne peut s'actualiser, dans notre histoire, que par notre méditation.
Si je tarde à me libérer, non seulement je méconnais le don nuptial de sa présence en moi, non seulement je manque à mon humanité en restant esclave de mes déterminismes, mais je l'empêche aussi de se manifester et de se communiquer à travers moi, en privant les autres de cette révélation spirituelle qui peut seule les toucher. »

Maurice Zundel, Je ne crois pas en Dieu, je le vis

 

 

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02/02/2021

Egalité, Fraternité, Diversité...

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« Quand le grand ethnologue allemand Kurt Unkel, mieux connu sous le nom de Nimuendaju que lui avaient conféré les Indiens du Brésil auxquels il a consacré sa vie, revenait dans les villages indigènes après un long séjour dans un centre civilisé, ses hôtes fondaient en larmes à la pensée des souffrances qu’il avait du encourir loin du seul endroit où, pensaient-ils, la vie valait la peine d’être vécue. Cette profonde indifférence aux cultures autres était, à sa manière, une garantie pour elles de pouvoir exister à leur guise et de leur côté. »

« En empruntant une autre image, on pourrait dire que les cultures ressemblent à des trains qui circulent plus ou moins vite, chacun sur sa voie propre et dans une direction différente. Ceux qui roulent de conserve avec le nôtre nous sont présents de la façon la plus durable ; nous pouvons à loisir observer le type des wagons, la physionomie et la mimique des voyageurs à travers les vitres de nos compartiments respectifs. Mais que, sur une autre voie oblique ou parallèle, un train passe dans l’autre sens et nous n’en apercevons qu’une image confuse et vite disparue, à peine identifiable pour ce qu’elle est, réduite le plus souvent à un brouillage momentané de notre champ visuel, qui ne nous livre aucune information sur l’évènement lui-même et nous irrite seulement parce qu’il interrompt la contemplation placide du paysage servant de toile de fond à notre rêverie. Or, tout membre d’une culture en est aussi étroitement solidaire que ce voyageur idéal l’est de son train. Dès la naissance, probablement même avant, les êtres et les choses qui nous entourent montent en chacun de nous un appareil de références complexes formant système : conduites, motivations, jugement implicites que, par la suite, l’éducation vient confirmer par la vue réflexive qu’elle nous propose du devenir historique de notre civilisation. Nous nous déplaçons littéralement avec ce système de référence, et les ensembles culturels qui se sont constitués en dehors de lui ne nous sont perceptibles qu’à travers les déformations qu’il leur imprime. Il peut même nous rendre incapable de les voir. »

« Sans doute nous berçons-nous du rêve que l’égalité et la fraternité règneront un jour entre les hommes sans que soit compromise leur diversité. Mais si l’humanité ne se résigne pas à devenir la consommatrice stérile des seules valeurs qu’elle a su créer dans le passé, capable seulement de donner le jour à des ouvrages bâtards, à des inventions grossières et puériles, elle devra réapprendre que toute création véritable implique une certaine surdité à l’appel d’autres valeurs, pouvant aller jusqu’à leur refus sinon même à leur négation. Car on ne peut, à la fois, se fondre dans la jouissance de l’autre, s’identifier à lui, et se maintenir différent. Pleinement réussie, la communication intégrale avec l’autre condamne, à plus ou moins brève échéance, l’originalité de sa et de ma création. »

Claude Lévi-Strauss, Race et culture

 

 

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01/02/2021

L’immense travail de domestication accompli par les femmes au cours des millénaires

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« Pour ma part j’ai toujours considéré les féministes comme d’aimables connes, inoffensives dans leur principe, malheureusement rendues dangereuses par leur désarmante absence de lucidité. Ainsi pouvait-on dans les années 1970 les voir lutter pour la contraception, l’avortement, la liberté sexuelle, etc. tout à fait comme si le "système patriarcal" était une invention des méchants mâles, alors que l’objectif historique des hommes était à l’évidence de baiser le maximum de nanas sans avoir à se mettre une famille sur le dos.

Les pauvres poussaient même la naïveté jusqu’à s’imaginer que l’amour lesbien, condiment érotique apprécié par la quasi-totalité des hétérosexuels en activité, était une dangereuse remise en cause du pouvoir masculin. Elles manifestaient enfin, et c’était le plus triste, un incompréhensible appétit à l’égard du monde professionnel et de la vie de l’entreprise ; les hommes, qui savaient depuis longtemps à quoi s’en tenir sur la "liberté" et "l’épanouissement" offerts par le travail, ricanaient doucement.

Trente ans après les débuts du féminisme "grand public", les résultats sont consternants. Non seulement les femmes sont massivement entrées dans le monde de l’entreprise, mais elles y accomplissent l’essentiel des tâches (tout individu ayant effectivement travaillé sait à quoi s’en tenir sur la question : les employés masculins sont bêtes, paresseux, querelleurs, indisciplinés, incapables en général de se mettre au service d’une tâche collective quelconque).

Le marché du désir ayant considérablement étendu son empire, elles doivent parallèlement, et parfois pendant plusieurs dizaines d’années, se consacrer à l’entretien de leur "capital séduction", dépensant une énergie et des sommes folles pour un résultat dans l’ensemble peu probant (les effets du vieillissement restant grosso modo inéluctables). N’ayant nullement renoncé à la maternité, elles doivent en dernier lieu élever seules le ou les enfants qu’elles ont réussi à arracher aux hommes ayant traversé leur existence – lesdits hommes les ayant entretemps quittées pour une plus jeunes ; encore bien heureuses lorsqu’elles réussissent à obtenir le versement de la pension alimentaire.

En résumé, l’immense travail de domestication accompli par les femmes au cours des millénaires précédents afin de réprimer les penchants primitifs de l’homme (violence, baise, ivrognerie, jeu) et d’en faire une créature à peu près susceptible d’une vie sociale s’est trouvé réduit à néant en l’espace d’une génération. »

Michel Houellebecq, Interventions 2020

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31/01/2021

Le pouvoir de se donner une loi à soi-même

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« Tous les traits positifs de la voie du surhomme se rattachent à ce second aspect : le pouvoir de se donner une loi à soi même, le "pouvoir de dire non, de ne pas agir, quand on est poussé par une force prodigieuse, par une énorme tension vers le oui" ; l’ascèse naturelle et libre qui s’applique à éprouver ses propres forces en jugeant "la puissance d’une volonté au degré de résistance, de douleur, de tourment qu’elle peut supporter pour les tourner à son avantage" (si bien que de ce point de vue tout ce que l’existence offre de mauvais, de douloureux, de problématique, tout ce qui nourri les formes populaires des religions sotériologiques, est accepté et même désiré) ; avoir pour principe de ne pas obéir aux passions, mais de les tenir en laisse ("la grandeur de caractère ne consiste pas à ne pas avoir de passions – il faut les avoir au plus haut degré, mais les tenir en laisse, et sans que cette domination soit une source de joie particulière, avec simplicité") ; l’idée que "l’homme supérieur se distingue de l’inférieur par son intrépidité, son défi au malheur" ("c’est un signe de régression quand les valeurs eudémonistes commencent à être considérées comme les plus hautes") ; et répondre, stupéfait, à ceux qui montrent "le chemin de la félicité" pour inciter l’homme à se conduire de telle ou telle manière : "Mais que nous importe à nous le bonheur ?" ; reconnaître qu’un des moyens par lesquels se conserve une espèce humaine supérieure consiste "à s’arroger le droit à des actes exceptionnels vécus comme des tentatives de victoire sur soi-même et des actes de liberté… à s’assurer, par une espèce d’ascèse, une prépondérance et une certitude quant à sa propre force de volonté" sans fuir aucune sorte de privation ; affirmer la liberté qui consiste à "maintenir la distance qui nous sépare, être impassible devant les peines, les duretés de l’existence, les privations, la vie même", le type le plus élevé d’homme libre étant représenté par "celui qui surmonte constamment les plus fortes résistances… le grand péril faisant de lui un être digne de vénération" ; dénoncer la néfaste confusion entre discipline et aveulissement (le but de la discipline ne peut être qu’une force plus grande – "celui qui ne domine pas est faible, dissipé, inconstant") et tenir pour certain que "la dissolution n’est un argument que contre celui qui n’y a pas droit et que toutes les passions ont été discréditées par la faute de ceux qui n’étaient pas assez fort pour les tourner à leur avantage" ; montrer la voie de ceux qui, libres de tout lien, n’obéissent qu’à leur seule loi, adhèrent inflexiblement à celle-ci et sont au-dessus de toute faiblesse humaine ; enfin tout ce qui fait que le surhomme n’est pas la "blonde bête de proie", ni l’héritier d’une équivoque virtus de despotes de la Renaissance, mais est aussi capable de générosité, de promptitude à accorder une aide virile, de "vertu donatrice", de grandeur d’âme, de surpassement de sa propre individualité – tout cela représente un ensemble d’éléments positifs que l’homme de la Tradition aussi peut faire siens mais qui ne s’expliquent et ne sont tels qu’à la condition d’être rapportés, non à la vie, mais au "plus-que-vie", à la transcendance ; ce sont des valeurs qui ne peuvent attirer que les hommes portant en eux quelque chose d’autre et de plus que la simple "vie". »

Julius Evola, Chevaucher le tigre

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30/01/2021

Le malheur

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« Le malheur n’a pas fondu sur toi, ne s’est pas abattu sur toi ; il s’est infiltré avec lenteur, il s’est insinué presque suavement. Il a minutieusement imprégné ta vie, tes gestes, tes heures, ta chambre, comme une vérité longtemps masquée, une évidence refusée ; tenace et patient, ténu, acharné, il a pris possession des failles du plafond, des rides de ton visage dans le miroir fêlé, des cartes étalées ; il s’est coulé dans la goutte d’eau du robinet du poste d’eau sur le palier, il a résonné avec chaque quart d’heure au clocher de Saint-Roch.

Le piège, c’était ce sentiment parfois presque exaltant, cet orgueil, cette sorte d’ivresse ; tu croyais n’avoir besoin que de la ville, de ses pierres et de ses rues, des foules qui t’entraînaient, besoin seulement d’un fragment de comptoir à la Petite Source, d’une place avancée dans un cinéma de quartier ; besoin seulement de ta chambre, ton antre, ta cage, ton terrier, où tu reviens chaque jour, d’où tu repars chaque jour, ce lieu presque magique ou plus rien désormais ne s’offre à ta patience, même plus une fissure au plafond, même plus une veine dans le bois de l’étagère, même plus une fleur sur le papier peint. Tu étales, encore une fois, les cinquante-deux cartes sur ta banquette étroite ; tu cherches, encore une fois, l’improbable solution d’un labyrinthe informe.

Tu as perdu tes pouvoirs. Tu ne sais plus suivre la lente dérive des bulles et des brindilles à la surface de ta cornée. Nul visage, nulle chevauchée victorieuse, nulle ville à l’horizon ne se laissent déchiffrer au travers des fissures et des ombres.Le piège : cette illusion d’être – comment dire ? – infranchissable, de n’offrir aucune prise au monde extérieur, de glisser, intouchable, yeux ouverts regardant devant eux, percevant tout, les plus petits détails, ne retenant rien. Somnambule éveillé, aveugle qui verrait. Être sans mémoire, sans frayeur.

Mais il n’y a pas d’issue, pas de miracle, nulle vérité. Des carapaces, des cuirasses. depuis ce jour suffocant où tout a commencé, où tout s’est arrêté. Tu rases les murs sales des rues noires, heurtant de ta main droite les pierres des perrons, les briques des façades. Tu t’assieds, jambes ballantes, au-dessus de la Seine, pendant des heures à regarder l’inappréciable remous que creuse l’arche d’un pont. Tu retires les quatre as de tes cinquante-deux cartes étalées. Combien de fois as-tu refait les mêmes gestes mutilés, les mêmes trajets qui ne conduisent jamais nulle part ? Tu n’as d’autre secours que tes refuges de quatre sous, ta patience imbécile, les mille et un détours qui chaque fois te ramènent à ton point de départ. Des squares aux musées, des cafés au cinémas, des berges aux jardins, les salles d’attente dans les gares, les halls des grands hôtels, les monoprix, les librairies, les galeries de peinture, les couloirs du métro. Les arbres, les pierres, l’eau, les nuages, le sable, la brique, la lumière, le vent, la pluie : seule compte ta solitude : quoi que tu fasses, où que tu ailles, tout ce que tu vois n’a pas d’importance, tout ce que tu fais est vain, tout ce que tu cherches est faux. Seule existe la solitude, que tôt ou tard, chaque fois, tu retrouves en face de toi, amicale ou désastreuse ; chaque fois, tu demeures seul, sans secours, en face d’elle, démonté ou hagard, désespéré ou impatient.

Tu t’es arrêté de parler et seul le silence t’a répondu. Mais ces mots, ces milliers, ces millions de mots qui se sont arrêtés dans ta gorge, les mots sans suite, les cris de joie, les mots d’amour, les rires idiots, quand donc les retrouveras-tu ? »

Georges Perec, Un homme qui dort

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29/01/2021

"Si tu veux vaincre ton ennemi, élève ses enfants"...

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« Qui ne connait pas l'interview d'Aaron Russo, mort depuis d'un cancer foudroyant, dans laquelle il raconte ses discussions avec Nick Rockefeller, à qui il dit : "Vous avez quand même oeuvré pour le droit des femmes..." Et qui lui répond d'un air moqueur qu'en vérité, l'indépendance des femmes, ils s'en foutent... c'est juste qu'ils se sont aperçus un jour que, si les femmes restaient à la maison, seulement la moitié de la population générait des impôts, mais que si elles travaillaient, les enfants seraient en plus de cela beaucoup plus tôt sous la coupe de l'Etat, qui pourrait ainsi les formater tout petits... "Si tu veux vaincre ton ennemi, élève ses enfants", dit le proverbe oriental ! »

Claire Séverac, La guerre contre les peuples

 

 

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28/01/2021

L’appartenance intime de mon travail à la Forêt Noire et aux hommes qui y vivent vient d’un enracinement séculaire

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« Sur le versant abrupt d’une haute et grande vallée du sud de la Forêt Noire, il y a à 1150 m d’altitude un petit chalet de ski. Il mesure en tout 6 mètres sur 7. Le toit bas abrite trois pièces : la cuisine qui sert aussi de pièce principale, la chambre à coucher et un cabinet de travail. Dispersées dans le fond étroit de la vallée et sur le versant opposé pareillement abrupt, les fermes aux grands toits en surplomb s’étalent largement. Le long du versant, les prairies et les pâturages montent jusqu’à la forêt de vieux sapins altiers et sombres. Sur tout cela règne un clair ciel d’été et dans son espace radieux deux éperviers s’élèvent en décrivant de larges cercles.
C’est là mon monde de travail – vu par les yeux "contemplatifs" de l’hôte de passage et de l’estivant. Moi-même je ne contemple à proprement parler jamais le paysage. J'éprouve son changement d’heure en heure, du jour à la nuit, dans le grand cycle des saisons. La pesanteur des montagnes et la dureté de leur roche primitive, la croissance prudente des sapins, la splendeur lumineuse et sans apprêt des prairies en fleur, le murmure du torrent dans la longue nuit d’automne, la sévère simplicité des étendues profondément enneigées, tout cela s’insinue, se presse et vibre dans l’existence de tous les jours là-haut.

Non pas pourtant dans les instants voulus d’immersion dans la jouissance et d’identification artificielle, mais seulement lorsque l’existence qui m’est propre est à son "travail". Le travail "seul ouvre" l’espace à cette réalité de la montagne. La marche du travail demeure enchâssée dans l’avènement du paysage.


Lorsque dans la profonde nuit d’hiver une violente tempête de neige déchaîne ses rafales autour du chalet, recouvrant et dissimulant tout, c’est "alors" le grand temps de la philosophie. C’est "alors" que son questionnement doit devenir simple et essentiel. L’élaboration de chaque pensée ne peut être que dure et tranchante. L’effort que requiert la frappe des mots est semblable à la résistance des sapins se dressant contre la tempête.


Et le travail philosophique ne se déroule pas comme l’occupation à part d’un original. Il a sa place au beau milieu du travail des paysans. Quand le jeune paysan remorque le lourd traîneau le long de la pente et sans tarder le pilote, avec son haut chargement de bûches de hêtre, dans la descente périlleuse jusqu’à sa ferme, quand le berger, d’un pas lent et rêveur pousse son troupeau vers le sommet, quand le paysan dans sa chambre assemble comme il convient les innombrables bardeaux destinés à son toit, alors mon travail est "de la même espèce". L’appartenance immédiate au monde paysan trouve là sa racine. Le citadin pense qu’il « se mêle au peuple » dès qu’il s’abaisse à un long entretien avec un paysan. Quand, le soir, à l’heure de la pause, je m’assois avec les paysans sur la banquette du poêle ou à table, dans le coin du bon Dieu (1) , "la plupart du temps" nous ne parlons "même pas". Nous fumons nos pipes en "silence". De temps en temps peut-être, on laisse tomber un mot pour dire que l’abattage du bois en forêt tire maintenant sur sa fin, que la nuit précédente, la martre a dévasté le poulailler, que demain probablement telle vache va vêler, que l’Oehmibauer (2) a eu un coup de sang, que le temps va bientôt "tourner". L’appartenance intime de mon travail à la Forêt Noire et aux hommes qui y vivent vient d’un enracinement séculaire, que rien ne peut remplacer, dans le terroir alémanique et souabe.


Le citadin est tout au plus "stimulé" par ce qu’il est convenu d’appeler un séjour à la campagne. Mais c’est tout mon travail qui est porté et guidé par le monde de ces montagnes et de leurs paysans. Maintenant, mon travail là-haut est de temps à autre interrompu pour d’assez longues périodes par des pourparlers, des déplacements pour des conférences, des discussions, et mon enseignement ici, en bas. Mais aussitôt que je remonte là-haut, dès les premières heures de présence dans le chalet, tout l’univers des questions anciennes m’envahit et cela sous la forme même où je les avais laissées. Je me trouve tout simplement transporté dans le rythme propre du travail et ne suis au fond absolument pas maître de sa loi cachée. Les citadins s’étonnent souvent de mon long et monotone isolement dans les montagnes parmi les paysans. Pourtant ce n’est pas un isolement, mais bien la "solitude". Dans les grandes villes, l’homme peut en effet facilement être plus isolé que "nulle part ailleurs". Mais il ne peut jamais y être seul. Car la solitude a le pouvoir absolument original de ne pas nous "isoler", mais au contraire de "jeter" l’existence tout entière dans l’ample proximité de l’essence de toutes choses.


Là-bas, on peut devenir en un tour de main une "célébrité", par l’intermédiaire des journaux et des revues. C’est encore le chemin le plus sûr pour vouer notre vouloir le plus propre à la "mésinterprétation" et pour tomber rapidement et radicalement dans l’oubli.

(1) Dans les fermes de la Forêt Noire, on a coutume de s’asseoir à même la banquette de faïence du grand poêle qui se trouve au centre de la pièce ; la table entourée de bancs est disposée dans un des coins de la même pièce et c’est là que l’on suspend le crucifix, d’où son nom de "coin du Bon Dieu" (Herrgottswinkel).

(2) Il s’agit là probablement d’un surnom villageois. »

Martin Heidegger, "Pourquoi restons-nous en province ? (1933)" in Écrits politiques 1933 – 1966

 

 

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27/01/2021

Crédule

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« Peut-être vaut-il la peine de rendre compte ici du phénomène ambigu de la naïveté : celle-ci est avant tout du manque d'expérience combiné avec de la crédulité, comme le prouve l'exemple des enfants, même les plus intelligents. La crédulité peut avoir un fond positif : elle peut être l'attitude de l'homme véridique qui croit tout naturellement que tout le monde est comme lui ; il y a des peuplades qui sont crédules parce qu'elles ignorent le mensonge. Il va donc de soi que la naïveté peut être chose toute relative : un homme qui ne connaît pas la psychologie des fous est un naïf aux yeux des psychiatres, même s'il est fort loin d'être un sot. S'il faut être "prudents comme les serpents" — à condition d'être "simples comme les colombes (*)" — c'est avant tout parce que l'ambiance dresse des embûches et qu'il faut savoir se défendre, c'est-à-dire que notre imagination doit avoir conscience des caprices de la mâyâ terrestre.

(*) Ce qui du reste fait penser aux "pauvres dans l'esprit", qui ne sont certes pas censés manquer de facultés mentales. On connaît cette histoire : les novices condisciples du jeune Thomas d'Aquin, connaissant sa crédulité — réelle ou apparente — l'appelèrent un jour pour lui montrer "un boeuf qui vole", puis se moquèrent de lui parce qu'il courut à la fenêtre pour voir le phénomène ; il leur répondit : "Un boeuf qui vole est chose moins extraordinaire qu'un moine qui ment." »

Frithjof Schuon, Racines de la condition humaine

 

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26/01/2021

La curiosité-suicide...

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« Quoi qu'il en soit, si nous nous en tenons au sens courant du terme, être naïf c'est s'arrêter à la perspective simplificatrice et matérialisante de l'enfance, sans pour autant devoir perdre l'instinct pour la "seule chose nécessaire", lequel n'exige aucune expérience complexe ni aucun don de spéculation abstraite.
Nous voudrions répondre ici à la question suivante : un homme libéré d'une erreur pernicieuse est-il devenu plus intelligent pour autant ? Au point de vue de l'intelligence potentielle, non ; mais au point de vue de l'intelligence effective, oui, certainement ; car sous ce rapport, vérité égale intelligence. La preuve en est que l'acceptation d'une vérité-clef entraîne la capacité de comprendre — comme par une réaction en chaîne — d'autres vérités du même ordre, plus une multitude d'applications subordonnées ; toute compréhension illumine, toute incompréhension obscurcit. A l'opposé de la naïveté, il y a l'intelligence luciférienne, exploratrice, inventive, laquelle s'enfonce passionnément et aveuglément dans l'inconnu et l'indéfini ; c'est l'histoire de Prométhée et d'Icare, et c'est la curiosité-suicide. »

Frithjof Schuon, Racines de la condition humaine

 

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25/01/2021

L'absurdité de la thèse matérialiste

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« Il n'est pas hors de propos de faire remarquer dans ce contexte que la grande contradiction du matérialisme, c'est qu'il est pensé ; il n'est pas lui-même de la matière, il est un concept, donc quelque chose d'immatériel par définition. Le phénomène de la subjectivité nous ne nous lassons pas de le dire prouve concrètement l'absurdité de la thèse matérialiste, du fait que la nature même du penseur dément ce qu'il pense; autant déclarer ''objectivement'' que l'esprit humain est incapable d'objectivité, ou qu'il est vrai qu'il n'y a pas de vérité, et ainsi de suite. »

Frithjof Schuon, Racines de la condition humaine

 

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24/01/2021

Un vide

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« Il y a deux choses à envisager dans les choses créées, à savoir l'apparence empirique et le mécanisme ; or l'apparence manifeste l'intention divine (…) le mécanisme n'opère que le mode de manifestation. Chez l'homme corporel par exemple, l'intention divine s'exprime par la forme, la déiformité, le symbolisme, la beauté ; le mécanisme est l'anatomie et le fonctionnement vital. La mentalité moderne, à tendance toujours scientiste et "iconoclaste", tend à suraccentuer le mécanisme au détriment de l'intention créatrice, et cela sur tous les plans, psychologique aussi bien que physique ; il en résulte une mentalité blasée et "démystifiée" que rien n' "impressionne" plus. Avec l'oubli de l'intention divine, pourtant apparente a priori, on aboutit à un vide dépourvu de tout point de référence et de toute signification, et à une mentalité de nihilisme et de désespoir, si ce n'est de matérialisme insouciant et brutal. En face de cette déviation, c'est l'enfant qui a raison, quand il croit que le ciel bleu au-dessus de nous c'est le Paradis. »

Frithjof Schuon, Racines de la condition humaine

 

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23/01/2021

Un bon caractère

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« A la question de savoir s'il vaut mieux avoir de l'intelligence ou un bon caractère, nous répondrons : un bon caractère. Pourquoi ? parce que, quand on pose cette question, on ne pense jamais à l'intelligence intégrale, laquelle implique essentiellement la connaissance de soi ; inversement, un bon caractère implique toujours une part d'intelligence, à condition évidemment que la vertu soit réelle, et non compromise par un orgueil sous-jacent, comme c'est le cas dans le "zèle d'amertume". Le bon caractère s'ouvre à la vérité, exactement comme l'intelligence fidèle à sa substance débouche sur la vertu; nous pourrions dire aussi que la perfection morale coïncide avec la foi, qu'elle ne saurait donc être un perfectionnisme social dépourvu de contenu spirituel. »

Frithjof Schuon, Racines de la condition humaine

 

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22/01/2021

Porcelaine

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« Les chiens de faïence se regarde "de travers". Mais comment s'étonner, ils sont en porcelaine. Ils n'existent pas. Quand l'homme s'engage dans une relation tendue avec un autre homme, c'est pour dissimuler ce que son inconscient lui crie : qu'en tant qu'il dit "je" et se prend (sauf dans ses rêves) pour un individu, il commet un énorme mensonge. Nous ne sommes jamais individuels, mais restons, comme Antigone le démontre à Créon, qui ne comprendra jamais rien, des êtres de lignages et de lignées, humaines et non humaines. Nous portons en nous le poids du monde, de sorte que nous ne pouvons demeurer "droits". L'agressivité vient de cette "mauvaise humeur" éprouvée à côtoyer en nous des êtres faux, controuvés, des artefacts dont la vie se brode sur un mensonge. Alors, comment ne pas entasser d'autres mensonges, pouvoir, honneurs, richesses, désir de conquête, la longue litanie des bobards ? La totalité de l'histoire de l'Occident, dans sa rudesse, provient de cette ambiance de faux-semblants que, très bizarrement, la psychanalyse ne met pas clairement en tête des blocages à traiter et dénouer d'urgence, si l'on veut retrouver une pensée et une vie. »

Arnaud Villani, Chiens de faïence

 

 

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21/01/2021

Les chefs

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« Mon père, prolétaire de son état, a toujours porté à ses divers patrons une haine constante et qu’il transférait d’ailleurs de l’un à l’autre sans la modifier d’un iota. Tous les patrons étaient à son avis détestables. Ancien combattant de la guerre 14-18 et soldat pendant sept années (la guerre le cueillit alors qu’il terminait son service militaire), il adorait, vénérait, respectait (mon enfance en sait quelque chose) ceux qui avaient été ses officiers. L’explication est simple et je l’ai donnée plus haut : il respectait le Maître héroïque et (à lui bidasse de 2ème classe) inaccessible. Il se souvenait de son temps militaire, malgré les souffrances de la guerre, avec joie. Son malheur commença lorsqu’il dut obéir à des bourgeois. A des patrons et non plus à des chefs.

[…]

Evidemment, les officiers que mon père admirait le plus étaient ceux qui avaient été tués.

[…]

D’ailleurs comment respecter le Maître, dans une démocratie, puisqu’il n’est qu’un esclave promu ? D’où la haine du prolétaire pour le bourgeois qu’il souhaite devenir tout en méprisant les moyens de cette promotion et les antivertus nécessaires à cette ascension. Le bourgeois est l’anti-héros qui a utilisé la ruse, le négoce, l’argent, la combine (etc.) et qui s’est avilit en tant qu’homme pour devenir bourgeois. “S’embourgeoiser” est injure… D’où la haine et l’envie du prolétaire et ce mépris fasciné qu’il porte au bourgeois. Celui-ci n’est pas un Maître respecté et admiré mais, à la limite, un salaud. Je verrai là une des raisons du désespoir contemporain ! Le promu a mauvaise conscience et le non-promu méprise ce qui, en même temps, est son idéal.

Alors que le véritable Maître est admiré. Parce qu’il est inaccessible. Parce qu’il est source de valeurs. Parce qu’il est exemplaire et protecteur. Parce que sa morale, étant héroïque, rejoint le sacrifice et l’ascèse. Du coup, entre lui et l’esclave, l’amour — oui l’amour ! — est possible.

L’attitude du prolétaire vis-à-vis du bourgeois est assez semblable à celle du non-Juif face au Juif. Mépris pour ce dernier et désir d’accéder où il accède tout en éprouvant une répulsion morale pour ses “supériorités”. Ce n’est pas un hasard si le prolétaire est volontiers antisémite. Le Juif est, à ses yeux, le bourgeois suprême. (Cette attitude est celle de beaucoup de noirs américains qui voient dans le Juif l’impérialiste suprême.) »

Jean Cau, Le temps des esclaves

 

 

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20/01/2021

Avachissement et avilissement masochiste

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« Il m'aura fallu des années de réflexion et de lucidité afin d'oser mettre en question et en questions l'égalitarisme sacro-saint qui fut mon miel et mon lait jusqu'à de récentes années.

(...)

Il aura fallu d'une part que j'assiste à l'avachissement et à l'avilissement masochiste de nos sociétés occidentales, d'autre part que je découvre le visage effroyablement médiocre du communisme pour que j'ose me demander si leur faillite commune n'avait pas même origine et mêmes raisons : le culte – bien qu'il fût célébré par des prêtres divers – du même veau. »

Jean Cau, Le temps des esclaves

 

 

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19/01/2021

Guerre civile planétaire

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« Qui oserait rappeler l’évidence démontrée il y a déjà vingt-cinq ou trente ans par Foucault que non seulement la guerre des races ne s’est pas éteinte avec l’émergence des guerres nationales, ou de la "lutte des classes", mais qu’elles ne cessent au contraire toutes ensemble de s’élaborer sans cesse dans l’infernal creuset des âmes humaines livrées à elles-mêmes, et aux mauvais picrates intellectuels du XXème siècle, contaminant peu à peu toutes les structures de la société-monde, jusqu’à nous promettre l’éclatement prochain d’une guerre des sexes comme horizon terminal, au milieu des destructions de la guerre civile planétaire ? »

Maurice G. Dantec, Laboratoire de catastrophe générale (Le théâtre des opérations 2000-2001)

 

 

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18/01/2021

La beauté

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« Saint-Etienne et sa banlieue. Un pareil spectacle est la condamnation de la civilisation qui l’a fait naître. Un monde où il n’y a plus de place pour l’être, pour la joie, pour le loisir actif, est un monde qui doit mourir. Aucun peuple ne peut vivre en dehors de la beauté. Il peut quelque temps se survivre et c’est tout. Et cette Europe qui offre ici un de ses visages les plus constants s’éloigne sans arrêt de la beauté. C’est pour cela qu’elle se convulse et c’est pour cela qu’elle mourra si la paix pour elle ne signifie pas le retour à la beauté et sa place rendue à l’amour. »

Albert Camus, Carnets II, 1942-1951

 

 

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17/01/2021

Du coeur et de l'âme

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« Les qualités propres à l’aristocratie sont difficiles à décrire, parce qu’elles viennent du cœur et de l’âme plus que du seul intellect ou de la seule "raison morale". De même que l’aristocratie relie le peuple aux dieux, elle relie le ciel à la terre, comme l’arbre du monde dans les anciennes mythologies. Elle relie aussi le visible à l’invisible, le fini à l’infini, ce qui se décrit à ce qui ne peut pas se dire. Elle montre les choses mais elle ne les dit pas. »

Alain de Benoist, Les idées à l’endroit

 

 

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16/01/2021

Un chaton

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« Un bombardier de nuit soviétique avait lâché une bombe (...). Parmi les débris de rondins et les gravats il ne découvrit qu’un chaton. Le chaton était en piètre état, il ne demandait rien, n’attendait rien, il devait croire que la vie sur terre c’était cela : le bruit, le feu, la faim. »

Vassili Grossman, Vie et destin

 

 

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15/01/2021

La classe intellectuelle

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« Nous sommes devenus amis, c'est-à-dire que chaque jour il venait se fourrer chez moi, m'empêchait de travailler et m'entretenait à coeur ouvert de sa détresse. Dès les premiers temps, son extraordinaire fausseté, qui me donnait vraiment la nausée, m'avait frappé. En tant qu'ami, je le gourmandais de tant boire, de vivre au-dessus de ses moyens et de faire des dettes, de paresser, de ne rien lire, d'être si peu cultivé et si peu informé, et en réponse à toutes mes observations, il souriait amèrement, soupirait et disait : “Je suis un raté, un inutile !” ou “Que voulez-vous attendre de nous, débris du servage ?” ou “Nous dégénérons…” Ou bien il se mettait à débiter un long fatras où il était question d'Onéguine, de Pétchorine, du Caïn de Byron, de Bazarov, et disait d'eux : “Ce sont nos pères par la chair et par l'esprit.” Comprenez en somme, que ce n'était pas de sa faute si les plis officiels traînaient des semaines entières sans êtres ouverts, s'il buvait et faisait boire les autres, mais celle d'Onéguine, de Pétchorine et de Tourguéniev qui ont inventé le raté et l'inutile. La cause de son extrême dépravation et de sa vie scandaleuse n'était pas, voyez-vous, en lui-même, mais à l'extérieur, au-dehors. Et avec cela — voyez la ruse ! — il n'était pas seul à être dépravé, menteur et vil, nous aussi nous l'étions… “Nous, les gens des années 80”, “nous, le surgeon amolli, énervé du servage”, “nous que la civilisation a défigurés…”. Bref, nous devions comprendre qu'un grand homme comme Laïevski était grand jusque dans sa déchéance, que sa dépravation, son ignorance et sa crasse étaient un phénomène d'histoire naturelle, consacré par le déterminisme, que les causes en étaient universelles, élémentaires et que l'on devait suspendre devant lui une veilleuse d'icône parce qu'il était la victime de l'époque, des influences, de l'hérédité, et ainsi de suite. Tous les fonctionnaires et toutes les dames, en l'entendant, poussaient des oh ! et des ah ! d'admiration et j'ai mis longtemps à comprendre à qui j'avais affaire : était-ce un cynique ou un adroit filou ? Des individus comme lui appartiennent en apparence à la classe intellectuelle, qui ont quelque instruction et parlent beaucoup de leur noblesse personnelle, savent se faire passer pour des natures complexes. »

Anton Tchekhov, Le duel

 

 

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